Chapitre 3: Cody

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Je balance mon réveil à l'autre bout de ma chambre. Quelle idée de régler le volume sonore aussi fort! Mais tant pis. Je suis déjà debout. D'un pas lent, je me dirige vers la salle de bain. Dix minutes plus tard, après un bon décrassage et un brossage des dents, me voilà de nouveau tout beau et tout propre. La serviette toujours attachée, je me dirige vers ma petite cuisine de 80m². Je sors le lait du frigo et récupère la boîte de céréales du placard. Des Chocapics. Rien de tel qu'une bonne dose de chocolat pour démarrer la journée. J'expédie au plus vite mon p'tit-dèj' et file m'habiller. J'opte pour un bas de jogging noir couplé à un débardeur blanc. Face au miroir, j'applique du gel sur mes cheveux bruns et les coiffe vers l'arrière puis laisse un épi au-devant du crâne, ainsi que quelques petites mèches sur le front. Mes cheveux sont courts, un peu rasés à la base de la nuque. Quant à mes yeux, ils sont d'un gris anthracite assez vif -ce qui me donne assez de charme selon pas mal de meufs. Mon nez est court et épaté, mes sourcils fins, mes joues creuses, mon menton assez prononcé, et mon front est plutôt large. En tout cas plus que la moyenne. Je trouve mon visage bizarre mais je m'en fiche assez. Etant donné que, et bien, j'ai pas de vie sociale. La voie que j'empruntais à déraper à cause d'une bêtise au lycée. Depuis ce jour, je me suis reclus. J'ai rompu tout contact avec le monde extérieur. Comme disent les Japonais, je suis devenu un hikikomori. J'ai à présent 19 ans et je dépends toujours de mes parents, grands cadres dans une importante societé. Ils m'ont loué cet appart' et m'envoient chaque semaine quelques milliers dollars pour subvenir à mes besoins. Je travaille pas, passe mon temps à glander ou regarder la téloche. Mais ce que j'aime faire, c'est mater des films X sur le net -quoi? J'suis seul, pas de filles. Il faut bien s'exciter de temps en temps- ou regarder des animés et jouer à des jeux. Voilà ce qu'est la vie de Cody Prescott. C'est-à-dire moi. Je baille. Eh ben. A peine sorti de la douche me voilà déjà épuisé. Je vais piquer un p'tit somme.

A mon réveil, il est plus onze heures, mais dix-sept heures. De plus, il pleut averse. Quelle belle journée! Notez l'ironie. Quand je fais rien je passe mon temps à dormir. J'ai envie d'un bon jus de pomme. J'ouvre le frigo et constate qu'il est presque vide.La poisse. La dernière fois que j'ai mis le pied dehors date d'au moins un mois. Je fais toujours mes courses à l'avance mais on dirait bien que mon stock est épuisé. Je soupire. Je me lève et me dirige vers la porte d'entrée de l'appartement. J'enfile mes baskets et récupère mon parapluie. Il est temps d'aller faire un tour dehors.

********************

Traînant d'un pas nonchalant, je retourne bredouille chez moi. C'est la fête du travail aujourd'hui. Je savais pas. Le seul supermarché dans le coin ainsi que les autres supérettes sont fermés. Au moins, j'ai pu obtenir des nouilles et un petit carton de pâtes dans une petite épicerie. Il pleut toujours autant. Les gens pressent le pas pour retourner à leur domicile. Je déteste vraiment le monde. J'aimerais vraiment, sincèrement, abandonner ma vie de NEET, mais le monde, ainsi que les autres humains, sont tous pourris. Je hais cette facette de notre monde. J'aimerais avoir la chance de vivre une belle aventure. Ah! Si seulement...

Un bruit d'explosion me fait sursauter et je lâche mon paquet de nouilles et mon carton de pâtes. L'horreur! Fichus. Ils sont fichus. Cette satanée pluie vient de gâcher mon repas. Le bruit provenait de la ruelle à côté de moi. D'autres bruits, de choc et d'impact, résonnent cette fois-ci. Je l'entends malgré cette pluie car je suis face à cette ruelle. M'aventurer à l'explorer malgré le danger, ou faire comme si de rien n'était et reprendre ma route? Ma curiosité me titille bien trop et je décide de braver le danger. Direction la ruelle.

