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Un beau matin, une immense limousine aux couleurs du pays et du PAV s’immobilisa devant le poste de contrôle de la cité. Comme pour toutes les cités, le poste de garde avait été maintenu, même si les enceintes avaient été supprimées depuis longtemps. Il servait à indiquer le passage du monde des citoyens au monde des nawaks, même si tout le monde le savait. Bien que non prévenus, les gardes se figèrent dans un garde-à-vous à son entrée, puis à sa sortie, les empêchant de distinguer les passagers, avant que le véhicule ne s’éloignât dans un chuintement. Les vigiles reprirent leur respiration.

Dans la voiture, HDP trônait, inquiet, la communicante donnait les derniers détails et la traductrice simplifiait pour les trois débiles, la maquilleuse collait les derniers poux avec un gel béton. Le mot d’ordre était simple : battement d’ailes, pose recueillie et la fermer, quoi que l’Autre (épithète peu aimable, omis par la police de la bonne convenance) dise. « Le truc habituel, quoa ! », marmonna Uriel, qui aurait surtout voulu jouer avec les boutons des vitres, vexé de la tape sur les doigts reçue d’HDP. Ce mec l’impressionnait.

Arrivé, tout ce petit monde descendit de voiture. Gérard et matou avaient été relookés pour ne pas trop démarquer dans cet environnement. Ils regardaient tous les deux ce palais impressionnant qu’Uriel traversait, indifférent. Il faut dire que beaucoup de ses séries se découlaient dans des palais, de tout âge et de toute géographie, et que, finalement, celui-ci se montrait très banal. Les couloirs avaient été vidés, même si la petite troupe était passée par la porte dérobée.

Seul un huissier marchait devant, incapable de se retourner, et baissant la tête pour laisser passer l’invité. Même sous la torture, il n’aurait su décrire le visiteur secret. HDP pénétra dans le bureau et se tint debout près de la porte, prêt à intervenir, tout comme les deux gardes républicains, en ordre de bataille. Le PAV se leva avec un grand sourire et accueillit le phénomène, ne sachant s’il devait lui serrer la main, selon le protocole 488, lui donner l’accolade, protocole 322, ou s’incliner respectueusement, protocole non prévu. Il opta pour cette dernière solution, ressentant une aversion pour les plumes. Bien qu’il la joua mâle alpha, la PAV, comme les religieux, n’en menait pas large. Quand il se rendit compte de la réalité des ailes, sa crainte augmenta, surtout avec ce déploiement assorti d’un bruit plus imposant que celui de l’envol des canards de son parc. Ses acolytes, qui savaient prendre des décisions douloureuses pour les autres, n’en seraient pas revenus pas de voir leur leader charismatique si obséquieux. Le chef se heurtait à un problème auquel aucune note ne l’avait préparé : est-ce que tous les anges sont des enfants ? Heureusement, ce n’était pas une fille ! Et si ce sont des enfants peut-on leur faire confiance ? L’État payait une fortune ces soi-disant élèves doués et pas un n’avait été en mesure d’anticiper la venue d’un ange. In petto, il se proposa de réformer cette École, avant de revenir à son mouton à plumes, aussi silencieux qu’insondable. Il finit par pérorer doucement, chose qu’il savait très bien faire, appréciant l’intelligence et la profondeur de ce qu’il s’entendait dire. Un obscur ambassadeur d’Afrique l’attendant pour des intérêts particuliers, il prit congé de l’Ange. Autant ses sbires que Hubert attendaient quoi penser. Sa tirade, quelle leçon mémorable, resta dans les annales : « Se confronter au Divin rend modeste ! ». C’est toujours ce qu’il ressentait de la part de ses visiteurs confrontés à son génie.

L’Archange étant validé par la PAV Toute-puissante, c’est avec une grande satisfaction que HDP orienta tout son monde vers un manoir discret du Perche : l’aventure trébuchante commençait vraiment.

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