11. ALL I ASK...

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REESE

— Reese, réveille-toi.

Ce sont les premiers mots que j'entends ce matin, ce n'est autre que la voix grave de mon frère. Je me tortille dans mon lit avant d'ouvrir les yeux, Scott a le sourire jusqu'aux oreilles. Pour être honnête, je suis un peu perdu, qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi il me réveille ? :

— Reese tu n'as pas oubliés qu'aujourd'hui on a dix-huit ans.

Je le regard avec un air coupable, ça peut arriver d'oublier son anniversaire quoi que. Mais j'ai une excuse ma maladie, mais aussi le fait que j'ai rompu avec la femme de ma vie, que je meurs dans deux mois et que je vais fêter mon dernier anniversaire. On va dire que je n'ai pas la tête à m’amuser, pourtant chaque année ce jour si spécial se passe de la même manière.

Tout d'abord, le premier lever réveille l'autre pour lui souhaiter un bon anniversaire. Ensuite ma mère prépare un énorme petit-déjeuner avec tout ce qu'on aime. Mais aujourd'hui elle n'est pas aussi joyeuse que les précédents, son sourire et sa bonne humeur cache une lourde tristesse. Je fais comme si je n'avais rien remarqué et entame mon petit-déjeuner.

Généralement on passe la journée en famille ou en tout cas on essayer. Malheureusement aujourd'hui nous avons cours, mais mes parents refusent qu'on y aille, ils veulent passer cette dernière journée si spéciale avec moi. Je les comprends, après ça, je n'aurais plus jamais d'anniversaire, je n'aurais jamais soixante ans, ni d'enfants. Je ne connaîtrai rien du monde des adultes, c'est comme ça.

La journée est pesante tout le monde essaye d'être de bonne humeur, mais ils font semblant. Scott est le seul à se comporter un peu près normalement. Les jeux de société, le bowling, la promenade, pas une activité ne se passent sans que ma mère parte pleurer. Elle revient toujours le sourire aux lèvres, les yeux rougis et moi je fais comme si c'était normal. Mais rien n'est normale, personne ne s'effondre en larmes quand on fête un anniversaire, personne n'essaye de cacher qu'il va mal. Mais je garde tout ça pour moi et j'attends que cette journée horrible s'achève.

Le dernier repas de la journée arrive, ma mère a fait des lasagnes, notre plat préférer. Quand on était petit, on s'en mettait par tout et on rigoler, on se moquer de l'autre. C'était le meilleur moment de la journée où on discuter d'astronomie, de nos passions, des bêtises qu'on a fait. Chaque année au dessert on sort l'album photos de l'année passé, on se remémore tout ce qu'on a fait à deux. Mais cette fois, il n'y a que le bruit des couverts qui rythme notre repas, personne n'a envie de parler, personne n'a envie d'être joyeux. Le dessert arrive un brownie au caramel, avec deux dix-huit en cire allumé et un "Joyeux anniversaire Reese et Scott" marqué sur le dessus. Nos parents chantent Happy Birthday, mais je vois bien que ma mère se retient de pleurer :

— Stop, arrêter on dirait que je suis déjà mort. Vous avez vu les têtes que vous avez, entre maman qui a pleuré toute la journée, papa qui fait une tête d'enterrement. Vous croyez que c'est juste pour Scott, il n'a pas voulu un anniversaire aussi déprimant et moi non plus. Je voulais que mon dernier anniversaire se passe comme les précédents avec de la joie, de la bonne humeur. Je vais mourir, mais ce n'est pas une raison pour faire comme si tout était fini, comme si j'étais déjà enterré. Je sais que c’est dur, mais depuis quelque temps, j'ai l'impression que j'existe déjà plus pour vous.

