Chapitre 10 - Départ imminent

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Une main douce et chaude caressait mon front. Je revins à la réalité, accroupi sur le balcon de ma chambre, déversant ma bile dans les buissons en dessous.

— Actarus ? Que se passe-t-il ?

Vénusia me redressa. Elle me présenta un tissu que je pris pour essuyer mon visage. Mon crâne me faisait souffrir. Je mis quelques secondes pour comprendre ce que je faisais là.

— Vénusia ? Que... ?

— Tu t'es cogné en ouvrant la fenêtre. J'allais prendre Hoshi qui se réveillait.

En effet, j'entendais les hurlements de la petite.

— Va la chercher. Ça va aller. Je vais bien.

Elle entra dans la pièce tandis que je regardai le paysage recouvert de brouillard. Je me souvenais vaguement de ma nuit et du cauchemar qui avait perturbé mon corps. Je rejoignis mon aimée qui s'était installée sur le fauteuil pour allaiter le bébé. Je passai un bras autour d'elle et l'embrassai sur la tempe.

— Comment vas-tu ? T'es-tu reposée ?

Elle hocha la tête.

— Tu as eu des nouvelles ?

— Non. Enfin, pas d'Artus.

Je m'agenouillai devant elle et caressai doucement sa main libre. J'hésitai à avouer ce qu'Alphgar m'avait dit. Hélas, je ne pouvais pas retarder la discussion.

— Je dois retourner sur Fleed..., chuchotai-je.

— Oui.

— Seul...

Vénusia sursauta.

— Quoi ? Comment ça, seul ? Mais...

Elle baissa la tête en mâchouillant sa lèvre.

— C'est trop dangereux là-bas pour que je t'emmène avec Hoshi..., continuai-je en évitant son regard. Avec Artus introuvable, tu restes une cible pour mes ennemis.

— Ennemis ? Mais enfin, n'as-tu pas dit...

— Il y a toujours des fous pour prendre la relève.

Je lâchai sa main et me levai.

— Je vais passer la journée au Centre. Tu me rejoins ce midi ?

— J'apporterai le lait comme au bon vieux temps.

— Hum, oui. Merci.

Je me penchai pour l'embrasser sur les lèvres.

— Prends soin de toi en attendant.

Je me détournai quand elle me retint par la main.

— Attends. Tu ne m'as rien dit sur les ennemis. Que sais-tu ?

— Pas grand-chose. Mais je ne te cacherai rien. Je te le promets.

— Promis ?

— Promis.

Vénusia me regarda incertaine. J'esquissais un sourire avant de me détourner.

Je la connaissais bien, maintenant. Toujours à l'affût pour être près de moi. Elle allait faire des pieds et des mains pour venir avec moi. Je devais me méfier... Enfin, maintenant avec Hoshi, elle ne pouvait pas l'abandonner pour me suivre si facilement. Je m'arrêtais en haut des marches. Et pourtant... Je secouai la tête. Non. Impossible.

***

Au Centre, j'annulai tous mes rendez-vous et me concentrai sur les plans du nouveau Cosmorak avec Alcor. La technologie terrienne était loin du stade avancé de ma planète. Je pouvais leur offrir un peu de notre savoir mais ils devaient faire leur propre évolution. Cependant, je voulais qu'Alcor vienne avec moi. J'avais confiance dans ses capacités de pilote, c'était un très bon ingénieur et nous nous entendions lors des combats. J'appelai le responsable fleedien pour lui faire part de mes propositions. Au bout de deux heures de discussion, nous parvînmes à établir un plan d'amélioration satisfaisant. En mettant tous les ouvriers sur le projet, nous pourrions préparer l'appareil pour un voyage spatial dans un délai de quatre semaines, délai trop long au vu des événements qui se précipitaient. Les informations sur la construction de Goldorak que j'avais gardées précieusement avec moi lors de ma fuite allaient servir. Je les avais peu divulguées lors de la grande guerre contre Vega, le minimum avait cependant aidé mon père à améliorer les armes des appareils de la patrouille. Mais, maintenant, le combat se déroulerait principalement sur Fleed et je ne savais pas qui seraient mes alliés et mes ennemis. Or la technologie avancée de cette partie de l'univers était plus puissante que la technologie inventée par le professeur et les ingénieurs de la NASA.

La construction du Cosmorak nous a montré que l'équipe du Centre pouvait faire son maximum dans un minimum de temps mais l'engin avait été conçu pour ne voyager qu'une fois et participer à un seul combat. Un combat où le non-retour avait été une possibilité.

Resté seul dans le bureau, je plongeai mon regard à travers la fenêtre sur le lac qui bordait l'arrière du Centre. Le soleil était voilé de nuages blancs légers, le vent faisait danser les feuilles vertes des arbres. J'aimais regarder ce paysage si vert. Je ne m'en lassai pas en sachant que je ne retrouverai pas cela sur Fleed avant de nombreuses années, pas de cette envergure tout au moins. Mon cauchemar refaisait surface. Les images que j'avais vues m'inquiétaient, surtout la dernière vision. Etait-ce une prémonition ? Cet être déformé, au corps démesuré, qui était-il ? Etait-ce lui qui lançait ces attaques sur les planètes ? Je me plongeais dans mes connaissances des peuplades des différentes galaxies afin de trouver à quelle physionomie cet être appartenait. Aucune image ne correspondait. Las de ces réflexions, j'allais rejoindre la salle de visio-conférence lorsque j'aperçus Eradius me fixant avec un sourire en coin. L'impression était furtive mais j'eus une sueur froide en le voyant. Il frappa à la porte et me salua naturellement.

