Chapitre 10

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Elles passèrent de longues et interminables heures à monter dans les arbres et analyser chaque parcelle des branches et du sol. Le tout, bercé par les sanglots de Jessica qui tentait d’être efficace tant bien que mal à cause de ses larmes.

Finalement, la nuit tomba sans qu’elles n’eussent rien trouvé. Tout comme les autres groupes, vraisemblablement. Du moins, Nanoki espérait qu’ils ne fussent pas partis sans avertir les autres.

Ce fut donc avec beaucoup d'appréhension qu’elles s’endormirent.

(Déplacer les corps.)

Nanoki ouvrit les yeux. Grands. Très grands. Elle se redressa subitement. Le monde tourna autour d’elle quelques instants avant de se stabiliser.

— Qu’est-ce que…

Les arbres avaient disparu pour laisser place aux murs de sa chambre. La voix de Shiro dans un ton suraigu comme s’il imitait un enfant parvint aux pauvres oreilles de Nanoki.

— Coucou les copains ! Vous savez, je suis vraiment triste que vous ayez essayer de me fuir, vous savez ! Heureusement, comme je suis votre ami génialissime, je vous ai ramené dans votre chambre pour vous faire gagner du temps ! Je sais, je suis incroyable, pas besoin de me remercier ! Mais si vous insistez, je ne dirais pas non à un petit meurtrounet ! Allez, je vous laisse aller manger ! Bisous ! PS, j’ai rangé la nourriture et la boisson pour vous !

— Shiro, les PS ne s’utilisent que dans les lettres…

— Pas moi !

Un soupir sorti du bracelet avant que le micro ne coupa.

Nanoki se hâta dans le réfectoire pour retrouver les autres qui étaient déjà presque tous là, en plein débat.

— S’ils nous ont ramené ici, c’est forcément pour une raison ! s’écria Léo. Je suis sûr qu’il y a un indice ou une sortie qu’il veulent nous empêcher de trouver !

— Mais, genre, tu veux qu’on fasses quoi ? Ils ont, genre, dut déchirer vos plans et, genre, ça sert à rien de continuer, déclara Clarisse.

Cette dernière s’assit contre une table, bras croisés. Léo la regarda de haut avant de se tourner vers les autres.

— Je n’ai pas de temps à perdre avec des personnes qui ne partage pas mon ambition. Si tu veux mourir ici, grand bien te fasses, mais ne me ralenti pas.

Nanoki partageait l'avis de Léo. Ils ne pouvaient pas les avoir fait bouger juste pour leur faire gagner du temps comme le disait Shiro. Ils devaient être plus proche d'une sortie ou d'un indice que ce qu'ils pensaient. Au moins un des groupes. Restaient à savoir lequel…

Léo marchait en direction de la sortie tout en déblatérant.

— Je vais d'ailleurs aussitôt trava…

Il se stoppa quand il rentra dans une forme qui venait de se matérialiser : Shiro. Le temps s’arrêta quelques secondes avant de soudainement s’accélérer. Le robot empoigna les cheveux de Léo pour le retourner et plaça son bras sous sa gorge. L’analyste se retrouvait presque au sol, exerçant une force sur ses jambes pliée pour ne pas se laisser tomber. Dans une grimace, il tenta de griffer et de frapper Shiro. Néanmoins, ses ongles glissaient sur la peau métallique de leur bourreau et ses poings ne touchait que de l’air.

En temps normal, la capacité de karatéka de Nanoki l’aidait à avoir de bons réflexes pour se battre pour sauver les victimes d’agression. Cependant, cette fois-ci, son corps refusait de bouger. Son cerveau lui hurlait d’agir tout en la convaincant de ne rien faire.

Alors elle se contenta de regarder, les yeux plus agités que le reste.

Shiro allait tuer Léo !

Pourtant, dans un mouvement lent, presque doux, Shiro s’abaissa pour poser Léo au sol avec un grand sourire.

Aussitôt, l’analyste s’écarta du robot à quatre pattes, semblant de ficher de son image pour la première fois depuis qu’ils étaient ici.

Kuro apparut ensuite et saisit le bras de Shiro pour le faire reculer, une moue désapprobatrice au visage.

— Shiro ! Tu leur fais peur !

— Justement soeurette ! C’est marrant, tu trouves pas ? Le petit Léo hautain et méprisant qui se retrouve à trembler de peur, à deux doigts de supplier pour sa vie !

Le concerné, toujours au sol, avançant à reculons, lui jeta un regard noir ainsi qu’un grognement. Toutefois, ce n’eut pour effet que de faire rire Shiro.

— Je voulais juste vous dire que ça servait à rien de fouiller la forêt, mais si vous tenez tant que ça à perdre du temps, soit, faite donc, mais ne restez pas trop loin, demain matin, j’aurais une annonce à vous faire ! Bisou les copains ! Pensez à vous entretuer surtout !

