Chapitre 24 : Par-delà les tempêtes (2/2)

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Le voyage débuta sous de bons augures. Côtoyant si longtemps la terre, beaucoup durent s’adapter à ces brimbalements cumulés à l’air maritime. Là où Héliandri grimpait allègre sur le grand mât, les bardes souffrirent de nausée sur la passerelle durant les premiers jours. Aucune musique n’égaya donc la traversée malgré leurs futiles tentatives d’interpréter quelques notes.

Une mer tranquille portait la caravelle jusqu’à l’inconnue destination. Parfois des vagues impactaient la structure, sans jamais en menacer sa stabilité. Un climat ensoleillé les accueillait de prime abord, mais le ciel s’assombrissait jour après jour. Pas de quoi démoraliser Amathane, qui manipulait le gouvernail dans un mutisme presque cérémonieux. Malgré les distractions censées perturber la monotonie, elle s’attelait constamment à la tâche, s’interrompant juste pour se sustenter et se reposer.

Et tempêtait face à la vacuité de ses efforts, même si Phiren la rassérénait alors. Le navire avait beau filer droit vers le sud, l’horizon était dépourvu de contours devant lesquels s’émerveiller. Seuls régnaient les flots dans toute leur vastitude, isolant peu à peu les explorateurs loin de tout. Amathane se référait à l’intensité des rafales, anticipait les bancs de sables, et les expectatives parurent pourtant hors d’atteinte.

En l’absence d’un clair objectif, naviguant dans un environnement empreint d’une discrète magie, une routine finit par s’installer. Héliandri trottait d’un bout à l’autre de la passerelle et rivait souvent ses yeux à grande distance. Il lui prenait à s’arrêter pour converser avec ses compagnons, surtout Dehol, dont la taciturnité préoccupait jusqu’à Vazelya.

Ce jour-là, il se divertit en observant Adelris pêcher. Il s’était placé derrière Kavel, lequel inspectait le seau trônant à côté de son aîné, pendant que les bardes osaient sortir de leur cale. Accrochés à l’hameçon, les poissons se présentaient sous des formes et nuances variées, leurs écailles plus étincelantes qu’ailleurs. Ils n’évoquèrent pas le moindre souvenir à Dehol. Ce dernier s’enthousiasma néanmoins face à la poigne du guerrier, qui soulevait la canne à pêche sans effort, et remplissait la réserve sans sourciller.

Quand il se retourna vers Turon, celui-ci empruntait déjà l’escalier. Il surveilla la voûte, où de massifs nuages gris s’amoncelaient, avant de s’appuyer sur le bastingage. Deux coups d’œil inquisiteur le cernèrent, mais il ne flancha guère. Derrière le gouvernail s’érigeaient deux figures ayant renoncé à toute discrétion.

— Ta dédication est appréciée, complimenta-t-il.

Amathane garda le silence.

— Tu as tes raisons de te renfrogner, reconnut-il. Nos interactions ont débuté de manière conflictuelle, et Vazelya n’a rien arrangé. Puis-je m’excuser en son nom ?

— Pourquoi toi ? douta Amathane. Tu étais le garde du corps de Guvinor, maintenant celui de Héliandri. Si Vazelya regrette, elle devrait avoir la bravoure de m’affronter directement.

— Elle n’a rien exprimé à ce sujet. Je souhaitais juste apaiser les tensions.

— L’idée est louable, l’exécution l’est moins. Qu’elle vienne d’elle-même, si elle l’ose.

L’espace d’un instant, Amathane joignit le geste à la pensée, jugeant la mécène sur la passerelle. Toutefois Vazelya s’y complaisait tant, savourant la caresse des rayons dorés, que la collectionneuse renonça aussitôt. Elle chercha du soutien auprès de Phiren, lui aussi appuyé sur le bastingage, qui lui gratifia d’une esquisse de sourire.

Après quoi elle se heurta à l’insistance du garde.

— Je converse avec toi pour une autre raison, dévoila-t-il. Enfant des terres profondes, je n’ai que peu goûté à la fureur des flots jusqu’à maintenant. Peut-être est-ce l’occasion de me débarrasser de mes idées préconçues sur les tegaras ?

