Chapitre 5

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Ils en oublient, bien sûr, les haricots verts qui se carbonisent benoîtement dans la poêle rougie sur le feu de charbon, dans la cuisine. Se foutent royalement de la porte ouverte et qui donne directement sur la rue. Les passants ? Qu’ils en profitent pour prendre des cours, ces cons ! Comment qu’il va se l’embroquer la vieille ! A sec, c’est évident puisque la source est tarie depuis des siècles. Peu importe, il va lui faire surchauffer le radiateur à la mémère !

N’y tenant plus, ils s’enlacent avec vigueur. Prémices d’une empoignade qui vaudra son pesant d’or. Ils s’écrasent les cerceaux à les rompre. L’ostéoporose ? Fume, mon gars ! Rien à foutre que le squelette de la rombiasse se barre en sucette. Elle veut du braquemard alors elle en aura pour les cent prochaines années ! Elle projette de l’éponger complet, le grincheux, lui vider les valseuses et en profiter pour lui visiter les muqueuses, des fois qu’il en resterait planqué dans les replis. Les orphelines du vieux singe vont se faire une cure d’amaigrissement express comme jamais. Pourront prendre l’air en Sibérie sans craindre les engelures, du temps qu’elles refroidissent.

Ils se jettent dans un combat tumultueux qui se termine, très provisoirement, sur le canapé, près de la table de la salle à manger. Ne parlent plus, ne profèrent plus que des cris incompréhensibles, simiesques. Redevenus bêtes, ils ne se soucient que de l’acte animal dont ils ont été privés pendant trop longtemps. D’un coup de pied incontrôlé, Raymond envoie valdinguer la table et la vaisselle de môman finit lamentablement sur le parquet et avale son bulletin de naissance. Ils se grumellent les intérieurs à grandes goulées voraces. Raymond doit même recracher deux trois dents du râtelier d’Agathe qui part en miettes aussi (le râtelier, hein ? Parce qu’Agathe se prépare à partir à dame, elle…)

Ce que voyant, le prévoyant bonhomme retire le sien et le fourre prestement dans la poche de son grimpant. C’est donc dans d’abominables bruits de succions édentées qu’ils se découvrent le dedans. Agathe lutte avec acharnement pour reprendre son souffle. Ce goret de Raymond ne lui laisse que le minimum syndical en oxygène tant ses assauts sont furieux. Leurs mains fébriles découvrent le site archéologique qui leur est offert en pâture, ne s’arrêtent pas au contact des nombreuses verrues et autres scories qui marbrent le cuir usé du partenaire. Ça fait maintenant plusieurs longs instants qu’ils s’évertuent à se défaire de leurs hardes.

Petit aparté (encore ?) qu’il me paraît important à soumettre à votre sagacité : ils s’évertuent… Cette expression n’attire pas encore votre attention ? Et pourtant, elle me semble, plus que jamais, d’actualité ! Bah ouais…ils s’évertuent…j’aurais pu dire ils veulent se défaire à toute fin de leur vertu. Non ? Ca ne vous inspire pas plus que ça ? Qui vient de dire que cela n’a rien à voir ? Et alors ? Ça vous arrivera donc jamais de digresser un peu dans les conventions ? Pfff… tiens, je reprends sans plus intervenir, z’êtes trop terre-à-terre. Quelle misère, quand même)

Bref ; ils s’évertuent… non, ils s’acharnent (et toc !) pour se retrouver à poil. Hé, c’est qu’ils veulent frotter ce qui leur reste de pilosité sans ces ridicules obstacles de tissus qui les enferment, loin du contact bestial qu’ils recherchent !

Regardez :

Papy se pèle les corps calleux dans l’espoir de déboutonner le pull de la vieille Agathe. Mais il manque de pratique… s’y prend comme un aveugle qui voudrait commenter les fresques de la Chapelle Sixtine. Il s’entête pendant que la vieille se démène du prose pour bien se mettre en position de tir. Finalement, Raymond décide d’arracher les fringues de la rombière sans se préoccuper des conséquences. Les étoffes volent donc rapidement. En lambeaux parce qu’il vient de reprendre son râtelier…vous savez, celui qu’il avait planqué dans la poche de ses pantalons, tout à l’heure. Simplement, il s'en sert comme d'une pince ou d'un couteau.

Non ? Vous ne vous rappelez pas ? Bah alors ! Mémoire de trois secondes : vous pourriez concourir face à des poissons rouges ! Pas grave, je poursuis : armées de cet engin létal, ses mains débitent (attention les mauvaises interprétations, hein ?) la veste, le chemisier, la robe de sa walkyrie. La voici enfin dans la simple tenue de ses dessous antédiluviens. Il admire les baleines en fer forgé d’un demi-mètre de diamètre du porte-lolos et qui contiennent difficilement cette poitrine de cétacé. Les dentelles, jadis envoûtantes, sont aujourd’hui grises de crasse et de tâches malhonnêtes. Pourtant, tout à son irrépressible envie de mâle en rut, Raymond s’en fout pas mal et s’apprête à sortir une clé à molette pour déverrouiller l’engin infernal. Heureusement, il finit par dégauchir le mécanisme (en acier trempé, celui-ci) qui cède à contre-cœur sous ses coups de boutoirs. Des bonnets surpeuplés s’échappent alors environ trois mètres-cube de viande laitière. Telle une coulée pyroclastique, un nuage de poussière dévale aussi les flancs montagneux du torse d’Agathe. Ses mains fébriles tentent bien de contenir cette avalanche mais, rien à faire, le courant est trop fort ! Alors, il passe à autre chose.

Considérant qu’elle n’est encore qu’à demi conquise, il s’attaque au gros de l’affaire. Il la débarrasse des derniers morceaux de tissus, restés collés par la sueur depuis des années. Pas une mince affaire mais il s’en sort honorablement, le bougre. Elle aura poussé bien des cris de douleur, laissé quelques centimètres carrés de peau, arrachés en même temps que les fibres mais, bon, le panorama est maintenant dégagé, pour l’essentiel. Maintenant, le vieux satyre peut se régaler et admirer les vestiges de sa donzelle. Alors, lui reviennent à l’esprit tous ces corps de femmes, magnifiques et parfumées, souples et musclées. Dans la force de l’âge, Raymond épuisait ses compagnes dans des joutes amoureuses d’où il ressortait toujours vainqueur. Il se souvient des corps-à-corps torrides, des cris de souffrances qu’il lui arrivait de pousser lors de quelque manœuvre aventureuse.
Quel pied ! Faut dire qu’à l’époque, le beau Raymond affolait les frifris de ces dames en deux coups de cuiller à pot. Un as de la tringle, quoi ! Aussi, après avoir pris un peu de recul pour mieux considérer l’état général de sa nouvelle conquête, est-il un peu…choqué de découvrir les effets du temps sur un quartier de barbaque pas entretenue.
Manque plus que les bloches et c’est la totale !

A suivre !

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