DES JOURS HEUREUX

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Idrias, pays des vampires

Jour 1

Les vapeurs fumantes m'entouraient offrant un cadre calme et apaisant. Une senteur de fleurs sauvages et de miel s'élevait de l'eau du bain. La finesse du revêtement de la baignoire épousait à merveille la forme de mon corps. Et la lumière diffuse des bougies parfumées placées autour de la baignoire offrait une vision de romance parfaite. Un bac à glaçons gardait une bouteille de champagne au frais.

Tout cela cadrait parfaitement avec le moment.

L'eau s'agita légèrement lorsqu’Elizabeth bougea pour me regarder dans les yeux, une coupe de champagne à la main.

« Ton verre est bientôt aussi vide que cette baignoire si tu ne cesses de gigoter, lui fis-je remarquer.

– C'est exact, mon amour ! Aurais-tu la gentillesse de me resservir ? me demanda-t-elle, tout sourire.

– Mais bien entendu. »

J'attrapai d'un geste ample la bouteille et lui remplis le verre à moitié. Puis, l'agrippant par le bassin, je la retournai et elle en profita pour s'appuyer contre mon buste. Cela faisait deux jours qu'avait eu lieu la naissance de notre fille.

Je n'avais pas encore présenter au peuple ma fille, nous attendions la cérémonie officielle pour le faire. Mais, Elizabeth avait émis le souhait et le besoin de quelques jours de tranquillité avant l'agitation de la préparation de la dite cérémonie qui devait l'introniser dans la famille royale.

Elle en avait profité pour passer des moments privilégiés avec Asha et juste nous trois, en famille. Le couple régnant en était déjà gaga et lui offrait déjà des cadeaux chaque jour.

« Il va falloir que j'éloigne Asha de mes parents où ils vont nous en faire une princesse pourrie gâtée.

– Voyons Freya, ils sont juste heureux d'avoir du sang neuf dans la maisonnée. Laisse-les donc en profiter au maximum, me réprimanda doucement Eli. Nous pourrons bien nous en soucier plus tard.

– Comme tu veux, mais tu en prendras la responsabilité quand Asha fera des crises pour avoir des cadeaux !

– Mais oui, mais oui, répondit-elle simplement à ma remarque. »

On se laissa aller dans la tiédeur profitant de notre moment de détente. Tout le palais avait reçu l'ordre de nous laisser en paix pour trois jours. Je dédaignais même mes entrainements et mes devoirs royaux.

C'était plus qu'agréable de n'être tenue à rien, juste au bonheur.

Je sentis Elizabeth frissonner contre moi, alors que l'eau se rafraichissait et que le champagne était au bout. Je lui indiquais de se relever et je sortis la première pour chercher des serviettes.

Je l'entourai dans une épaisse et moelleuse serviette avant de faire de même avec moi. Ensuite, je lui tendis une main pour l'aider à sortir. La déchirure de l'accouchement la faisait encore souffrir alors je prenais grand soin à ce qu'elle ne fasse pas trop d'effort.

Alors que je la fis s'assoir sur un banc recouvert de coussin moelleux, elle me posa une question des plus déconcertante :

« Puisque je n'ai plus besoin de ton sang pour survivre à la grossesse, ferons nous toujours l'amour le soir quand je serais complètement remise de l'accouchement ?

– Pourquoi cette soudaine question, Eli ?

– Je me la pose depuis quelques jours déjà.

– Tu as peur que quelque chose change entre nous ?

– Oui... souffla-t-elle timidement.

– Tu sais Eli, ce n'est pas parce que nous ne partageons pas notre sang que cela doit changer entre nous. D'autant plus, repris-je, que tu n'es maintenant plus tenue par mon obligation de faire attention à toi.

– Comment ça ?

– Je t'ai demandé de ne pas subvenir à mon besoin de sang car le fœtus t'en prenait déjà assez. Ce n'est plus le cas à présent.

– Tu veux dire que tu arrêteras d'en prendre à Dimitri ? demanda-t-elle, espérant un oui.

– Si c'est ce que tu veux, je lui ferais parvenir ton ordre, oui.

– Oui je le veux ! dit-elle sans réfléchir une seconde.

– D'accord, rigolai-je de sa fugacité. »

Elle me sauta dans les bras, heureuse comme jamais.

Après cette discussion, je l'aidais à s'habiller et à se préparer puis nous partîmes en direction des jardins dans des robes légères et printanières.

Une douce chaleur recouvrait le jardin ensoleillé en cette fin de matinée. Nous avancions, à l'ombre des arbres, main dans la main sur le chemin dessiné.

Des arbustes et des fleurs parfaitement taillés décoraient les avenues. Les oiseaux gazouillaient et tournoyaient au-dessus de nos têtes. Des jets d'eau colorés jaillissaient des fontaines disséminées à chaque tournant.

J'emmenai Elizabeth au plus profond du jardin où le calme et la tranquillité dont elle avait tant besoin se trouvait.

Nous nous arrêtâmes dans une alcôve entourée de colonne en marbre blanc où des glycines y grimpaient sans se soucier de rien. Leurs fleurs pointaient vers nous. Une pelouse parfaitement taillée s'étendait sous mes pieds et un voile fin, tiré entre les colonnes, étirait une ombre idéale par-dessus nos têtes.

Une couverture à carreau rouge avait été tirée et des petits mets froids attendaient déjà dessus. Une femme se tenait devant nous immobile, avec un enfant dans les bras. Elizabeth se tourna vers moi, intriguée.

« Pourquoi Asha est là avec sa nourrice ?

