UN MARIAGE EN GRANDE POMPE

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Idrias, un pays de renouveau

Mon cœur battait à tout rompre depuis que mes paupières s’ouvrir sur le visage endormi d’Aiden. Voilà ! Le grand jour arriva, le jour qui marquerait à jamais mon existence. J’exaltai d’être bientôt unis à l’homme de ma vie mais en même temps le stress s’empara de mon corps. Chacun des pores de ma peau transpira l’angoisse que mon amour ne soit pas réciproque.

Et si ? Et si, il jouait la comédie pour s’emparer de mon royaume et asservir mon peuple ? Et si, j’étais un simple jouet entre ses mains ? Et si, l’enfant que je portais n’était rien d’autre pour lui, qu’une fin en soi ? Et si, et si… Pleins de questions sans réponses qui vinrent me parasiter le cerveau alors que je devrais être la plus heureuse du monde. J’espérai être, au plus profond de moi, plus qu’une fin en soi pour cet homme.

Je ne connaissais Aiden que depuis quelques semaines et pourtant j’avais cette impression tenace que je ne l’avais jamais vraiment quitté, comme une mère connaissait son enfant avant même qu’il naisse. Je voulais qu’il me serre dans ses bras puissants pour me réconforter, qu’il m’embrasse pour faire battre mon cœur encore un peu plus vite, qu’il ne se lasse jamais de dire à quel point il tenait à moi.

Mais là, en cet instant, tout ce que mon cerveau produisit était un brouhaha de questions inopinées qui me mirent les nerfs en pelote. La boule de frustration que j’étais n’allait pas tarder à exploser.

Je me libérai de l’étreinte d’Aiden et rejoignis le balcon derrière mes baies vitrées. L’air frais du matin s’engouffra dans la pièce, faisant frissonner au passage mon amant. J’inspirai profondément remplissant mes poumons d’un air pur bienvenu.

Je m’avançai sur les dalles froides du balcon en pierre et observai le paysage en contrebas. La nature s’étira sur des kilomètres à perte de vue. Une odeur d’herbe coupée et de miel flottait dans l’air. Les jardiniers avaient reçu l’ordre d’entretenir parfaitement les jardins où se déroulerait la cérémonie qui me liera à Aiden pour le restant de ma vie, comme cela avait été le cas pour Elizabeth. Et, on préparait sûrement des mets délicats pour la fête du mariage.

J’entendis grogner, je passai la tête par la porte vitrée, Aiden gesticula toujours endormi. Je rentrai en prenant le soin de bien refermer derrière moi et je remontai la couverture sous son menton. Je l’embrassai furtivement sur la joue avant d’appeler mes chambrières.

Le couronnement de la veille avait fait de moi une Reine, alors je n’avais guère le temps de lésiner avant mon mariage. Je fis une rapide toilette puis Julia et Vicky m’aidèrent à enfiler une robe simple mais qui montrait ma majesté.

On toqua quand Julia referma la chaine qui retenait sur mes épaules le manteau royal. Vicky déposa mon diadème avant de se camper devant la porte. Elle ouvrit le battant et annonça mes parents.

Aryerk et Lunafreya se dessinèrent dans l’encadrement de ma porte. Je leur fis signe d’entrer mais en silence pour ne pas réveiller Aiden.

« Comment te sens-tu ma chérie ? demanda ma mère, à voix basse. »

Je fis signe à mes dames de compagnie de s’effacer, elles exécutèrent une révérence rapide et refermèrent la porte derrière elles.

« Pour tout dire, je crois bien que je suis plus angoissée que jamais…

– Et c’est tout à fait normal, ma chérie, affirma père, qui n’est pas stressé le jour de son mariage.

– Justement, ne devrais-je pas être sûre de mes sentiments à l’égard de cet homme après tout ce qui s’est passé ?

– N’aurais-tu pas plutôt peur de perdre Elizabeth en t’unissant à lui ? demanda mon père en touchant la corde sensible. »

Je fondis en larme, accablé par mon silence oppressant jusqu’à présent. Ma mère me prit automatiquement dans la chaleur de ses bras. Je me retrouvai quelques instants comme à l’époque où je bafouillais sur mes mots et où les farces étaient bien plus importantes pour moi. La nostalgie m’étreignit et je retrouvai un semblant de paix collée ainsi à ma mère.

Mon père passa ses propres bras autour de nous deux et ce fut un câlin familial des plus agréables. Je pris une profonde inspiration et chassai les larmes de mes joues d’un revers de main.

