On ouvre les yeux

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Elle ne revint à elle que quelques jours plus tard. Elle ouvrit les yeux, et posa son regard autour d’elle. Elle prit enfin le temps d’observer calmement son nouvel environnement. Elle était seule dans cette chambre, et c’était tant mieux, elle n’avait aucune envie d’échanger avec qui que ce soit.

Le docteur Ewan passa la voir en fin de matinée et il posa le même regard bienveillant sur elle. Elle en aurait rougi. Avec beaucoup de douceur, il lui posa quelques questions, et après une rapide analyse, son verdict tomba comme une coupe chirurgicale.

« Vous avez fait un burn-out Mademoiselle Garati. »

Sahila : « Un quoi ? »

Doc E : « Un burn-out »

A : « Ah oui, j’avais bien entendu. Mais comment ça ? C’est pas possible, pas moi ! »

Doc E : « Et si, mais rassurez-vous, ça arrive à des gens bien. C’est même souvent la première cible de ce genre de phénomènes. Maintenant, il vous faut l’accepter, comprendre pourquoi vous avez laissé ces choses se produire et faire en sorte qu’elles ne se reproduisent plus. Faites-vous aider, il vous faut un coach, quelqu’un qui vous guide. »

Woaouh, douche froide ! Parce qu’en plus, ce serait de ma faute !

Sahila ne comprit pas de suite la portée de ce diagnostic rapide et concis. Alors non Sahila, ce n’est pas de ta faute, tu n’as pas à culpabiliser, mais tu le comprendras plus tard. Comme tu comprendras qu’il ne faut pas parler de faute, mais de responsabilité. Nous sommes responsables de nos actes, et nous provoquons consciemment ou non ce qui nous arrive dans la vie.

Sur les conseils du docteur Ewan, Sahila se fit aider. Elle entreprit un long travail sur elle-même, ses valeurs, ses aspirations, ses rêves qu’elle avait fini par oublier. Elle n’avait pas beaucoup d’économies, mais elle se débrouillait, elle faisait des petits boulots, elle voyait au jour le jour. Son objectif était d’aller mieux. Elle était déterminée à trouver son chemin de vie. Une chose était sûre, c’est que sa route se trouvait loin de Paris. Elle ne supportait plus cette ville, elle ne l’avait jamais vraiment aimé d’ailleurs. Et il était évident aussi qu’elle ne travaillerait plus jamais dans un cabinet d’avocat.

Sa famille vivait toujours à l’étranger, son père était diplomate, ses parents étaient amenés à changer d’horizon assez souvent. Elle pensait souvent à eux, mais elle ne concevait pas de retourner vivre avec eux. Elle avait besoin de son indépendance et surtout de stabilité. Elle ne supporterait pas de déménager tous les 3 ans et se sentir déracinée une fois de plus. Elle avait fait ses études de droit à Bordeaux où elle avait rencontré sa meilleure amie Eva.

Mais oui, c’est ça ! Et si je retournais aux sources ? Sahila jeta un coup d’œil rapide à son appartement, tout ce qu’il contenait tenait largement dans une voiture, pas besoin de déménageurs. De toutes façons, elle n’en avait pas les moyens.

Sahila attrapa son Mac Book et commença à regarder les annonces de maisons ou appartements à louer en région bordelaise. Depuis quelques années, Bordeaux était devenu la ville la plus attractive de France, détrônant ainsi le Sud-Est et son urbanisme galopant. En l’espace de deux ans, Bordeaux avait accueilli plusieurs milliers de parisiens, aspirant à une qualité de vie meilleure. Ils étaient arrivés avec leur pouvoir d’achat de parisien, et leurs exigences de parisiens. Résultat, les prix de l’immobilier avaient flambé. Sahila due se rendre à l’évidence, elle pouvait oublier le centre-ville, trop cher. Elle étendit ses recherches aux communes voisines. Malheureusement, même constat. Elle élargit encore davantage ses recherches pour se retrouver dans un périmètre distant de 80 km de Bordeaux. Qu’à cela ne tienne, elle voulait quitter la ville, fuir les parisiens, respirer l’air de la campagne, il semblait évident qu’il fallait également fuir Bordeaux. Elle n’aimait pas le Nord de la région. Elle s’installerait donc en Sud-Gironde, près de chez son âme sœur. Elle devait maintenant trouver la perle rare qui entre dans son budget. Si elle vendait son appartement, elle aurait la trésorerie nécessaire pour voir venir quelques temps, même sans boulot. Elle pourrait se trouver une petite location en attendant mieux. Ce qu’elle voulait par-dessus tout, c’était un jardin.

Pour une fois dans sa vie, Sahila eu de la chance. A peine l’annonce parue, une famille de retraités entra en contact avec elle. Le couple cherchait un petit pied-à-terre à Paris pour venir voir leurs enfants de temps en temps. Ils finançaient l’acquisition sur fonds propres, pas besoin de crédit, on allait gagner du temps. Le jour de la réitération de l’acte authentique, Sahila arriva chez le Notaire avec sa voiture chargée de toutes ses affaires. Elle prendrait la route dès qu’elle savait l’argent sur son compte.

Le trajet vers Bordeaux lui sembla passer à la vitesse de l’éclair, elle était tellement contente de pouvoir tourner le dos à toute cette vie, qu’elle fit le trajet d’une seule traite. Sa meilleure amie l’attendait. Quand Sahila descendit de la voiture, elles s’enlacèrent toutes les deux comme si elles ne s’étaient pas vues depuis une éternité. Oui, une éternité, c’était la représentation exacte que Sahila se faisait du temps écoulé.

Elles ont beaucoup discuté ce soir-là, euh, non cette nuit-là. Habituée des nuits blanches, Sahila était intarissable, elle avait besoin de vider son sac. Eva était dotée une de ces rares qualités, l’écoute active. Elle ne faisait jamais semblant de s’intéresser à ce que lui racontait son amie. Quand Sahila s’aperçue que les yeux d’Eva commençaient à clignoter, elle se blottit contre elle pour s’endormir. Une fois de plus, elle ne se serait pas couchée la veille du jour où elle devait se lever. Mais cette fois, ce n’était pas par contrainte.

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