Chapitre 1

3 minutes de lecture

Comme chaque jour, je repense à lui. Un an à me rappeler de la catastrophe dès le réveil. Des cauchemars à ne plus les compter. Ceux qui vous obsèdent pendant des heures et passent enfin au moment de s’endormir, pour continuer quelques instants plus tard. Mais la vie a repris depuis.

Je me dégage de mon lit, les pensées encore embrumées par un réveil douloureux. Ma main gauche vient tenter de détendre mon oreille endolorie par les bouchons bleus qui traînent sur mon coussin. Il faut dire que les murs sont fins dans mon immeuble. Aucune intimité. Aucune tranquillité. Surtout lorsque le téléphone sonne à cinq heures du matin pour partir au travail !

Aujourd’hui, je me prépare à subir la dernière journée difficile de la semaine avant le week-end. Heureusement que j’ai posé mon lundi, d’ailleurs ! J’ai prévu d’aller gambader dans la forêt avec une amie.

À cette pensée, je ne peux pas m’empêcher d’esquisser un sourire. Elle me plaît, bien évidemment, et je crois que c’est réciproque. Notre petit jeu me convient et permet de maintenir une tension plutôt agréable entre nous.

Je m’empare du beurre, puis m’assieds. Je grommelle lorsque je ne vois pas le pain posé sur la table. Peu importe l’heure, je déteste me relever lorsque je m’apprête à manger !

J’allume la télévision et écoute à moitié les informations, comme beaucoup de gens à cette heure-ci. Il faut dire qu’avoir un léger bruit de fond est toujours plus appréciable qu’un long silence perturbant.

Je me perds dans les limbes de ma tête, les yeux fixés sur mon mur blanc épuré. J’ai la chance de disposer d’un cinquante mètres carré en région parisienne avec deux pièces. Malgré le loyer relativement élevé, je parviens à vivre convenablement.

Soudain, une ombre m’effraie à côté de la télé. Une forme noire rampante de la taille de ma montre jaillit de derrière la commode. Par réflexe, je regarde mes bras et ne distingue aucune trace de morsure. Je déteste ces bestioles, bien qu’elles soient très utiles dans notre monde ! Il faut dire qu’il y en a certains au travail, on se demande à quoi ils servent réellement.

J’approche mon chausson de son corps, impressionnant pour moi à cette distance, et l’explose de toute ma force.

Après avoir nettoyé la trace de sang au vinaigre blanc, je me lave les dents et enfile une paire de baskets. Mes clés en poche, je descends les marches. Mais une porte claque dans la cage d’escalier.

Cela n’a peut-être pas d’importance, mais je connais suffisamment bien la routine des habitants pour savoir que je suis le seul à être levé si tôt. Au bout de cinq ans dans la même résidence, à entendre les mêmes bruits, les mêmes voitures rentrer à la même heure, une intuition se profile à l’intérieur de mon esprit.

Je regarde ma montre et vois que j’ai encore un peu de temps.

Je grimpe une marche, doucement, comme si mes voisins pouvaient entendre chacun de mes mouvements. Un sursaut étripe mon cœur. Un frisson parcourt mon échine.

Une deuxième marche, puis une troisième passe derrière moi. Enfin, l’étage tout entier est avalé par mes pas. Mais les portes sont bien fermées. La fenêtre de l’étage n’est pas ouverte.

Cette fois-ci, je me fige sur place après qu’une voix ait retenti.

Je la reconnais entre mille. Cependant, c’est impossible, il n’est plus de ce monde.

— Antoine, je suis toujours là, près de toi.

Je me retourne dans la direction de la voix qui vient de prononcer ces mots. Personne. Simplement le fruit de mon imagination.

Pourtant, je l’ai clairement entendu. Il m’a appelé.

Non, mon frère jumeau est mort depuis un an. Je dois faire mon deuil.

Je secoue la tête et redescends les marches pour sortir sur le parking privé. Après être entré dans ma voiture, je mets les clés dans le contact, me masse les tempes et démarre le moteur.

Un bourdonnement tremble dans la poche gauche de mon jean ; je viens de recevoir un message d’une collègue de travail qui me propose de boire un café en arrivant. Je pense que la proposition n’aurait pas pu tomber à un meilleur moment !

Annotations

Vous aimez lire Valanaire ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0