– Je me suis dit qu'un petit pique-nique en famille te ferait plaisir. La nourrice ne restera pas. »

Elle ne me répondit pas, elle se contenta d'avancer vers sa fille et de la prendre dans ses bras. Elle congédia d'un remerciement la nourrice qui s'éloignait déjà quand je m'approchais d'elles.

J'embrassais Eli sur la tempe avant de placer mon index entre la petite main potelée d'Asha. Elle me la serra fort avant d'essayer de la porter à sa bouche.

« N'est-elle pas trop mignonne ? me questionna Elizabeth.

– Forcément, puisqu'elle me ressemble, lui répondis-je avec le plus grand sérieux du monde. »

Eli me donna une tape sur l'épaule avant de faire une mine boudeuse, la tête tournée sur le côté et lèvres pincées.

« Je rigole, ma chère ! Tu lui as donné une petite valeur ajoutée malgré tout.

– Tu es méchante ! C'est moi qui l'ai sortie de mon utérus !

– Mais bien sûr qu'elle est jolie, Eli. C'est la plus mignonne de tous, comme toi. »

Je l'embrassai rapidement sur les lèvres pour l'empêcher de protester.

« Allons manger ! »

Je posai une main sur ses reins pour la diriger vers la couverture. Je lui pris Asha des bras pour la laisser s'installer confortablement. Je m'installais ensuite en face d'elle, portant la petite sur un bras.

Elizabeth n'attendit pas pour avaler les plats concoctés par nos cuisiniers. Elle les dévora tous littéralement, les mains dansant d'un plat à l'autre.

Je me contentais de l'admirer, berçant Asha en chantonnant une berceuse idrienne. Elizabeth adorait m'écouter la chanter et parfois s'endormait même à la place de notre fille.

Repue, une main sur l'estomac, elle s'allongea et m'écouta le visage rayonnant. Elle offrit son visage à la légère brise. Asha babilla et agita ses bras potelés avant de doucement fermer les paupières au rythme doux du bercement et de la mélodie.

« Je crois que je ne me lasserais jamais de t'écouter la chanter...

– J'espère, mais je n'ai pas encore mangé ! »

Je plaçai Asha contre le flanc d'Eli et la recouvrit de son plaid doux. Puis je rampai jusqu'à Eli tel un prédateur.

J'entendis les battements de son cœur s'accélérer et son pouls se faire plus saccadé. Je me plaçai du côté inoccupé par la petite, et me mis sur mon côté droit, un coude soutenant ma tête.

« Tu n'as pas à avoir peur… »

Je me penchai sur elle, écartant les cheveux de sa gorge. Je léchai la zone de morsure, produisant des analgésiques dans ma salive pour annihiler la douleur. Eli gémit sous ma caresse. Puis, je perçai la fine peau de son cou de me crocs et je laissai s'écouler l'hémoglobine dans ma bouche.

Je me collai instinctivement à elle, prise de désir alors que j'avalais goulûment son sang délicieusement sucré. Je fis glisser mes mains sur son corps et empoignai sa poitrine. Je malaxai doucement ses seins lui arrachant de petits cris de plaisir.

Je m'écartai doucement d'elle après avoir recueilli le sang suffisant pour me nourrir. Je léchai à nouveau la zone, plus précisément les deux petits points rouges qui se refermèrent rapidement.

Je pris le temps de savourer le reste du sang resté sur mes lèvres, mais je n'eus pas le temps que déjà Eli m'attira à elle et m'embrassa à pleine bouche.

Elle s'écarta de moi essoufflée et désireuse.

« Tant que tu n'es pas refermée, pas de sexe ma belle ! la rabrouai-je.

– C'est de ta faute, à m'exciter comme tu le fais.

– C'est la contrepartie de la morsure, ma belle. Après si tu veux je peux toujours te faire ressentir de la douleur à te tordre les boyaux à la place, lui dis-je un grand sourire étirant mes lèvres.

– Non, ça ira, je préfère le plaisir. »

Je lui fis un clin d'œil et je m'installais couchée contre des oreillers, attirant Eli et Asha contre moi. Puis je sortis un livre du panier de repas et en fis la lecture à Elizabeth.

J'avais commencé la lecture la nuit quand Elizabeth ne trouvait pas le sommeil souffrant des douleurs post natales. Il paraissait que ma voix la calmait et lui permettait de glisser vers le sommeil malgré les tiraillements douloureux.

Depuis, j'avais continué remplaçant le rituel du sang de tous les soirs par un roman choisi par ses soins dans ma bibliothèque privée.

Un voile sombre menaçait les armées qui approchaient furtivement, chacun d'un côté. Une douce excitation de la bataille pulsait entre les rangs de soldats puissamment armées. Chacun d'eux étaient là pour protéger quelque chose.

Elizabeth se cala plus contre moi et laissa ses paupières se fermer au début du récit.

La bannière de la déesse mère flottait au vent, bénissant les combattants pour leur noble sacrifice. Au loin une corne indiqua l'arrivée de troupes ennemies, sonnant le début des combats. Les deux armées se jetèrent l'une sur l'autre, toutes armes au poing. Les deux camps se mélangèrent rapidement ne permettant plus aucune distinction entre les deux. Des soldats par centaines tombèrent les uns après les autres, laissant des familles endeuillées. Le temps semblait suspendu où l'issue de la bataille était incertaine. On voyait les cadavres s'amonceler et les rapaces tournoyer haut dans le ciel, annonçant un festin.

La respiration d'Eli s'était adoucie. Un souffle régulier et lent s'échappait de ses lèvres entrouvertes. Elle avait fini par sombrer dans le sommeil, rassasiée et heureuse.

Je pris une position confortable et attrapai Asha pour la caler entre nous.

Puis, je laissais l'obscurité m'absorber également.

« J'ai une surprise pour toi, Eli !

– Laquelle ? demanda-t-elle excitée.

