Chapitre 25

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Shiro éclata d’un rire sanglant, les mains sur le ventre.

— Il n’y a vraiment rien de mieux qu’une bonne exécution ! Hé, faite pas cette tête là. Elle l’a mérité après avoir commis un tel crime. Nous ne faisons que suivre la loi du Talion.

Nanoki leur lança un regard noir. La loi du Talion ? Ils se moquaient d’eux !

Shiro fit mine de trembler, un air faussement apeuré. Puis il pouffa à nouveau de rire, comme s’il se retenait depuis longtemps.

— Franchement… vous ne détestez pas votre camarade pour avoir enlever la vie d’une autre ? Nous ne faisons que la venger. Clarisse est morte de la même manière que Célia. Elle a juste… souffert un peu plus.

— Un peu plus ? Vous foutez pas d’nous ! s’enquit Randy. Je l’ai détesté d’avoir fait ça, mais elle avait ses raisons ! Elle pensait tuer l’instigateur ! Parce que vous l’avez poussé à croire que Célia était l’instigateur ! C’est de votre faute ! C’est vous qui devriez tout prendre au centuple !

Randy criait à se casser la voix, car c’était la seule façon de se défouler sans se jeter sur eux pour les transformer en bouillis. Même en braillant, il dut serrer les poings pour se retenir.

— Nous ? Pousser Clarisse à croire que Célia est l’instigateur ? Nous n’avons aucune raison de faire ça. Ce n’est que l’interprétation de notre perpétrateur après avoir lu le secret de sa futur victime.

Shiro lui offrit un sourire malicieux, les yeux plissés.

Randy se mit à trembler, et dans un geste que Nanoki qualifierait d 'irréfléchi, il se jeta vers les robots. Kuro fit un signe à Shiro mais ce dernier défiait Randy du regard. Il ne comptait pas partir. Il comptait se laisser frapper.

Mais à la surprise générale, Randy passa devant les robots sans les toucher. Il se laissa tomber près du trône de Shiro, et abattit son poing dessus aussi fort qu’il le put.

Shiro haussa les épaules avant de disparaître, suivit de Kuro.

Peu à peu, ils sortirent de la pièce. Et contrairement à ce que Nanoki pensait, Randy fut l’un de premier à quitter l’endroit. Elle pensait qu’il resterait quelques minutes, à genoux, avant de comprendre que c’était le moment de partir.

Nanoki resta concentrée sur ce dernier, qui hésita à aller au gymnase, avant de serrer les poings et de se rendre au réfectoire. Les autres retournaient dans leur chambre et c’était également ce que la karatéka voulait faire. Mais… le comportement de Randy l’intriguait trop. Il semblait particulièrement atteint par la mort de Célia. Pourtant, bien que cette dernière tentait de discuter avec lui, ils n’étaient pas proches.

La seule conversation qu’ils eurent pu avoir de leur vie devait être celle dans la cour. Randy avait précisé qu’il avait eu besoin de réfléchir à ce que l’actrice lui avait dit et qu’il devait lui fournir une réponse.

Avant même qu’elle s’en rendit compte, Nanoki était déjà devant le réfectoire. C’était sûrement une mauvaise chose d’être aussi curieuse et d’en demander autant dans une telle situation. Son propre coeur ne demandait qu’à se reposer au calme. Mais c’était plus fort qu’elle. C’était comme si toute son âme lui hurlait d’y aller. SAvoir ce qui se tramait était presque devenu vital. Le monde lui devait des réponses.

Après tout, Randy verra ça comme un soutien et j’arriverais peut-être à trouver les réponses que je cherche. C’est gagnant gagnant quoi….

Elle tentait de s’en convaincre. C’était mieux que d’accepter qu’une curiosité malsaine la faisait oubliait le reste pour des réponses.

Nanoki pénétra dans le réfectoire. Elle y trouva Randy, assis à une petite table, la tête dans les mains, dans une profonde réflexion. Il jeta à peine un regard à la karatéka quand elle avança vers lui à petit pas.

— Célia avait tout compris. Pas étonnant pour une actrice j’imagine…

Compris ? Compris quoi ? A quel sujet ?

Elle aurait voulut penser naïvement que Célia lui avait raconter quelques chose d’important sur la tuerie, mais c’était plutôt évident que cela concernait directement et personnellement Randy.

Nanoki attendit la suite, prenant place à ses côtés, pour indiquer qu’il pouvait continuer. Mais il ne le fit pas et le silence revint de longues minutes. Elle aurait voulut lui poser elle-même la question, cependant, elle sentait qu’elle avait plus de chose d’obtenir une réponse en attendant.

— Elle a vu à travers moi. Tu sais, j’étais pas comme ça quand j’étais gamin, j’étais plus calme, plus sensible, plus gentil, trop gentil. Ce qui a fait qu’on se servait souvent de moi. Je m’en rendais pas compte à l’époque. J’étais tout naïf et manipulable et j’étais super content que les autres viennent me parler, même s’ils me demandaient un service. Je me disais que ces personnes me faisaient confiance et que je ne devais pas les décevoir. Parce que je voulais que ces gens deviennent mes amis. Je voulais pleins d’amis à l’époque…

Il fit une pause, happé par les souvenirs. Il semblait revivre les événements en même temps qu’il les racontaient.

