Chapitre 6 : Résiste

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— Maman ? ... Qu'est-ce que ?

Ma mère est couchée au sol, baignant dans une flaque de sang. Je progresse lentement vers son corps. J'ai l'impression d'étouffer. Je ne contrôle plus rien. Mes pieds avancent, mais j'ai du mal à comprendre ce qui se joue devant mes yeux. Je finis par me pencher au-dessus d'elle. Il faut que je vérifie son pouls. Mais je me sens incapable de le faire. Mes joues sont baignées de larmes. Ma mère ouvre alors les yeux. Elle est vivante ! Je m'approche encore plus près. Elle semble vouloir dire quelque chose, mais ses paroles restent inaudibles. J'examine son corps, espérant ne voir qu'une blessure superficielle. Mais je ne peux échapper un cri d'horreur quand j'aperçois vers son bassin une ouverture plus grande qu'une main. Je ne peux m'empêcher de me retourner pour vomir. Mon estomac me brule, mais je n'ai pas le temps de m'épancher. Je retire alors en vitesse ma veste et compresse sa plaie. Ma mère me regarde, mais ses yeux sont vides. Ils sont perdus entre moi et autre chose.

— Ali il.... Il... y a...

— Chut maman. Ne dis rien. Ça va aller...

Elle me saisit le bras dans un dernier effort.

— Ali... quelqu'un... dans la maison... Louis.

Mon sang ne fait qu'un tour. Je me retourne à grande vitesse, mais personne ne se trouve derrière moi. Je reporte le regard sur le visage de maman.

— Maman ! Qu'est-ce que... Je stoppe net. Ma mère garde les yeux ouverts, mais toute étincelle de vie est partie. Je pose fébrilement mes doigts sur son cou. Mais plus aucun battement ne se fait sentir. De grosses larmes coulent le long de mes joues. Je reste de marbre, pouvant à peine respirer. Je soulève son corps. Son sang se répand partout sur moi. Mais je m'en moque. Je veux juste la serrer contre moi. La bercer contre mon cœur.

— Maman... Reviens s'il te plait... je t'aime...

Je la serre toujours plus fort espérant lui transmettre la moindre once de vie. Mais j'ai beau tout faire, ses pupilles restent vides. Je ne supporte pas de voir ses yeux bleus océans partir comme ça au naufrage. Je pose alors mes doigts sur ses paupières et je les ferme doucement. Mon corps tremble. Je mords ma langue jusqu'au sang. Le goût métallique dans ma bouche me fait réagir. Il faut que je trouve Louis.

Je déplace doucement le corps de maman et me dégage de cette position. Debout, je regarde autour de moi en tentant de faire le moins de bruit possible. Mais mes hoquets, vestiges de ma crise de larmes, résonnent à travers la pièce. Je décide de monter les escaliers. Il faut que je cherche Louis. Je dois le trouver vivant. S'il existe une divinité, n'importe quoi, je vous en supplie, ne m'enlevez pas Louis. Je grimpe alors la première marche. D'un coup me voilà projetée sur le plancher. Ma tête vient cogner la rampe de l'escalier. Je m'étale de tout mon long. Ma vision est troublée. Une ombre m'engloutit. Je tente de me retourner, mais je crie tant la douleur me cloue au sol.

— Bouge pas, chérie. Je vais m'occuper de toi. Une voix grave, terrorisante perce le silence.

L'homme se jette alors sur moi. Ses bras emprisonnent mon corps sous le sien. Je suis au bord de la suffocation. Sa main se promène près de ma poitrine. Je ne pense à rien d'autre qu'à sortir de son emprise. Mais ma vue ne s'est toujours pas rétablie et ma tête me lance inlassablement. Au prix d'un effort gigantesque, je parviens à balancer mon genou dans ses parties intimes. L'homme crache alors un cri de douleur et lâche mon corps. J'en profite pour ramper en direction de la table afin d'attraper le ciseau qui traîne. Mais avant que je ne puisse étendre mon bras, l'inconnu me tire par les jambes et m'envoie un coup de pied dans le bassin. Ma respiration s'arrête. J'ai la sensation que l'obscurité m'engloutit. J'ai tellement mal ! Mais une rage au fond de moi prend feu. Par un sursaut d'adrénaline, je prends la lampe posée sur la table et frappe l'inconnu de toutes mes forces sur la tête. Ses yeux d'un marron destructeur me fixent l'espace de quelques secondes. Le temps s'est arrêté. Un rictus mauvais transforme son visage puis il tombe inconscient sur moi. Je parviens à m'en défaire. Et cours à grande vitesse en direction de l'étage. Chaque foulée est douloureuse. Comme si un millier de seringues s'enfonçaient dans mon crâne. Mais je dois trouver Louis. Je n'ai pas le choix. Je réflechirai plus tard à la douleur... J'arrive à l'étage.

