Chapitre 11 - Une arrivée un peu chamboulée

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Aspiré dans un tourbillon rouge et noir, je glisse le long d'un tube sans possibilité de me retenir. J'entends les pleurs d'un enfant. Mon corps frissonne et se contracte. Je connais cette détresse qui vient du fond du coeur. Artus... Que lui font-ils subir ? Je tente de me débattre de la toile d'araignée qui maintenant m'enferme et se resserre autour de moi. La chaleur s'insinue à travers ma combinaison qui perd peu à peu sa protection ignifugée. La sueur coule devant mes yeux. Je ne peux bouger mes poignées retenues par des fils d'acier qui me coupent la peau. J'ouvre la bouche pour crier le nom de mon fils. Ma gorge est sèche, aucun son ne sort. Je ne peux le protéger. Comment lui faire savoir que je suis là ? Un éclair me frappe. Je suis jeté au sol. Une lumière aveuglante me contraint à fermer les yeux. Où suis-je tombé ? Les pleurs sont proches, non les hurlements. Je sers mes poings et me redresse... Difficilement. Mon fils... Je suis là pour te délivrer... Attends-moi... J'avance, je trébuche. Le sol glisse, craque. Mes pieds s'enfoncent dans des miasmes dont l'odeur m'empêche de respirer. Ne pas regarder au sol. Ne pas sentir ces choses qui grimpent sur moi. Vite, faire abstraction. Vite, un pas devant l'autre. Je cherche mon arme sur ma hanche. Ma main happe le vide. La clarté s'amenuise. Je distingue des ombres. Une ombre gigantesque. Je dois lever les yeux pour apercevoir le haut du corps. Je retiens un hurlement. Cette bête monstrueuse aux dents effilées penche sa tête au-dessus d'une forme recroquevillée. La gueule béante, prête à avaler mon enfant. Non. Les mots ne sortent pas. Je me jette sur lui de toutes mes forces. Je rebondis sur une surface dure. Devant moi, la visière de mon casque laisse apercevoir un jeu de rayons multicolores.

***

1981 - Etoile de la Croix du Sud - Passage intergalactique.

J'étais dans le cockpit de Goldorak. Je soupirai de soulagement bien que toujours confus des images qui assaillaient mon esprit. Ce n'était qu'un cauchemar. Je répétais ce leitmotiv dans ma tête tout en regardant effaré le balai de lumières devant mes yeux. Mon endormissement n’avait duré qu’un court laps de temps pourtant je me trouvais confronter devant des milliers de navettes qui assiégeaient ma planète. Pourquoi ? J'étouffai un cri de rage et mordis ma lèvre. Pourquoi ? Je maintins plus fermement les manches du gouvernail, vérifiai l'enveloppe invisible et l'antiradar que j'avais branchés à l'approche de la Croix du Sud puis je stabilisai Goldorak sur sa position pour analyser la situation. Fleed était encore à quelques heures/lumière ce qui me permettait de la voir dans son ensemble. Je pianotai sur mon GPS pour régler la zone géographique qui me faisait face. Euphor, la Capitale, construite sur son hémisphère Nord était à l'opposé, là où, en ce moment même, le soleil tentait de redonner vie aux micro-organismes sans l'aide de notre technologie. Je devais contourner l'armada dont je ne reconnaissais pas l’emblème peinte sur les flancs de chaque appareil, tout en évitant les rayons qui tentaient de percer le halo synthétique que nous avions déployé autour de la planète pour créer une atmosphère respirable et suppléer au faible rejet d'oxygène des quelques végétaux ayant survécus à la désastreuse destruction de Fleed.

Je ne contactai pas Lukas de crainte que notre communication ne soit interceptée. Au bout d'une heure de cache-cache, j'indiquai le code d'ouverture et me faufilai dans le trou suffisamment large de la sphère protectrice de Fleed pour laisser passer les 40 mètres d'envergure de ma soucoupe. De là, je me dirigeai vers la zone d'atterrissage prévue pour Goldorak. J'ouvris le cockpit et fis un bond en salto pour rejoindre le groupe de quatre personnes qui m'attendaient déjà. J’ôtai mon casque, secouai mes cheveux qui collaient sur mon front et ma nuque puis tendis la main vers le premier homme. Malgré son maintien rigide en accord avec son rang, une tenue stricte où aucun pli ne dépareillait, Lukas, celui en qui j'avais le plus confiance à gérer la gouvernance pendant mon absence, montrait des signes de fatigue accumulée. Ses pupilles qui pétillaient habituellement de malice ne brillaient pas. Cependant, il se courba pour marquer son respect avant de se redresser en serrant ma main des deux siennes. Mon sauveur et compagnon des temps de guerre affichait une lassitude que ne démentaient pourtant pas son maintien et la fermeté de sa poigne.

