14. ANTHEM OF THE ANGELS

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REESE

Mon frère est mort, je pensai ne jamais dire ça avant qu’on est cent ans. Il a disparu d’un coup comme une étoile filante. J’ai l’impression qu’il n’a été que de passage dans ma vie, comme si les dix-huit années qu’on avait passé été juste un instant, une seconde dans ma vie. C’est une sensation atroce, comme si on s’été attaché à quelqu’un qui n’avait jamais existé.

J’ai eu aussi la lourde tâche d’appel un à un ses amis pour leur annoncer son décès. Ce sont les appels les plus compliqués que j’ai dû passer. C’est horrible de les entendre pleurer, d’entendre leurs questions aux quels je n’ai pas les réponses. Mais pour Andy je n’ai pas pu, je devais lui dire en face, mon frère tenait à elle et ça se voit dans les messages qu’ils se sont envoyés, je les aie lu quand on m’a remis le téléphone de Scott.

— Salut, dis-je quand elle m’ouvre la porte, je ne sais pas comment te dire ça…

— Scott est mort, c'est ça, dit-elle les larmes aux yeux.

Je hoche la tête n’ayant plus les mots.

— Avant de mourir, il a écrit un message qu'il n'a pas eu le temps d'envoyer. Mais je pense qu'il aurait voulu que tu le lises.

— Je… Est-ce que tu peux le lire pour moi ?

— Oui, dis-je en pénétrant chez elle

Je respire un grand un coup avant de commencer :

— "Andy je suis désolé, je n'aurais pas dû couper les ponts. Mais c'était compliqué pour moi de te voir comme une amie. Je suis tombé amoureux de toi et comme d'habitude je ne voyais pas le positif de cette relation, de ce qu'elle pourrait nous apporter. J'aimerais qu'on essaye, j'aimerais que tu m'aides à régler tout mes problèmes, à être heureux. Je t'aime et je veux vivre avec toi, que tu m'empêches de sombrer quand mon frère mourra. Je veux m'en sortir et je veux que tu sois à mes côtés." Scott n'a jamais dit ça à quelqu'un, il était prêt à se battre mais la vie en a décider autrement.

Andy fond en larmes :

— Oh non, je n'aurais pas dû te lire ça.

— Viens là.

Elle me prend dans ses bras et mes pleurs se joignent au sien. Je m’en voulais d’avoir connu l’amour et pas lui, je m’en voulais de ne pas avoir tout fait pour qu’il sorte avec elle. De nous deux, Scott était celui qui mérité le plus d’être heureux, parce qu’il s’est tellement battue, il a tellement fait semblant de l’être qu’il méritait qu’un jour ça soit réelle. Mais il est mort et je ne peux plus rien n’y faire.

Une semaine après son enterrement, je retourne au lycée sans lui, je n’y pas remis les pieds depuis qu’il a disparu et à peine franchi les portes que j'ai envie de m'enfuir. Les gens me regardent avec tristesse, surprise. Certaines me souhaitent leurs condoléances, mais je n'en veux pas, je veux qu'on me laisse tranquille.

Je passe alors devant le casier de Scott, un mémorial a été installé. On y trouve des photos où il sourit, il est heureux, des fleurs, des mots. Mais tout ça me fait plus de mal que de bien, ça me rappelle juste qu'il n'est pas là. Alors dans un élan de colère, je détruis tout. Je laisse s'échapper toute la rage qui me dévore de l'intérieur. La rage de l'avoir perdu, de ne rien avoir pu faire. Les fleurs, les mots sont réduits en miettes, la table sur laquelle tout reposé n'est plus. Les gens me regardent dans l'incompréhension et le choc de mon acte. Moi-même je ne sais même plus pourquoi j'en suis venue à faire ça, alors je m'enfuis, parce que ses derniers temps c'est tout ce que je sais faire.

Je m'arrête alors à la sortie du lycée et m'assois désespère sur les marches. Je sens la tristesse monté et le manque de plus en plus présent. Mon frère était l'un de mes seuls amis, mais maintenant qu'il n'est plus là je me sens seul et abandonné. Une main sur mon épaule me montre le contraire :

— J'ai vu ce que tu avais fait au mémorial. Je voulais savoir si tu allais bien, me demande Angel.

— Ça pourrait allait mieux.

— Tu sais ton frère avait peur de te perdre, c'était son angoisse. Il pensait qu'il ne le supporterait pas, qu'il se noierait. En fait il voulait te protéger de ses sentiments qui le détruisaient, il ne voulait pas que tu aies apporté ce poids. Il voulait te montrer que qu'importe ce qu'il ressentait il serait là pour toi. Mais il a fini par me les cacher aussi et être tout seul face à tout ça. Il t'aimait plus que tout au monde et son objectif s'était de te protéger coût que coût.

— Mais tout ce que je voulais c'était l'aidé aussi, lui donner de l'espoir quand il n'en a pas. J'aurais aimé qui me dise tout ça, que je puisse l’empêcher de sombrer, mais il n’a rien fait et moi non plus. Je l’ai laissé se détruire sans agir. J'ai envie de lui en vouloir, mais je ne peux pas et ça m'énerve. Ça m’énerve parce que je me sens responsable de tout ça.

