Chapitre 4 : Tout commence par un rêve

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— Seulement dix-sept ans ? Comment c'est possible, demanda t-elle en détaillant son enveloppe charnelle de haut en bas avec de grands yeux ronds. La plupart des divinités au Domaine qui revêtaient une telle apparence avaient plusieurs millénaires, c'était donc peu concevable de penser qu'il puisse être si jeune.
— C'est sûr que pour quelqu'un d'immortel ça doit paraître peu mais nous les humains n'atteignons même pas la centaine d'années en général.
— Qu'avez vous le temps de faire en si peu de temps, demanda t-elle de plus en plus perplexe.
— À contrario, l'éternité n'est-elle pas un peu... Comment dire... Ennuyante ?
— Je n'ai pas expérimenté grand chose du concept mais, pour le moment, ça ne l'est pas vraiment. J'ai tellement de choses à apprendre, à voir, à faire...
— Je suppose que tu as raison.

Ethan finissait tranquillement son premier pancake alors qu'Esther engloutissait son cinquième ayant réduit à elle seule considérablement la pile. Il l'observait tandis qu'elle se démenait avec ses couverts pour en entamer un autre.
— Tu ne t'arrêtes donc jamais de manger, demanda t-il en plaisantant à moitié.
— Si, quand je dors, répondit-elle en le considérant avec le plus grand des sérieux alors qu'il s'attendait à un grand sourire cynique de sa part.

Son goûter achevé, elle se leva vivement de son siège avant de se retourner vers son hôte.
— J'ai une requête humain.
— Tu peux m'appeler par mon prénom tu sais.
— Très bien... Ethan donc... Je sais que c'est très peu approprié de poser une telle question à quelqu'un que l'on vient à peine de rencontrer mais...
— Je t'en pris, pas besoin d'être aussi guindée, l'informa t-il, pensant que son langage soutenu venait de son supposé malaise.
— Pourrais-tu m'héberger quelques temps ? Je n'ai pas d'endroit ou dormir et je pense ne jamais trouver quelqu'un qui cuisine aussi bien.
— Merci pour le compliment.

Ethan fit mine de réfléchir, levant les yeux au ciel. Évidemment qu'il allait accepter un marché dont il ne peut tirer que des avantages. Et puis, il aurait tout intérêt à céder aux caprices d'une divinité, qui sait ce qu'il pourrait lui arriver sinon... Si le seul prix à payer pour expérimenter la magie était de partager un lit et de cuisiner quelques plats, il n'y voyait aucun inconvénient.

— Tu peux rester bien sûr.
Le visage d'Esther s'éclaircit immédiatement.
— Merci mille fois ! Je te revaudrais ça, sois en assuré.
— Y'a pas de quoi.
— Mais au fait... Tu as parlé de "parents" tout à l'heure... Et les tiens ? Je veux dire, ils ne seraient pas gênés par ma présence ?
— Parce que tu penses qu'ils vont être au courant, dit-il en esquissant un sourire en coin.
— Bien sûr, ça tombe sous le sens... Tu peux ranger ce petit air satisfait, lui signala t-elle en levant les yeux au ciel.

Comme Ethan ne semblait pas vouloir exprimer clairement la raison de l'absence de ses géniteurs, la jeune fille en conclut qu'il valait mieux ne pas trop creuser la question afin de ne pas vexer son hôte ce qui pourrait rendre leur cohabitation plutôt tendue par la suite. Après tout, il ne tenait qu'à lui d'avoir son petit jardin secret, ainsi soit-il, elle s'adapterait.

— J'ai soif.
— Tu m'étonnes avec tout le sucre que tu viens d'ingérer... Enfin, ça te fera découvrir autre chose de la gastronomie humaine. Qu'est ce que vous buvez chez les dieux la plupart du temps, demanda t-il tout en allant chercher une bouteille dans son frigo miniature.
— De l'eau, quelques jus de fruits mais surtout beaucoup de thé ! Quelques uns boivent de l'alcool mais je déteste ça.
— Si je peux me permettre... Votre monde semble bien ennuyeux de ce que j'en ai appris pour le moment.
— Je ne peux pas prétendre le contraire. Il ne tient qu'à toi de me faire découvrir toutes les frivolités de la société humaine !
— En attendant Esther, voici pour toi du thé glacé.
— Glacé ? Quelle drôle d'idée...
Il plaça un gobelet devant elle puis versa un liquide orangé à l'intérieur sous le regard captivé de la jeune fille. D'abord méfiante, celle-ci goûta le breuvage du bout des lèvres mais directement happée par l'arôme de pêche, elle avala le reste d'une traite.

— Quelle est la suite du programme après ce délicieux nectar ?
— Et bien je dois faire mes devoirs mais toi tu peux regarder la télé.
— Je ne pourrais pas t'aider dans ton labeur ?
— Ça risque de t'ennuyer, et puis, je peux me débrouiller.
— Je n'en doute pas !
— Bref... Suis moi, je vais te mettre un film.

Le duo retourna dans la petite chambre. Esther s'enroula dans une couverture puis s'adossa contre la tête de lit. Ethan quant à lui s'occupa d'allumer la télé et de lui indiquer la fonction de chacun des boutons de la télécommande avant de la lui tendre.
— Tu as tout compris ?
— Oui oui. Il est déjà tard, tu devrais aller t'occuper de tes études, je me débrouille.
— Si tu as un soucis...
— Je sais, je t'appelle. Pas besoin de m'infantiliser tu sais, j'ai quand même un siècle, indiqua t-elle en se balançant d'impatience.
— Il faut dire que ton apparence porte à confusion.
— C'est beaucoup moins fatigant pour moi de revêtir un corps d'enfant.
— Alors je m'adapterai. Bonne nuit !

Il lui adressa un bref signe de la main qu'elle lui rendit avant de quitter l'entrebâillement de la porte. Esther s'empressa de lancer un film qu'il lui occupa une bonne partie de la soirée tandis que Ethan, lui, se démenait comme il pouvait avec ses cours de littérature.

Après un peu moins de deux heures à vaquer chacun à leurs occupations respectives, le jeune homme rejoint Esther dans la chambre, éreinté par ses deux heures d'étude. Il la retrouva endormie, roulée en boule serrant le traversin contre elle. Dans un soupir, il la souleva doucement afin de ne pas la réveiller et de la décaler légèrement de sorte à ce qu'il puisse se coucher lui aussi. Malheureusement, il n'avait pas le luxe de pouvoir s'offrir un canapé pour lui laisser tout l'espace.

Épuisé, il ne lui fallut pas plus de quelques minutes pour qu'il rejoigne à son tour le pays des songes. Juste avant de s'endormir, il vint à penser que tout ce qu'il venait de vivre n'était qu'un rêve et qu'il ne trouverait rien ni personne d'étrange à son réveil si ce n'est une belle pile de pancakes recouverte de sirop d'érable.

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