— Votre Altesse, comment s'est passé le voyage ?

— Long et stressant mais sans souci particulier. Par contre l'accueil là-haut était des plus banals, un vrai feu d'artifices.

Mon humour peu habituel tomba un peu dans le silence angoissé. Je me tournai ensuite vers les trois autres personnes qui me saluèrent. Je notai la présence de Marcus, le ministre de la Défense, d’Ilian, un des jeunes étudiants de l'Institut Aéronautique Spatiale que j’avais promu dans le projet de Goldorak-2 et d'un représentant du CIPUPCET, reconnaissable à l'insigne accroché sur son col. Je tiquai à sa vue mais vu la situation, je ne m'étonnai pas de le voir dans le hangar de Goldorak.

— Un point sur la situation ? A qui appartient cette force spatiale ?

— Ils se réclament de l'Empire de Vega.

— Vega ? sursautai-je. Je n'ai pas reconnu le symbole peint sur les navettes. Avez-vous récolté des informations ?

— Non. La situation est plus grave qu'il y a 6 jours. Le comte Badista ici présent est arrivé en catastrophe hier nous avertir que le gouvernement central a été investi par un groupe armé lors d'une réunion plénière et que tous les membres ont été assassinés.

— Quoi ! m'exclamai-je d'horreur. Ce n'est pas possible.

— Hélas, dès que l'information a filtré, ce fut la débandade, reprit Badista. C'était un coup d'état. Les militaires se sont ralliés aux terroristes. Ce fut un massacre programmé de tout l'état-major, de tous les parlementaires. J'ai pu fuir de justesse. J'ai rejoint difficilement Fleed. Et là, toute la planète entourée de milliers de navettes...

Il se jeta à genoux attrapant ma main, gémissant.

— Votre Majesté, vous êtes là maintenant, vous allez pouvoir nous sauver avec Goldorak.

Lukas se précipita pour le relever.

— Un peu de retenue, Comte.

J'entourai sa main des miennes pour le réconforter, tout en interrogeant Lukas :

— Notre armée ?

— Nous sortons d'une réunion avec les généraux lorsque j'ai pris connaissance de ton arrivée.

— Les pilotes ont été appelés, continua Marcus. Ils se réunissent dans leur bataillon. La situation n'est pas réjouissante car on ne s'attendait pas à une nouvelle guerre. C'est trop tôt. Personne n'est prêt. Nos appareils sont faibles.

— La population ?

— Elle panique comme on peut s'y attendre. Nous revenons au temps de la guerre de Vega. La police tente de juguler les crises. Les associations d'entre-aide aident à rassembler les gens par quartier et les conduisent vers la montagne.

Je fronçai les sourcils.

— Comment se fait-il que nous n'ayons rien vu venir ? Comment ont-ils pu construire autant d'appareils ?

— C'est le mystère pour nous, répondit Lukas. Nous cherchons les contacts avec les planètes du CIPUPCET mais pour l'instant, nous n'avons que le silence.

Ce mot se répercuta sur les murs du hangar comme un bruit funeste et s'installa entre nous.

— Le prototype de Grendizer-2 est terminé, informa alors Ilian. Néanmoins, nous n'avons pas encore eu la possibilité de le tester avec les événements. Et il nous manque un pilote chevronné.

Je haussai les sourcils.

— Tu ne t'étais pas proposé pour l'être ?

Il baissa les yeux gêné.

— Oui, en effet mais...

Lukas vint poser un bras autour de ses épaules.

— Ilian a eu un accident lors d'un entraînement. Depuis, il n'a pas repris les manettes.

— Personne dans ta formation ne pouvait suppléer ?

— Non, la machine est très complexe et sans vous pour nous guider, nous ne voulions pas tenter le diable.

Je hochai la tête de compréhension.

— Cette machine ne peut pas être utilisée en l'état actuel sans un pilote chevronné. Bien, allons dans la salle du conseil pour finaliser le point d'attaque.

Soudain, un mouvement derrière moi capta mon attention.

— Pourquoi ne pourrai-je pas être ce pilote chevronné ? dit une voix dans mon dos, une voix que je ne m'attendais pas à entendre ici, une voix qui me fit frémir de peur.

Je me retournai lentement pour découvrir devant moi la personne que je souhaitais le plus voir loin de moi dans la situation actuelle.

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