Chapitre 5 - Disparition

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Je reçus le deuxième indice d'une catastrophe à l'approche du Centre.

— Ici Argoli. Je capte Goldorak sur le radar. Que se passe-t-il ?

— J’ai eu une prémonition cette nuit. Je devais absolument rentrer.

Un silence étrange suivit.

— Nous t’ouvrons la route n°7. Venez à l'observatoire dès que possible. Nous préférons que Goldorak rentre discrètement.

— Tu m'inquiètes...

— Le professeur vous expliquera.

Je tournai la tête brièvement vers Vénusia qui était assise sur le siège passager derrière le mien et qui s'était penchée sur le côté, attentive au message, les mains crispées sur les accoudoirs.

— Je n'aime pas ça, murmurai-je.

Elle secoua la tête et posa sa main sur mon bras.

***

Dès que nous reprîmes nos vêtements civils, nous rejoignîmes la salle où nous eûmes la surprise de voir réunis les deux autres membres de la patrouille, mon père et les trois scientifiques de la première heure, Argoli, Antares et Cochyr.

— Bonjour tout le monde. Pouvez-vous nous expliquer ?

— Bienvenue Fils.  Vous rentrez tôt de votre voyage.

L’atmosphère de la pièce était étouffante. D’un simple regard, je compris que les temps paisibles étaient finis. Phénicia a les yeux rouges d'avoir pleuré, Alcor a les cheveux plus chiffonnés que d'habitude. Mon père avait les traits tirés. Je fermai un instant les yeux et sentis les doigts de mon épouse serrer les miens.

— Il s'est passé quelque chose, n'est-ce pas ? J'ai l'impression que vous n'avez pas dormi depuis des heures et que vous êtes sur le pied de guerre. Dites-moi.

Mon frère de coeur fit un pas en avant. 

— C'est Artus.

— Artus ?

— Il a disparu. La nuit passée...

— Quoi ?

Le cri venait de Vénusia qui avait posé une main sur sa bouche. Je l'entourai de mon bras pour la soutenir.

— Cela a dû se passer au moment où vous êtes partis.

— Vous avez fouillé le ranch ?

— Oui. Nous allions te prévenir lorsque tu es apparu.

— Pourquoi ? ... Vous avez trouvé quelque chose ?

Le professeur me tendit un petit boitier. 

— Ceci. Nous n'avons pas encore eu le temps de l'analyser. 

Je pris l'objet dans mes mains.

— Qu'est-ce que c'est ?

Le petit rectangle noir était froid cependant je sentis de légères vibrations.

— Qu'est-ce que c'est ? répétai-je à voix basse.

A ce moment-là, les portes automatiques s'ouvrirent laissant passer Eradius.

— Votre Altesse ! J'ai appris que vous étiez rentré. Vous avez un appel dans la salle de conférence en provenance de Fleed. Le vice-président souhaite vous parler urgemment.

— Bien, j'arrive.

Je fis un signe à mes coéquipiers qui me suivirent. Je maintenais toujours les épaules de Vénusia qui tremblait de plus en plus.

— Nous allons éclaircir ce mystère. Ne t'inquiète pas. Artus va bien, tentai-je de la rassurer.

Je ne croyais pas à ce que je disais. L'appel de Lukas n'était pas une simple coïncidence.

***

Lorsque j'arrivai dans la pièce, je le vis sur l'écran en discussion avec le Général Phoebus. Tous les deux semblaient inquiets ce qui n'augurait rien de bon, le militaire étant connu pour sa parfaite maitrise de soi.

— Lukas ?

A son prénom, il se retourna. Je fus choqué par la blancheur de son teint.

— Duke ! Tu es déjà là ! Je suis désolé de te déranger pendant ta lune de miel.

— Que se passe-t-il ? 

Avant de me répondre, Lukas tourna son visage vers Vénusia qu'il salua en se courbant.

— Votre Altesse. Toutes mes félicitations pour votre mariage. Je n'ai pas eu l'occasion de le faire de vive voix.

Vénusia abaissa la tête en signe de reconnaissance.

— S'il vous plait... murmura-t-elle.

— Duke, l'heure est plus grave que je ne le pensais il y a quelques jours.

Je me tendis à cette introduction pour le moins inquiétante.

— Dis-moi.

