Chapitre 1

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Lundi, 6h du matin, appartement de Katherine.

Katherine se réveilla avec un mal de tête pas possible. Elle quitta son lit pour rejoindre la salle de bain où elle prit une douche rapide. Avant de se brosser les dents, elle prit son petit déjeuner ; des cupcakes qu’elle avait préparés exprès pour son rencard de la dernière fois. En les voyant, elle ne put s’empêcher de les engloutir d’un coup, comme narguer le pauvre homme qui n’avait pas réussi à gouter à sa bonne cuisine. Elle se coiffa en un updo élégant et rajouta son serre-tête préféré, celui avec des perles blanches. Elle se vêtit d’une robe lolita classique de couleur verte, sa mère aimait quand elle la portait parce qu’elle mettait ses yeux en valeur. A cette pensée, son cœur pinça : sa mère lui manquait. Katherine resta quelques secondes à regarder dans le vide avant de se ressaisir. Ce n’était pas comme si sa mère était décédée, les vacances de Noël arrivaient à grand pas, elle retournera en Irlande et retrouvera ses parents.

Elle s’assura qu’elle avait fermé sa porte à double tour avant de se diriger vers la gare. Le train menant à son université était le même qu’elle prenait pour aller au bar, sauf que c’était à une station plus loin. A 7h45, le train débordait déjà de monde ; des employés en retard, des lycéens voulant sécher la première heure de cours, des femmes allant à leur rendez-vous chez le médecin…Katherine n’entra pas dans ce train-là, elle préféra attendre le prochain, au moins, elle serait sûre de trouver une place de libre. De toute façon, son cours ne commençait que dans une heure, elle avait le temps.

A 8h45, les étudiants étaient toujours dans la cafétéria ou dans le jardin de la fac, profitant des dernières quinze minutes avant d’entamer leurs journées emplies de cours tous aussi ennuyeux les uns que les autres. Enfin, ça dépendait de leurs spécialités. Pour Katherine, les siens l’intéressaient et les appréciaient, elle ne se lassait jamais d’écouter ses professeurs expliquer pendant des heures. Elle les trouvait aimables et compréhensifs. Rien ne pouvait lui faire détester son département, enfin, c’était ce qu’elle s’était dite en début de semestre.

Katherine entra dans l’établissement spécialisé dans la peinture et soupira en voyant tous les regards se fixaient sur elle. Encore une fois, elle attira l’attention de ses camarades sans le vouloir.

« Mademoiselle aristocrate est arrivée ! Plaisanta un jeune homme en la pointant discrètement du doigt. »

Quand est-ce qu’ils muriront ? Cette pensée traversait l’esprit de la jeune femme à chaque fois qu’elle assistait en cours. En revanche, aujourd’hui, elle n’était pas d’humeur à écouter les sottises de ces imbéciles. Elle sortit son téléphone dont les écouteurs étaient enroulés autour de l’objet, elle les enfonça dans ses oreilles et monta le son à fond, puis entra dans la salle où débutera son cours. Pour booster sa confiance en elle et se convaincre qu’elle n’était source de moquerie seulement parce qu’ils la jalousaient, elle écoutait la chanson Wasabi de Little Mix.

La blonde s’assit à une table du premier rang, attirant comme toujours les regards des autres étudiants. Ces derniers avaient pris place en prenant soin de rester éloignés d’elle. *De vrais gamins* pensa-t-elle. Katherine jeta un œil sur son téléphone, encore huit heures et elle rentrera chez elle.

Lundi, 11h48, bar Freddy.

A cette heure-ci, peu de monde était présent dans le bar, mais ce n’était pas pour autant qu’il n’y avait pas de clients. Kaylani, vêtue d’un tablier blanc, courrait vers une table, un plateau à la main.

« Excusez le retard. Dit-elle avec un sourire en posant les verres et plats sur la table. »

Elle repartit au comptoir où d’autres commandes attendaient d’être servies. La clochette au-dessus de la porte d’entrée résonna, Kaylani prit les menus et les donna aux nouveaux arrivants dont l’un la zyeutait bizarrement, elle l’ignora. Elle rejoignit le comptoir une nouvelle fois où Josh, employé à temps pleins, essuyait la vaisselle propre.

« C’était quoi, ce regard ? Demanda-t-il avec un sourire au coin, sachant pertinemment ce qui allait se produire.

-Laisse tomber, c’est pas la première fois. Sourit-elle à son tour. Bon, je vais prendre leurs commandes.

-Bonne chance. Souhaita Josh et prit la commande d’une cliente, tout en gardant un œil sur Kaylani. »

La brunette rejoignit la table treize, elle mit sa main dans sa poche et en ressortit un vieux petit calepin, qui avait perdu toute son épaisseur à force de déchirer les feuilles, et un crayon.

« Je peux prendre votre commande ? Demanda-t-elle en leur gratifiant son plus beau sourire.

-Il n’y aurait pas une autre serveuse ? Questionna l’homme qui l’avait zyeutée.

-Je suis la seule disponible durant la matinée, monsieur. Votre commande ?

-Désolé, mais je n’ai pas envie qu’une noire touche ma nourriture, ni à mon argent. »

La bombe était jetée, une fois de plus. Kaylani avait deviné les intentions de cet individu dès qu’il avait posé ses yeux sur elle. Bien que les clients racistes se faisaient rares ces temps-ci, ça ne voulaient pas dire qu’ils n’existaient pas.

« Arrête tes conneries, Michael. Tu attires tous les regards sur nous. Lui chuchota son ami.

