UNE PRISON DE FORTUNE

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Quelque part à Lycae

Après m’avoir emmené de force avec lui, Cassius avait tenté de satisfaire son égo en m’enfermant dans une cage grandeur nature au milieu des siens. Les lycans me regardaient comme si j’étais une curiosité de la nature, me fixant de leurs yeux luisants. Ma robe noire était à présent maculée de boue et l’odeur de Cassius collait à ma peau. J’étais comme une bête de foire à exhiber.

J’espérais avec ardeur que Dimitri et Ezio avaient pu mettre en sécurité Elizabeth et Asha. Et j’étais tentée de prendre mon épingle, plantée dans ma coiffure défaite, pour me permettre de le demander à Lilith. Elle le saurait forcément. J’aimerais pouvoir lui demander ce qui allait m’arriver.

Je me décidais rapidement et sortis de mes cheveux emmêlés l’épingle pour me piquer le bout du doigt. Une goutte de sang s’en échappa et je priai fiévreusement ma déesse.

Une brève apparition plus vaporeuse que d’habitude apparut à mes pieds. Elle tendit les bras vers moi et je posai mes mains sur les siennes, métaphysiques.

« Lilith, qu’est-il arrivé à Elizabeth et Asha, à tous ? questionnai-je rapidement.

– Mon enfant ne t’inquiète pas, ils vont tous bien. »

Je poussai un long soupir de soulagement. Je levai mon visage sur celui de la déesse. Ses yeux étaient voilés de tristesse.

« Que vais-je devenir ? demandai-je hésitante.

– Malheureusement mon enfant, même une déesse ne peut voir l’avenir. Ton parcours peut être couvert de lauriers comme de malheurs, à toi de trouver les réponses à tes questions en faisant tes propres choix. Chacun de tes choix t’emmènera vers une nouvelle vérité. À toi d’en démêler le vrai du faux selon tes doutes et tes croyances. Crée toi ton propre avenir, mon enfant… Mais souviens-toi d’une chose : ceci n’est pas mon territoire. Je ne peux donc rien pour toi…

Elle disparut dans un écran de fumée, me laissant encore plus perplexe et perdue qu’avant.

Je me sentais seule et j’avais horriblement froid. Ce qui techniquement n’était pas possible, un vampire ne ressentait pas sa morsure. Mais mon corps était étrangement entouré d’une froideur que je ne me connaissais point.

La tristesse entoura mes traits, marquant ma peau de leurs stigmates. Mes yeux s’embuèrent de larmes et je ne savais plus quoi faire pour construire mon avenir. Cette avenir que j’étais censé saisir de mes mains pâles, me paraissait bien loin en cet instant.

Je me protégeais de mes bras en entourant mon corps. Je me balançais d’avant en arrière, cherchant désespérément à étouffer mes pleurs grandissants.

Je me focalisais sur l’épingle qui était restée dans mes mains, sa lame s’enfonçait dans ma paume créant des sillons de sang. J’entamais une longue litanie pour essayer de démêler le vrai du faux.

Sentant mes larmes se tarirent, mes pensées furent englouties par un flot de voix qui semblait s’entrechoquer violemment. Stoppant net mon balancement, je me concentrais sur ces voix. Leur conversation m’arriva par brides. Je compris rapidement qu’il était question de moi et de mon sort parmi les lycans.

« Elle doit mourir pour m’avoir humilié ! » cria ainsi Cassius que j’aurais reconnu même en enfer. Il souhaitait donc à présent ma mort seulement pour avoir fait entrer une humaine dans ma vie.

« Oser choisir un humain vil sans cerveau à ma place, c’est la pire des offenses qu’on puisse me faire ! ». Donc en plus de me détester, il voulait la mort d’Elizabeth. Heureusement, il n’avait pas connaissance de sa destination.

Je détournai mon esprit de cette maison en bois, j’en avais suffisamment entendue pour savoir que ma vie ne tenait plus qu’à un fil. Mais, des voix contre m’empêchaient de fermer complètement mon esprit. Pourquoi des lycans chercheraient à empêcher mon exécution ? Pensai-je. Cela n’avait aucun sens.