— J’ai ouvert les yeux quand je les ai rencontré. Ils voulaient m’aider pour que je me fasse plus marcher dessus, qu’on ne se serve plus de moi comme un chien bien obéissant. Et malgré tout, je suis heureux de les avoir rencontré. C’est des bons, tu sais. Même s’il font les cons derrière leur carapace de gros durs. J’étais contre certaines de leur pratique, comme voler dans les magasins et déclancher des bagarres de rues, et même si je les vends pas très bien, c’étaient vraiment des bons gars. Ils ont juste besoin de se rendre compte que profiter de sa jeunesse, c’est pas enchaîner les conneries. Ils avaient commencé à s’assagir avec le temps. Ils sont pas con, juste inconscient. Et même si on dirait, je te parle pas de badboy ténébreux ou je ne sais quoi. Tu sais, l’un d’eux disait, ça remonte à quelque mois à peine, qu’il comptait reprendre l’entreprise de son père et la rendre encore mieux pour l’empêcher de faire faillite. Une putain d’entreprise de magasins de jouer. C’est vraiment un gosse celui là…

Un sourire triste se dessina sur ses lèvres alors que ses yeux devenaient brillants.

— Je voulais devenir comme eux au collège. Je voulais en avoir rien à foutre comme eux et vivre ma vie au jour le jour. Le plus drôle, c’est que le jour où je me suis battus, ils ont compris que c’étaient pas super de se battre. Ils étaient mort d’inquiétude. Depuis, à la place de ce type de connerie, ils préféraient faire chier les profs, être le rigolo de la classe, faire des blagues nuls, organiser des soirées entre potes… Sauf le gars de l’entreprise de jouer. C’était le plus sérieux et le plus raisonnable de nous quatre. Le seul qui se cachait pas derrière une carapace. C’est lui qui m’a trouvé, tu sais…

Il ferma les yeux et attendit, laissant les larmes humidifier ses joues.

— Célia a compris pour la carapace. Elle voulait me convaincre de l’abandonner… Mais le problème, c’est que je sais pas vraiment qui je suis. Je sais pas si le vrai moi et proche ou loin de cette carapace. Je me suis demandé si au final, ce n’était pas ça le vrai moi, et que j’avais juste grandi. Mais si Célia avait remarqué un truc, c’est qu’il doit y avoir une différence. Est-ce que tu crois que le vrai moi c’est ce p’tit gars sensible, naïf, manipulable et trop gentil ? Je n’ai pas envie de redevenir comme ça.

Nanoki pensa qu’il s’agissait d’une question rhétorique, mais compris que Randy attendait une vraie réponse quand il se tourna vers elle.

— Je ne peux pas répondre à ta place… Ce dont je suis sûre par contre, c’est que tu ne peux plus redevenir comme avant. Tu as ouvert les yeux, tu t’es rendu compte des choses. Peu importe comment tu évolueras, tu ne peux que devenir une version amélioré du toi passé. Moi, je crois pas vraiment au grand changement de caractère, ce sont juste des carapaces. Les gens ne changent pas, ils évoluent. Que ce soit pour devenir une meilleure version d’eux même, ou une pire. C’est à toi de voir la direction que tu veux emprunter.

Randy cala à nouveau sa tête dans ses mains sans parler durant de longues minutes. Nanoki se demanda s’il n’avait pas oublié sa présence.

— Merci… Je ne sais pas pourquoi tu es restée tout ce temps à m’écouté, pourquoi t’as pris la peine de me répondre… mais merci. Ça fait du bien de parler…

Si tu savais que ma volonté n’est pas aussi noble que ce que tu penses…

Nanoki se leva, comprenant que les dernières paroles de Randy signifiait qu’il ne parlerait plus. Elle jeta un dernier regard vers lui, qui était retourné dans une profonde réflexion. Elle quitta le réfectoire pour retrouver sa chambre.

Elle se rendit compte à quel point écouté pouvait être épuisant. Mais elle était heureuse d’avoir eu les réponses qu’elle voulait. Sa curiosité était rassasié.

Nanoki s’écroula sur son lit. Au moment instant, son nez la piqua et ses yeux s’humidifièrent. Elle compris alors que sa grande bonté n’était pas seulement de la curiosité. Inconsciemment, elle voulait retarder le moment où elle serait seule avec ses pensées.

Elle adorait la solitude il y a seulement quelques jours, quand cela lui permettait de lire ou s’entraîner en paix. Mais là, elle n’avait la force de faire aucune de ces deux activités. Même lire semblait être une tâche trop compliquée.

Alors elle serra son oreiller contre sa poitrine et laissa ses larmes dévaler sur ses joues.

Comment garder espoirs après quatre morts ? Elle ne savait pas combien de temps elle tiendrait. Malgré ses bons réflexes, et si elle se faisait tuer ? Et si elle craquait et finissait par tuer quelqu’un.