— Quelles sont-elles ? demanda Amathane en grinçant des dents. Rien ne me hérissera plus que les propos de Vazelya, rassure-toi.

— J’ai entendu beaucoup d’histoires, parmi lesquelles je peux citer le rituel de passage à l’âge d’adulte. Est-ce vrai que, quand les tegaras célèbrent leur trentième anniversaire, ils sont envoyés seuls sur un petit bateau au milieu de la mer ? Et doivent alors retrouver leur île natale, seulement munis de leur sens de l’orientation et de quelques provisions ?

— Ce rituel est encore pratiqué à Menkaop, Sewerti et Poghref. Mais moi, je suis originaire de Ryusdal, où cela a été abandonné depuis bien longtemps. Il faut croire que toutes ces îles ne forment pas un ensemble uniforme. Comment réagirais-tu si je décrivais chacune des tribus des monts Puzneh comme identiques ? Eh bien, dis-toi que nos îles sont bien plus vastes.

Turon se déroba des yeux d’Amathane, mais ils transpercèrent tellement que toute échappatoire paraissait futile. Ce pourquoi il s’avança légèrement, épongeant la goutte de sueur perlant sur sa tempe.

— Continue donc, invita Amathane en haussant des épaules. Je devais bien m’exprimer sur ce sujet à un moment.

— J’ai eu vent d’une autre rumeur, dit Turon. Dans certains équipages pirates, avoir une présence masculine à bord est jugée comme source de malheur. Ce qui expliquerait pourquoi la majorité des capitaines sont des femmes.

Amathane soupira, fixant à peine son interlocuteur.

— Voilà pourquoi la communication est compliquée, se plaignit-elle. Votre image des tegaras est dépassée depuis un millénaire. Je vais faire l’effort de rectifier : il y a de nombreux capitaine pirates masculins. La proportion est juste un peu déséquilibrée car, pour beaucoup, une capitaine terrifie davantage qu’un capitaine. Plus grande en moyenne.

— Mes excuses, dit Turon. J’avais décidément tout faux. Par contre, cette disparité est bien présente, et je ne la comprends pas. C’est bien moi qui fus choisi pour intégrer la compagnie, et non Akhème. Nos différences physiques n’ont jamais influencé, ou très peu, la manière dont nos sociétés fonctionnent.

— Et tu crois que c’est le cas chez les tegaras ? Peuh, juste de l’ergotage ! Nous sommes les plus libres de tout Menistas, et nous ne sommes soumis à aucune hiérarchie. Que nous priions Ytheren, déesse des océans, n’y change rien. Et encore, je ne suis pas sûre de son existence.

— À ce propos, j’ai aussi cru comprendre que…

— Que les tegaras enceintes accouchaient seules sur les navires, sans protection, bénies par Ytheren ? Là encore, des cas isolés. Ce serait un trop grand risque. Quelle divinité risquerait le sacrifice de ses fidèles ?

Se mordillant les lèvres, s’extirpant de cette vision, Turon se gratta l’arrière du crâne. Il retourna sur la passerelle sur un ultime coup d’œil avec son interlocutrice, dont les traits rigides n’avaient été perturbés. Elle se détendit cependant à l’arrivée de Phiren, et enlaça un bras autour de sa taille.

— Je ferais mieux de me taire, jugea le garde. Tout était plus facile quand je me contentais de flanquer Guvinor. J’envie Akhème, en ce moment.

— J’ai l’habitude, avoua Amathane. Ces discussions constituent peut-être la première étape pour faire évoluer les esprits. Plusieurs siècles après, j’avais perdu espoir.

Frôlait l’illumination, côtoyait l’espérance au moment où Turon et Amathane empruntèrent des routes distinctes. L’une resta agrippée au gouvernail et se projeta sur l’étendue infinie autour d’elle. L’autre chemina sur le pont où il se positionna à hauteur de ses camarades.

L’astre diurne avait déjà cédé, mais la pénombre s’exposait sans ambiguïté. Des premières gouttes chutèrent alors, assombrirent les planches de la caravelle. À peine eurent-ils le temps de les sentir qu’elles se multiplièrent à une cadence soutenue, obstruant bientôt leur vue des environs.

L’averse se fracassa sur tout un chacun sur un bruit tonitruant.