– Tu verras quand on y sera, lui répondis-je en lui faisant un clin d'œil. »

Je lui attrapai la main et la tirai jusqu'à l'extérieur du palais.

Nous traversâmes les longs couloirs du deuxième étage où se trouvaient les appartements royaux et on bifurquait à l'angle d'un couloir pour prendre le grand escalier. On croisa dans l'escalier quelques membres de la cours qui logeaient au premier. Au bas des marches, le lustre du hall d'entrée nous accueillait sous son scintillement.

Un garde royal s'empressa d'ouvrir le battant de la grande porte à notre approche, au pas de course.

Devant nous, l'eau scintillante jaillissait de la fontaine arrondie que les voitures contournaient pour déposer leurs passagers. Elle marquait l'entrée tout comme ses pavés marquaient le sol. Sur les côtés de l'avenue se tenait des bosquets bien entretenus, qui continuait également tout autour de la bâtisse formant un U.

Les écuries se trouvaient non loin des grilles en fer forgé et en or surmonté de piques pour éviter toute intrusion. Je tirai Eli jusqu’aux écuries où les cheveux nous accueillaient dans de joyeux hennissements.

« Viens, ton cadeau est par ici. »

On s'approcha d'un box dont la porte était restée fermée. Au fond, un cheval apeuré était prostré contre le mur. La botte de foin que les palefreniers lui avaient apporté n'était pas entamer.

« Il me semble que cet étalon aurait bien besoin de ton calme. »

Elizabeth s'approcha de la stabule et claqua de la langue plusieurs fois pour attirer l'attention de la bête.

« Il a la même robe gris-souris que mon cheval resté en Angleterre. »

Le cheval remua la tête et huma l'air. D'un coup, les naseaux dilatés, il avança vers Elizabeth. Elle plaqua sa main devant sa bouche pour retenir un cri. Quand l'étalon sortit sa tête, elle passa des bras autour de son encolure et lui murmura des mots doux.

Je m'approchai d'eux et l'étalon hennit comme pour me remercier de lui avoir ramené une vieille amie. Eli se retourna vers moi, le visage dégoulinant de larmes.

« Que fait Cobalt ici ? renifla-t-elle.

– Je me suis dit que cela te ferait plaisir de l'avoir parmi nous. Après tout, Idrias est ton foyer maintenant. »

Elle se jeta dans mes bras, heureuse comme jamais. Je lui proposais de faire un tour à cheval pour fêter l'occasion. Elle accepta de concert et sauta presque à cheval dès qu'il fut prêt. Je grimpai sur le dos de Shinda et je nous dirigeai en lisière de forêt qui bordait tout le domaine.

« Lycae et Idrias se partage le territoire qui s'étend de Grenoble en passant au-dessus de Monaco, en France, jusqu'à Genova et qui remonte à Torino en Italie. Le petit territoire alimente le conflit ancestral car les lycans aimeraient un espace plus grand pour ne pas être confinés qu'à une forêt. A l'origine du conflit ancestral, c'est un désaccord né entre Lilith et Nyx, la déesse mère des lycans, racontais-je à Eli.

– Donc c'est comme ça qu'a commencé la guerre ?

– Oui d'une certaine manière. Les déesses Lilith et Nyx sont sœurs et se sont consacrées à protéger ce territoire pour nous permettre une vie paisible. Mais il y a eu un conflit sur le partage des terres. C'est ce qui a provoqué la mésalliance entre nos deux espèces et sur la cohabitation avec l'humanité.

– Vous étiez en paix au début donc. Vous vous entendiez bien ?

– Je suppose, c'était y a des siècles. Mais comme y avait la paix, c'est qu'on devait s'entendre.

– Alors pourquoi vous ne pourriez pas mettre vos rancunes de côté et œuvrer pour la paix ?

– Je pense que c'est plus compliqué que ça en a l'air. On en a tous marre de se battre mais la haine est tellement ancrée dans nos cœurs que pour envisager une paix durable, il nous faudrait bien des siècles supplémentaires.

– Si on ne commence pas un jour, mon amour, on ne saura jamais si elle possible.

– Tu as raison, Eli. Tu es très sage pour ton âge, terminai-je en l'embrassant. »

Nous étions arrivées au bord du fleuve qui bordait le territoire et le traversait de part en part.

« Comment a-t-il été baptisé ?

– Le fleuve « Liberté » car il circule à son bon vouloir creusant la roche et la terre pour se frayer un passage.

– C'est joliment trouvé.

– Je trouve aussi. »

On continua notre balade à cheval l'une à côté de l'autre, nos doigts entrelacés, observant les merveilles que nous offrait la nature. Car aucune merveille humaine ne pouvait surpasser le travail de dame Nature qui œuvrait pour l'équilibre des forces.

Jour 2

Je tirai Elizabeth du lit vers les coups de dix heures du matin, sous les rayons du soleil qui éclairait la peau laiteuse de son visage. Elle grommela des excuses pour se rendormir et se retourna me tournant le dos.

Prise d'aucune pitié, je parcourus ses flancs de mes doigts habiles. Elle sursauta et se tortilla pour essayer de se soustraire à mes chatouilles insatiables. Ses rires remplirent la pièce comme autant de petits éclats de bonheur infimes et fugaces.

Elle finit par se rendre, incapable de reprendre son souffle correctement. Je retirai alors mes mains et les levai bien haut en signe de réédition. Elle se releva dans le lit et pris cinq minutes pour retrouver son souffle et essuyer ses yeux humides de larmes de rires.

Elle se leva et disparut dans la salle de bain accompagnée d'une domestique. Elle y passa un quart d'heure à se pomponner pour ressortir vêtue d'une robe volant aux couleurs du printemps. La robe marquait sa taille et faisait ressortir agréablement ses formes voluptueuses.