Je me cache derrière une benne à ordures et observe un spectacle qui est des plus surréalistes. Deux grands loups anthropomorphes -deux mètres je dirais- debout dans toute leur férocité et splendeur animale, font face à une magnifique jeune femme. La personne la plus belle qu'il m'ait été donné de voir. De beaux et longs cheveux roux, soyeux et bouclés à mi-longueur; un visage de poupée, rond et des joues légèrement roses; des yeux bleu-ciel et envoutants, le nez fin et droit, avec de légères taches de rousseur, une bouche charnue et délicatement rosée; un corps mince et athlétique avec une poitrine opulente; une robe à volants noire laissant ses douces épaules dénudées avec ses fines bretelles recouvrant ses bras, le tout sur des sandales grecques. Tous ces éléments font de cette femme pour laquelle je viens d'avoir le coup de foudre, une pure beauté. A mes yeux, c'est une déesse. Il se peut même que je ne sois pas loin de la vérité, car, dans son magnifique dos, s'étendent deux magnifiques ailes, au plumage plus blanc et pur que le cristal lui-même. Son air est déterminé, farouche. Une vraie guerrière. Elle le fait encore plus avec sa longue lance qui vient de se matérialiser entre ses mains. Elle fait face aux deux créatures surnaturelles sans la moindre peur décelable dans son regard. Quelle femme! Je remarque autre chose.. Elle n'a rien tandis qu'eux sont couverts de sang sur certaines parties de leur fourrure. Ils halètent. J'ignore pour quoi a lieu ce combat, mais elle semble clairement les dominer. Les créatures commencent à lui parler dans une langue qui m'est clairement inconnue. Mais je perçois certaines connotations de ma langue; l'anglais. Elle semble en a avoir marre de les écouter et bondir vers eux mais un éclair la foudroie sur place. Elle s'écroule au sol en même temps que sa lance disparaît.

  • Séléna. Tu n'aurais jamais dû t'incruster dans mes affaires.

Un nouvel être ailé descend du ciel. Un homme cette fois. Il porte un costard cravate bleu marine et le plumage de ses ailes est de la couleur des ténèbres. Ses traits sont fins, ses cheveux blonds attachés en queue de cheval, ses yeux écarlates, ses oreilles pointues, et une fine barbe lui pousse au menton. Il s'accroupit face à elle et la saisit par la gorge avant de la relever. Elle gémit de douleur. Il lui enfonce son poing dans l'abdomen et la projette contre un mur. L'ordure! Il claque des doigts et les deux loups-garous -je vois pas ce qu'ils pourraient être d'autre- la relèvent en la tenant par les bras. Elle adresse un regard haineux à l'homme. Et ils se mettent enfin à parler dans ma langue.

  • Pourquoi? pourquoi, sire Yorziel?
  • Pourquoi? Ma très chère Séléna. Tu es bien trop jeune pour comprendre, saisir même ce genre d'action. Cinq-cents ans révolus ne représente rien. Mais je tiens à te féliciter. Tu as persisté dans ton enquête lorsque tu as découvert les troubles régnant à Angélus. Ce qui t'as conduit à ces deux imbéciles, incapables de dissimuler leurs traces. Franchement. Devoir tout régler soi-même est épuisant.
  • Je ne peux croire que des Anges, surtout ceux de la Première Triade, peuvent faire ça au Créateur. C'est un grand acte de trahison.
  • La ferme! Le Créateur a disparu depuis bien des lustres. Et le gouvernement désuet qu'il nous a laissé n'a plus à être d'actualité. Le monde est en proie à de grands changements. Place au renouveau. Tu as été une belle épine dans notre pied. Mais à présent, tu vas devoir disparaître pour la réussite de notre coup d'Etat. Dommage. Malgré le fait que tu sois un simple Ange, tu pouvais rivaliser avec un Archange. Adieu, belle Séléna.
  • Vous ne pouvez, sire Yorziel!
  • Vous deux, veuillez à lui offrir une mort douce et honorable. Et attendez-vous à une belle punition à votre retour.
  • A vos ordres maître. Disent-ils en choeur

