Chapitre 2 (3/3)
En soirée, je me décris généralement comme la blonde de service. Ça m’aide à excuser tout ce que je ne comprends pas du premier coup. Bon, j’essaie de me reconcentrer, et me démène autant que possible pour éviter de me perdre dans mes réflexions. Je tente de me focaliser sur une seule d’entre elles, sans y parvenir. Alors, au bout d’un moment, je choisis, comme trop souvent, de me remémorer les souvenirs avec ma mamie Henriette. Cette femme a beaucoup compté dans ma vie, je l’ai énormément aimée. Généralement, dans ces instants, les larmes coulent le long de mes joues et une pointe se forme dans mon cœur. Mamie Yéyette a remplacé ma mère qui a décidé de me renier à l’âge de seize ans, et de me foutre dehors, par la même occasion. Mon aïeule, comme je l’appelais de temps en temps pour la taquiner, m’a accueillie, soutenue dans les moments où j’étais au fond du gouffre, elle a tenté de me comprendre, sans toujours y parvenir. Il faut dire que j’étais vraiment difficile, notamment à l’adolescence. Elle a même essayé deux ou trois fois de renouer le contact avec mon père, alors qu’il s’est barré avec sa pouffe le jour de mes cinq ans. Je ne l’ai plus jamais revu, il n’a jamais demandé de mes nouvelles. Encore un beau connard.
Je me force à passer à autre chose, mais c’est trop tard. J’aimerais tellement que quelqu’un débranche mon cerveau pour que je puisse enfin respirer un peu. Mes émotions m’étouffent, je n’en peux plus.
Comme toutes les nuits, d’aussi loin que je me souvienne, je vais mal dormir. Je vais vivre mon sommeil et mes rêves. Je ne me repose jamais, mes pensées incessantes et mon imagination débordante m’en empêchent. Je ferme les yeux, et j’attends que demain arrive.
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