« Tu ne vas pas sortir comme ça où l'on va te voler à moi ! m'exclamai-je.

– C'est ce qu'on va voir, me répondit-elle avec une moue aguicheuse.

– Va te changer ! ordonnai-je.

– Certainement pas ! »

Elle me défia du regard avant de remonter ses jupons et de prendre ses jambes à son cou en s'exclamant :

« Viens m'attraper si tu peux ! »

Autant dire que c'était déjà perdu d'avance avec ma vitesse surnaturelle, mais aujourd'hui je n'avais pas envie de tricher. Je m'élançai quelques minutes après elle et la suivis dans les couloirs. Elle courut relativement vite mue par son envie de gagner.

Alors que j'étais à deux doigts de l'attraper, elle feinta et se déroba sous mes doigts. Elle prit la direction opposée d'un coup. Je dus freiner d'urgence et opérer un demi-tour avant de recommencer ma course.

Je l'attrapais par la taille alors qu'elle poussait la porte de la chambre d'Asha.

« Je t'ai eu !

– Mais tu as perdu, je suis arrivée à notre fille avant toi !

– Je t'ai laissé gagner voilà tout, lui dis-je détachée.

– Oh, ne boude pas chérie ! Je t'aime quand-même, me taquina-t-elle à son tour. »

On se racla la gorge derrière nous. Quand on se retourna, la nourrice tenait la petite prête et habillée légèrement au vu de la chaleur printanière de l'extérieur.

« Excusez-nous de vous avoir fait attendre. Merci de vous être occupé de la petite Marguerite, la remerciai-je.

– C'est un plaisir, votre Altesse. C'est un amour de bébé. »

Je lui pris Asha des bras et Eli vint s'accrocher à moi puis on se dirigea en famille dans la cour avant du palais.

Idrias, pays des vampires, en ville.

Bébé en poussette et mamans parées, nous déambulions dans les rues d'Idrias au-delà des grilles du château pour se mêler à la foule et aux bonnes odeurs du marché.

« C'est magnifique ! ça bourdonne de vie, s'exclama Elizabeth.

– N'est-ce-pas ? Je me suis dit que tu aimerais découvrir un peu la vie ici.

– C'est juste parfait. »

Je lui pris la main et l'attira à moi pour l'embrasser passionnément. Je m'éloignais quand son souffle se fit plus saccadé. Ce n'était ni le lieu ni le moment pour que le désir monte entre nos corps.

« Allez viens ! Je suis sûre que tu n'as rien à te mettre pour le bal de ce soir.

– Oh oui ! J'avais complétement oublié le bal royal ! Vite une robe ! »

Le désir s'effaça rapidement de son regard pour laisser place à une excitation toute nouvelle. Son visage excité reflétait son jeune âge. Je la laissai nous diriger dans les boutiques de créateurs de la ville. Je poussai la poussette et veillai sur Asha alors qu'Elizabeth parcourait les rangées d'habits.

Une voix aigüe interrompit ses recherches.

« Milady, cherchez-vous quelque chose de précis ? demanda la vendeuse dhampir en se souvenant de mon épouse. »

Elle s'exprima en Idrien. Mais Elizabeth avait suffisamment bien progressé pour comprendre et lui répondre dans la langue nationale.

« Oui, je recherche une robe de bal.

– Oh parfait. Venez que je prenne vos mesures ! dites-moi ce que vous voulez et on vous la fera sur mesure.

– Mais c'est pour ce soir, Madame.

– Aucun problème. Ne vous en faites pas, je vous la ferai livrer directement au château.

– Fais-lui confiance, Eli. Mme. Victoria est la meilleure styliste et créatrice de mode. Elle exporte ses créations au-delà de nos frontières.

– Oh, votre Altesse, je ne vous ai pas entendu. Vous souhaitez également une robe ?

– Non, non, occupez-vous simplement de Milady. Je vais attendre avec la petite, Eli. Amuse-toi bien, lui souris-je.

– Oh mais c'est la petite nouvellement née ! s'extasia Mme. Victoria.

– Oui, mais pas un mot aux autres ! Elle vous sera bientôt présentée officiellement, lui répondis-je.

– Promis, Altesse. Par-là, Milady. »

La robe commandée, j'entrainai Eli parmi le marché qui exposait aux habitants les productions du moment. On sentait les bonnes odeurs de fruits et de légumes, et celle plus odorantes du poisson frais. L'odeur succulente de la charcuterie fit gronder le ventre d'Elizabeth.

On acheta de quoi lui faire un bon pique-nique avant de s'installer à l'ombre d'un arbre dans le centre entouré d'enfants qui courraient et dansaient.

Elle se cala contre l'écorce de l'arbre et prit dans ses bras Asha puis la bloqua contre sa poitrine. Elle retira l'étoffe qui cacha un de ses seins et Asha le prit goulûment. Elle but avec appétit avant de faire son rot et de finir par s'endormir.

Je pris notre princesse contre mon cœur et la berça doucement pour laisser mon épouse se régaler de son propre festin. On s'était fait aborder par énormément de villageois, si bien que la naissance d'Asha n'était plus un secret du tout. Ils s'étaient tous empressés d'approcher pour avoir la chance d'admirer la petite chérie et de nous féliciter.

« Tu devrais avoir faim également, non ?

– Ne t'inquiète pas pour moi, une fois par semaine me suffit pour survivre.

– Mais je ne veux pas que te ménages pour moi. Je suis sûre que Dimitri te laissait prendre son sang plus souvent.

– Tu veux vraiment le savoir, lui demandai-je étonnée.

– Non, mais je veux te donner le mien maintenant !

