Chapitre 42 : Laboratoire

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« Fiel, Maïdokh, il était temps ! C’est quoi, ton problème ? »

Dans la petite pièce aux murs bleuâtres, quatre paires d’yeux la fixaient sans ciller. Allongée sur une civière, Mahaut considéra chaque visage avec attention : si deux d’entre eux avaient effectué le voyage jusqu’à Suhuro avec elle, deux lui étaient inconnus.

« Comment vous sentez-vous ? lui demanda une Danamôn d’âge moyen, après un regard réprobateur à Kohim.

— Pas trop mal, je crois…

— Je m’appelle Nitisham, je suis la conservatrice du musée, poursuivit-elle. Nous nous sommes pas mal inquiétés pour vous. Heureusement, nous avons un médecin dans notre équipe scientifique, qui a pu veiller sur vous depuis votre syncope.

— Vous ne souffriez d’aucun traumatisme, vos constantes étaient bonnes, expliqua le docteur en question avec un grand sourire. J’ai préféré attendre un peu avant de vous transférer vers le dispensaire, où ils sont débordés comme partout… »

L’esprit empêtré dans le souvenir des longues minutes passées sur le pont, Mahaut se redressa et secoua la tête. Le médecin s’approcha pour l’examiner avec son scanner manuel, qui lui notifia le parfait rétablissement de sa patiente par une joyeuse mélodie.

« Je suis désolée de vous avoir causé de l’embarras, formula-t-elle lorsqu’il eut rangé son appareil. La salle présentant l’attaque nucléaire m’a bouleversée…

— Ça peut se comprendre, conforta Nitisham, elle a été conçue pour marquer les esprits. Comme un avertissement…

— Pour que les visiteurs en saisissent l’horreur ?

— Et s’efforcent de toujours préserver l’harmonie, oui… »

Kohim haussa les sourcils, l’air mécontent. Assis près de la porte, Jabgard regardait dans le vague, visiblement fatigué de leur journée de trajet. Mahaut se leva et vit qu’il était presque minuit sur l’horloge de l’infirmerie. Elle avait mis tellement de temps à se rendormir… Blottie dans les bras de Sam, elle avait peu à peu retrouvé un semblant de sérénité, mais la quantité de cortisol dans son organisme l’avait gardée éveillée de longues heures.

« Je suppose qu’à présent, vous avez envie de consulter le journal ? s’enquit la conservatrice tandis que le docteur prenait congé. C’est la raison de votre visite, n’est-ce pas ?

— Tout à fait, confirma-t-elle, si ce n’est pas trop vous demander à cette heure tardive.

— Ce n’est pas un souci, votre ami nous avait avertis de votre venue. Nous n’avions simplement pas prévu que vous arriveriez aujourd’hui ! rit Nitisham avec chaleur. Nos équipes ont travaillé sans relâche la nuit passée et depuis la fermeture tout à l’heure pour révéler les textes cachés. Tout le monde est si excité par cette découverte… Je vous montre ? C’est au labo, juste en bas. »

Mahaut emboîta le pas de la Danamôn, invitant d’un geste de la main ses camarades à les accompagner.

« Tu fais chier, Maïdokh… lui souffla Kohim lorsqu’elle le croisa près de la porte. Quand est-ce qu’on se barre ?

— Ce ne sera plus très long, lui assura-t-elle alors que son rythme cardiaque s’accélérait déjà. Et tu risques d’apprendre des trucs spectaculaires sur Opthéo Tsong… »

Ils descendirent deux volées d’escaliers, puis parcoururent un couloir donnant accès à une multitude de salles vitrées, dans lesquelles seuls les voyants lumineux de quelques instruments étaient visibles dans la pénombre. Ils pénétrèrent dans une pièce faiblement éclairée où s’affairaient encore plusieurs personnes. Tandis que trois scientifiques, équipés de leurs omnivues, consultaient des documents dans une énorme projection holographique, trois autres en combinaison blanche manipulaient les pincettes motorisées d’une haute machine dont les parois inférieures étaient en verre. Debout au centre du dispositif reposait le carnet de Sam, dont la couverture bleue semblait en partie déchiquetée.

« Après 3 000 ans, le journal du Fondateur Bodson est évidemment devenu très fragile… commenta la conservatrice. Nous prenons donc les plus grandes précautions pour ne pas l’abîmer. Mais grâce aux informations de votre ami sur la composition de l’encre, nous avons vite trouvé la technique d’imagerie permettant de faire apparaître le contenu de toutes ces pages que nous croyions vides. »

Mahaut s’avança pour observer la manière dont les experts manœuvraient leur appareillage afin de positionner une des dernières feuilles du carnet à l’horizontale.