L'Ange Yorziel disparaît dans un grand nuage de fumée. Les deux loups la balancent au sol. Elle n'a plus de forces. Elle pourra jamais les battre. Qu'est-ce que je pourrais faire? Jene suis qu'un simple humain. Un simple humain qui vient d'assister à un spectacle au-delà de son monde. Ils avancent à pas lents, prennent leur temps. Soudain, un mal de crâne effroyable me saisit. Je me mords la langue pour ne pas hurler de douleur. et m'accroupit derrière la benne. Tout tangue autour de moi. Le temps semble être comme suspendu. Je ne perçois plus rien, à part un amoncellement de nuances de gris qui devient totalement noir. C'est le vide, le froid total autour de moi. Il n'y a rien excepté le rien. Et ma tête me fait toujours autant souffrir. Tout à coup, une voix. Une belle voix de femme. Un écho. Elle semble lointaine, mais elle m'apparaît pourtant si proche, comme si elle était chuchoté dans mon oreille. Cette voix emplit tout ce sombre lieu. On ne perçoit qu'elle. J'en oublie même ma propre existence. Qu'elle continue. Je ne veux pas être seul dans ce monde-ci.

  • Pauvre être sans défense. La vie n'est-elle pas injuste?
  • Si. Elle l'est.
  • Le Créateur est une belle ordure, n'est-ce pas?
  • Oui. Il l'est.
  • Il a conçu les humains pour qu'ils soient les agneaux inoffensifs, attendant juste le moment idéal pour être dévoré par le grand méchant loup.
  • Qui êtes-vous?
  • Aucune importance pour l'instant. Disons juste que je suis un être pouvant proclamer haut et fort être Dieu.
  • Je comprends rien.
  • C'est fait exprès. Fut un temps où les Hommes disposaient de remarquables pouvoirs. Mais comme dit plutôt, le Créateur ne les a pas créés pour être une menace. Alors ils ont dû obtenir eux-mêmes ce pouvoir tant convoité. En dévorant les Surnaturels morts au combat. Les humains n'étaient plus que des charognards en quête de chair surnaturelle. En bouffer revient à s'octroyer le pouvoir de ces créatures. Ainsi, ta répugnante espèce s'est mêlé d'un combat qui ne la regardait pas, bouleversant l'équilibre fragile instauré par le créateur avant de disparaître. Alors. Toujours fier d'être humain?
  • Non. Que me voulez-vous?
  • Dommage. La suite sera pour plus tard. Ce que je veux de toi? Ton corps. Pas pour des trucs sexuels, non. J'ai même pas une réelle existence. Ce que je souhaite, c'est ta dévotion corps et âme. Que tu deviennes mon serviteur et accomplisse tous mes désirs. En échange de quoi, je t'offrirai le pouvoir qui ne fera plus de toi un être faible. C'est tout.
  • Mon corps hein?
  • Oui. Mais fais vite. Tu n'es pas le seul de ta lignée. Même si tu es le plus prometteur. Réfléchis vite.
  • Je vous jure allégeance, qui que vous soyez. J'accomplirai le moindre de vos ordres, quels qu'ils soient, même si je dois tuer. Tout ce que je désire, c'est la force nécessaire afin de protéger celle qui vient de faire chavirer mon coeur. Je suis à vos ordres, Votre Excellence.
  • Bien. Très bien même. Tu auras ce que tu désires, Cody. Fais bon usage de mon pouvoir. Et n'oublie pas. Tu es à moi. Je t'appellerai bientôt.

Un mal de tête plus violent que le précédent me saisit et je ne peux m'empêcher de hurler. Mais dans mon for intérieur. Je me réveille, étendu sur le sol, à quelques mètres de ma bien-aimée. Les loups-garous sont toujours à la même position. Ma perception du temps a vraiment été faussée. Je ressens en moi un torrent de puissance, ne demandant qu'à jaillir aux moindres de mes ordres. Quelle sensation grisante! Je me relève et m'approche des deux créatures. Ils s'arrêtent et me dévisagent. Y compris ma Séléna. Ils sentent parfaitement le flot d'énergie qui m'animent. D'instinct, je sais quoi faire. Je tends ma main vers eux, et une vague de flammes ardentes jaillit de ma paume. Elle les carbonise entièrement, ne laissant rien derrière à part une nuée de cendres. Mais j'en ai trop fait vu que les flammes ont incinéré le quartier juste derrière le cul-de-sac de la ruelle. Elle m'adresse un regard vide d'émotions avant de sombrer dans l'inconscience. Je la soulève par les épaules et les genoux avant de faire apparaître des ailes formés uniquement d'un feu ardent, et je m'envole. Direction ma demeure de NEET.

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