— Louis, c'est Ali. Où es-tu, bonhomme ? je crie. Mais seul le silence me répond.

Je fouille notre chambre puis celle de maman. Mais aucune trace de lui. Je réfléchis. Mon cerveau ne parvient plus à avoir les idées claires ! Où est-il ? Je jette un œil par la fenêtre de notre minuscule salle de bain. Et, enfin, je sais. Je dévale les escaliers aussi vite que je le peux. Et me dirige vers le hall, tout en m'assurant que l'homme dans le salon est toujours inconscient. Heureusement pour moi, il ne semble pas réveillé. Je me faufile à côté de lui. Mon rythme cardiaque est de plus en plus rapide. J'ouvre la porte qui mène à dehors et je cours comme je peux en direction de la vieille étable de grand-père. Si Louis s'est dissimulé, il ne peut être qu'ici. C'est son endroit préféré quand on joue à cache-cache tous les deux. Je coulisse la porte en bois et rentre dans ce qui reste de l'étable.

— Louis ! Louis ! C'est Ali. Réponds-moi.

Un léger bruit se fait attendre près du vieux chariot. Je m'y avance. Et trouve Louis recroquevillé. De grosses larmes ne cessent de tomber dans ses yeux. J'ai l'impression qu'il a du mal à me reconnaitre. Il me regarde durant ce qu'il me semble être des minutes. Puis il finit par se jeter dans mes bras. Le soulagement me fait tituber. Nous pleurons l'un contre l'autre. L'un avec l'autre. Mais je ne peux m'attarder dans les bras de Louis. Il faut que l'on parte, de suite.

— Louis, écoute-moi. On doit sortir de là. Tu vas prendre ma main et me suivre sans faire de bruit. Ok bonhomme ?

Il hoche la tête entre deux sanglots. J'embrasse son front. Et lui tend mon bras. C'est parti. Même si je suis terrifiée j'ouvre la porte et passe ma tête. Tout semble calme. J'espère de toutes mes forces que le meurtrier soit encore inconscient. Je décide de sortir. Je tourne ma tête dans tous les sens.

— Cours avec moi, Louis ! je chuchote.

Nous voilà, en train de courir pour rallier le chemin de terre qui mène hors de la propriété. Soudain, un coup de feu retentit. Je stoppe net. Louis me percute. Il s'accroche à ma jambe et enfouit son visage. Le bruit a fait battre mon cœur plus vite. J'ai l'impression qu'il va exploser dans ma poitrine. Je me retourne doucement afin de protéger Louis, derrière moi. L'homme se tient à une trentaine de mètres. Sur le perron de notre maison. Il détient un pistolet qu'il braque sur nous. Nous sommes coincés. Une envie de vomir me cloue au sol. Il s'avance lentement vers nous. Je suis au bord de la crise de panique. Respire Ali. Respire. L'homme demeure de plus en plus proche. Son visage est déformé par la colère. Une cicatrice lui barre la moitié de la joue. Il est terrifiant. Puis j'entends les pneus d'une voiture glissés sur le gravier. Je fais volte-face et vois une jeep rouge foncé sur nous. Louis émet un cri. Il ressert son empreinte autour de ma jambe. Quant à moi, je suis en état de choc. C'est trop. Entre le corps de maman, l'agression de l'inconnu et le fait de mourir soit par une arme soit par écrasement, je suis à bout. Je regarde durant ces microsecondes cette voiture filer sur mon frère et moi. Puis elle s'arrête à quelques centimètres de nous. La vitre est ouverte et une femme d'une quarantaine d'années apparait :

— Vite montez ! crie-t-elle en ma direction.

Je ne comprends rien. C'est quoi ces histoires ? Je regarde derrière moi. L'homme détient toujours le canon de son pistolet braqué sur mon frère et moi. Mais il n'a pas continué d'avancer. J'ai deux choix ; soit prendre une balle dans la tête soit monter dans cette voiture. Sous le coup de la survie, je porte mon frère et saute à mon tour sur le siège passager. La femme fait alors demi-tour rapidement. Son visage est concentré. Tandis que le mien et celui de Louis sont ravagés. Je me réfugie contre mon frère. Mes battements de cœur diminuent. Le décor autour de moi semble flou. Mes pensées sont éparpillées.

— Qu'est-ce... L'obscurité prend place.

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