Chapitre 16 - Annexe - Arnaud

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Lyon, avril 1944.

Le Soleil se lève à travers les épais nuages qui recouvrent la ville, les rayons percent difficilement les amas de fines gouttes d'eau et ils éclairent petit à petit la ville de Lyon. Un homme est chez lui, dans son appartement du centre-ville. Cet homme n'est autre qu’Arnaud Armier, grand ami d’Henry Ramier et Pierre Brossolette, mais aussi informateur du résistant Jean Moulin, du temps où il était encore en vie. Âgé de quarante-sept ans, dans la vie de tous les jours, Arnaud est professeur de lettres dans un collège de la ville. Mais depuis le début de la guerre il s'absente à intervalles réguliers pour la Résistance, en prétextant rendre visite à sa mère malade dans le Sud du pays. Lorsqu'il s'absente, il se rend dans les nombreuses régions du Sud mais parfois aussi dans le Nord. Il rejoint les différents maquis, récupère certaines informations sensibles et il revient à Lyon pour transmettre ses informations, à Moulin dans le passé, et maintenant à d'autres résistants. 

Le professeur se dirige vers la porte d'entrée de son appartement, le pas assez lourd ; il arrive au niveau de l'entrée et abaisse son regard vers le sol. Sur le plancher en bois de chêne, il trouve une enveloppe où seul son nom de famille est écrit. L'homme en déduit qu'elle est arrivée là grâce à un informateur et non par les services postaux du pays. Il se baisse et ramasse l'enveloppe de papier. D'un pas ferme, il se retourne et se dirige vers le sofa où il se laisse tomber. Il inspecte l'enveloppe de plus près ; au toucher elle semble ne contenir qu'une feuille à l'intérieur. En regardant d'un peu plus près l'écriture sur le dos de l'enveloppe, il reconnait celle de son ami Henry. Des nouvelles qu'il a eues, Henry a été exécuté le mois dernier par les SS à Drancy. Il ouvre l'enveloppe et sort la lettre qu'elle contient. Arnaud déplie la feuille de papier et trouve dessus les mots de son ami.

"Arnaud,

Notre situation à Paris n'est vraiment pas bonne et nous sommes en danger, les enfants et moi. Brossolette et Bollaert ont été arrêtés et je crains que vienne bientôt notre tour. Les enfants, Hannah et Romain sont forts mais je ne sais pas combien de temps ils seront capables de tenir sous les tortures des Allemands. 

J'ai peu d'espoir pour le jeune Lillois et moi-même si nous sommes arrêtés ; mais pour Hannah c'est différent. L'homme qu'elle fréquente est haut placé et fera tout ce qui est en son pouvoir pour la libérer. Je pense qu'il y arrivera. Si c'est le cas, il écartera sûrement Hannah d'une vie libre après cela ; peut-être la renverra-t-il à Lyon. Dans tous les cas, il faut que tu veilles sur elle. Retrouve-la et mets-la en sécurité. Elle voudra à tout prix continuer son travail pour la Résistance. 

L'Allemand qu'elle espionne se nomme Friedrich Strauss ; avec ce nom tu devrais pouvoir la retrouver. Mon ami, je compte sur toi. Je ne pense pas pouvoir tenir les promesses que j'ai faites plus longtemps. J'espère qu'il ne sera pas trop tard lorsque tu recevras mon message.

Porte-toi bien mon cher ami.

Henry"

Le résistant ne sait pas quoi penser, c'est la toute première fois qu'il entend parler de cette Hannah. Même du temps où son ami vivait encore à Lyon, il ne lui en avait jamais parlé. Cependant, sa confiance en Henry est importante et il ne doute pas de la fiabilité de la jeune femme dont il parle. Maintenant, il va devoir retrouver la résistante. Si son ami est décédé, ce n'est peut-être pas le cas d'Hannah et il y a encore de l'espoir à la retrouver.

Les jours passent, pendant lesquels Arnaud a fait jouer ses relations au sein des différents réseaux pour découvrir où est Hannah. Pour l'instant, aucune bonne nouvelle ne lui est parvenue. Mais cela ne fait qu'une semaine et retrouver quelqu'un peut prendre bien plus de temps que cela ; alors le résistant ne baisse pas les bras et poursuit ses recherches. Il monte les escaliers du bâtiment dans lequel se trouve son foyer, puis arrivé devant la porte de son appartement, il trouve un homme, assis contre cette dernière. À la vue de l'arrivée d'Arnaud, l'inconnu se lève et prononce "Rex". Par ce mot, le résistant comprend qu'il a face à lui un informateur d'un réseau. Utiliser le mot "Rex" pour s'identifier comme membre de la Résistance, est une consigne donnée par Arnaud pour identifier les personnes qui lui apportent des informations. Pour le choix du nom de code, il a tenu à rendre un hommage à son cher ami décédé l'an passé.

Arnaud acquiesce d'un mouvement de tête puis il déverrouille la porte de l'appartement avant d'inviter l'autre homme à entrer. Les deux résistants s’approchent d'un bureau où Arnaud cache de nombreuses informations liées au mouvement. Le patriote sort de sa veste une enveloppe qu'il tend à Arnaud. Le professeur n'attend pas éternellement et il se saisit du courrier.

- Cette fois, il s'agit bien de l'information que vous attendiez. 

- C'est sûr ?

- Oui monsieur, le chef de mon commando m'a affirmé que l'information est véridique.

Arnaud ouvre l'enveloppe et en sort un morceau de papier et une photo. Sur la photographie, il peut voir Hannah, à Paris en compagnie de Friedrich, tous deux se dirigeant vers le deuxième arrondissement de la capitale française. Il inspecte le visage de la jeune femme et remarque qu'elle ne semble pas dans un état émotionnel stable. Il pose la photo sur le bureau et il se saisit du mot qui l'accompagnait.

- "Hannah Marty, revenue d'Auschwitz le quinze avril", peut-il lire sur le papier.

Il s'appuie de ses mains sur le bureau tout en gardant le mot dans sa main gauche, il fixe la fenêtre et s'accorde un moment de réflexion. Que faire maintenant ?

Le jeune homme qui l'accompagne fixe le professeur sans rien dire et se contente d'attendre. Après quelques instants, Arnaud se relève et dépose le morceau de papier sur la photographie. Il se tourne vers son invité.

- J'ai besoin de savoir si elle va rester à Paris ou s'il est prévu qu'elle quitte la capitale. Elle a été accusée de fait de résistance donc elle est sûrement surveillée. Tant qu'elle est à Paris, il me sera difficile d'entrer en contact avec elle, sans compromettre sa couverture que les autres ont réussi à préserver.

- Bien monsieur, je m'en occupe.

- Dis-moi, quel est ton nom ?

- Charles Guillet monsieur.

- Bien. Tu peux y aller.

Le jeune homme quitte prudemment l'appartement d'Arnaud ; le professeur le regarde partir depuis sa fenêtre, vérifiant que nul ne le suit. De son côté, il se pose certaines interrogations ; si Hannah ne quitte pas Paris, comment entrer en contact direct avec elle sans la compromettre ?

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