Les larmes me sont montées aux yeux et Angel est dans le même état. J'avais l'espoir qu'au regard du nombre de jours qu'il me reste à vivre, le deuil serait plus facile. Mais c'est faux, c'est douloureux, presque destructeur. Je me rends compte que pour Scott cela aurait été une trop grande épreuve. Il aurait fuir tout ça et ça aurait mal fini, c'est horrible, mais je me demande si ce n'est pas mieux comme ça. Là où il ait, il ne souffre plus, il n'a plus peur, le poids qui le menacer de le faire sombrer n'est plus. Mais je me dis que j'aurais pu faire quelques choses pour le sauver, l'obliger à rester cette nuit-là, à me parler et ne pas faire comme si je ne savais pas où il allait. C'est cette culpabilité qui fait mal, on se sent toujours coupable de sa perte.

Je suis rentré chez moi me reposer, retourner au lycée été prématuré. Mais je voulais échapper à l'ambiance lourde dans la maison. Mes parents ne vont pas tarder à se retrouver seuls, je ne sais pas si leur couple, leur amour va survivra à ça. J'espère juste qu'ils arriveront à remonter la pente, à être heureux de nouveau.

Je monte à l'étage et m'apprêt à rentrer dans ma chambre. Mais je ne peux m'empêcher de regarder la porte fermée de celle de mon frère. J'ai encore envie de croire qu'il est là-dedans, qu'il va sortir, me sourire. Malheureusement, je ne peux pas continuer à penser ça, il faut que j'avance même si dure. Ma main tremble, hésite sur la poignée, quand elle sera ouverte tout mes espoirs s'envoleront avec lui.

Un air frais s'échappe quand je rentre enfin. Je regarde les posters de films d'horreur sur ses murs, ses films qu'il le faisait rire et qui m'ont toujours effrayé. Puis sur une étagère les CD d'Ed Sheeran qu'il passait en boucle, ma main s'arrête sur l'album ÷. Je le mets alors écoutant Supermaker flowers, c'était sa préférée, mais aussi la plus triste. Je ne peux retenir mes larmes au refrain. Je le revois chantonner cette chanson en lisant ses bouquins sur l'astronomie. Il a toujours été fasciné par les planètes, les étoiles, sont plus grand rêve s'était de devenir astronaute.

Je m'allonge sur le lit, le cœur lourde, je n'ai plus envie de bouger, de faire quoi que ce soit. Mais une photo sur sa table de nuit retient mon intention, ma famille au complet dans un cadre cassé. Je le sers contre moi de toutes mes forces, comme pour garder en mémoire une famille heureuse et non en deuil.

Les jours passent, ma fin se rapproche et j'ai de plus en plus peur. Angel est là à mes côtés, elle passe ses journées avec moi. Et je m'en veux de me battre pour être heureux alors que la femme de ma vie est là. Mais j'ai besoin d'elle, de son sourire, de ses "ça valait".

L'avant-dernière semaine arrive, je sors dehors profitant une ultime fois de l'automne, du vent sur mon visage, du paysage. Main dans la main, nous regardons les feuilles tomber, je ne peux pas m'empêcher d'être nostalgique de m'imaginer mon frère et moi faisant une bataille de feuilles mortes. Son rire me manque, ses bêtises qu'on faisait à deux, ses moqueries. Mais tout ce que je veux sais l'oublier, qu'il me laisse heureux le temps qui me reste. Si seulement je pouvais claquer des doigts et faire disparaître ce stupide deuil qui me ronge :

— Reese, tu penses encore à lui ?

— Oui, désolé, je ne devrais pas avoir la tête ailleurs quand t'es près de moi.

— C'est ton frère et pour te dire je pense à lui tous les jours. Je ne pensais pas que serait aussi dur, mais tu sais quoi, on va rentrer se blottir l'un contre l'autre et regarder des séries télé.

Je souris et nous faisons demi-tour, comment elle fait pour toujours avoir le mot, l'action qui me redonne du courage, de la joie.

Le froid commence à me donner mal à la tête, j’en fais abstraction et nous continuons donc d'avancer. Mais la route commence à tanguer. Non, pas maintenant, il me reste du temps. Je regarde Angel paniquer, je ne veux pas partir pas maintenant. Je suis effrayé de ne plus l'entends, j'arrive à peine à lire sur ses lèvres. Puis je m'écroule au sol sentant mon corps convulser. J'aperçois Angel partir chercher de l'aider, mais tout ce que je veux c'est qu'elle ne me laisse pas seule. Je ne peux plus bouger, je ne contrôle plus rien. Mes yeux commencent à se fermer, j'essaye de me battre, s'il vous plaît laisse moi du…

Je suis surpris de me réveiller à l'hôpital, en fait je suis plus surpris d'être encore en vie. Quelque chose sur mon visage me gêne, à tâtons je sens le tuyau de la canule nasale. Est-ce que c'est grave à ce point-là ? Respire, c’est juste qu'un outil pour que ton corps s'oxygène un peu mieux. Rien d'inquiétant, tout va bien se passer, tu vas rentrer chez toi et c'est tout.