— Plusieurs gouvernements nous ont appelés à l'aide. Leurs peuples se soulèvent et des monstres de métal détruisent les principales métropoles. 

— Monstres de métal ?

— Oui, des copies des monstrogoths.

— Comment est-ce possible ? N'avions-nous pas mis en place un organisme de surveillance et de destruction des sites veghiens avec le CIPUPCET *?

Le CIPUPCET, de son nom complet, la "Confédération Intergalactique des Planètes Unifiées pour la Paix, la Coopération Economique et Technologique" se relevait à peine du démantèlement de ses membres engendrés suite à la guerre intergalactique. Nous avions passé des semaines lors de mon premier retour sur Fleed à réorganiser cette institution et sa première mission avait été la création d'un tribunal.

— Nous n'avons visiblement pas trouvé tous les lieux. Par ailleurs, la légende de l'Avaleur d'âme refait surface.

— L'Avaleur d'âme ? répétai-je, les sourcils froncés, réfléchissant à sa signification.

— Le dernier démon que le chevalier a combattu dans l'histoire du Dragon rouge, intervint ma soeur.

Je la fixai, les yeux exorbités, le souffle court. Je sentis mon sang se retirer de mon visage. 

— Que dis-tu ? 

— Tu te souviens ? J'ai peu de souvenirs de la famille mais Grand-père nous racontait cette histoire. Mon précepteur a continué à la narrer après sur Terre. Elle est resté vivace dans mon esprit.

Cette fois, c'est moi qui chancelait, retenu par les bras légers de Vénusia. Je m'appuyai contre le rebord d'une table.

— Lukas, dis-moi ce que tu sais sur cette légende et pourquoi elle refait surface.

— D’après le roi de Umeda, des jeunes hommes sont enlevés dans différentes zones géographiques. Leur témoignage parle d'un brouillard intense, d'une ombre gigantesque, d'un cri à glacer le sang. Certains ont vu la silhouette d'un dragon. Il disparaitrait aussitôt qu'il a pris dans ses serres les proies. Les faits ont lieu en même temps.

Le silence s'installa de nouveau, chacun réfléchissant aux implications de cette nouvelle information. Je le rompis en me redressant puis je regardai Lukas dans les yeux.

— Avez-vous envoyé une aide militaire ?

— Votre Altesse, je ne vous cache pas que ces événements nous laissent perplexe. Ils sont assez similaires aux attaques de Vega. Nous devons agir vite, intervient le Général Phoebus.

— Nous avons été informé il y a à peine 3h, reprit Lukas. Après avoir reçu les rapports de nos diplomates en fonction dans ces planètes, nous avons établi un décret pour l’envoi de troupes mais la Constitution ne nous permet pas de valider cet ordre. Seul le roi peut le faire. Et il doit le faire directement.

Je serrais les poings devant ces informations. Les images que je voulais effacer de ma mémoire refirent surface, l’espace d’un instant. Je secouai la tête pour les chasser.

— Résumons. Avant-hier, tu me parlais d’une rumeur sur le retour de Vega... Nous avons vérifié les enregistrements de la dernière bataille et nous avons bien vu sa mort.

— Des peuples se soulèvent et des monstrogoths apparaissent détruisant des grands villes. Des personnes disparaissent et la légende de l’Avaleur d’âmes refait surface. Alphgar est de retour.

— Et mon fils est kidnappé. Une navette a-t-elle quitté Fleed pour la Terre, ces jours derniers ?

— Non, pas à ma connaissance. Aucune soucoupe suspecte n'a été repérée aux alentours.

— Artus a disparu, la nuit passée vers la fin de la fête. Nous avons retrouvé un objet en métal dont la matière n'est pas terrienne. De plus il y a une marque, un signe qui ressemble à l'alphabet de l’ancienne langue fleedienne.

A ces mots, Phénicia prit le boitier que je tenais encore dans ma main. Elle s'approcha de la fenêtre pour le scruter. Alcor la suivit. 

— En effet, tu as raison. Qu'est-ce que cela peut être ? 

— Nous allons surveiller et fouiller tous les engins qui pénètrent dans notre espace, interrompit Lukas. Duke, tu n'es pas sans savoir qu'Artus et Hoshi sont les premiers que tes ennemis chercheront à atteindre. Ce sont tes héritiers. Depuis ton mariage, tu dois renforcer leur sécurité ainsi que celle de son Altesse.

