Dimanche 12 juillet 2015

Le réveil affiche 4h18. Les chiffres lumineux rouges ne sont pas suffisants pour éclairer les deux corps nus enlacés dans le lit. Un portable vibre… Puis quelques secondes plus tard, ce même portable crache une musique qui déchire la quiétude de la chambre.

— Sam, c’est ton téléphone ! grogne une jeune femme.

Agathe donne un léger coup de coude à Samuelle. Celle-ci tapote sur sa table de nuit à la recherche du son maléfique qui l’arrache à son sommeil. Elle le trouve, ouvre un œil et regarde l’écran. Il indique : « BERTRAND ».

Sam se dresse d’un coup, fait glisser le curseur vers la gauche et prend l’appel en s’éloignant de la chambre en direction du salon.

— Sam ! fait-elle d’une voix aussi claire que s’il était midi.

— Ouais, salut. On a besoin de toi tout de suite route des Plessis à Sainte-Luce pour un homicide... Tu peux être là en combien de temps ? demande Bertrand.

— Dix minutes !

— Je t’attends, dit-il en raccrochant au nez de Samuelle.

Bertrand Leclerc est le chef de la brigade criminelle de la Sûreté départementale de Nantes. Et lorsqu’il appelle son enquêtrice, Sam, il a pour habitude d’aller droit au but. Plus il est direct, plus c’est sérieux. Et cela n’a pas échappé à Samuelle.

Elle se glisse en silence dans la chambre et part à la recherche d’une culotte, d’un jean et d’un tee-shirt. Elle fait un détour par la salle de bains et trouve un élastique pour attacher ses longs cheveux blonds.

— Putain, pas le temps pour se maquiller ! ronchonne-t-elle à son reflet.

Elle se regarde dans le miroir, tente d’effacer le maquillage de la veille, qui a un peu coulé. La nuit dernière n’a pas été de tout repos, comme toutes les nuits passées avec Agathe. Agathe ! Qu’est ce qu’elle va en faire ? La réveiller et la foutre à la porte à 4h du mat’ ? Non… Pourtant, elle ne l’a encore jamais laissée seule chez elle. Prônant le « chacune chez soi », l’une comme l’autre… Soucieuses de garder une part de liberté malgré le sérieux évident de leur relation. Elle s’asperge le visage d’eau et fixe ses yeux gris, comme si ceux-ci allaient lui amener la solution. Et puis zut ! Elle se rend dans le salon, attrape un jeu de clefs et revient dans la chambre.

— Agathe ? Agathe ?

Sam essaie de capter l’attention de son amie à coup de baisers dans le cou.

— Hum…

— Dis bébé, je te laisse un double des clefs… C’est… Je dois y aller. Et… Ben, c’est plus simple comme ça, hein… Tu peux partir quand tu veux. Et… tu peux aussi revenir quand tu veux…

Agathe se redresse doucement. Elle allume la lampe de chevet et observe sa compagne, se demandant si elle est sérieuse. Sam qui refuse les engagements. Celle-là même qui refusait qu’elle reste dormir sur place il n’y a pas si longtemps. Terrifiée à l’idée de devoir partager un petit déjeuner… Sa Sam qui veut être libre comme l’air ! Elle sonde au plus profond de ses yeux gris sombre pour s’assurer que ce n’est pas une blague. Samuelle ne cille pas. Elle attend sagement un sourcil relevé et un sourire au coin des lèvres qu’Agathe daigne lui dire si elle accepte de prendre ses clefs. Un geste lourd de sens. Pire qu’une bague !

— Tu es sûre ? demande Agathe.

— Oui !

— Et tu veux que je revienne ce soir ?

— Oui…

— Tu sais…

Agathe n’a pas le temps de poursuivre, car Sam se jette pour l’embrasser tendrement.

— Je suis sûre, ma belle ! Mais je ne peux pas en discuter maintenant. Je file.

— C’est grave ? s’enquit la belle au bois dormant.

— Je t’appelle dès que je peux, esquive la flic.

Sam s’écarte. Elle attrape son blouson, ses Bensimon et quitte son appartement, un sourire accroché aux lèvres. Finalement, c’est parfait comme timing !

Arrivée en bas de l’escalier, Sam est bien trop loin pour entendre son fixe qui résonne chez elle.