– Très bien, soupirai-je. »

Elle posa le sandwich qu'elle tenait et dégagea l'accès à son cou. Je me penchai sur sa gorge et léchai la zone avant de mordre.

Elle soupira d'aise et se laissa aller contre mon buste. Je pris soin qu'Asha ne soit pas écrasée, et lui pris le minimum, puis je refermai la plaie.

« Merci, chérie, lui murmurai-je avant de capturer ses lèvres dans un baiser vorace. »

Je m'écartai d'elle, des mères et leurs enfants nous observaient fasciner. Elizabeth rougit et baissa la tête, gênée, je m'excusai auprès de mes sujets qui nous quittèrent avec un sourire aux lèvres.

Un brouhaha de conversation et le claquement de talons et de talonnettes nous parvenait depuis le grand hall du palais. Une musique diffuse engloba le tout, pendant qu'Elizabeth et moi-même nous finissions de nous préparer.

Eli se changeait à l'écart dans la salle de bain pour me faire une surprise. Je n’avais reçu aucune information sur la robe commandée plus tôt.

Quant à moi, je revêtis une robe bustier d'un vert forêt élégant, serrée à la taille et aux genoux. Une cape me tombait des épaules et tournoyait autour de moi. De somptueuses améthystes complétaient le tout et ma tête était ornée d'une couronne en argent sertie également d'améthystes.

Elizabeth sortit de la salle de bain vêtu d'une robe taille empire bleu nuit constellée de paillettes qui lui donnait un côté sombre et mystérieux. Elle avait sûrement souhaité cacher le reste de son ventre de maternité que je trouvais charmant pour ma part. Elle portait ses cheveux flamboyants libres décorés d'un bijou de tête.

« Tu es magnifique, Eli, la complimentai-je. »

Elle rougit et me répondit :

« Tu l'es bien plus que moi ! »

Je lui tendis la main qu'elle prit joyeusement et je l'emmenai à travers les murs du palais.

« Où va-t-on ? Nous ne cherchons pas Asha ?

– Si mais d'abord je dois te montrer cela. »

Je fis un vague geste de la main après avoir ouverte une porte dissimulée dans le mur sous des peintures de guerres qui représentait notre lutte contre les lycans. Elizabeth parut tout de suite excitée à l'idée de découvrir un secret du château.

« Ceci est une salle secrète qui mène à des boyaux de passages secrets. Si jamais tu devais un jour te mettre à l'abri, ce passage serait parfait. Il est très bien dissimulé et peu connu. Il te suffit pour cela d'appuyer sur le bouton dans la nuque de la statue près de l'entrée. »

Le passage se situait au bout du couloir de notre étage, et facile d'accès pour peu qu'on connaisse son existence. On débouchait sur une salle en pierre décorée de banc en bois et de statues en marbre. Plusieurs ouvertures menaient sur des passages aux débouchés diverses. Certains menaient aux cuisines du rez-de-chaussée, d'autres dans les jardins ou encore dans la cour avant directement.

Elizabeth en fit le tour rapidement puis nous nous dirigions vers la chambre d'Asha. Sa nourrice l'avait revêtue d'une robe rosée et froufroutante. Je la portai sur un bras et offrit mon bras gauche à ma chère et tendre.

On voyait du haut du grand escalier les invités entrés dans la salle de bal qui prenait une grande partie du rez-de-chaussée. Une fois tout le monde à l’intérieur, nous gagnâmes le bas des marches où leurs Majestés nous rejoignirent. On se tenait tous droits, Orisha assise à mes pieds.

« Vous êtes toutes trois magnifiques, s'exclama joyeusement la Reine.

– Vous souhaitez faire votre entrée avec la petite, demandai-je. »

Mon père acquiesça avec enthousiasme et me l'arracha presque. Puis, le héraut tapa de sa canne sur le parquet et annonça le couple royal.

« Leurs Majestés Aryerk le Second et Lunafreya Lilith II, et la princesse Asha ! »

Mes parents soignèrent une dernière fois leur tenue et firent leur entrée après que les portes se soient ouvertes. Nous suivîmes peu de temps après.

« Son Altesse la princesse Freya et Milady Elizabeth Frye ! »

Elizabeth me broya le bras sous le stress. Je lui tapotai la main pour la rassurer et lui fis un sourire. On entra sous un flot de sourire et de respect.

Je l'entrainai jusqu'aux trônes placés en notre honneur sur le côté de l'estrade royale. Les membres de la famille Belladone – dont mon futur roi – se trouvaient en face de nous. Orisha se coucha devant nos trônes et posa sa tête sur ses pattes velues.

Les invités se relevèrent de leur révérence après un signe de la main du Roi. Les conversations reprirent alors, les rires et la boisson avec.

Un oracle du temple de Lilith avança vers nous et nous félicita pour la naissance de notre fille. On le remercia chaleureusement et ce fut un défilé de remerciements qu'on dut exprimer aux invités se succédant pour nous féliciter.

« Je propose que ma fille ouvre le bal avec Milady pour fêter la naissance d'Asha Lilith d'Idrias, s'exprima avec entrain le Roi portant toujours la petite dans ses bras. »

Je me levai donc, ordre du Roi après tout, et offrit ma main à Milady. Eli la pris hésitante, une frayeur passa dans son regard.

« Ne t’inquiète pas, je te rattraperais si jamais. »

On se dirigea vers la piste de danse qui s'était formée entre la foule près de l'orchestre. J'indiquai à Eli de suivre mes pas tout simplement.

Une valse débuta et je l'entrainai dans une danse sensuelle sans entrer dans la vulgarité. Elle rapprocha son corps du mien, nous prîmes toutes d'eux un pan de notre robe pour ne pas marcher dessus et je la guidais dans ses pas.