« On ne peut pas la tuer ! Ou le malheur s’abattrait sur nous ! ». À cette intervention, Cassius grogna dangereusement de mécontentement. Mais un nouveau parlant vint soutenir cette voix : « elle a raison, leur déesse Lilith pourrait nous punir pour avoir tué sa prophétesse. Es-tu prêt à sacrifier chacun d’entre nous juste pour ta petite vengeance minable ? ». J’avais l’impression de reconnaitre cette voix mais je ne pouvais mettre ni de nom ni de visage sur cette dernière.

« Je te conseille de t’écraser Aiden, tu n’as même pas été fichu de retrouver la princesse quand elle est partie en exil alors qu’on dit de toi que tu es le meilleur pisteur ! ». Par la suite, il y eut des poings abattus sur la table et des engueulades que je finis par cesser de suivre.

Les ténèbres de la fin de journée eurent raison de moi et je finis par m’endormir épuisée par les pires évènements de ma vie, sur un sol terne et boueux.

Des bruits tapés contre ma prison de fortune me réveillèrent en sursaut. Je me mis instinctivement sur mes pieds en position de défense.

« Excusez-moi princesse, je ne voulais pas vous réveiller. J’ai trébuché et heurté les barreaux.

– Qui êtes-vous ? sifflai-je.

– Je m’appelle Aiden, j’accompagnais mon père pendant la négociation avec Idrias.

– Si je me rappelle bien, vous êtes le plus jeune fils de l'Alpha ? »

Il me le confirma d’un sourire triste.

« Vous voulez m’humilier plus que votre frère ou cherchez-vous autre chose ? demandai-je sceptique.

– Suivez-moi, vous serez logé non loin du cœur du village… Chez moi. »

Je restais éberluée par cette réponse.

Aiden se contenta de reculer pour me laisser passer par la petite porte de la prison. Il fit ensuite signe à des hommes armés d’outils. Ils s’avancèrent vers les grilles de la prison qu'ils démontèrent. Mon soupçon s’était avérée, je n’étais qu’une bête de foire pour Cassius. Je n’aurais jamais supporté de vivre avec un homme comme lui, même sans parler de son espèce.

Son jeune frère, Aiden, m’accompagna jusqu’à un chalet en bois verni et me fit entrer. L’intérieur oscillait entre les meubles en bois, des décorations chaleureuses, de la fourrure, des linges douillets et des tons naturels.

Malgré la rudesse de l’endroit, on s’y sentait bien. Du rez-de-chaussée on pouvait voir un balcon qui faisait le tour de la pièce à vivre. Plusieurs portes à l’étage s’ouvrait sur ce balcon qui contenait une bibliothèque bien fournit.

« C’est un bien bel endroit pour une simple prisonnière. On penserait que vous avez perdu un pari avec votre frère et ainsi que vous n’avez pas eu le choix de ma présence ici.

– On pourrait dire cela en effet.

– Eh bien, bonne chance. Je peux me montrer très inconvenante quand je le souhaite.

– Je pense que je devrais survivre, répondit-il avec un charmant sourire contrairement à son frère. Je vais vous montrer votre chambre. »

Il me conduisit donc à l’étage et me fis entrer dans une chambre simplement meublée d’un lit, d’une commode et d’un bureau. Il m’indiqua également la salle de bain au même niveau.

« Je vais vous laisser, il me semble qu’une douche vous fera le plus grand bien.

– Le plus grand bien, ce serait que je retrouve ma fille et ma femme, enfin ma vie quoi ! répondis-je sarcastique.

– Je vous laisserais des affaires devant la porte de la salle de bain, des serviettes vous attendent déjà. »

Il ignora royalement ma pique. Sans plus tarder, je me retournais et m’enfermais dans la salle d’eau où j’ouvris le robinet de la douche à fond diffusant une épaisse vapeur qui s’accrochait au miroir du lieu.

Le chalet était plongé dans le silence à ma sortie de la salle de bain. J’étais empêtrée dans des vêtements trop grands. Je portais un boxer sous un jean deux tailles au-dessus de la mienne avec un large t-shirt.

Les lumières étaient éteintes, ce qui ne m’empêchait pas de voir clairement mon chemin dans la pénombre de l’habitation. Je me dirigeai vers le coin cuisine et ouvrit le frigo. Geste qui pouvait paraitre bizarre pour un vampire, mais j’avais espéré que du sang en poche m’y attendait.