« Freya ? Elizabeth comprendra. Elle est plus forte que tu ne le penses, elle comprendra que tu as toi aussi besoin de trouver cette perle qui permet de te lever tous les matins, comme elle la trouvé en toi…

– Merci papa, merci maman, leur répondis-je en les serrant une dernière fois contre moi. »

Ma mère renifla et me regarda de ses yeux brillants, le rouge de ses prunelles rehaussées par ses larmes. Je la questionnai du regard et formulai une question silencieuse sur mes lèvres.

« Cela fait tellement longtemps que tu nous avais plus appelés ainsi… »

Il était bien vrai que depuis qu’ils étaient monté sur le trône, je ne les avais appelé plus que par les appellations « sire », « majesté » ou encore « père » ou « mère ». À présent que ce titre me sied, je pouvais bien leur faire plaisir en employant cette contraction.

Ils me saluèrent une dernière fois avant de quitter la pièce. Je finissais de me coiffer et de me maquiller.

« Alors comme ça, tu doutes de mes sentiments ? »

Je m’effrayai en entendant la voix grave et meurtrière d’Aiden alors que je quittai la salle d’eau. Il s’était redressé contre les oreillers et me regardait gravement.

Je ne savais pas quoi répondre, les mots restèrent bloqués dans ma gorge. Alors, je me contentai de le fixer.

« Tu ne comptes pas répondre Freya ? Ou devrais-je dire « Majesté » ? »

– Je…

Je le regardai toujours fixement, du moins autant que ma vision embuée me le permettait. Je serrai les lèvres pour ne pas craquer. Je ne voulais pas passer pour une fille fragile qui s’inquiétait pour un rien.

« Très bien, si c’est comme ça… Je ferais mieux de quitter le palais… »

Il se leva prestement, enfila ses habits de la veille et parcourut la distance qui menait à la sortie. Je voulais lui courir après, ne serais que pour le retenir mais mon corps était mu d’une volonté propre. Il resta tétanisé sans que je puisse esquisser le moindre geste pour le retenir.

Il ouvrit en grand la porte d’un geste magistral avant de la refermer derrière lui en la claquant. Les lambris des murs tremblèrent sous la force du choc et je fixai l’espace où il se tenait il y a encore quelques secondes.

Non ! Je ne pouvais pas le laisser s’en aller ainsi, mon cœur saigna déjà de le voir si loin de moi. Je forçai mes pieds à avancer, un pas devant l’autre. Je refermai mes doigts tremblants sur la poignée et l’ouvris en grand.

Je m’apprêtai à crier son nom quand il se retourna, comme s’il m’avait attendu sur le seuil de ma chambre. Il ouvrit ses bras et je m’y jetai m’agrippant comme une forcenée. Je sentis ses biceps m’entourer et me bercer.

« Tu en as mis du temps, mon amour… Ne doute jamais plus de mon attachement pour toi… »

Je reniflai bruyamment contre son épaule, dans un geste des moins élégants du monde.

« Eh ! Pas de morve sur mon t-shirt, Princesse !

– Je ne suis plus princesse, réussis-je à articuler entre deux reniflements.

– C’est vrai, Majesté, répondit-il en s’inclinant impérieusement. D’ailleurs, il me semble que vos sujets attendent. »

Je me détachai de lui et regagnai la salle de bain pour rafraîchir mon maquillage. J’essuyai toutes traces de larmes et mes yeux eurent la gentillesse de ne pas gonfler suite à celles-ci. Puis, je fus en marche pour mes premières doléances auprès d’un peuple refondé.

Une odeur particulière flottait dans le ciel alors que mes pieds foulèrent le parterre de fleur. Elle était à la fois douce et sucrée, pleine de vie et attachante. Je réfléchissais quelques secondes avant de mettre le doigt dessus. C’était bien évidemment le parfum de l’amour qui m’enivrait.

Je promenai un œil expert autour de moi, tout était parfait. Les petites gens s’étaient surpassées pour rendre les jardins resplendissants de beauté à l’occasion de mon mariage. Ma robe était loin d’une blancheur virginale, le cadeau de Vicky et Julia était osé.

Mes dames de compagnie m’avait fait la surprise de choisir un rouge impériale presque sang qui rehaussait mes pupilles cramoisies et l’argenté de mes cheveux ondulés. La pièce principale revêtait cette couleur, tout le centre de la robe qui s’étendait de mon buste jusqu’à mes pieds empruntait la nuance de blanc connu des robes de mariées traditionnelles. Des petits joyaux brillants s’attachèrent au rouge qui captait le moindre jet de lumière.