Nous virevoltions sur le parquet brillant de la salle de banquet au rythme d'une musique douce et entrainante. Elle finit par poser sa tête sur mon épaule et se laissa aller, en ignorant toute bienséance.

Les dernières notes retentirent en même temps que les cris de la petite Asha. Nous fûmes applaudis et on se dépêcha de retourner auprès de mes parents pour calmer le bébé qui devait sûrement avoir faim.

« Viens par-là, Eli, tu seras plus tranquille pour lui donner le sein. »

Je lui indiquai une antichambre où l'on accédait par une porte dérobée derrière le trône du Roi. Elle s'installa sur un divan en se mettant à l'aise et découvrit son sein gauche pour le présenter à Asha. Comme à son habitude, elle but avec appétit et je les laissai pour rejoindre la fête, leur donnant une tranquillité apaisante entre mère et fille.

Il faut savoir parfois se retirer à certains moments. Et là, c'était l'heure de la communion entre Elizabeth, la mère, et Asha, la fille.

Le bal battait son plein entre les verres d'alcool et de cocktail qui circulait et les buffets de gourmandises exposées. Sans oublier, l'orchestre qui n'arrêtait pas.

Pendant l'absence relative d'Elizabeth, Kaname, mon époux depuis sa naissance, s'avança pour m'inviter à danser. Il portait un costume deux pièces brun foncé et comme moi, des cheveux argentés encadraient son visage angélique.

« M'accorderiez-vous cette danse, Princesse ?

– Volontiers. »

Il me présenta son bras et je posai ma main dessus. Je le laissai me guider entre les danseurs. Il posa une main sur ma hanche et de l'autre, guida nos pas.

Pendant la danse, il en profita pour me féliciter pour la naissance d'Asha et on parla de la future paix possible entre les loups et les vampires. Il ne semblait pas apprécier de devoir me partager avec un lycan après l’officialisation de nos noces.

Plusieurs autres prétendants m'invitèrent à danser et Elizabeth finit par revenir. Si elle était jalouse, elle n'en laissa rien paraître.

« Aimes-tu chanter, chérie ? lui demandai-je.

– Oui beaucoup, pourquoi ?

– Parce que j'ai une surprise pour toi.

– Laquelle ? paniqua-t-elle, pas très confiante.

– Tu verras, viens suis-moi. »

Je l'escortai jusqu'à l'orchestre où l'on me confia un violon.

« Il est prévu que je réalise une performance au violon pour remercier nos invités. Tu pourrais m'accompagner au chant. Choisi la musique et je te suivrais.

– Très bien, elle réfléchit avant de me donner un titre de chanson. Tu peux jouer Bittersweet Symphony de « the Verve ». »

Je m'approchai du bord de l'estrade des musiciens et leva les mains pour réclamer le silence. Au bout de quelques minutes, j'obtins un silence complet.

« Je tiens à vous offrir une performance au violon pour avoir répondu présent ce soir. Elizabeth sera ma chanteuse. Alors profitez du moment ! ».

Je me plaçai sur une chaise près d'Elizabeth qui était devant un micro, les mains crispées sur le pied. Je lui indiquai de prendre de grandes bouffées d'air pour se détendre. Le pupitre bien en place devant moi, je posai mon archet sur les cordes et entamai les premières notes.

Une douce musique calme vibra dans le silence de la foule. Bientôt les notes montèrent et prirent une dimension plus profonde et significative. La voix d'Elizabeth se posa parfaitement sur la mélodie.

« Cause it's a bittersweet symphony this life

Trying to make ends meet, you're a slave to the money then you die.

I'll take you down the only road I've ever been down

You know the one that takes you to the places where all the veins meet, yeah. No change, I can't change, I can't change, I can't change, but I'm here in my mold, I am here in my mold.

But I'm a million different people from one day to the next

I can't change my mold, no, no, no, no, no, no, no ».

La foule commença à battre la mesure au rythme de la mélodie, accrochée à la voix mélodieuse et harmonieuse d'Eli. Plus rien ne comptait à mes yeux que notre duo parfaitement synchronisé qui invitait les gens à nous écouter de leurs deux oreilles.

« Well I never pray,

But tonight I'm on my knees, yeah.

I need to hear some sounds that recognize the pain in me, yeah.

I let the melody shine, let it cleanse my mind, I feel free now.

But the airwaves are clean and there's nobody singing to me now.

No change, I can't change, I can't change, I can't change, But I'm here in my mold, I am here in my mold.

And I'm a million different people from one day to the next

I can't change my mold, no, no, no, no, no, no, no ».

Mon archet glissa sur les cordes sans que je comprenne vraiment comment, je me laissai simplement entrainer, comme Elizabeth. Je bougeai au rythme fluctuant de la mélodie et me laissai émerveiller par la voix pure d'Eli.

« Cause it's a bittersweet symphony this life.

Trying to make ends meet, trying to find some money then you die.

I'll take you down the only road I've ever been down

You know the one that takes you to the places where all the veins meet, yeah. No change, I can't change, I can't change, I can't change, but I'm here in my mold, I am here in my mold.

But I'm a million different people from one day to the next ».

Les dernières notes retentirent et pendant quelques instants plus personne ne fit un bruit ou un pas. Je tournai la tête vers Eli qui avait laissé échapper des larmes. Et d'un coup, un brouhaha s'éleva des invités ainsi que des sifflements et des cris. Je me levai et pris la main d'Elizabeth que je guidai pour saluer la foule d'une révérence rapide.

Les larmes coulèrent bientôt en flot sur ses joues roses. Je passai un bras autour de ses épaules et elle se blottit au creux de mon cou pour renifler.