Il leur mima un baiser avant de disparaître. Il ne restait que Kuro qui soupira. Elle envoya un regard désolé en direction de Léo qui se levait, époussetant ses vêtements.

— Je sais que c’est plus facile à dire qu'à faire, mais nous ne devez pas avoir peur. Cela ne lui fait que plus plaisir, il se nourrit de vos angoisses et de votre méfiance. En tout cas, rassurez-vous, si vous respectez les règles, il ne peut rien faire de plus que vous faire peur. Sinon, préparez-vous psychologiquement pour demain.

Elle leur adressa un bref salut avant de disparaître à son tour.

Quand ils furent seuls, le silence régnait. Des yeux se croisaient, exprimaient leur inquiétude. Mais pas une parole. Jusqu’à ce qu’un rire résonne dans la pièce. Puis un deuxième. Ils riaient à en avoir mal au ventre, pliés en deux.

Soen et Eden.

LE menteur pointait Léo du doigts, dont le visage devenait rouge, contrairement à ses phalanges qui blanchissaient tant il serrait fort les poings. Il tremblait.

Les rires cessèrent. Soen, au sol, se tenait la joue, les yeux grands ouverts. Léo venait de le frapper. Et il semblait prêt à le refaire. Il leva la tête vers Eden qui eut un mouvement de recul, les bras en croix devant son visage pour se protéger.

— Assez ! Léo, sors d’ici tout de suite !

La voix d’Aaron, dont les légers trémolos exprimaient son hésitation, parvint tout de même à transmettre son ordre et Léo se précipita hors de la pièce.

Cette fois-ci, aucun rire ne brisa le silence. Soen se leva sans bruit et mit sa capuche sur sa tête de sorte à cacher son visage, puis se hâta dans la cuisine.

Pendant ce temps, le reste des participants s’installèrent aléatoirement sur les tables.

Eden, qui était seul sur une des petites tables, se racla la gorge, sans oser parler durant une longue minute. Mais sentant les regards appuyés sur lui, il se lança.

— Je voulais… Je me disais que c’était mieux d’en rire… Je voulais pas me moquer de lui…

— T’es con ou quoi ? C’est, genre, carrément humiliant, déclara Clarisse.

— J’en étais sûr ! Léo va tous nous tuer ! s’exclama Kaïs.

Les pieds sur la chaise, il se balançait d’avant en arrière sur cette dernière. Il serrait tombé plusieurs fois si Gaël ne le retenait pas.

— Il a agit sous le coup de la colère, ce qui est compréhensible car il a cru qu’il allait mourir. Je n’affirme pas qu’il ne tuera personne, mais il n’est pas assez stupide pour tuer plusieurs personnes ; plus il y a de victimes, plus on trouveras de preuves contre lui, indiqua Aaron.

Au même moment, Soen revint, sa capuche toujours sur la tête et prit place aux côtés d’Eden. Les regards convergèrent vers lui.

— Enfin il ferme sa gueule, lui, murmura à Daphné pour elle même.

Le menteur s’accouda à la table, ses gants ensanglantés dévoilés. Lorsqu’il s’en rendit compte, il les arracha de ses mains avant de les fourrer dans ses poches.

— Soen ? l’interrogea Eden.

Il garda le silence, lèvres pincées, avant de finalement lâcher.

— Il m’a pété une dent l’enfoiré…

Le silence envahit la pièce à tel point que l’on y entendait des mouches imaginaires. Des regards de tous types fusèrent, de la peur à la moquerie. Jusqu’à ce qu’un cri déchirant les forçât à boucher leurs oreilles.

Kaïs sauta de sa chaise, recula, puis trébucha. A cause de sa force de recul, ses fesses cognèrent si fort le sol que Nanoki se demanda s’il ne s’était pas cassés quelque chose. Ce dernier ne s’en préoccupa pas, glissa sur le sol, sans tourner le dos aux autres. Ses yeux lançaient des éclairs et il souhaitait sans doute que ceux-ci fussent mortels.

Il cria à nouveau lorsque son dos rencontra le mur. Il se tourna vers le mur une fraction de seconde avant de reprendre sa position d'origine. Il les dévisageait un par un, les yeux tellement écarquillés que Nanoki ne put s’empêcher de déglutir quand il la visait.

Il ressemblait à un démon. C’était impressionnant. Nanoki s’attendait à ce que le mannequin se transformât en une créature magique pour les attaquer.

A la place, il agrippa sa main à ses cheveux, prêt à les arracher.

— C’est bon, Léo a pété un câble, il va tuer quelqu’un c’est sûr. Il va me tuer. Il va me tuer. Il va me tuer.

— Kaïs, je… commença Aaron.

— Il va me tuer !

Kaïs ne laissa pas le temps au leader de finir sa phrase. Dans un hurlement plein de trémolos, il fonça à l’extérieur, poussant la porte si fort qu’elle manqua de sortir de ses gonds en frappant le mur.

Le bruit sourd fit sursauter Nanoki qui mit du temps à comprendre ce qui venait de se passer. La bouche entrouverte, elle fixait la porte, dont le vent aider à la refermer.