— Abritons-nous ! avertit Mélude. Le déluge nous frappe !

Ingambe quoique tremblotante, la chanteuse allia le geste à la parole. Elle courut vers la cale sur un preste élan. Hélas elle perdit l’équilibre en une fraction de secondes, car la caravelle se collisionna contre une vague colossale. Plusieurs personnes s’ébranlèrent sur cet impact. Mélude, quant à elle, glissa le long de la passerelle, puis se cogna sur le seau qui rebondissait à contre sens. Sonnée, elle se cogna contre la porte, étalée sur un agglomérant de frétillants poissons.

— Tu n’as rien ? s’alarma Zekan.

Ni une, ni deux, Makrine et lui se ruèrent vers leur amie, quand bien même leurs chaussures ripaient sur l’humidité de la passerelle.

Leur cœur s’arrêta au premier grondement. Lorsque la foudre se manifesta. Chacun se cala pour mieux appréhender cet éclat violet jailli des nuages. De puissantes rafales soulevèrent les voiles au rythme de l’impact des hautes vagues sur la caravelle. Vrombissements après vrombissements, elle oscillait sur les flots davantage qu’elle les naviguait, pourtant Amathane s’opiniâtra sur le gouvernail.

— Ne paniquez pas ! conseilla-t-elle. Il n’y a aucune tempête que je ne saurai dompter. Accrochez-vous bien, et ensemble nous percerons à travers cette infâme grisaille !

— Bien compris, fit Héliandri, les cheveux balayés par le vent.

Accroché au mât central, Kavel s’immobilisa dans un moment de suspension. Une partie de lui protégeait le carnet de notes lesté à sa ceinture, une autre balayait à proximité sans une seconde de répit.

Il n’éluda rien.

Guère l’empressement avec lequel Turon se rapprochait de Héliandri, qui se braquait à l’avant, au mépris de l’impétuosité du vent et de la pluie. Ni le raidissement d’Adelris qui surveillait la tempête avec un œil vif. Encore moins la force qu’Amathane déployait pour manœuvrer le navire, épaulée par un Phiren quelque peu tressaillant. Surtout pas Dehol, qui fila d’un bout à l’autre de la passerelle. Même les bardes, bien que retirés, lui valurent un rictus inquiet.

À plusieurs reprises, les éclairs risquaient d’incendier la fragile et salvatrice structure qui était leur. D’une célérité sans pareille, doublée d’une intensité inouïe, la foudre éclatait dans un roulement terrible. Par dizaines les jets descendaient du ciel, leur coruscation miroitant dans les iris de leurs victimes.

Entre deux épais nuages fusa un éclair plus énergique et rapide encore. Il était dirigé contre le grand mât, duquel il s’approcha dangereusement. Une courbe hyaline dévia alors sa trajectoire, aussi acheva-t-elle sa trajectoire sur des flots tumultueux.

Mélude venait de se réveiller, et déjà ses yeux s’étaient dilatés.

— Souviens-toi, Makrine ! interpella-t-elle. Comme ton bouclier !

— Sauf que celui-ci dépasse de loin mon niveau, admit la concernée.

Même si un mouvement effervescent animait la caravelle, il était ardu de se manquer la fulgurante convergence de flux. Autour de Vazelya régnait une magie pure et diaprée, qu’elle avait utilisé pour générer une égide sphérique autour du bateau. De la foudre la frappait de part et d’autre, mais se dissipait sur des points d’impact, diffusant des ondes sur la surface.

Peu importait la quantité à toucher le bouclier, la mage déployait ses bras, projetait des milliers de particules, sans s’infléchir d’un iota sous la submersion magique.

Jusqu’au moment où la voix lancina de plus belle.

— Qui penses-tu impressionner ? interrogea Nasparian. Ta défaite est inévitable.

— Et tu te montres encore, seulement en esprit ! s’exclama Héliandri. Manifeste-toi en personne, Nasparian. Cette fois-ci, mon trait ne te manquera pas.

— Tu ne revêts pas d’intérêt immédiat. Une seule personne rivalise avec mes pouvoirs, et elle est donc ma priorité.

