Chapitre 4 (huitième partie)

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Dimanche 9 juillet 2006

Mickaël revint seul ce dimanche-là à Fort William, puisque Jenn demeurait à Glasgow avec son père pour aider Sam à faire ses cartons. La jeune femme et son père avaient déjà bien avancé au cours de la semaine passée et envisageaient de faire un premier trajet, en chargeant déjà les cartons qui étaient prêts, au cours de la semaine. Ils n'avaient cependant pas encore fixé de date.

Mickaël, quant à lui, tenait vraiment à revenir à Fort William, pas tant pour faire avancer le projet de chantier du restaurant, mais surtout pour marquer l'anniversaire de Maureen - certes avec quelques jours d'avance - et aussi parce qu'il ne reviendrait pas le week-end suivant : le festival de musique de Glasgow avait débuté la veille et la quinzaine s'annonçait chargée au restaurant. Il profiterait de son week-end pour se reposer et poursuivre ses propres cartons.

Ce soir-là fut marqué par une très belle soirée d'été. Il faisait beau depuis plusieurs jours, une douce chaleur agréable s'était installée sur Fort William. Maureen était souriante, reposée et ravissante, selon les dires de Mickaël. Si Mummy avait été ravie de pouvoir offrir à son petit-fils une salade avec les premières tomates du jardin, il avait ensuite savouré du poisson froid avec une mayonnaise et une part de tarte aux framboises. Il avait aussi apprécié les fraises cueillies à la fraîche, le matin-même.

Il avait convenu avec sa grand-mère qu'il s'occuperait du repas du lendemain, qu'il comptait bien préparer pour Maureen, pour marquer son anniversaire. Il irait faire les courses dans la matinée, leur rapporterait aussi des provisions pour la semaine. Même s'il y avait toujours une copine de Mummy, une voisine ou même la femme de John à pouvoir leur ramener ce dont elles avaient besoin.

Le soir s'étirait, comme à n'en plus finir. Mummy les abandonna après avoir vu le soleil disparaître derrière les monts d'Ardgour, mais la nuit serait encore longue à venir. Comme Maureen n'avait pas sommeil, ils décidèrent de s'offrir une autre tasse de thé.

- Ma douce, commença Mickaël, je suis vraiment content de ce que nous avions décidé, que tu passes ces semaines ici. Tu as vraiment repris des forces et je te sens sereine...

- Oui, je le suis, répondit Maureen. Mummy et moi vivons à un rythme tranquille ici et pourtant, les journées passent vite ! Je ne m'ennuie pas du tout... Elle prend grand soin de moi, et je suis contente aussi de pouvoir l'aider un peu au jardin ou à la cuisine. Certains jours, nous passons beaucoup de temps à préparer nos repas ! Et pas que les repas... Elle a commencé à faire des bocaux pour l'hiver, des confitures...

- Je l'ai bien senti en arrivant, sourit-il. Ca embaumait la fraise... et la framboise. Au point que je me suis demandé si Léony aurait encore de quoi faire quand elle viendra !

Maureen sourit, elle savait que Mummy attendait avec une certaine impatience la venue de son arrière-petite-fille.

- Il n'y a pas que toi qui aies la forme, poursuivit-il. Mummy pète le feu ! J'ai l'impression que rien ne l'arrête, qu'elle a comme rajeuni...

- Je ne pourrais pas trop le dire, dit Maureen, je peux t'assurer qu'elle va bien. Elle m'a dit aussi ne pas ressentir de douleurs dans ses jambes, en ce moment. Et je crois qu'elle s'amuse aussi beaucoup à prendre soin de moi, comme si elle avait eu besoin d'avoir à veiller sur quelqu'un...

- Et ce n'est pas rien que d'avoir à veiller sur toi... et sur le bébé, ajouta-t-il. Et ça m'a fait penser à quelque chose dont je voulais te parler... J'y ai réfléchi ces derniers jours aussi, alors que j'avais les mains dans les cartons.

- Qu'est-ce donc ? demanda Maureen avec intérêt.

- Et bien, voilà... Je pensais qu'au lieu de chercher une maison, on aurait pu... rester là, avec elle.

- Habiter ici ? s'étonna Maureen.

- Oui... La maison est grande, on a d'autres choses en tête toi et moi que de chercher un logement, et puis... J'aime cette maison, j'aime tout ici.

- Oui, je comprends, dit Maureen avec un peu d'émotion.

Elle marqua un petit temps de silence, puis dit, en regardant vers l'horizon :

- Et c'est vrai qu'il sera difficile de trouver un autre endroit d'où nous pourrions avoir une si belle vue !