« Attention, on numérise ! » annonça l’un d’eux à la ronde.

La salle fut soudain plongée dans l’obscurité. Seul un filet de lueur bleutée était discernable, parcourant le papier millénaire avec une extrême lenteur.

« L’équipe digitale va ensuite analyser la capture effectuée pour obtenir le meilleur rendu possible, reprit Nitisham quand la lumière revint. Regardez, nous avons déjà scanné quatre-cent-quatre-vingt-deux pages sur les cinq cents du premier journal !

— Combien y en a-t-il en tout ? interrogea Mahaut.

— Le Fondateur Bodson a écrit toute sa vie… Nous avons vingt-sept carnets, mais les suivants sont deux fois moins épais. Le papier est devenu plus difficile à se procurer pour les survivants après l’attaque… »

Vingt-sept agendas de deux-cent-cinquante jours. Sam avait à peine dépassé quarante ans au moment de son décès, calcula rapidement Mahaut. Nul doute que les conditions de vie dans un continent dévasté s’étaient sévèrement dégradées, mais ça semblait si bref… Cette vie écourtée était-elle toutefois due à ses propres agissements ou à sa disparition prématurée ? Elle devait en avoir le cœur net.

« Puis-je en prendre connaissance ? s’enquit-elle après une grande inspiration.

— Bien sûr, valida la Danamôn. Cependant, nous n’avons encore pu traduire qu’une dizaine de pages, car nous prenons le temps de vérifier chaque mot par rapport au contexte et aux autres documents historiques dont nous disposons.

— Dans ce cas, je vais peut-être pouvoir vous faciliter la tâche. »

Sous les regards plus que circonspects de Kohim et Jabgard, Mahaut saisit ses omnivues et se connecta au réseau de la salle. Les feuilles numérisées apparurent aussitôt sur ses lunettes, et reproduites en grand dans la projection holographique devant eux. Elle entreprit de traduire la première page à haute voix, sous l’œil médusé des scientifiques du musée.

22 mars. Chaque journée que je passe aux côtés de Mahaut est comme un rêve éveillé. Elle ne le saura peut-être jamais, mais je préfère de loin mes jours à mes nuits, même si celles-ci sont tout bonnement extraordinaires. Je sais que c’est impossible, mais j’espère que nos sentiments resteront toujours aussi forts, et que rien ne nous séparera jamais. Je l’aime, comme un dingue, et chaque seconde un peu plus. Il faut que j’arrive à lui dire, même si je crains qu’elle ne me réponde pas…

La gorge nouée, elle s’interrompit ; Sam avait-il si peu confiance en lui en réalité ? Pour se donner du temps avant de poursuivre, elle observa la réaction des personnes autour d’elle. Le sourire aux lèvres, deux experts pointaient du doigt les parties de leur propre transposition qui ne correspondaient probablement pas à ce qu’elle venait de lire. Jabgard fronçait les sourcils tout en bâillant. Kohim, lui, avait l’air exaspéré. Elle recommença alors son travail de traduction, cette fois vers le ramahène, sans pour autant susciter la moindre émotion perceptible dans le chef du soldat. Elle balaya ensuite les pages pour arriver à une date gravée dans sa mémoire.

26 janvier. J’ai pris la décision la plus pénible de toute ma vie. Mahaut a raison, je suis un lâche ET un lâcheur. Je fuis au lieu de lui dire la vérité. J’en ai marre de lui mentir, mais je n’ose pas la confronter à ce que j’ai découvert. Comment annonce-t-on à quelqu’un qu’il va bientôt tuer des millions de gens ? Ou des milliards ?

Pendant des mois, j’ai cru dur comme fer que les Danamôns avaient mal interprété les faits, qu’il y avait forcément des informations dont ils ne disposaient pas, parce que Mahaut ne commettrait jamais de pareilles atrocités. Je ne la pensais même pas capable de les envisager… À présent, j’ai peur de m’être trompé. Je présume que les gens changent quand ils subissent l’adversité. Que face à certaines épreuves, il est impossible de ne pas ressentir de la haine, de la frustration, du dégoût. Mais moi, je ne sais plus comment réparer le tort qu’on lui a fait.

J’espère qu’elle sera forte et se rendra compte de son erreur. Je ferais tout pour l’aider, si seulement j’avais ce pouvoir… Mon cœur saigne, sans fin, sans rémission. Je vais m’investir dans ma nouvelle vie à Boston, et croiser les doigts pour que la douleur diminue petit à petit…

Mahaut ôta les omnivues de ses yeux afin d’essuyer les larmes qui embuaient sa vue. Combien Sam avait-il dû souffrir ces longs mois pendant lesquels il avait douté d’elle, et combien plus encore depuis qu’il avait entrevu dans ses positions agressives l’ombre d’Opthéo Tsong. Elle agita la tête, comme pour en éliminer les derniers reliquats de son ressentiment à l’encontre de son ami.