— Pourquoi elle, encore ? s’agaça Amathane. Je suis la navigatrice ! Je mérite au moins un peu de ton attention.

— Peux-tu bloquer mes éclairs, voleuse ?

— Non, mais je peux les esquiver !

Contre ces affirmations s’interposa Vazelya elle-même. Malgré les abruptes agitations de la caravelle, malgré les multiples jets chatoyant en étincelles sur la surface incurvée, elle ne ploya aucunement. Fidèle à son image sur la passerelle, authentique réceptacle de magie, se dressant telle une inaltérable statue. De minces rictus souillèrent son faciès tandis qu’elle soutenait le colossal globe de flux.

— Je ne suis pas ta rivale, affirma-t-elle. Je te suis supérieure en toute catégorie.

— Ton arrogance te coûtera-t-elle ta fugace existence ? menaça Nasparian.

— À quoi riment ces pauvres tentatives d’intimidation ? N’as-tu pour objectif que de répandre le chaos ? Affronte-moi directement au lieu d’impliquer mes compagnons !

Une nouvelle salve frappa, résultant en une succession de grésillements, suite auxquels Vazelya dut se courber. Seul Dehol osa s’approcher tant le flot de magie saturait.

— Tes compagnons sont tout autant coupables que toi, accusa Nasparian. Trop longtemps vous avez exploré ce territoire. Delcaria aurait dû vous tuer, bon sang ! Mais il semblerait que j’ai mal évalué ta cruauté, Vazelya.

— En quoi ce territoire est-il tien ? répliqua la mécène. Quiconque ralentit la progression de notre quête se doit d’être désintégré.

— Nous nous accordons sur notre approche. En tant qu’importun obstacle, j’espère alors que tu comprendras.

Surgit une série de cinq éclairs. Toutes frappèrent le même point et transpercèrent l’égide. Atteignirent leur cible avant qu’elle ne pût s’en prémunir totalement.

La foudre impacta Vazelya en plein abdomen. Un hurlement s’ensuivit, perça au-delà du martèlement de la pluie et du grondement du tonnerre, paralysa tout un chacun. Vazelya s’effondra mollement, comme si la magie l’avait abandonnée. Des lignes de particules s’extirpèrent de la passerelle à haute vélocité, renoncèrent à un corps désormais fragilisé. Une once de fumée s’exhalait de la plaie brûlante.

Ainsi la débâcle s’inscrivit dans la confusion.

De profonds plis ternissaient son visage, des larmes creusaient des sillons sur sa joue, pourtant Dehol n’en avait cure. Il se pencha auprès de Vazelya à brûle-pourpoint. S’assura que sa respiration lui parvenait encore, que son cœur battait toujours. Ignorait la fureur de la foudre, la force du déluge, même l’épreuve à laquelle la caravelle était soumise.

— Soignez-la, je vous en supplie ! implora-t-il. Sa blessure est grave !

Makrine courut sur cet appel, aussitôt talonnée par Zekan et Mélude. Fixé vers l’avant du navire, gardant son équilibre envers et contre tout, Turon hésita à faire volte-face. Il remarqua néanmoins l’obstination avec laquelle Héliandri se tenait au bout du navire.

Impavide, imperturbable. Tant pis si l’impact des vagues la submergeait d’écume salée. Peu lui importait si elle ne se maintenait qu’à la volonté d’une mer déchaînée. Car l’aventurière ne se retirerait pas d’une foulée.

— Où est ta voix, Nasparian ? provoqua-t-elle. Penses-tu nous avoir vaincus ?

— Ne reste pas là ! cria Amathane. Je nous protègerai autant qu’il le faudra, mais l’océan t’emportera !

— Je m’en fiche !

Héliandri se déploya. Écarta ses bras au maximum. Raide, fière, un large sourire embellissait ses traits. Quelques contestations, surtout de Turon, se noyaient sous le tintamarre de la tempête.

— Dévoile toute ta puissance ! hurla-t-elle. Tu as peut-être terrassé Vazelya, mais moi je suis encore là ! Je n’ai pas besoin d’une égide imparable pour me dresser contre toi !