Je hochai la tête en signe d'accord.

— Veux-tu que je t'envoie une aide militaire ?

— Non pas pour l'instant, décidai-je. Gardons cette information sous silence. Le kidnappeur prendra contact. Je ne veux pas non plus inquiéter les terriens. Ils commencent à peine à se remettre des dégâts de la guerre.

***

La communication coupée, je m'affalai sur le sol, les mains dans les cheveux. Je devais me reprendre et réfléchir à toutes les informations que je recevais. J'étouffais. Où était Artus ? Que lui était-il arrivé ? Pourquoi ? Lui qui avait déjà tant souffert ! Les voix me parvenaient lointaines. Les mots se mélangeaient dans ma tête : Véga, dragon, monstres, Avaleur d'âme, Alphgar...

Le scintillement lors de mon mariage et la silhouette dans la pénombre me revinrent à l’esprit. Lukas m'avait dit que le vieux sorcier était de retour. J'avais la conviction que rien n'était dû au hasard. Il avait les réponses que je cherchais. Je devais partir à sa recherche.

Je me relevais précipitamment, le regard clair et déterminé. Vénusia, accroupie devant moi, tomba en arrière en se reculant. Je me penchai pour l'aider à se mettre debout.

— Excuse-moi, ma chérie. Comment vas-tu ?

— Je suis inquiète pour Artus. Où il est ? Comment va-t-il ? Lui qui a eu des difficultés pour s'adapter, que doit-il supporter ?

Je la serrai contre moi et caressai son dos.

— Nous allons le retrouver.

— Il est si petit et s’exprime à peine. J'ai peur.

— Nous allons retourner au ranch. Tu vas te reposer et t'occuper d'Hoshi.

Elle hocha la tête. Phénicia s'approcha et la tira vers elle, l'entourant de chaleur féminine.

— Artus nous a montré à plusieurs reprises qu'il pouvait se débrouiller. La patrouille ne baisse jamais les bras. Mon frère va trouver une solution. Viens, ton père est inquiet lui aussi.

Tandis que ma soeur emmenait Vénusia hors de la pièce, je regardai mon père et Alcor.

— Je ne connais pas encore exactement la situation mais une chose est sûre... Le temps de paix est fini. Je vais devoir repartir sur Fleed, le plus vite possible. Je voudrais vous demander une faveur...

Je me courbai en avant, la tête baissée, les bras le long du corps, utilisant l'humilité de ce peuple insulaire pour marquer la gratitude.

— Puis-je mettre Vénusia et Hoshi sous votre protection, s'il vous plait ? De ce que je peux comprendre au vu du peu d'informations que j'ai, Artus a été enlevé par un extraterrestre. Les prendre avec moi est trop dangereux pour leur sécurité.

Le fracas des dossiers qui chutaient au sol retentit derrière moi alors que mon père posait les deux mains sur mes épaules et me redressait :

— Tu n'as pas à demander ainsi. C'est évident, voyons.

— Un extraterrestre ? Comment ? interrogea Alcor qui réfléchissait aux implications que cette information apportait.

— Je n'en ai aucune idée. Les radars n'ont remarqué aucune arrivée d'OVNI mais il se peut que cet ennemi invisible ait créé un camouflage très puissant. On sait bien que la sécurité pendant la fête n'était pas à son maximum, j'en avais décidé ainsi.

— Actarus, tu ne dois pas culpabiliser pour cela. Nous sommes aussi responsables.

— Je sais mais… Je dois retrouver Alphgar.

— Qui est Alphgar ? m'interrompit Alcor.

— C'est un sorcier légendaire, chevalier de la caste du dragon. C'est lui qui m'a aidé lors de la bataille de Fleed. Il m'a enseigné la métamorphose. J'ai appris à mon retour, qu'il avait aidé une partie de la population à s'échapper et ensuite il a disparu.

Je me tus un instant.

— Il était présent hier, pendant la cérémonie et pendant la fête.

— Que dis-tu ? s'étonna mon père. Je n'ai vu personne.

— Il était invisible. Je vais faire un tour à cheval, décidai-je tout d'un coup.

Je courus vers la porte bousculant Eradius qui ramassait les papiers au sol sans entendre les exclamations d'Alcor et de mon père.

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