4.

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 Cher toi, 


J'avais besoin de coucher sur le papier tout ce que je ressens. J'avais besoin de te le dire. J'avais besoin de l'avouer avant de partir.


Tu sais bien que je vais mourir. Tu es venu me voir ce matin avec la larme à l’œil, tu as murmuré mon prénom en un murmure, puis tu t'es enfui. Je crois que ce sera la dernière fois que je te verrais.


Je ne suis pas si lâche que cela. J'avais prévu de te dire en face mes secrets, mais tu t'es enfui si vite que je n'ai pas eu le temps de prononcer ne serait-ce qu'un son.


Je dois avouer que cela m'arrange, car même à l'écrit je continue à tourner autour du pot comme un abruti.


En écrivant, je me rappelle comment ce "Axel" avait sonné dans ta bouche, et j'en ai encore des frissons. Je pense à tes bras protecteurs, et je frissonne. Ça t'aide ?


Non, bien sûr. Tu ne vois rien. Jamais. Alors autant le dire carrément puisque j'ai décidé de prendre la dernière occasion qui se présentait : Je t'aime.


Je sais que c'est anormal. Je sais que c'est un pêché. Mon père me l'a assez répété, merci. Je sais aussi que tu penses comme lui. Que tu m'aurais repoussé. Mais je voulais te le dire, pour que tu comprennes combien j'ai souffert.


A mes quinze ans, j'ai souffert de découvrir que je n'aimais pas les femmes, mais les hommes. Je me suis dit que ça passerait, que je guérirais de cette maladie. Mais aucun miracle n'est arrivé.


Alors, je me suis forcé. Je suis sorti avec des filles, multipliant les relations à court terme. Elles tombaient comme des mouches, mais je ne les aimais pas. Je leur trouvais des défauts minimes, qui devenaient gigantesques, puis répulsifs. Pourtant, j'espérais toujours de "trouver la bonne".


Le problème, c'est que j'ai seulement "trouvé le bon". Je t'ai rencontré, mon cœur a fait des saltos, mon souffle s'est coupé, et mes genoux ont flanché. Je t'ai suivi du regard, tu m'as aperçu, m'as souri et t'es approché.


Voilà comment a commencé notre "amitié". Pendant quarante longues années, j'ai caché de mieux en mieux mes sentiments, les enfouissant au fond de moi ou détournant la tête à la moindre faiblesse.


Je vois d'ici tes yeux écarquillés, ta bouche déformée par une moue dégoûtée. J'entends d'ici les murmures; "heureusement que ce pauvre vieux est mort", "il a mal tourné", "c'était une punition du Tout-Puissant".


Excuse mon écriture tremblante et les traces de larmes. Je dois être plus lâche que je ne me plais à le penser.


Excuse ma lettre, brûle-là si tu préfères, mais je vais devoir continuer. Je vais devoir tout expliquer.


Une part de mon cœur espérait, et espère encore, que tu m'aimes. Je crois que c'est la partie la plus endommagée, la plus desséchée. C'est d'ailleurs celle-là qui me crie de te rejoindre, de t'embrasser. C'est celle-là qui se languit de ton visage, de tes mains, de tes lèvres, de ta chaleur.


Je sais bien que tu n'espérais pas une lettre d'amour d'un pauvre vieillard, mais je n'ai rien de mieux à offrir.


Je dirais "Baisers", mais je crois bien que c'est inapproprié, alors je vais simplement te mettre "A bientôt", comme si nous allions nous retrouver demain, et nous mentir encore une fois,


Axel.


P.S. : Je vois ton visage à travers la vitre. Je dois halluciner. Ai-je imaginé tes bras autour de moi ? Ai-je rêvé ta bouche contre la mienne ?

Mes seules certitudes, ce sont celles de t'aimer et de mourir. D'ailleurs les mots se brouillent déjà devant mes yeux. Je sais que la fin est proche.

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