Héliandri persévéra. De pernicieuses vagues, grandissant de secondes en secondes, risquaient de l’emporter à tout moment. La caravelle chavirait sans la déséquilibrer. Seule parmi tous, l’aventurière resta droite, comme insensible à ces phénomènes implacables. L’averse s’abattait et elle se délectait de la caresse des gouttes de pluie. La mer l’agressait et elle résistait à sa frénésie.

— Observe, Nasparian ! s’écria-t-elle. Tu m’as arrachée à mon amie, mais je la retrouverai ! Je grimperai chaque montagne, naviguerai chaque océan. Plus jamais nous ne serons séparées. Galvanisé de magie, isolé du monde, tu n’as aucune idée du lien qui nous unit !

Héliandri prévalut. En tête vers une destination inconnue, immobile en dépit des bringuebalements. L’aventurière chevauchait la mer comme si aucune turbulence n’accentuait le flux et reflux. Quoique les impacts pullulaient, son sourire resta intact sur son visage submergé d’eau salée. Pas le moindre clapotis, vrombissements et grondements ne l’altérait.

— Me penses-tu faible ? poursuivit-elle. J’ai vécu pire ! Ce n’est qu’une épreuve parmi tant d’autres, de laquelle je ressortirai renforcée !

Pendant que l’aventurière s’époumonait contre son environnement, Kavel s’abritait encore en relative sécurité. Il s’était abrité au milieu de la passerelle, auprès du grand mât, enfouissant son carnet dans sa besace. Des frissons glacés courbaient son échine et le clouaient sur place.

— Pourquoi la foudre ne frappe plus ? demanda-t-il, peinant à articuler.

Trempé jusqu’à l’os, l’historien était tenté de se recroqueviller. Il comprit encore ce que la statuette de Zinhéra incarnait aux yeux d’Adelris. Psalmodier était séduisant, observer était naturel.

Alors son regard perça à travers le rideau de pluie, révéla ce que la pénombre dissimulait. Une aventurière opiniâtrée dans la stagnation, jusqu’au moment où le garde la tira de là. Une mécène plongée dans l’inconscience, victime d’une profonde brûlure, par-dessus laquelle un flux smaragdin esquissait le soin. Une navigatrice flanquée de son partenaire, eux-mêmes trimant à manipuler le gouvernail. Peut-être que la foudre cessait de zébrer, mais le bateau risquait d’être englouti à tout moment.

Avant qu’il ne posât les yeux sur son aîné, un rugissement se répercuta, plus retentissant encore que la tempête.

Chacun retint son souffle, incapable de refouler leurs tremblements. Le sourire s’était effacé du faciès de Héliandri. Des rictus sillonnaient celui d’Amathane. Dehol s’accrochait à sa protectrice inconsciente, bientôt envahi de pleurs. Et alors que ses ongles ripaient sur le bois humidifié du mât, Kavel se fixa sur l’avancée résolue d’Adelris, qui venait de défourailler.

— Tout ira bien, murmura-t-il d’une voix plus douce qu’à l’accoutumée.

— Nous ne savons pas ce que c’est ! s’écria Kavel.

Adelris décocha un sourire à l’intention de son cadet. Ni les grosses gouttes dégoulinant de ses tresses, ni l’instabilité de la passerelle n’affaiblirent ce moment. Au lieu de quoi il braqua davantage sa hache, dont le tranchant étincelait contre toute attente.

— Voilà ce que j’ai compris, déclara-t-il. Nasparian veut nous occire par tous les moyens possibles. Pas forcément avec sa propre magie.

— Une raison de plus pour préconiser la prudence ! dit Kavel.

— La menace est sans équivoque, petit frère. Que Zinhéra me protège, car aujourd’hui, j’accomplis mon rôle.

Adelris se hissa jusqu’au bastingage latéral Enserra ses mains mouillées autour du manche de son arme. Une étincelle raya son visage sur lequel nul effroi n’apparut. Il était au-devant de ses compagnons, immobile malgré les oscillations. D’ici il percevait les frissons qui pétrifiaient son frère et ses amis. D’ici il sentait leurs veines se glacer, recourbés face au péril inconnu.

Tous n’aperçurent cependant qu’une ombre. Des ailes et de pattes de grande envergure. Une créature qui fila à une vitesse incommensurable.

Et sur son passage brisa la caravelle en deux.

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