Tout le buste était décoré d’une dentelle finement ouvragée des deux nuances de couleurs de la robe, une unique bretelle décorait ma poitrine où trônait au bout une rose découpée dans le tissu. Une rivière de diamants s’accrochait à mon cou et des rubis pendaient à mes oreilles. La robe épousait parfaitement mes formes et s’évasait à mes genoux, mettant en avant ma taille de guêpe et le galbe de mes seins.

Un bouquet de rose de Lilith tenu par le signe de Nyx, une lune pleine en pierre de lune et un diadème vinrent compléter la tenue en une touche de raffinement et d’élégance.

Aryerk vint se poster à mes côtés et je passai le bras autour du sien. Des enfants du peuple avaient jeté des pétales de fleurs par centaine pour créer le tapis de fleur que je foulai à chacun de mes pas.

Mon père me guida jusqu’à mon époux et futur Roi d’Idrias. Je promenai mon regard sur le monde qui m’entourait, on me sourit ou on me chuchota des paroles apaisantes sur mon passage. Puis, je finis par lever la tête. Devant-moi se tint une vision de rêve que je n’aurais jamais pu imaginer.

J’étais destinée avant même ma naissance à épouser le rejeton de la famille Belladone. Et me voilà prête à offrir mes vœux à un lycan alors que je portais son enfant.

Aiden avait revêtu un élégant costume sombre, un bleu presque noir où s’attardèrent les rayons de soleil. Il portait dessous une chemise blanche immaculée et ses cheveux indomptés lui retombaient sur le visage dans un joyeux fouillis.

Je vrillai mes yeux aux siens et je ne les lâchai plus. Arrivé devant l’autel improvisé, mon père posa ma main dans la sienne et il se décala pour rejoindre ma mère. Aiden prit mes mains dans les siennes et je lui fis face.

« Tu n’as jamais été aussi ravissante qu’à cet instant, murmura-t-il. »

Un oracle du temple, un loup, commença son serment sur la fidélité, mais dès lors, je n’écoutais déjà plus. J’étais bien trop occupée à me noyer dans l’océan des prunelles de mon aimé. Je sentis une bouffée de chaleur monter en moi qui teinta mes joues de pourpre.

« Aiden de Lycae, souhaitez-vous prendre pour épouse pour les siècles à venir, dans la joie comme dans le malheur, dans la santé comme dans la maladie, dans la paix comme dans la menace jusqu’à que la mort vous sépare, sa majesté Freya d’Idrias ?

– Oui, je le veux, souffla-t-il.

– Majesté Freya d’Idrias, souhaitez-vous prendre pour époux pour les siècles à venir, dans la joie comme dans le malheur, dans la santé comme dans la maladie, dans la paix comme dans la menace jusqu’à que la mort vous sépare, Aiden de Lycae ? Et faire de lui votre Roi ?

– Oui, je le veux.

– Par les pouvoirs qui me sont conférés, je vous déclare unis par les liens sacrés et uniques du mariage. Tendez vos bras. »

Aiden et moi-même firent ce que l’oracle demandait, l’oracle taillada, d’une dague en os, nos paumes. Je pris le poignet d’Aiden et nos sangs se mélangèrent. L’oracle noua ensuite un ruban autour et posa sa main sur les nôtres unies.

« Que nos déesses mères bénissent cette union et longue vie à leurs Majestés ! intima l’oracle d’un brin de voix fort. »

On posa une couronne sur la tête de mon consort alors que le peuple entama une longue litanie pour suivre les paroles de l’oracle.

« Vous pouvez embrasser le marié à présent, continua l’oracle. »

Je me penchai et je touchai timidement la bouche d’Aiden, intimidé par le monde qui nous fixait. Des applaudissements retentirent comme un seul homme et une pluie de pétales s’abattirent sur nous.

L’oracle mit le feu au ruban qui se consuma rapidement libérant nos poignets laissant la marque sur nos peaux de notre serment. Puis, on se retourna vers ceux qui représentaient à présent notre peuple et on les salua d’un mouvement timide.

Un sourire étira mes lèvres quand je vis Elizabeth au bout de l’allée avec Lou et Asha dans ses bras. Elle m’offrit son plus beau sourire tout en applaudissant. Je la saluai et lui fis signe d’approcher. Elle s’arrêta au pied de l’autel et m’offrit une ravissante révérence en signe de déférence.

« Eli…, soufflai-je. »

Elle ne prit pas le temps de se relever qu’elle se jeta dans mes bras. Je la serrai contre mon cœur. Asha fut coincée entre nous deux. Elle avait déjà trop grandit à mon goût en si peu de temps. Lou quant à elle s’agrippa aux jambes de son père. Ce fut de joyeuses retrouvailles d’une étrange famille recomposée.

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