Il sourit et reconnut :

- J'ai grandi avec ce paysage sous les yeux, à chaque fois que nous venions ici. Cette maison fait partie de moi, aussi. Bien sûr, j'ai passé ma scolarité à Glasgow, j'ai grandi à Glasgow. Mais ici... C'était à la fois le lieu de vacances, l'aventure, et un sentiment de liberté incroyable. Et pas seulement parce que je pouvais cavaler partout sans contrainte ou presque... Il y a quelque chose de très fort qui me lie à cet endroit, à cette maison, et pas seulement à Fort William et à ses alentours. C'est vraiment là que tout a commencé... Je ne saurais pas bien exprimer ce sentiment, et ce n'est pas seulement lié au fait que je sois né à Fort William. C'est plus fort que ce simple "attachement".

- Je pense parvenir à le mesurer, dit-elle. Dès la première fois que tu m'as parlé des Highlands, de Mummy, j'ai bien senti que c'était un endroit particulier pour toi. Qu'il y avait un lien très fort entre cet endroit que tu évoquais et toi-même. Et cette impression est devenue réalité dès notre premier séjour. Cela me plairait beaucoup de vivre ici, mais c'est la maison de ta grand-mère et il faut qu'elle soit d'accord. Ce ne serait pas rien pour elle que de partager son quotidien avec nous...

- Oui, mais je pense avoir les arguments pour la convaincre, dit-il avec un petit sourire malicieux. Je lui en parlerai demain.

Maureen sourit. Son regard se porta vers les Monts d'Ardgour qui, lentement, s'enfonçaient dans la pénombre, même si le ciel, au-dessus d'eux, demeurait clair.

Lundi 10 juillet 2006

Mickaël avait donc pu constater la bonne entente entre Maureen et sa grand-mère, que la jeune femme allait bien et que le médecin qui la suivait était confiant pour la fin de sa grossesse. Mummy, quant à elle, retrouvait comme une nouvelle jeunesse. Lui et Maureen étaient vite tombés d'accord la veille pour faire accepter à Mummy qu'ils s'installassent définitivement avec elle. Mickaël n'avait vraiment pas le temps de chercher une maison dans les alentours, il ne voulait pas que Maureen s'en occupe avant la naissance, pour qu'elle ne retombe pas dans une fatigue comme celle qu'elle avait connue à Glasgow au mois de mai.

Ainsi, à la fin du repas d'anniversaire qu'il avait préparé pour la jeune femme, entama-t-il la discussion avec sa grand-mère :

- Mummy, Maureen et moi sommes tombés d'accord pour un projet dont nous aimerions te parler. J'ai bien réfléchi ces derniers temps, je n'avais que ça à faire, tu vas me dire... Nous avons avancé au mieux pour le restaurant Sam et moi, maintenant, il ne reste plus qu'à attendre la fermeture et le départ du propriétaire actuel. Les plans ont été validés avec les artisans, ils interviendront en août. Sam et moi nous irons bosser là-bas aussi, notamment dans la cuisine. Nous n'aurons pas trop du mois d'août pour être prêts le plus vite possible pour rouvrir en septembre. Il faudra juste que je rencontre encore d'autres fournisseurs... J'attends d'être définitivement sur place pour cela, ce sera plus simple.

- Il faut faire les choses dans l'ordre, aussi, Mickaël, émit Mummy. Le plus important était d'envisager les travaux.

- Exactement. Ensuite... je ne te fais pas un dessin, mais la rentrée sera... hum, disons... pleine d'aventures.

Maureen sourit à cette expression, ne dit rien. Elle passa simplement, machinalement, la main sur son ventre. Le bébé lui donna un petit coup en réponse.

- C'est le moins que tu puisses dire, dit Mummy.

- J'ai donc pensé, et Maureen est d'accord avec moi, que nous aurions bien autre chose à faire que chercher une maison, poursuivit-il.

- J'ai dit que vous pouviez rester ici... un petit peu, fit Mummy avec un léger étonnement.

- Et bien, je pense que ce serait mieux que l'on reste ici tout court. La maison est grande, tu y es toute seule, dit Mickaël sans la moindre hésitation.

- Tu veux... Vous voulez habiter ici ? dit-elle d'un air ébahi.

- Oui, répondit Mickaël avec fermeté en fixant sa grand-mère droit dans les yeux et Maureen acquiesça en silence.

- C'est idiot, répliqua la vieille dame. Aujourd'hui, les jeunes n'habitent plus chez les vieux.

- Ce n'est pas parce que plus personne ne le fait que nous, nous ne pourrions pas le faire, rétorqua son petit-fils. De toute façon, je t'interdis de protester : au fond de toi, je suis sûr que tu es ravie et que tu seras très heureuse, dans quelques mois, d'entendre un petit bébé gazouiller dans cette maison. Il est temps de lui redonner de la vie.

L'argument laissa Mummy sans voix, puis elle finit par dire qu'elle allait réfléchir...

Maureen et Mickaël échangèrent un regard complice. "P'têt ben qu'oui, p'têt ben qu'non..."

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