Chapitre 9 - Flash Back - Henry

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Paris, 24 juin 1940.

La nouvelle circule dans tout le pays depuis deux jours. La France a capitulé, l'armistice a été signé, le pays est tombé aux mains de l'ennemi. Henry écoute la radio attentivement, espérant entendre de bonnes nouvelles ; peut-être l'arrivée des Anglais sur le territoire qui viendraient délivrer le pays, fraichement prisonnier des Allemands. Il repense à l'appel de de Gaulle, les combats doivent continuer. Les Français doivent résister, ils doivent dire non à la domination nazie, non à la défaite de la France. Il est en zone occupée, Paris est occupé.

Il se lève du sofa et éteint la radio. À quoi bon continuer d'écouter les mêmes choses. Il se dirige vers son bureau et s'installe sur une chaise, en face du meuble en chêne noir. Il prend une clé, dissimulée dans l'abat-jour de la lampe de bureau ; puis il déverrouille le premier tiroir du bureau dans lequel il cache son journal. Si les Allemands entreprennent des fouilles chez lui, et qu'ils tombent sur son journal, Henry est sûr d'avoir des problèmes. Il récupère le carnet et le pose sur le plan de travail du bureau. Henry l'ouvre sur une page vierge et se saisit d'un crayon ; il écrit dans ce carnet ses pensées, résistantes, contre l'idée d'une occupation par l'ennemi. Il veut se souvenir dans l'avenir de ce qu'il aura fait ; ou s'il meurt, que quelqu'un le sache. Il n'a pas parlé de ses motivations à la jeune Hannah qu'il a pris sous son aile il y a plusieurs années de cela déjà et qui l'a suivi jusqu'à la capitale. La jeune femme travaille avec lui dans la librairie que l'homme a achetée quelques années auparavant ; même s'ils partagent de nombreux moments ensemble, cela ne va pas plus loin et Henry préfère tenir sa protégée éloignée de toute implication dans cette guerre. Ces dernières années, il s'est fait de nombreux amis, plutôt discrets ; et c'est grâce à ces contacts qu'il parvient à communiquer, depuis l'arrivée des Allemands sur le territoire, avec d'autres Français qui s'opposent fermement à la présence de l'ennemi dans le pays. C'est depuis le discours du général que la Résistance est née, et Henry a participé à sa création en prenant les armes immédiatement. 

De son côté, il prépare un journal, avec d'autres libraires et journalistes ; c'est dans ce journal qu'il encourage leurs concitoyens à prendre les armes avec eux et à dire non aux Allemands, non aux décisions de Pétain. Une fois l'édition quotidienne réalisée, ils la transmettent à d'autres résistants qui se chargent de la distribuer aux Parisiens. Certains d'entre eux ont été arrêtés par la Gestapo ou par la Wehrmacht ; alors Henry prend un grand nombre de précautions et fait preuve d'une grande prudence.

Il se lève de sa chaise puis la rabat sous le bureau. Il replace son journal dans le tiroir, le ferme à double tour puis il replace la clé dans sa cachette. L'abat-jour étant épais, la clé ne se voit pas lorsque l'ampoule de la lampe est allumée. Henry se dirige vers l'escalier qui mène au rez-de-chaussée où se trouve la librairie. Il descend les marches une à une et une fois arrivé dans le magasin, il trouve Hannah, plongée dans son travail de mise à jour de l'inventaire du magasin. Il se racle la gorge et la salue ; la jeune femme lève la tête hors de son très gros annuaire.

- Oh ! Bonjour Henry, je ne t'avais pas entendu descendre.

- Ce n'est rien. Comment vas-tu aujourd'hui ? 

- Tout va bien pour moi, malgré le fait que je n'ai pas le moral à profiter des beaux jours.

- Pourquoi donc ?

- Ce qu'il se passe me déplait, les événements me dépassent, je n'arrive pas à accepter la situation, je crois même que j'en suis incapable. 

- Je comprends tout à fait. Je suis dans le même cas que toi.

- Ne crois-tu pas que nous devons continuer à nous battre comme le souhaite de Gaulle ? 

- Si mais... Hannah, c'est bien trop risqué.

- Bien trop risqué ? Quand le gouvernement a envoyé mon père dans les tranchées il y a presque trente ans, ça c'était risqué. Ne me dis pas que tu comptes rester sans rien faire, les bras croisés !

- Pour mon cas non, je ne vais pas attendre que le temps passe et laisser notre ennemi s'installer dans notre pays comme si de rien n'était. Mais toi si.

- Comment ça ? Il est totalement hors de question que je ne fasse rien.

- Hannah, s'il te plait, j'ai promis à Eva de prendre soin de toi et je compte bien tenir ma promesse. 

- Je ne suis plus une enfant Henry, je n'ai pas besoin que l'on me protège. J'ai un avantage que tu n'as pas ; je suis une femme, je peux assez aisément me rapprocher des Allemands en n'ayant sur moi qu'une faible méfiance de leur part.

Henry relève légèrement la tête et se donne un instant de réflexion. Il ne veut pas mettre Hannah en danger, mais elle n'a pas tort, elle peut les charmer, s'attirer leur sympathie. Ils se méfieront moins d'une femme que d'un homme. Il lève les yeux au ciel et soupire un grand coup puis redirige son regard vers la jeune femme.

- Très bien. J'accepte que tu t'engages mais promets-moi de ne commettre aucune imprudence.

- C'est promis ! répond-elle en embrassant son tuteur sur la joue. Merci Henry.

- Il va falloir qu'on réfléchisse à ce que tu vas pouvoir faire.

Ils mettent plusieurs jours à réfléchir à une stratégie sur les actions qu'Hannah peut entreprendre. Après une concertation avec un autre résistant, Hannah décide de faire cavalier seul et de se lancer dans l'espionnage. Elle se balade discrètement dans les rues de la capitale pendant plusieurs mois, cherchant les membres de la Gestapo puis elle étudie leur emploi du temps et elle trouve un point d'espionnage idéal : le café où Karl Bömelburg, chef de la Gestapo à Paris, et ses hommes ont l'habitude de prendre leur pause.

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