« C'était magnifique !

– Une autre ! Une autre ! scanda la foule. »

Je les remerciai encore et entrainai Elizabeth à l'écart. Je l'embrassai avec fougue et passion et l'écrasa contre mon corps. Elle se laissa faire et répondit à mon baiser avec la même urgence. Mes mains se promenèrent d'elles-mêmes sur son corps que je connaissais par cœur, chaque recoin, chaque zone sensible.

Je rompis notre baiser avant d'aller trop loin, après tout Elizabeth était encore convalescente. Je la laissai se recoiffer et remettre en place sa robe avant de rejoindre le bal.

A la fin du bal, Elizabeth comme Asha tombèrent comme des masses. Je couchai rapidement ma fille dans son landau avant de déshabiller Eli et de lui enfiler des vêtements de nuit. Orisha, ma panthère s'installa tout près du lit de la petite pour la protéger. Ce qu'elle faisait toutes les nuits. Je m'allongeai aux côtés d'Elizabeth et la serrai contre mon cœur avant de me laisser glisser vers l'inconscience.

Jour 3

La dernière journée s’entamait sous un doux soleil, il nous restait vingt-quatre heures de pure tranquillité. Je laissais Elizabeth en compagnie de sa fille, pour qu’elle puisse en profiter un peu au lieu de la confier à la nourrice.

J’en profitais pour me balader sur le dos de Shinda avec ma panthère noire à mes côtés, que j’avais un peu négligé ces derniers temps.

« Allons chasser ma belle, indiquai-je à Orisha. »

Elle grogna en réponse et partit comme une fusée en direction de la forêt. Je talonnais Shinda pour la suivre et nous galopions au fil du vent, mes cheveux battant contre mes épaules, ma robe fouettant la selle.

Les cîmes des arbres m’apparaissaient comme un immense brouillard dans notre course. Orisha fila à travers bois à une vitesse hallucinante pour un simple mortel. Elle repéra rapidement une proie et la prit en chasse. Je bandai mon arc et le parai d’une flèche. Je guidais Shinda qu’à la seule force de mes cuisses.

Je suivis les halètements de l’animal et en continuant ainsi nous la coincerions contre un enrochement près d’un lac. Mais ne coincer que l'animal, nous donnerait aucune satisfaction. J’enfonçai alors mes talons dans les flancs de Shinda.

Shinda fila au triple galop et je tirai le carreau qui se ficha en plein dans le cœur de la biche. Elle s’étala sur le sol, morte sur le coup. Je m’approchai doucement de l’animal quand j’entendis les feuilles mortes bruisser. J’armai mon bras prête à me défendre.

Des yeux verts luisants fixaient ma proie derrière un buisson dense. Orisha grogna en position d’attaque. Je mis pied à terre et fis de même. Je tirai une épée du fourreau fixé à la selle et me préparai à me défendre.

La forme rampa jusqu’à nous, faisant crisser les branches sur son passage. Une masse féroce et hostile avança à pas lents vers nous, puis elle s’arrêta nous fixant de toute sa hauteur. Je reniflais l’air qui ne dégageait aucune hostilité envers nous, un relent m’appris que le lycan cherchait simplement à se nourrir.

Je claquai ma langue pour indiquer à mes compagnons de reculer. Le lycan sous sa forme de loup, s’élança et choppa la biche au cou avant de la tirer rapidement derrière lui et de détaler. Je le perdis de vue rapidement dans la broussaille du paysage.

J’avais déjà vu un loup blanc et roux mais c’était à Londres. Si, comme on l’avait soupçonné, c’était un lycan dans sa troisième forme, que seul certain lycan puissant possédait, alors ça devait être lui tout à l’heure. Mais, pourquoi n’a-t-il pas informé son Alpha de ma cachette ? Pensais-je. J’imagine qu’ils sont plusieurs avec ce pelage.

Je chassais l’image du loup et remontais en selle pour rejoindre ma famille pour le diner. Je retraversais la forêt à un rythme soutenu et confiais Shinda à un palefrenier.

Je retrouvais Elizabeth dans notre chambre qui se changeait. Je pris une douche rapide et délaissai ma robe d’équitation rouge pour une robe style grec légère et confortable. Puis, je donnai le bras à Eli que j’escortais jusqu’à la salle à manger privé du Roi.

Les portes s’ouvrirent à notre arrivée dévoilant mes parents déjà attablés. Je les embrassais tour à tour et nous prîmes place à la table ronde en acajou. Orisha qui m’avait accompagnée s’installait sur le sol froid sous la table.

« Vous avez encore cette après-midi de tranquillité avant de commencer les préparatifs de la cérémonie ? demanda père.

– Oui, en effet. On compte bien en profiter, répondis-je.

– Vous vous sentez comment Elizabeth ? questionna ma mère.

– Très bien, je suis complétement remise de l’accouchement. Et j’ai hâte de voir cette cérémonie. »

Je conversais de politique avec mon père. Pendant que ma mère sondait Elizabeth sur son futur rôle de princesse. Elle lui chantait aussi les louanges de sa petite fille, Asha.

« Vous n’avez pas peur d’être toute l’attention de la journée ?

– Non, je pense que le concours de Miss m’a permis de me donner confiance en moi.

– C’est une très bonne chose alors. Opaline, ta dauphine du concours, est d’ailleurs partie étudier en Angleterre. Elle reviendra dans quelques années si tout va bien. »

Les plats d’Eli furent apportés en plus de cruches de sang. Le serveur nous versa avant tout un verre de vin. Je profitais du repas pour raconter l’incident de chasse de ce matin, en sirotant mon verre.