Dans le laboratoire mal éclairé, seuls ses deux anciens camarades d’unité ne paraissaient pas émus par le contenu du journal. Tandis que l’équipe scientifique notait fébrilement ses révélations, elle leur traduisit à nouveau le texte — quoique toujours sans grand effet —, puis poursuivit ses vérifications. La page du 3 mars n’avait apparemment pas été scannée, ce qui étonna Mahaut, mais elle l’avait de toute façon déjà lue. Elle fit défiler les suivantes.

5 mars. Tout est fini. Je ne sais même pas pourquoi j’écris encore. Jamais plus rien n’aura d’intérêt dans ce triste monde. J’ai échoué dans ma mission et je n’ai même pas eu le courage d’en tirer les conclusions. Pour pouvoir fonder Danapi ? Quel lâche, oui ! Elle a glissé hors de ma prise et je suis resté comme un con avec son manteau entre les mains. Je réentends sans cesse le bruit, ce bruit atroce, je ne peux plus le supporter. Et aussi le cri de cette femme qui a assisté à toute la scène depuis son balcon. Putain, quel raté je fais…

Elle pleurait à présent à chaudes larmes, sous le regard interloqué des experts. Sa relecture du texte en ramahène lui donna l’occasion de retrouver quelque peu ses esprits avant d’enchaîner.

10 mars. Enterrement aujourd’hui. On était nombreux, mais heureusement Alexia a réussi à museler la presse, donc seulement des têtes connues. Le pire expérience de toute ma vie, juste après mon échec sur le pont. Je ne sais même pas comment je suis resté debout pendant la cérémonie. Par moments, j’ai l’impression de ne plus rien ressentir, c’est très confortable. Pourvu que ça dure, parce qu’au moins, comme ça, la vie peut continuer. Mahaut, par pitié, pardonne-moi !

« Bien sûr que je te pardonne, SamSam », pensa-t-elle, les mâchoires serrées. Ce qui était d’autant plus facile que son ami avait cette fois-ci accompli sa mission !

14 mars. Je repars tout à l’heure, le cœur lourd et inquiet. J’ai voulu discuter avec Alexia, mais elle a prétexté qu’elle avait des engagements préalables. Je ne sais pas si elle a déjà conçu son plan à ce stade, et j’ai peur de lui mettre des idées dans le crâne en lui parlant de ce qui va arriver. De ce qui risque d’arriver, plutôt. Parce que je n’ai pas d’autre choix que d’œuvrer sans relâche pour prévenir le pire. C’est le minimum que je puisse faire pour expier mes fautes.

Mahaut inspecta la suite des images du journal jusqu’à apercevoir la combinaison de noms qu’elle cherchait.

5 avril. Le seul bon côté de mes rêves, pour le moment, c’est qu’ils m’évitent de faire des cauchemars. Même si en vrai, ça ne change pas grand-chose. Jour et nuit, je repense à Mahaut, à tout ce que j’aurais dû faire pour la sauver. Je me revois avec son manteau dans les bras, écroulé au pied du parapet. Et quand j’arrive à me concentrer sur d’autres activités, la triste réalité de ce qui nous attend me revient en pleine figure.

Alexia a envoyé plusieurs messages à tous les membres du mouvement, rappelant leur devoir de dénoncer les personnes et les entreprises qui « profitent du système ». Évidemment, elle les a signés Opthéo Tsong. La machine est en marche, et il va falloir une puissance colossale pour stopper sa course folle. Je suis terrorisé par ce que l’avenir nous prépare. Comment vais-je pouvoir affronter ça sans toi, Mahaut ?

Elle arrêta sa lecture après une ultime traduction à l’intention des deux Ramahènes et s’essuya les joues. Elle n’avait plus le courage d’aller plus loin, ayant obtenu une réponse à ses principales questions.

« C’est extraordinaire ! s’enthousiasma la conservatrice dès qu’elle se tourna dans sa direction. Ces pages jettent une lumière nouvelle sur la chute de Ramah et le destin de leur prophète. Nous devrons encore les étudier en détail, et corroborer leur contenu avec d’autres sources, mais c’est d’ores et déjà une découverte spectaculaire ! Où avez-vous appris l’ancien français ? Est-ce que vous seriez d’accord de traduire le reste des textes ? Comme service d’intérêt général, naturellement… Vous auriez du temps demain ?