-J’ai bien le droit de choisir la personne qui me sert, quand même ! Répondit-il en haussant le ton. »

Kaylani lâcha un rire jaune, elle n’était pas d’humeur à écouter des propos absurdes à son sujet. Afin d’éviter tout conflit et de déranger les reste de la clientèle, la brunette appela une de ses collègues blondes. La jeune femme se retrouva donc au comptoir une nouvelle fois, le sourire toujours aux lèvres. Josh la regarda un instant et put lire de la déception dans ses yeux, ou était-ce de la tristesse ? Son regard se dirigea instinctivement vers le client qui reluquait sa nouvelle serveuse.

« Tu veux que je lui en touche un mot ? Demanda-t-il, attirant son attention.

-C’est gentil, mais laisse tomber. Répondit-elle en s’asseyant sur le siège rouge.

-Nous sommes au 21e siècle, et il existe encore des gens aussi stupides. Rétorqua une vieille femme avant d’engloutir ses pancakes au sirop d’érable, elle se tourna vers Kaylani. Ignore-les, ce genre de personne ne vaut même pas qu’on leur accorde la moindre importance.

-Merci, madame Stewart. »

La vieille femme lui rendit son sourire. Mme Stewart était une habituée du café. Adepte de pancake, elle aimait ceux que préparait le chef cuisinier de Freddy, sans oublier leur sirop d’érable qu’elle trouvait succulent. Une fois, elle leur avait demandé où le trouvaient-ils, dans quel marché l’achetaient-il, mais ils ne lui avaient jamais répondu, comme quoi c’était le secret du chef et qu’il préférait ne rien divulguer concernant ses trouvailles et recettes.

Kaylani l’observa commander une autre assiette et ses lèvres s’étirèrent en un sourire attendri, et dire que cette femme était toujours célibataire. La brunette fut tirée de ses songes lorsqu’elle entendit une musique retentir dans le café. Elle se tourna vers Josh, ce dernier lui lança un clin d’œil. Bien que le volume fût plutôt bas, elle reconnut la chanson Dance Monkey, une chanson que le personnel aimait la lui faire écouter à chaque fois qu’elle était victime de racisme. Etrangement, elle arrivait parfaitement à booster sa confiance en elle et lorsque la clochette retentit une nouvelle fois, Kaylani fredonnait le refrain, sa bonne humeur retrouvée.

Lundi, 16h13, université d’art plastique.

Katherine s’étira sur sa chaise, elle était assise depuis trois heures consécutives et devait avouer que ses fesses lui faisaient atrocement mal. Quel fut son bonheur lorsque leur professeur d’anatomie les congédiât quelques minutes avant la fin du cours. Toutefois, après avoir rangé ses affaires et était prête à sortir, l’enseignant les interpella ;

« Avant que vous ne partiez, j’aimerai parler de votre examen. Commença-t-il en ignorant les plaintes de quelques étudiants. Je vous demande donc un projet de fin d’année, tiré de votre propre imagination et non pas un copier-coller des projets appartenant aux étudiants de l’année passée. Sur un thème de votre choix. La note sera divisée en deux, une moitié pour le premier semestre et l’autre pour le deuxième. Etant donné qu’il ne reste qu’un mois et demi avant la fin de ce semestre, je vous demanderai donc de préparer des croquis. Votre dernier délai sera le 6 Janvier. Sur ce, bonne fin de journée. »

La salle de cours se vida petit à petit. Katherine, écouteurs déjà placés dans ses oreilles, marchait d’un pas rapide vers la sortie. A peine eut-elle franchis la porte qu’elle fut retenue brusquement par le bras. Sous l’effet de la surprise, la jeune femme oublia de faire remarquer au jeune homme blond son manque de courtoisie ; on n’agrippe pas une femme de cette façon quand même ! Comprenant son geste maladroit et surtout à cause du regard noir que Katherine lui lançait, l’inconnu se dépêcha de retirer sa main de son bras. Elle retira ses écouteurs.

« Pardon, je ne voulais pas être impoli. Balbutia-t-il en se grattant la nuque d’un air gêné.

-Et pourtant. Claqua la blonde, ses yeux toujours fixés sur cet inconnu. C’est pourquoi ?

-En fait…Hésita-t-il. J’ai l’habitude de te voir seule à l’université et je te trouve bien solitaire pour une femme aussi charmante.

-C’est le cas, cependant. C’est bon ?

-Euh… »

Elle ne lui laissa pas le temps de finir sa phrase qu’elle se retrouva déjà de l’autre côté de la rue. Marchant d’un pas rapide, la jeune femme voulait rentrer chez elle au plus vite. Non seulement la journée fut pénible pour elle, mais encore il avait fallu qu’un bel étranger fasse son apparition et essaie de la draguer, si elle pouvait appeler ça de la drague. Katherine savait qu’elle était naïve sur les bords, mais pas stupide ; du coin de son œil, elle avait remarqué des étudiants qui les observaient en se retenant de rire, sûrement les amis du jeune homme. C’était aussi clair que de l’eau de roche, ils payaient sa tête, comme l’avaient fait bon nombre de personnes.

En allumant les lumières de son appartement, Katherine eut une monté de nausées en raison de l’odeur de renfermé, elle avait oublié de laisser les fenêtres ouvertes ce matin. Elle se déchaussa, posa son sac sur la table du couloir et se dirigea vers la cuisine pour se mettre quelque chose sous la dent. Son placard était presque vide, elle ne trouva que deux paquets de pâtes, une boite de thon, trois tablettes de chocolats et plusieurs paquets de grains de maïs. Son choix fut rapide lorsqu’elle décida de manger du popcorn devant la télévision. Bien installée sur le canapé avec son bol remplis à ras bord, elle se promit de faire quelques courses quand l’envie se manifestera.

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