Mon père, Aryerk ne fut pas surpris de découvrir des lycans proches de nos frontières pour trouver de quoi sustenter la meute. Chaque guerre affolait et déséquilibrait les forces de la nature, éloignant les proies. L’Alpha de la meute souhaitait cette paix surtout pour laisser le temps, que la forêt retrouve son calme naturel, du moins en partie.

Le repas se termina sur des notes joyeuses dans des discussions animées et pleine de vie et de rires.

« Tu sais nager dis-moi ?

– Oui bien sûr, pourquoi cette quest…

– Parfait, suis-moi ! »

J’entrainai dans mon sillage Eli comme je l’avais fait pendant ces trois derniers jours. Je m’arrêtai sur un ponton qui défiait le fleuve Liberté. Une barque décorée de fleurs barbotait au pied du ponton.

J’aidai Eli à grimper dans l’embarcation et la laissa s’installer confortablement contre les coussins disposés comme un canapé. Je montai également et m’emparai des rames pour commencer à donner des petits coups pour nous éloigner du bord.

Étant dans le sens du courant, je laissais couler la barque au fil de l’eau veillant seulement à ne pas rentrer dans des roches. Elizabeth admirait le paysage, une main flottant à la surface miroitante de l’eau. Ses yeux s’ouvrant en grand et s’émerveillant à chaque poisson sautant et replongeant dans l’eau, chaque feuille virevoltant au vent et chaque bruissement éphémère dans les arbres et sur les eaux.

Au loin, sur la berge, des passants nous faisaient des signes auquel on répondait joyeusement. Même, un cerf sautait au rythme de la barque. Elizabeth contemplait tout ce qu’Idrias avait à lui offrir. Elle vint s’installer entre mes jambes, sa tête reposant contre mon ventre et se laissa bercer par les ballotements des remous.

Arrivée au ponton qui desservait la ville, je réveillais Eli qui avait fini par se laisser un peu trop aller. Puis-je la ramenais au château dans une petite balade au pas, main dans la main. Je lui fis visiter les jardins qu’elle n’avait pas encore explorés de fond en comble.

Je lui montrais chaque arbuste, chaque rosier, la serre en verre en finissant par le labyrinthe végétal. Je l’emmenai en son centre où un gouter fort apprécié l’attendait avec des rafraîchissements.

On se posa sur les divans autour d’une table basse et conversa au calme et à l’abri de toutes autres personnes dans un cadre idyllique. Des bougies avaient été allumées diffusant leur odeur de lavande.

« J’espère que notre fille pourra partir étudier à l’étranger si elle le souhaite ?

– Bien sûr, elle pourrait aller à Londres, à Paris, ou tiens pourquoi pas l’Autriche ou le Japon.

– Non pas le Japon ! C’est trop loin et ne parlons pas des catastrophes naturelles ! s’exclama Eli.

– Je croyais qu’elle pouvait aller où elle voulait ? souris-je.

– Oui, sauf dans les endroits dangereux.

– Eh bien, cela restreint considérablement la liste.

– Oui, mais bon ce n’est pas sûr qu’elle parte non plus. »

Je rigolai à son intervention et elle m’envoya un gentil coup de poing dans l’épaule pour que j’arrête de me moquer de son côté surprotecteur.

Nous étions absorbés par notre conversation et n’avions pas vu le temps passer, des éclats rosés s’étendaient dans le ciel annonçant le déclin de l’astre.

« Il va falloir qu’on rentre, fis-je remarquer.

– Je suis sûre d’avoir retenu le chemin !

– Alors montre-moi ça, lui dis-je en faisant un geste vaste du bras. »

Je la suivis dans le dédale de couloirs végétaux. Je ne dis rien, je me contentais de la suivre. Bien que, je sentais qu’elle allait finir par nous perdre. Je mémorisais le trajet qu’elle prenait au cas où.

Au bout d’une heure, selon ma montre, elle s’arrêta et se retourna en s’exclamant qu’elle s’était perdue.

« Ce n’est pas grave, dormir à la belle étoile ne nous a jamais fait de mal.

– Pardon ? Tu veux qu’on dorme dehors !

– Tu as dit que tu nous sortirais de là, demain ce sera plus clair pour voir où tu vas. Viens, je te ramène au point de départ. »

Je lui fis retraverser le chemin qu’on avait emprunté pour revenir au centre du labyrinthe. Elle essaya de me persuader de nous ramener mais en vain. Elle finit par s’avouer vaincu et se coucha sur l’un des deux divans. Je la recouvrais d’une couverture laissée à disposition et m’installai sur l’autre.

L’avantage d’être un surnaturel, c’est de ne pas craindre les températures qu’elles soient plus froides ou plus chaudes.

La respiration d’Eli fini par se calmer, mais je l’entendais frissonner, claquant ses dents.

Je me levai discrètement et m’approchai d’elle. Je soulevai sa couverture et me faufilai en dessous. Puis je soulevai ses jupes et me penchai vers sa zone de bonheur. Il lui suffirait d'une bonne stimulation pour se réchauffer instantanément.

Je soufflai sur ses quelques boucles rousses et elle réagit en un instant, se tortillant pour en demander plus. Je me servis d’abord de ma langue, tâtant le terrain avant d’introduire plusieurs doigts et de la mener jusqu’à l’extase. C’était paupières clauses et bouche entrouverte qu’elle soupira d’aise avant d’agiter ses bras pour me ramener vers elle.

Je remontai sur son corps et l’embrassai à pleine bouche. Elle prit mon visage en coupe et me murmura une phrase que je n’oublierais jamais :

« Merci de m’avoir fait vivre toutes ses premières fois durant ses trois derniers jours. »

Je l’embrassai à nouveau et je nous laissais glisser vers un sommeil réparateur, emmitouflée dans les bras l’une de l’autre.

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