— Peut-être, oui, pourquoi pas ? Je vous tiens au courant… » répondit Mahaut, dont l’esprit avait déjà dévié vers son prochain objectif.

Sa priorité devenait en effet désormais de contrecarrer les machinations tragiques d’Alexia, et donc de revenir dès que possible à sa vraie vie. Elle considéra ses compagnons de voyage, dont les hochements de tête en disaient long sur leur épuisement.

« Vous avez tout suivi ? Édifiant, non ? ne put-elle néanmoins s’empêcher de les interpeller.

— La seule chose édifiante ici est ta débilité, Maïdokh ! ricana Kohim. Qu’est-ce que j’en ai à foutre du mal-être des fondateurs de Danapi ? Je veux dormir, nom d’un ours ! »

Front et yeux plissés, Mahaut le dévisagea un instant avant de comprendre sa méprise. Ni Jabgard ni lui ne connaissaient la véritable identité d’Opthéo Tsong, que les historiens ramahènes ne mentionnaient nulle part. Peut-être même était-ce Alexia qui avait fait effacer toute trace de son patronyme afin que son récit revisité de la création de Ramah soit cohérent ?

« Pardon, j’aurais dû vous l’expliquer d’emblée, se morigéna-t-elle. La Mao dont parle Samuel Bodson dans son journal n’est autre qu’Opthéo Tsong ! Ils étaient amants. »

Ses anciens camarades levèrent les yeux au ciel, visiblement peu convaincus.

« Pourriez-vous afficher les coupures de presse évoquant les actions du mouvement de Mahaut Deschamps qui reprennent sa photo ? demanda-t-elle à Nitisham, qui souriait toujours. Si vous les avez dans vos archives…

— Bien sûr, elles faisaient partie des documents du Fondateur Bodson. Juste un instant… »

À l’aide de ses omnivues, la Danamôn fit apparaître dans la projection holographique des centaines de vidéos, de photos et de textes. Du milieu de ceux-ci, elle tira plusieurs copies d’articles datant des débuts de l’activisme de Mahaut.

« Tu connais ces images, n’est-ce pas, Kohim ? questionna celle-ci. Ce sont les mêmes que dans les encyclopédies ramahènes… À présent, regardez le nom sous celle de gauche, qui a servi de modèle à la statue de Dar Long.

— Maha-ute Déchâmhpss ? décrypta Jabgard en prononçant tous les sons, à la manière ramahène.

— Ça se dit Mao Dèchant », précisa-t-elle.

Elle vit les sourcils de ses compagnons de voyage bondir, puis retomber pour obscurcir leurs yeux de plus en plus plissés. Sans s’appesantir plus avant sur cette étrange coïncidence, elle leur résuma brièvement la naissance du mouvement, jusqu’à son suicide et au piratage mené par les complices d’Alexia.

« Ce qui signifie que Ramah et Danapi ont en fait été fondés par le même groupe de personnes, pour mettre en œuvre les mêmes idées : celles d’Opthéo Tsong ! conclut-elle en fixant le jeune soldat. Qui ont ensuite été dévoyées…

— C’est n’importe quoi ! s’exclama Kohim en agitant les mains. Tu imagines que je vais croire les historiens maïdokhis plutôt que les nôtres ? Tu délires à nouveau, Maïdokh !

— Peut-être, mais tu ne penses pas que ça vaudrait la peine de vérifier ? Auprès de vos experts à vous, juste pour être sûr… »

Dans l’éclairage tamisé du laboratoire, Nitisham hochait la tête tandis que les scientifiques avaient arrêté leur travail pour écouter leur échange. Dans son énervement, Kohim envoyait des signaux neuronaux erronés à son exosquelette, qui le secouait par de courts spasmes.

« Comment connaissais-tu le contenu du carnet ? interrogea enfin Jabgard d’un ton méfiant. Où as-tu appris tout ça ? Avant d’entrer dans le musée, tu ne savais presque rien sur le destin d’Opthéo Tsong. Du moins, c’est ce que tu soutenais… »

Elle réfléchit à toute vitesse. Elle en avait trop dit, ou pas assez. Pourrait-elle prendre le risque d’aller jusqu’au bout dans la transparence ? Après tout, maintenant qu’elle avait découvert les raisons singulières de sa transformation en despote tyrannique, ses rêves n’avaient plus la même importance ; ils pouvaient partir en cacahouète si elle le souhaitait. Puisque, précisément, il s’agissait de ses rêves…

« Je le connaissais parce que je suis Opthéo Tsong, déclara-t-elle d’une voix grave. Je suis revenue pour faire comprendre aux félons de Ramah à quel point ils ont mal interprété mon message, alors écoutez-moi ! »

***

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