Elle finit par s’endormir, plongeant dans un sommeil empli de cauchemars.

— Non !

Nanoki se réveilla en sursaut. La respiration saccadée et le coeur battant la chamade, elle tenta d’ancrer dans son esprit que ce n’était qu’un cauchermar et qu’elle était revenue dans la réalité. Mais c’était comme si le poids du monde pesait sur ses épaules, avant de pénétrer sa peau, pour comprimer chacun de ses organes.

De l’air… besoin.. de… respirer…

Elle se précipita dehors, claquant la porte derrière elle. Le vent lui gifla le visage et un soupire de bien être s’échappa de ses lèvres. L’air accepta d’entrer dans ses poumons. Ses muscles se détendirent peu à peu. Elle prit de grande inspiration, tête levée vers le ciel.

Elle se sentait mieux, mais malgré le fait qu’il était 4 heures du matin, elle ne voulait pas retourner dans sa chambre. Elle étouffait trop dedans.

Elle décida alors de se balader pour se changer les idées. Elle sortit du chemin pour passer entre les arbres pour ne pas avoir de destination. Juste marcher.

Néanmoins, elle finit par arriver dans la cour qui n'était pas déserte. Sur un banc, Randy était assis au dessus du dossier, les pieds là où il aurait du poser les fesses, les coudes sur les cuisses et le regard rivés sur le sol. Nanoki décida de le rejoindre. Ce n’était pas si mal de tomber sur quelqu’un, cela l’évitait d’être seule.

Randy leva la tête vers elle quand elle ouvrit le portail.

— Qu’est-ce que tu fais là ?

— Cauchemars, répondit-elle en prenant place à ses côtés.

Il imita son activités — fixer le sol — et aucun des deux ne parla de longues minutes.

— Tu sais, te parler ça m’as beaucoup aidé. Je me suis rendu compte à quel point ça faisait du bien et à quel point j’en avais besoin. Je sais toujours pas pourquoi t’as fait ça, mais je voulais encore te remercier. Maintenant, j’ai envie d’apprendre à connaître le vrai moi. C’est plutôt marrant dis comme ça.

— Je ne sais pas si c’est parce que je suis au courant, mais j’ai l’impression que ta façon d’agir est différente. Déjà tu parlais pas beaucoup sans dire d’insulte ou faire savoir que quelque chose t’énervais.

— Ouais bon, c’est pas non plus comme si on allait tous faire ami-ami. Je t’ai dis, j’suis plus naïf, je sais bien que même si j’adore parler aux autres, c’est pas l’endroit où faire ça.

A nouveau, le silence régna. Nanoki aurait voulut dire plein de chose, mais ils restaient coincé dans sa gorge.

— Hey… vu que t’as été honnête avec moi, tu veux que je fasse pareil ?

— Comment ça ? T’as des choses à cacher ?

— Tu sais pourquoi je t’ai écouté hier ? Pourquoi je suis venue te voir au lieu d’aller dans ma chambre ?

Il se redressa, l’incitant à continuer du regard.

— Je pense qu’on est tous pareil, mais je me vois comme la protagoniste d’une histoire et vous, vous êtes les personnages secondaires, les gens que je croise dans la rue sont juste des figurants pour créer un décor… Du coup, comme je vois au centre de tout, j’ai l’impression que c’est un peu ma quête de trouver des réponses, que c’est mon devoir, et qu’en tant que protagoniste, je n’ai pas d’autres choix. J’ai remarqué à quel point t’étais affecté par le mort de Célia, et j’ai voulus savoir pourquoi. Mais il y a une deuxième raison. Je déteste être dans ma chambre. Être seule avec moi même où je ne peux que repenser à ce qui s’est passé et me dire que ce serait mieux de me tuer pour en finir au plus vite.

Elle retint une grimace à sa dernière phrase. Elle avait été un peu trop honnête.

— Je vois… merci de m’avoir dit la vérité…

— Est-ce que tu vas me détester pour ça ?

— Non. TU sais, c’est un peu pareil pour moi. Les deux trucs que t’as dit. Enfin, sauf le côté où j’ai l’impression que c’est un devoir. Et puis, qu’importe le pourquoi t’as fait ça, tu comptes pas aller raconter ça à tout le monde et te foutre de ma gueule. T’as l’air d’être le type de personne qui respecte les secrets des autres. Je veux dire, malgré ta curiosité, t’as déchiré ton mobile.

C’était pas vraiment par respect envers Daphné….

— Pour moi, ce qui m’importe c’est d’avoir pu parler à quelqu’un sur qui je peux faire confiance sur le sujet. Et puis, t’as quand même répondu à la question bizarre que je t’ai posée.

— Tu me fais confiance ? T’avais pas dis que tu n’étais plus naïf ?

— Quoi ? T’es en train de me dire que t’es pas une personne de confiance ? J’ai du mal à croire les personnes qui le disent ouvertement.

— Dans un situation comme celle-là. Moi même je ne sais pas si je peux me faire confiance.

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