— Et bah, ça c’est du spectacle, lança Soen.

— Non mais te faire péter la gueule ça t’as pas suffit ? s’exclama Randy.

Soen plaça ses mains derrière sa tête, un grand sourire au lèvres. Si Nanoki doutait de la véracité de ses propos quand il disait qu’il avait une dent pété, à cet instant, elle n’en doutait plus. Même si celle-ci était un peu en arrière, cela n’empêchait pas le petit trou d’apparaître.

Le menteur ferma aussitôt la bouche, gardant toutefois son sourire.

— Je suis du genre résistant.

— Tu dois avoir l’habitude au vu de toutes tes blessures, asséna Daphné. Pas si étonnant que tu te fasses battre avec un caractère de merde comme le tien !

Cette fois-ci, Soen perdit son sourire. Ses mains se collèrent à ses genoux et il baissa la tête. Toujours encapuchonné, de son angle du moins, Nanoki ne voyait pas son visage. Ce n’était pas nécessaire. Une larme le long de la joue du menteur qui tenta de retenir des sanglots.

— Je sais que tu m’aimes pas… mais dire une chose pareil…

Daphné se replia sur elle même, gênée. Elle jeta plusieurs regards aux alentours pour guetter la réaction des autres. La rêveuse resta silencieuse de longues secondes, sans savoir quoi dire.

— Je… je suis désolée…

Soen releva la tête, son sourire retrouvé. Il sécha rapidement ses larmes en éclatant de rire.

— Je t’ai eu ! Ça m’atteins pas du tout !

Daphné ouvrit la bouche, puis serra les dents, les ongles enfoncés dans ses paumes, prêtes à se jeter sur lui.

— Soen, je pense qu’il est temps pour toi de retourner dans ta chambre, c’est un ordre.

Le menteur s’exécuta non sans tirer la langue à Daphné, ce qui lui valut un regard noir de sa part. Lorsqu’il quitta la pièce, Daphné s’affala sur sa chaise dans un long soupir.

— Quel con !

Suite à ces événements, le calme reprit plus ou moins sa place. Quelques discussions fusèrent, mais tout le monde parlait bas, comme s’il s’agissait d’un secret que les autres ne devaient pas entendre. Puis, peu à peu, au fil des minutes et des heures, les voix prirent de l’ampleur.

Daphné reprenait elle aussi un air plus enjoué, ou du moins, aussi enjoué que c’était possible dans une telle situation.

— J’ai une théorie sur notre arrivée ici, débuta-t-elle.

Nanoki se redressa, l’intérêt décuplé. Même s’il ne s’agissait que d’une théorie, c’était une piste à explorer. Alors la karatéka se pencha vers elle pour l’intimer à continuer.

— Comme on n’a aucun souvenir, je me dis que les illuminatis sont sûrement impliqué !

— Quoi ?

Nanoki se demanda si Daphné ne se moquait pas d’elle tant ce qu’elle venait de dire était ridicule.

— Mais si ! Ça ne peut qu’être ça ! Si tu veux mon avis, ils se servent de nous comme cobayes pour des expériences pour un projet encore plus énorme.

Sans pouvoir se retenir, Nanoki pouffa de rire, mais se stoppa quand le regard plus que sérieux — et vexé — de sa camarade lui indiquait qu’il ne s’agissait pas d’une blague.

— Cela se tient, approuva Aaron.

Ce dernier se tenait derrière Nanoki qui venait de frôler la crise cardiaque.

— Tu te moques de moi ? asséna Daphné, un sourcil haussé.

— Non, je suis parfaitement sérieux.

Il prit place aux côtés de la rêveuse, les mains croisées sur la table. Autant Aaron n’avait pas l’air d’être le type de personne à plaisanter, autant Nanoki ne le pensait pas complotiste. Pourtant c’était le cas, tout comme la rêveuse.

Nanoki croisa les bras, s’allongea à moitié sur sa chaise en soupirant, avant d’aussitôt lever les yeux vers Aaron. Il ne l’avait pas entendu alors elle se détendit.

Les deux complotistes débattèrent sur les responsables entre les illuminatis, les aliens ou encore les reptiliens. Ils échangeaient leurs arguments avec tellement de passion et de conviction que Nanoki aurait presque pu y croire si elle n’avait pas le recul nécessaire pour se rendre compte de l’absurdité de leurs propos.

Désintéressée, elle s’éloigna d’eux pour rejoindre Lou qui était collée au mur, exerçant des pressions de temps à autre.

— Qu’est-ce que tu fais ?

— Je cherche. J’ai l’impression que vous avez tous abandonner l’idée de trouver une sortie. Ce n’est pas mon cas.

— On n’a pas…

— Que faites vous tous actuellement ? Vous discutez comme si vous étiez de vieux amis qui se retrouvaient devant une tasse de thé, ou bien vous vous attelez à la recherche ?

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