Chapitre III

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" Roh putain mais c'est pas vrai ...."

- Bon sang! Dans quelle merde tu t'es encore fourré Lauzel ?! Marmonnai-je en me frotant le visage dans mes mains.

J'en ratai pas une merde ! Entre les potes tarés, les frères fantômes et mainteant les démons mineurs, j'étais servi. Maudissant mes ancètres sur sept générations, je me résignai à écouter celui ou celle - qui sait avec eux, les apparences sont trompeuses - qui se tenait devant moi. Je regardai un instant derrière moi, essayant de ne pas perdre des yeux mon interlocuteur une seule seconde, cherchant un endroit où m'adosser.

Je me résignai, et posai mon postérieur sur la tête de la pierre tombale de ma famille.

" Désolé Pépé "

Le contact du marbre froid sur mes fesses m'arracha un frisson et me donna la chair de poule à travers mon jean. Je croisai les bras, l'air le plus autain, dédaigneux et détestable possible. Je toisai la succube de toute ma hauteur, bien qu'à vue de nez, la créature devait bien atteindre les deux mètres, une fois dressée sur ses pattes de bouc.

Je jetai un regard en coin à Thomas, toujours saucissonné derrère la succube.

- Ok ... Fis-je en soufflant le plus lentement possible. Je comptais calmement dans mon esprit. Un, deux, ... trois, ... quatre...

- Allons jeune homme, ne me fais pas ces yeux là, tu es à croquer quand tu t'énerve. Ronronne la créature, sans cesser de me dévisager. Je vais tout t'expliquer alors, morveux. Continua-t'elle en m'observant de haut en bas.

Je ne me sentai pas à l'aise du tout. Le démon sondai chaque partie de mon corps à la manière d'un IRM. Si je m'étais retrouvé à poil en face de ça, ça n'aurait pas changé grand chose à mon problème. Je me secouai intérieurement, et m'efforçai tant bien que mal de soutenir ce regard encore plus ardent que tous les feux de l'enfer. Je déglutis, alors qu'un sourire carnassier se dessinai sur son visage, et qu'une langue bifide dardait d'entre une rangée de dent aussi effiées que des rasoirs.

- Attendez ! Fis-je en levant les bras vers la créature. Attendez ... D'abord, relâchez Thomas !

La créature fit la moue, puis, constatant que Casper était plus innofensif qu'un moucheron, daigna claquer des doigts pour relâcher les entraves invisibles de mon frère.

Thomas s'effondra au sol sans soulever la moindre poussière. Seul un gémissement étouffé accompagna sa chute, plus ridicule que douloureuse. Il resta immobile quelques secondes avant de se relever, et de se tourner vers notre agresseur, ses yeux lançant des éclairs violet. Il ne pipa cependant aucun mot.

- Bien. Fit la créature. Pour commencer... Pourquoi tu m'as appelée, morveux ?!

- Pardon ?!

La succube roula des yeux, l'air exténué.

- Ton rituel. Les bougies rouges, les branches de houx, la bière, ta prière aux ... haut. Elle pointa son doigt vers les cieux solennellement, comme si quelque chose l'empêchai de pouvoir prononcer n'importe quel mot en rapport avec les dieux, ou un truc du genre. Tout ça, c'est un rituel d'invocation d'esprits parmis tant d'autres. Il est suffisemment puissant pour sceller un pacte de servilité entre un sorcier et une entité via un démon.

En voyant mon air dubitatif, elle finit par laisser tomber les explications alambiquées pour en venir aux faits.

- Malheureusement pour vous, j'en conclus que tu as dû concocter ce splendide petit rituel dans le but de revoir ton cher frère, je me trompe ?

Pas tout à fait, mais je hochai la tête, lui donnant raison.

- Et comme tu m'as fait ça comme un sagouin, au lieu de juste pouvoir le revoir, tu m'as invoquée. Alors oui je sais, reprit-elle, avant que je ne lui coupe la parole avec cette finesse qui m'était propre. J'aurai dû me présenter plus tôt devant vous, mais que veux tu, vous étiez tellement adorables, à vous étreindre de la sorte par un soir de Samhain.

Elle se prenait les joues dans les mains, feigant une expression attendrie. Car, évidemment, je me doutai bien que cette créature avait au moins de quoi rivaliser en vices avec ce cher Zeymmour. Passons le glair de reproches et d'obscénités qui me chatouillai la glotte pour continuer d'écouter le passionnant récit de la ... Dame ?