Puis je m'enfuis de table et me réfugie dans ma chambre. Je n'ai pas la force de les affronter après tout ce que j'ai dit. Les larmes me montent et je ne peux pas les retenir. Je pleure de désespoir, de fatigue, de colère. Rageusement, je m'empare de mon oreiller et le serre contre moi de toutes mes forces comme s'il était une bouée de sauvetage…

SCOTT

Les mots de Reese m'ont retourné, je savais que cette journée avait été pénible pour lui, mais pas à ce point-là :

— On va aller lui parler, disent mes parents encore abasourdis.

— Surtout pas, vous allez aggraver la situation.

Nos parents sont complètement dépassés par tout ça, ils ne savent plus quoi faire pour l’aide, le soulager, ils essayent encore et encore, mais ils font plus de mal que de bien. Je ne leurs en veux pas, ils essayent de se montrer force face à tout ça et c’est loin d’être facile, je sais de quoi je parle. Je finis par me lèver, monte jusqu'à sa chambre et toque :

— Reese, c'est Scott, on peut parler.

Un petit oui se fait entendre et je pousse la porte. Mon frère est là en pleure, je m'assois à côté de lui et attends :

— Je ne veux pas mourir Scott, je veux avoir une vie comme tout le monde. Je veux grandir, apprendre, faire des erreurs. J'ai essayé de faire comme si tout était normal, comme si ça ne m'affecter pas. J'ai essayé de vivre normalement, même avec les nasée matinale, les migraines malgré les médicaments, les troues de mémoire. Mais ce qui me rappelle que la fin est proche c’est la façon dont les parents et toi vous avez de me regarder. J’ai l’impression d’assister à mon enterrement tous les jours. Quand Angel ignorer tout, elle me portait un regard doux et bienveillant. A ses yeux, je ne mourrais pas demain ou dans quelques mois. Lui dire ça été accepté la réalité et on n’est jamais prêt. Je suis terrifié Scott et j'ai l'impression de me battre tout seul. Pour les parents je n’existe déjà plus. Et toi, tu caches tes sentiments derrière ta joie de vivre, ça ne marchera pas éternellement Scott, à un moment ça te détruira. Tout ce que je veux là maintenant, c'est dormir et oublier cette journée.

— Regard moi, tu n'es pas tout seul, je suis là et je resterai jusqu'à la fin, parce que je me suis promis de ne plus jamais t'abandonner. Et cette journée ne doit pas forcément s'arrêter comme ça. Tu peux faire tout ce qui te plaît, aller cinéma ou reste ici lire un livre, mais je suis avec toi. Parce que, que tu le veuilles ou non on est né ensemble et c'est dix-huit ans doive être unique.

S'il savait toute force qu'il m'a fallu pour lui dire ses mots, pour ne pas lui dire qu'à mon dix-neuvième anniversaire, je serais seul, que j'aurais mal et que mon frère me manquera terriblement. Pour ne pas lui dire que ce jour sera horrible, parce que ma vie n'aura plus de sens. Mais à ce moment précis tout ce qui m'empêche de m'effondrer, c'est son sourire, l'éclat d'espoir dans ses yeux rougis. Je me battrai jusqu'au bout pour ça, pour voir une dernière fois ce sourire.

— Emmenez-moi dans un bar.

— Quoi ? répondis-je surpris et le sourire aux lèvres, tu détestes boire, faire la fête et tu veux que je t'emmène dans un bar. Tu ne veux pas aller en boîte de nuit temps qu’on y est ?

Mais le regard sérieux de mon frère me fait mourir de rire.

— Scott arrête de foutre de ma gueule. Je veux essayer.

Je reprends mes esprits essaye de ne pas l’imaginer ivre.

— OK.

Après avoir prévenu les parents qu'on sortait faire un tour, nous montons dans la voiture. Quelques minutes et feux tricolores plus loin, nous arrivons au HighLine Bar. Nous sommes accueillis par les pseudo-chanteurs qui se sont emparés du karaoké. Mais également par les nombreuses discutions, les rires, les verres qui tintent entre eux. Le tout crée une ambiance détendue qui invite à l’amusement. Nous nous installons au comptoir en pierre où je commande deux bières histoire de commencer la soirée en douceur. Mais à peine la bouteille arrive que mon frère l'a presque terminé :

— Doucement, je sais que tu veux t'amuser mais quand même.