Si je continuais à être privé de sang, je n’irais pas bien loin dans une tentative de fuite. Le frigo était principalement remplit de viande et de quelques légumes. Plusieurs bouteilles de soda entamées trainaient çà et là. En somme le réfrigérateur était rempli de pleins de choses que je ne pouvais digérer à cause de ma constitution.

Je refermai brutalement la porte et m’installai sur le plan de travail pour réfléchir. Le froid du granit de la cuisine se diffusa sur mes cuisses à travers le fin tissu du jeans. Je posais mon menton dans mes mains et m’imaginais planter mes canines dans une veine bien juteuse d’un des lycans tapis dans ce village.

Je pouvais toujours ouvrir la porte d’entrée en grand et sauter sur le premier venu. Mais je doutais qu’on me laisserait encore la vie sauve après cela. Bientôt, plus que ma faim, mes pensées se dirigèrent sur ma famille. J’imaginais Asha, le sein de sa mère à la bouche, en train de téter et de mordiller. Elizabeth perdu entre les rayons de la bibliothèque de l’ambassade. J’imaginais mes parents en pleine crise d’hystérie qui enquiquinaient les gardes chargés de me retrouver.

Perdu dans mes pensées, je ne sentis le loup que quand il posa une main sur mon épaule. Je sursautai violemment et m’apprêtai à lever la main sur lui quand je le reconnus. C’était Aiden qui se tenait fièrement devant moi.

« Je n’aurais jamais cru que je pourrais un jour te surprendre comme ça, rigola-t-il tout seul.

– Et cela t’amuse ?

– Oui beaucoup, tu es toujours sur tes gardes généralement même pendant ton sommeil. Mais parlons d’autres choses, je t’ai ramené ceci. »

Il m’indiqua de la tête une bouteille qu’il tenait à la main remplit d’un liquide rougeâtre et épais. Il en versa le contenu dans un verre à pied en cristal avant de me le tendre.

« Tu as trait qui pour extraire ce sang ? demandai-je hilare de ma propre blague.

– A vrai dire… Moi, sourit-il de m’avoir déstabilisé par sa réponse.

– Pardon ?

– Je ne te mens pas. Bizarrement personne n’a voulu devenir ton casse-croûte alors je me suis porté volontaire. Tu risques d’être affaiblie après combien de jours de diète ? questionna-t-il sérieusement par la suite.

– En principe une semaine mais cela varie selon la quantité de sang avalée au préalable. Mais pourquoi t’en soucies-tu ? Ce ne serait pas plus simple de me laisser agoniser ?

– Si, mais mon père veut te garder en vie pour pouvoir faire pression contre les tiens.

– Donc vous gardez simplement vivant, un otage.

– Voilà, tu as tout compris.

– Dans ce cas, repris-je tout aussi sérieusement, je préfère un repas frais ! »

Je lui sautai à la gorge immédiatement après avoir prononcé cette phrase. Sous la vitesse et mon poids, nous basculâmes en arrière et heurtâmes le sol dur de la cuisine. Je plantai irrémédiablement mes crocs dans la fine peau de son cou et en suçais le sang qui s’en écoulait.

C’était une explosion de saveurs qui s’abattit dans ma bouche. Je n’avais encore jamais gouté pareil sang. Un gout fruité s’ajouta au gout généralement sucré du sang. Même celui si particulier d’Elizabeth, n’égalait pas celui de ce lycan.

Je sentis poindre contre mon bas ventre une érection proéminente alors que je continuais à avaler du sang par gorgées. Il remua légèrement pour libérer un bras de sous mon corps et vint faire glisser ses ongles le long de ma colonne vertébrale.

Un délicieux frisson parcourut mon corps et je mouillais déjà sous l’effet aphrodisiaque de son sang. Je remuai contre son membre au mépris de nos habits. Il en fit de même et un besoin impérieux nous éprit tout d’eux.

Au bout de quelques minutes, je fus complétement rassasiée mais le besoin de satisfaction n’était pas complet. J’allais me laisser aller à ses caresses lorsque je me souvins de qui c’était et de où j’étais.

Je m’éloignai de lui en poussant sur mes mains posées sur son torse. Je me relevai en un éclair et me réfugiai derrière le comptoir de la cuisine.

« Je… Je suis désolée. Ça n’arrivera plus. Je me contenterais de la bouteille, dis-je en l’attrapant et en partant aussi vite que possible. »

« Attend ! C’était divin… », fut tout ce que j’entendis de sa réponse.

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