- Tu m'as invoquée dans le but de revoir ton cher et tendre, et de le délivrer de sa hantise. Je l'ai extirpé de l'entre deux Mondes, pour te présenter l'Ethéré, et te permetre de réaliser votre souhait. C'est ça ?

J'objectai avec un ton sec.

- Foutaises ! Je ne vous ai jamais invoqué ! Et je vois pas pourquoi je voudrai invoquer un quelquonque démon ou entité de votre bord!

" Mouais, mon petit doigt me dit que t'as pas seulement besoin d'un câlin platonique, si tu veux mon avis ..." Me souffle alors Thomas dans mon esprit. Je chassai cette pensée d'un geste de la main.

- " Tais toi toi ! " Lui répondais-je.

Le démon leva un doigt de suspens devant mon nez, l'air grave et outré.

- Tu ne m'as jamais invoquée ?! Non mais je suis en train de rêver ma parole ! Des petits cons de votre espèce, les Instances devraient nous donner le droit de vous expirer sur le champ ! Mais passons. Continua-t-elle en m'offrant son sourir le plus faux et le plus enjôleur. Toujours est-il que mes services ne sont et ne seront jamais gratuit. Tout se paye ma petite dame.

On croirait entendre Mei. Je commençai tout juste à comprendre dans quelle merde je m'étais encore fourré. J'avais pactisé avec un enfant d'Asmodée pour qu'il extirpe le spectre de mon frêre des brumes de l'entre deux mondes ! Je n'avais absolument pas pensé à inclure une inconnue D ou S ( Démon ou Succube ) dans mon équation d'incantation. Et pour ma part, jamais je n'aurai pensé que cela s'apparentai à de la nécromancie, à vrai dire.

- Et tout à un prix.

- Attendez, stop ! Je n'ai encore rien demandé à qui que ce soit! Vous auriez pas une sorte de service après vente ou une genre d'annulation de prestation, de changement de dernière minute, comme chez Darty ? Risquai-je en essayant de sourire.

Elle aurait pu me rire au nez, m'en coller une ou tout simplement me faire passer l'arme à gauche, mais la succube prit un air encore plus sérieux.

- Trop tard. Continua-t-elle en affichant un sourire d'un sadisme rare. Tu as touché le pacte, maintenant il est scellé jusqu'à ce que toutes les parties aient obtenu gain de cause. Désolé mon petit sucre d'orge. Et je n'aurai aucun intérêt à te tuer.

" Pas tout de suite en tout cas ..."

Je bouillonnai sur place. Cette saloperie nous avait sans aucun doute vus dès le départ, moi et mon frère, et ommis de nous soumettre les conditions de ce foutu pacte. Quelle bassesse d'esprit, quelle indignité. En même temps, à quoi pouvais-je bien m'attendre, avec les démons ? De l'honnêteté ? De la bonne foi ? Laissez moi rire.

Je sentai en elle une perversité rare. La succube en face de moi était tantôt un chat, qui ronronne quand on la caresse dans le sens du poil, tantôt un monstre sanguinaire assoifé de vices qui n'hésitait pas à faire les pires atrocités pour arriver à ses fins. Ou pire, juste pour se délecter du malheur des autres.

" Mouais... ça aussi ça s'appelle un chat."

Je soufflai de nouveau, baisssai la tête, laissant mes boucles folles recouvrir mon visage. Je me frottai les mains, endolories par le froid, et ravalai une fois de plus ma salive. Après une courte pause, je me décidai enfin à lui faire face de nouveau, et lui posai la question fatidique.

- Et quel est ton prix ? Vue que je n'ai pas mon mot à dire...

Le démon marqua une courte pause, et avança sa main griffue vers mon menton, qu'elle souleva d'un geste vif vers son visage.

Je réprimai un mouvement de recul, un frisson parcourant mon échine.

- Ton âme ou ton énergie vitale. Voilà le prix à payer.

Je pense que je ne mesurai pas encore tout à fait la valeur du prix que me demandai l'entité. Je bloquai une seconde sur ses paroles, dubitatif. Mon hésitation suffisait à la convaincre de rentrer dans de plus amples détails.

