Où 6/10

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Il se débattit comme un damné. Elle n’avait jamais senti une telle rage de l’emporter. Sa main qui tenait habituellement son épée continuait de chauffer, une odeur de chair grillée s’en échappait. Finalement, sa proie cessa de se débattre, et la douleur s’attardait dans sa paume.

La garde rapprochée attendit que Kaïros sombre dans l’inconscience avant de le libérer. Enfin, elle put contempler sa main et grimaça. Sa peau avait commencé à fondre sur son pommeau, quelques lambeaux de chair étaient restés sur l’objet. Comment…

Un mouvement attira l’attention d’Ombre, et Hênn-fia lui tendit les mains en coupe. La duelliste lui tendit précautionneusement sa main blessée, sentant la chair grillée. La même lueur blanche et dorée brilla, émanant de l’intérieur même des mains de la petite blonde, et une chaleur tiède et apaisante irradia sur les brûlures. La rousse contempla, éberluée, la reconstruction des chairs sur sa main.

Elle leva les yeux vers la guérisseuse, impressionnée. Aussi, elle se demandait si les trois lettres gravées sur son dos pouvaient disparaître de la même manière. Si oui… Hênn-fia se détourna d’elle, fit étinceler ses mains sur la gorge de Kaïros et ce dernier se releva, penaud. Il s’adressa à Ombre d’une voix confuse, et réintégra le cercle, penaud.

Personne ne lui succéda dans l’immédiat, l’étrangère put ramasser son arme, et débarrasser la poignée des marques de brûlure. Un frisson la traversa quand elle se rendit compte de toute la magie dont elle venait d’être témoin. Ces dragoniens-ci différaient beaucoup de ceux de chez elle, ainsi que des esclaves de Vorn.

Les inconnus s’échangèrent quelques mots, et celui à l’accent bizarre coupa court à la discussion en s’avançant. De toute évidence, il se délectait déjà du combat. L’épée qu’il fit apparaître était de bien meilleure facture que ce qu’avait vu la duelliste jusque-là. Lui se déplaçait comme un vétéran, avec déjà une stratégie en tête.

Il s’apprêtait à lancer l’offensive, quand Isséri brisa le cercle en grondant. Ssdvenna’êk se figea et ne s’inquiéta pas outre mesure d’Ombre qui parait déjà. Quelque chose de froid et solide la saisit au poignet, et Isséri parla.

- Stenevâk’ orvenam Ssdvenna’êk. Kah. Tius nek’ dvos ?

- Viokà, Isséri ; s’inclina le dragonien.

Il rengaina, et recula jusqu’à réintégrer sa place initiale, main droite sur le cœur. Ombre observa ce qui retenait son poignet. Une forme noire, absorbant la lumière, l’enserrait. Elle dévisagea Isséri, qui fit apparaître une épée magnifique, certainement issue du talent d’un forgeron d’exception. Pourtant, plutôt que de chercher un contact armé quelconque, la cheffe demeura statique.

Elle tendit la main, et bougea subtilement les doigts. D’autres rais noirs apparurent, crurent, se saisirent d’Ombre qui n’osa pas se débattre, et la soulevèrent. Suspendue par les épaules, pétrifiée par cette débauche de magie, l’étrangère attendit la suite avec angoisse. Isséri lui parla, et Ssdvenna’êk lui traduisit :

- Dis que tou te sssoumets à ssson ôtoritè. Et âle te libèrrr.

Il cracha à nouveau. C’est avec peine que la prisonnière prit une goulée d’air puis, lorsqu’elle ouvrit la bouche, Isséri lui dicta :

- Nêh ktovrhër yosstembleâss Aniogar rhe Issériêh.

De son mieux, elle prononça la formule étrange. Lorsque la prononciation convint à Isséri, cette dernière la redéposa au sol avec douceur. Elle demeurait froide et conservait toute sa prestance. Ombre se tourna vers le traducteur involontaire :

- À quoi me suis-je engagée ?

- Respecter lôah Aniogar. Et ôtirtè Isséri.

- Que va-t-il adve… arriver à Gérald ?

- Loui sous toit, ou loui par là ; grogna l’écailleux en montrant la direction de la forêt.

Ombre pinça les lèvres.

- Et…

- Tôa issy ; tôa Aniogar. Tou pars, tou meurs. Pas par nô. Par ôtres frèrrrr.

Le cercle se brisait, chacun retournait vaquer à ses occupations, toujours obnubilés par les deux rescapés. Certains interrogèrent le tisserand sans l’approcher, il leur répondit abruptement. Isséri partit avec Hênn-fia sous la grande tente.

Ombre s’intéressa à son seigneur avec crainte. Il vivait toujours. Il ne portait aucune entrave. Elle se demanda combien de temps cela durerait. Moins d’un siècle selon l’étrange traducteur… sous quelles conditions ? Elle lui posa la question, il ne trouva pas de termes pour lui répondre. À la place, il l’attrapa par le bras, et lui annonça qu’elle méritait une meilleure tenue.

Il l’emmena près de son métier à tisser, et la fit patienter. Il frappa à un pieu marquant l’entrée de la tente, Hênn-fia en écarta les pans. Il lui demanda quelque chose, et elle revint en lui tendant un coffre.

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