— Votre Altesse, pouvez-vous regarder ces dossiers maintenant que vous avez un instant libre pour vos sujets et votre planète ? me dit-il d'une voix acerbe.

Je le fixai dans les yeux bien qu'il cherchât à m'éviter.

— Eradius, as-tu des remarques à me faire ? Sois franc.

Il fit un pas en arrière.

— Non, non. Je n'ai rien à dire.

— As-tu des informations sur l'enlèvement du prince ? insistai-je.

— Non, je vous l'ai déjà dit.

Je cherchai à nouveau son regard qu'il me refusa. Je tendis la main pour prendre les dossiers.

— Quelles sont les urgences ?

— Le vice-premier a envoyé un rapport sur la zone géographique des montagnes bleues.

— Rien sur les départs de navettes ?

— Je n'ai rien reçu, me répondit-il avec un léger tremblement dans la voix.

A nouveau, je plongeai mon regard dans le sien, et à nouveau il refusa le contact. Je soupirai.

— Bien, merci. Vous pouvez vous reposer.

Dès qu'il franchit la porte, j'activai ma montre.

— Alcor, tu me reçois ?

— Oui, vieux frère. Que puis-je faire pour toi ?

— Tu es au Centre ?

— Dans le hangar.

— J'aimerais que tu suives Eradius qui vient de quitter mon bureau. Il cache quelque chose. Tu peux faire ça ?

— Bien sûr. Je me mets en route.

— Merci.

Je parcourus brièvement le dossier que Lukas m'avait envoyé puis me dirigeai vers la salle de conférence où il m'attendait pour notre entretien quotidien. Ce fut son visage grave qui m'alerta.

— Que se passe-t-il ?

— Tu ne peux plus retarder ton départ, Duke. La situation s'aggrave d'heures en heures.

— Je comptais partir demain. J'aurais aimé mettre au point le Cosmorak pour qu'Alcor m’accompagne... Cependant, ce ne sera pas possible. J’espère qu’il pourra finaliser l’appareil d’ici un mois.

— Je fais le nécessaire pour te recevoir dans 6 jours.

— Dans tes connaissances géographiques ur la planète, connais-tu un endroit avec une chaine de montagnes volcaniques ?

Lukas posa sa main droite sous son menton, un doigt tapota ses lèvres :

— Nous en avons beaucoup. Tu as d’autres précisions ?

— Une montagne volcanique plus haute et plus creuse que les autres ?

— Je ne sais pas. Je vais mettre une équipe pour une étude plus précise des photos que nous avons scandées pour étudier les dégâts. Pourquoi ?

— J'ai fait un rêve étrange et j'hésite entre une affabulation de mon esprit et une vision.

— Je vais pencher pour la vision. Je n'oublie pas les capacités de ta famille, me répondit Lukas, un léger sourire aux lèvres.

— Il y avait un laboratoire avec une machine assez étonnante. Deux personnes discutaient, racontai-je.

— Peux-tu me les décrire ?

— Une femme avec des cheveux violets et un homme habillé d'une blouse blanche, les cheveux en bataille.

— Je vois.

— Il y avait une forte odeur de soufre. Et puis, j'ai vu un être assez monstrueux. Il avait la physionomie d'un stykadien. Il ressemblait à...

Je me tus, ma voix se bloqua.

— A qui ressemblait-il ?

— Zkraparok...

— Merde, c'est pas possible... Oh, désolé, se reprit Lukas.

— Pas de soucis. J'ai eu la même réflexion.

Je frissonnai à nouveau.

— Quoiqu'il en soit, je ne peux pas retarder mon retour. Je vais terminer les préparatifs.

— Bon voyage alors.

J'acquiesçai et coupai la communication. Je restai quelques instants, la tête penchée en avant. J'avais besoin de jouer de la guitare. Je me retournai pour quitter la pièce lorsque je sentis deux bras m'entourer.

— Je savais que notre bonheur n'allait pas durer, chuchota une petite voix.

J'attrapai les mains de Vénusia que je serrai. Puis me retournai pour l'envelopper plus fortement.

— Je suis désolé. J'aurais aimé que mon retour sur Fleed se fasse en famille. La situation est trop grave pour que je t'emmène avec Hoshi. Et ton père ne me pardonnerait pas s'il t'arrivait quelque chose.

— Je ne veux pas te quitter. Pas une deuxième fois.

— Moi non plus, je ne veux pas.

— J'ai entendu ta conversation. Qui est Zkraparok ?

— Le bourreau qui m'a torturé avant ma fuite.

Les mains de ma femme me caressèrent le dos tendu en signe d'apaisement.

— Tu ne m'en as jamais parlé parce que tu n’étais pas prêt.

Je secouai la tête.

— Encore maintenant, je ne peux pas. Je suis désolé.

Elle resta silencieuse, son visage blotti sur mon épaule.

— Je voudrais rester ainsi des heures. Mais ce n'est pas possible, soupira-t-elle.

Elle s'éloigna. Le froid s'insinua entre nous comme un mauvais présage. Je voulus encore la retenir mais elle partait déjà vers la sortie.

— J'ai apporté un pique-nique sur la terrasse. Tu viens ? Nous allons rejoindre Phénicia. Je ne sais pas si Alcor est revenu. Je l'ai croisé qui suivait Eradius vers la forêt.

— La forêt ?

— Oui, ton secrétaire frôlait les arbres. Enfin, c'est l'impression qu'il m'a donné. Il portait une mallette avec lui.

— Une mallette ?

Voyant que je ne faisais que répéter ce qu'elle me disait, Vénusia se retourna et me regarda inquiète.

— Actarus, tu vas bien ?

— Oui, oui, la rassurai-je. Je pensais à voix haute.

Je lui pris la main et la conduisis à l'extérieur.

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