- Nous, les démons, commence-t'elle en s'exprimant avec les mains. Demandons toujours une contrepartie pour nos services, très Cher. Cela dépend, mais les paiements varient en fonction de mes collègues. Chez nous, succubes ou incubes, nous privilégions les dons d'énergie plutôt que les âmes. Elle désigna du poing l'empacement de son coeur. Mais note bien que nous acceptons aussi cette transaction.

Je réfléchissai quelques secondes, contemplant le ciel de plus en plus maussade. La lumière de la Lune était cachée par d'épais nuages, de plus en plus bas dans le ciel.

- Et ... Cette énergie que tu me demande, tu la veux en quelle quantité ?

Une lueur dansait dans le regard de la créature. Elle se redressai sensiblement de quelques centimètres sur ses sabots, croisant les bras devant son poitrail.

- Tant que je suis sous contrat avec toi, je te demanderai cette contrepartie. Vous, les humains, possédez ce feu plus ardent que les enfers, tellement plus précieux à nos yeux que tout l'or que vous pourrez nous donner.

Mais si je lui donne l'un ou l'autre, jen suis mal barré. Et je suis plutôt dûr en affaires. Un contrat que je n'ai pas signé, que l'on me présente sous le nez avec obligation de paiement, c'est inadmissible! On appelle ça une arnaque !

- Et si je ne veux pas payer ? Commençai-je, espérant ouvrir les négociations.

- Tu n'a pas le choix chéri.

" Raté. Même pas une seule faille, pas un sourcil froncé. "

- Sinon quoi ?

- Je te hanterai jusqu'à la fin de tes jours. Et quand l'Ankou, la Faucheuse, Charon, Anubis ou je ne sais quel guignol viendra couper le fil de ta vie, je viendrai récupérer mon dû par substitution, ton âme. Et jamais tu ne pourra trouver le repos, car je m'en nourirai.

J'étais dans une impasse. Aucun foutu moyen de briser ce maudit pacte ! Mais je ne m'avouai pas vaincu pour autant. Je réfléchissai à toute allure, tournant le problème dans tous les sens pour essayer d'en extirper un échappatoire. Rien ne me vint à l'esprit.

- Attends ! Je... je vais y réfléchir. Je ne peux pas te donner de réponse cette nuit. Il s'est passé trop de choses en trop peu de temps pour pouvoir te donner une réponse.

La succube ne me lâchai toujours pas des yeux. Comme si j'étais un morceau de jambon ou une sucrerie qu'on lui remuait sous le nez. Vraisemblablement d'humeur joueuse, la créature secoua la tête en signe d'approbation.

- Bien. Je te laisse un peu de répit pour faire ton choix, petit.

La succube se redressa sur ses pattes de bouc, faisant craquer ses articulations, et étirant ses monstrueuses ailes de chave souris trouées. Elle se frotta le bras, puis remis ses longs cheveux cramoisi derrière ses longues oreilles en pointes avant de poursuivre.

- Je reviendrai quand j'aurai le temps... Elle laissa couler un léger blanc, puis repris, me fusillant du regard et me pointant dédaigneusement d'un doigt griffu accusateur. Mais rappelle toi bien d'une chose. Où que tu sois, où que tu ailles pour me fuir, je te retrouverai, et je quémanderai mon paiement, vu ?

Je hochai la tête. Les muscles de mes mâchoires tendus, la pomme d'adam faisant des montagnes russes dans ma gorge, je décidai d'accepter ces maigres conditions de négociation. Je me relevai enfin pour pouvoir partir, et me rapprochai du fantôme de mon frère, lui adressant un sourire compatissant. Il me le rendit timidement, se plaçant dans mon dos.

- Oh, une dernière chose avant que je m'éclipse. Quels sont les noms de mes clients ?

Stupéfaits, nous la dévisageâmes de conserve. Je me retournai vers Thomas, avant de me résigner à répondre.

- Olivier. Je suis Olivier Lauzel. Et lui, fis-je en désignant Casper, c'est Thomas, mon frère.

Je me retournai pour face face à la succube.

- Et maintenant ?

- Pandora. Au plaisir de vous revoir.

Ladite Pandora se campa sur ses pattes arrières, déploya toute l'envergure de ses immenses ailes, sa queue fouettant l'air dans son dos.

Elle disparu sans un bruit.

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