Il me regarde alors l'air défieur :

— Celui qui boit le plus de shot de vodka à gagner.

D'habitude c'est moi qui propose les défis, mais Reese est d'humeur joueur ce soir. J'accepte sans aucune hésitation, de toute façon mon frère fini ivre avant même le troisième. Pour ma part, je commence tout juste à être bien.

Mais quelques shots plus tard, nous nous retrouvons sur la scène du karaoké à chanter à tue-tête Shake it of de Taylor Swift. J’ai l’impression de faire un concert, tendant le micro au public qui me donne des vents monumentaux. Les gens se bouchent les oreilles tellement nous chantons faux, nous siffle ou nous prie carrément d’arrêter le massacre. Mais on ne les écoute même pas tellement on s’amuse. On ne tient pratiquement pas debout, on rigole pour un rien et on pense danser comme des danseurs professionnels. La vérité s’est qu'on n’est même pas coordonner, qu’on se rentre dedans et que la danse n’a aucun sens.

Mais alors que je vais chercher un verre d’eau histoire de dessaouler. Mon frère monte sur le comptoir et ne veut plus lâcher le micro malgré les tentatives du barman pour le faire descendre. Je le regard faire les larmes aux yeux tellement je rigole. Je n'ai jamais vu Reese comme ça, je ne l'ai jamais vu ce lâcher autant. Cette scène est juste absurde, invraisemblable. Si on m’avait dit un jour que je verrais mon frère si timide d’habitude chanter devant tout le monde, je ne l’aurais pas cru. J’immortalise ce moment en le filmant pour pouvoir voir chaque jour de ma vie à quel point Reese était vivant.

À la surprise de tout le monde il commence à enlever son pull et son tee-shirt sur l'air de Sex on fire de Kings on Leon. Il jette ses vêtements à travers la pièce, mais ses derniers atterrissent sur une petite mamie, à qui il fait un clin d'œil.

Une partie des gens sont outrés, d’autre sont morts de rire, certain comme moi scande le nom de mon frère.

— Et maintenant on enlève le pantalon ! crie-t-il tout fier.

Mais s’en est trop pour le gérant qui ne s'amuse pas autant que nous. On finit par être jeté dehors, Reese se rhabille avec difficulté mettant ses vêtements à l’envers. Pour ma part, j’appelle un taxi n’étant pas assez sombre pour conduire, je récupérer la voiture demain matin.

La balade en taxi est mouvement, la moindre action du chauffeur nous vaut un compliment crié de Reese.

— Il a tourné à droite yeah, hip hip hip hourra pour le chauffeur !

Après ça et un pourboire conséquent nous arrivons enfin dans notre quartier. Dans les rues éclairées par les lampadaires, il n’y a pas un bruit, ni âme qui vivent à part nous. Mais le silence est brisé par mon frère qui chante à tue-tête, s'il ne s'arrête pas il va réveiller tout le quartier :

— Reese chut, les parents et les voisins doivent dormir.

Pour toute réponse j'ai le droit à un pouce en l'air et je souris en ouvre la porte.

Après avoir couché Reese, je m'allonge dans mon lit le sourire aux lèvres, repensant à cette folle soirée qu'on a passée. Reese n'en aura sûrement aucun souvenir, mais moi ils seront là dans ma mémoire. C'est cette image que je veux garder de lui. L'image d'un frère heureux, qu'il n'abandonne pas, qui se bat pour chaque jour qu'il lui est offert. Cette soirée s'est tout simplement le plus beau cadeau qu’il est pu me faire. Et je regrette de ne jamais pouvoir le remercie comme il se doit…

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