— Comment te sens-tu ? me demande ma mère

— J'ai encore un peu mal à la tête.

— Tu veux qu'il augmente les antidouleurs ?

— Non, ça devrait aller.

Ma mère est bizarre, elle a l'air plus triste que d'habitude, accablé même.

— Maman qu'est-ce que t’a dit le médecin ?

J'ai l'impression qu'elle rassemble son courage, ses idées avant de répondre.

— Chéri, tu ne pourras pas sortir de l'hôpital. Tu vas passer la fin de la semaine, de… De ta vie ici. C'est mieux pour toi.

C'est comme si on m'avait donné un coup de massue sur la tête. Je pensai bêtement que je pourrais vivre la fin de ma vie tranquillement, me balader, retourner au lycée, voir une dernière fois ma chambre. Mais je ne ferai rien de tout ça, je ne pourrais même pas observer les étoiles une unique fois. Ça m'effraie, ça me terrifie de me dire que dans les jours, les heures avenir je pourrais mourir.

Jusqu'à maintenant tout ceci me paresser irréel, comme si c'était une mauvaise blague qui avait duré un an. Mais tout ça devient concret, je ne veux pas mourir, je refuse. Mais qu’est-ce qu'on peut faire quand on n'a pas choix, quand on aimerait qu'il y ait une sortie de secours ?

Les jours passent et se ressemble, mes parents et Angel restent auprès de moi, les médicaments contre la douleur, eux, m'assomment. La chambre d'hôpital est devenue mon sanctuaire, j'en connais chaque recoin et cet endroit m'énerve, m'exaspère. Mes parents ont beau l'avoir aménagé avec les affaires de ma chambre, mes vaisseaux spatiaux, mes affiches et mes romans de science-fiction, je déteste cet endroit chaque jours un peu plus.

Une seule fois je peux sortir de ma chambre, une unique fois pour profiter de la nature dans le parc de l’hôpital. Respirer l’air frais à plein poumons. Le soir, j’observe une dernière fois les étoiles avec Angel. Je me sens de nouveau vivant, comme si le pire n’allait jamais arriver. Il n’y a seulement que le bonheur de vivre c’est quelques instants, d’embrasser celle que j’aime, de rire avec mes parents. L’impression d’être heureux une dernière fois. Je profite de cet endroit, de cette vue qui disparaîtra.

L'ultime journée arrive et le matin même je réunis toute ma famille, Angel auprès de moi. Il faut que je leur dise adieu avant qu'il ne soit trop tard, parce que je n’ai aucune idée de l'heure, du jour à laquelle je m'en irai.

— Vous êtes tous les trois au courant, aujourd'hui s'achève peut-être ma vie. Vous ne savez pas à quel point j'ai peur, à quel point je ne veux pas vous laisser seul. Mais tout a une fin et la mienne est plus proche que celle des autres. Scott n'a pas pu vous dire tout ce qui avait sur le cœur. Contrairement à lui j'en ais l'occasion.

Papa, maman, je suis désolé que tout se termine. J'aurais aimé rester avec vous, être le dernier qui représente votre descendance. Promettez-moi une chose, aimez-vous et battez-vous pour une vie meilleure sans nous. Ne vous déchirez et par pitié ne vous en voulez pas, rien n'est de votre faute. Je vous aime plus que tout au monde, et vous avez été des parents formidables. Vous me manquerez.

Angel, je t'aime depuis que je t’aie rencontré. T'as toujours été là pour moi, même si c'était difficile. Tu me rends heureux quand je ne le suis pas. Tu m'en rendu fort et courage quand je n'ai plus d'espoir. Tu es une meilleure amie et un premier amour parfait. Je suis heureux d'avoir pu t'aimer le temps de quelques mois. Je suis fier de mettre battue pour toi.

Les gens disent qu'on n'oublie jamais son premier amour, alors je te demande de m'oublier, de refait ta vie. Je ne veux pas que tu te prives d'aimer à nouveau, pas pour moi. Promets-moi que tu te marieras que tu auras des enfants, parce que pour moi sera le plus beau cadeau que puisse me faire.

Pour finir, je veillerai sur chacun d'entre vous, mais je ne le ferai pas seul, Scott sera avec moi. Vous surmonterez tous ça, parce que vous êtes plus forts que vous le pensez. Et le plus important, vivez comme s'il chaque instant vous était compté. Je vous aime du plus profond de mon cœur, et même ses mots ne sont pas assez puissants pour le décrire.

Nos joues sont mouillées par les larmes, j'invite Angel à se blottir contre moi et mes parents à s'assoir, de me tenir la main. On est resté un bon moment comme ça à ce remémoré les bons moments, les souvenirs d’une vie que je quitte. Une heure après j'ai l'impression de voir mon frère qui me sourit, qui m'appelle, qui me dit de prendre sa main. Je sais que j’hallucine pourtant à cet instant, je n’ai plus peur, je n’ai plus mal, j’ai juste envie de le suivre et qu’on soit à nouveau réuni.

Alors dans un dernier soupir, je m'endors à jamais…

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