Chapitre 4 (septième partie)

4 minutes de lecture

Mercredi 5 juillet 2006

Chers parents,

J'espère que vous vous portez bien, ainsi que toute la famille. Je vous écris pour vous informer que j'ai déménagé et que je vais désormais habiter à Fort William. Mickaël et son ami, Sam, vont reprendre un restaurant ici. Vous trouverez ma nouvelle adresse au dos de l'enveloppe.

Je voulais aussi vous apprendre que j'attends un bébé. Sa naissance est prévue pour la fin septembre. Tous ici nous nous réjouissons de cette nouvelle et je souhaite qu'il en soit de même pour vous.

Embrassez bien mes petits frères et ma petite sœur pour moi.

Bons baisers

Maureen

La jeune femme se redressa légèrement. Elle s'était installée ce matin-là à la table de la salle à manger pour écrire cette lettre. Elle ne voulait plus tarder à prévenir ses parents de sa grossesse, ainsi que de leur installation à Fort William. Elle avait profité que Mummy était partie avec une de ses voisines faire quelques courses - c'était jour de marché -, pour s'en occuper. Et elle préférait être seule. Elle avait longuement mûri ses mots, ses phrases. Elle ne voulait laisser percer aucune rancœur ni aucun triomphalisme. Et surtout, aucune allusion à Brian. Après maintes réflexions, elle avait finalement choisi des phrases courtes, disant l'essentiel, sans exprimer beaucoup d'émotions. "Ils ne pourront pas dire qu'ils ne savaient pas", songea-t-elle en pliant la lettre pour la glisser dans l'enveloppe. "Mais je doute qu'ils me répondent... Enfin, nous verrons bien. Peut-être que, finalement, cela modifiera un peu leur attitude..."

Une fois la lettre prête, elle guetta le passage du facteur pour la lui remettre, puis retourna dans la cuisine pour prendre un saladier : Mummy avait cueilli juste un petit bol de framboises ce matin-là pour leur petit déjeuner et elle s'employa alors à récolter les autres. Les petits fruits commençaient à bien donner et Mummy pouvait facilement cuire deux kilos de confiture tous les deux ou trois jours. La jeune femme l'ignorait, mais la vieille dame avait décidé de préparer plus de réserves pour l'hiver que d'habitude, sachant qu'elle pourrait en donner à Mickaël et Maureen.

Vendredi 7 juillet 2006

En ce tout début d'après-midi, Mickaël pédalait tranquillement vers le restaurant. La ville s'animait, se préparant pour le festival de musique qui allait débuter le lendemain. Déjà, depuis deux jours, les groupes de musique avaient envahi les pubs et les concerts étaient nombreux le soir. Quand il rentrait en pleine nuit, la ville était encore assez calme. Dès le lendemain, elle serait beaucoup plus animée. Glasgow allait vivre au rythme de la musique, folk, rock, blues, venue des quatre coins du monde.

Même si c'était toujours une période très chargée au restaurant, car ils faisaient salle comble chaque soir et pour les deux services, Mickaël aimait ce moment de l'année. C'était le début de l'été, les journées étaient très longues, les gens affichaient joie et enthousiasme. La ville, sa ville, réputée si grise l'hiver, prenait des airs colorés. Les rues étaient pavoisées, on entendait de la musique sortir des pubs ou des petites salles, ici et là, même en journée. Bien entendu, les grands concerts se déroulaient chaque soir au parc de Kelvingrove, ce qui n'empêchait pas toute la ville d'être en fête.

L'an passé, il avait moins profité de cette ambiance, avec l'accident de Dan, la tension en cuisine à cause des avances d'Alison, ses inquiétudes pour Maureen. Cette année, il avait toute autre pensée à l'esprit, tout en se sentant aussi plus réceptif à l'ambiance dans la ville. Avec Sam et Jenn, William et Shana, ils avaient convenu de profiter de quelques concerts, au moins les soirs de relâche. Et notamment à la fin de la semaine suivante, puisqu'ils ne retourneraient pas à Fort William.

Il ressentait une certaine impatience à arriver à dimanche, pour repartir dans les Highlands, retrouver Maureen et Mummy. Il téléphonait chaque jour à Maureen, soit en fin de matinée, soit durant la pause de l'après-midi, à une heure où il savait qu'elle avait terminé sa sieste. Il avait nettement perçu qu'elle avait bien récupéré et s'était vraiment reposée. Au week-end précédent, il l'avait retrouvée en pleine forme et se dit que, même si elle lui manquait au quotidien, même si cela lui faisait un effet étrange de ne pas la trouver quand il rentrait en pleine nuit, ils avaient pris la meilleure décision possible pour elle et le bébé. La visite médicale du lundi précédent avait achevé de le rassurer.

Oui, vraiment, c'était le mieux qu'ils pouvaient décider en la faisant s'installer dès à présent à Fort William. Elle lui avait dit deux jours plus tôt qu'avec Mummy, elles avaient commencé à réfléchir à l'aménagement de la future chambre du bébé. Ils l'installeraient dans la chambre qu'Ingrid et Henry occupaient à chacune de leurs visites, car Mummy avait convenu avec sa fille qu'ils dormiraient désormais dans l'une des chambres d'appoint, au rez-de-chaussée. C'était une des plus grandes chambres de l'étage, dont la fenêtre donnait sur la montagne. Elles n'avaient pas encore installé la moindre affaire dedans, puisqu'il faudrait notamment envisager de déplacer le lit.

A chaque appel, il pouvait mesurer l'entente entre sa grand-mère et Maureen, entente dont il n'avait nullement douté. Il se réjouissait de constater qu'elles s'appréciaient au quotidien et partageaient déjà beaucoup. "Il n'y a pas qu'à Maureen que cela fait du bien d'être là-bas", songea-t-il en traversant tranquillement le pont qui enjambait la Clyde, "cela fait du bien aussi à Mummy qu'elle soit avec elle. Finalement, l'achat de ce restaurant est aussi une bonne décision pour elle. Même si on allait la voir régulièrement, même si elle a ses copines et de la famille proche encore présente, cela n'est pas pareil pour elle. Je sais qu'elle est ravie d'avoir à s'occuper de Maureen. C'est bien qu'on s'installe là-bas..."

Il s'arrêta au milieu du pont pour regarder quelques embarcations pavoisées qui remontaient tranquillement le fleuve. Leur sillage s'effaçait vers l'aval et son regard se porta au loin. "Oui, c'est bien qu'on s'installe là-bas et même qu'on pourrait peut-être..." Il n'exprima pas la fin de sa pensée, mais se promit d'avoir une discussion avec Maureen dès le dimanche à venir.

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