Chapitre 3 -Un héritage particulier

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Fleed - Automne 1979, année terrienne.

Pour la deuxième fois de la journée, Vairan se réveilla cette fois sur une paillasse. Il était seul dans une petite pièce, éclairée seulement par une petite lampe jaunâtre posée sur la petite table à côté du lit.

Il se releva, s’assit sur le bord du lit et grimaça sous la sensation du froid sur ses pieds nus. Il récupéra ses bottes rangées bien sagement au pied de la couchette. Le mouvement dut attirer l’attention des personnes qu’il entendait se mouvoir dans la pièce voisine car à peine avait-il fini d’enfiler ses chaussures que Beata bloquait la lumière venant de la porte.

— Ca va mieux ?

Vairan grogna. La douleur dans son crâne s’était atténuée mais pas au point de dire qu’il allait mieux. Cependant, il hocha la tête.

— Qu’avez-vous découvert sur le laboratoire ?

— Emilio épluche les plans qui se sont affichés sur le grand écran. Selon lui, nous aurions découvert les secrets de fabrication des monstrogoths de Vega.

Vairan la fixa intensément, pour tenter de cerner ce qu’il venait d’entendre. Des monstres cybernétiques inventés par Dantus. Une sueur froide l’envahit soudain. Il ressentait une peur profonde, ancrée au fond de lui comme la sangsue accrochée sur la peau qui pompe le sang jusqu’à épuisement.

Beata haussa les épaules, inconsciente de l’effroi de son responsable.

— Cosima vous attend pour continuer l’exploration de cette grotte. Que s’est-il passé ? Quand Ren et elle vous ont ramené, ils n’ont rien dit. Ren s’est ensuite enfermé dans une des petites salles du couloir. Il est prostré dans un coin et ne réagit pas.

— Est-ce que…

Il se tut. Un frisson le parcourut. Il y avait quelque chose qui le rendait confus mais n’arrivait pas à déterminer ce qui le gênait. Il contourna Beata pour sortir de la pièce.

— J’ai installé nos sacs dans chaque chambre du couloir ouest pour nous quatre, expliqua la jeune femme, en le suivant. Pour toi, j’ai trouvé un appartement de l’autre côté. Le commandant de ce laboratoire savait en profiter. Tu as tout à ta disposition : chambre, bureau, salon, salle de bains avec commodité. J’ai aussi découvert des douches communes. J’ai déjà établi avec les gars les règles pour leur utilisation. Hors de question que nous les femmes passons derrière vous.

Vairan l’arrêta d’une main.

— Je te fais confiance pour gérer tout cela au mieux. Tu as trouvé la cuisine ? Je meurs de faim.

Beata fronça les sourcils. Son côté indépendant rechignait à obéir à cet ordre détourné. Pourquoi devait-elle s’occuper des repas ? Elle n’avait pas été embauché pour cela. Pourtant, un oeil sur le visage exsangue de Vairan la retint. Elle ferait ça pour aujourd’hui. Demain et les jours suivants, elle organiserait des tours de rôles. Il fallait d’ailleurs qu’elle vérifie les stocks car s’ils restaient là plusieurs jours, elle n’était pas sûr d’avoir en suffisance.

— Pas encore. Je vais te préparer un sandwiches.

Vairan ne l’écoutait plus. Il avait rejoint Emilio qui parlait lui aussi joyeusement de ses découvertes. Il bougeait les bras dans tous les sens, pointait du doigt un écran, puis tapait sur quelques boutons et montrait un autre écran.

— Je n’ai quand même jamais vu ça. Et pourtant, j’en ai fait des lieux pour réparer les vieilles machines après la guerre. Je confirme que cet endroit représente les archives de Vega ou tout au moins du ministre de la défense, Dantus. Pourquoi il a choisi ce lieu et non Stykades ?

— Il savait que cette planète allait bientôt périr. Ils l’ont épuisé avec leur mine comme ils l’ont fait sur d’autres. Ici, à cause du lasernium, il savait que personne ne s’approcherait pour vérifier ce qu’il concoctait.

Emilio Barta écouta son responsable attentivement. Comment un homme aussi jeune, il ne devait pas dépasser la vingtaine en savait-il autant sur la grande Guerre ? Quand Fleed avait été envahie, lui s’était réfugié au fond des grottes sous-marines là où les avait emmené Alphgar. Pendant de longues semaines qui se sont prolongés par de longs mois, ils ont parcourus des centaines de km. Ça et là, ils avaient découverts un microcosme qui les avait aidé à survivre. A cet époque, il travaillait dans une société de communication dans le service informatique, chargé de mettre en place un réseau entre les succursales sur les autres planètes. Il n’était qu’un simple employé, uniquement passionné par les codes qu’il inventait et intégrait dans des programmes informatiques. La bataille l’avait pris par surprise et il avait suivi le flot de l’évacuation, abandonnant tout sur place. Il n’avait jamais revu ses parents avec qui il vivait encore malgré sa vingtaine bien passée. Il ne suivait pas l’actualité, bien qu’il savait que le Prince devait épouser l’héritière de Vega. Ses collègues et lui avaient eu de la chance. Le bâtiment dans lequel ils travaillaient était éloigné de la Capitale et avait échappé au bombardement. Comment s’était-il retrouvé dans une grotte aux reflets bleutés, il n’en avait encore aujourd’hui aucune idée.

Il sursauta devant le claquement de doigt devant ses yeux.

— Affiche-moi le projet du dernier monstrogoth créé ici.

— Oui tout de suite.

Il s’affaira aussitôt sur les touches devant lui tout en donnant les grandes lignes de sa découverte.

— Dantus a signé le protocole lui même, juste avant de rejoindre la Lune Noire. Par contre, il n’a pas lui même participé à sa construction. Je n’ai pas encore réussi à tout débloquer. Contrairement aux autres projets, celui-ci est sécurisé. Je n’ai pas réussi à décoder.

— Tiens moi au courant dès que tu as réussi. Je vais rejoindre Cosima dans l’atelier.

— L’atelier ?

— Elle ne vous a rien dit ? Nous avons trouvé l’atelier de fabrication de ces monstres. D’ailleurs, est-ce que les ordinateurs des différentes salles sont connectés ?

— Je vais vérifier cela avant de me lancer dans le hackage du dossier, assura Emilio.

Vairan hocha la tête et repartit dans le long couloir. En s’approchant de la section des chambres, il vérifia celle où Ren s’était réfugié. Il ouvrit la porte avec la délicatesse d’un bourrin.

— As-tu terminé la révision des navettes ?

Il jeta un oeil dédaigneux au petit homme rondouillard. Il l’avait intégré à l’équipe uniquement parce qu’il était un génie dans son milieu. Il pouvait remettre à niveau n’importe quel appareil volant. Mais surtout, il avait travaillé à la création de Goldorak, il pouvait peut-être en tirer quelque chose. En attendant, s’il restait à trembler comme un bébé, il ne lui était pas beaucoup utile.

— Non, cette chose…

— N’est qu’un engin comme les autres, inoffensif car inactif. J’aurais d’ailleurs besoin de toi pour vérifier sa structure. En attendant, va terminer la réparation des navettes. Nous aurons besoin d’une pour aller nous ravitailler et prévenir Fleed que nous restons plus longtemps.

— Oui maître euh, chef.

Ren se leva rapidement et fila vers le hangar, le tête dans les épaules. Vairan le suivit d’une allure plus lente. Arrivé à l’atelier, ses yeux se portèrent aussitôt vers l’emplacement au centre de la salle. Le monstre était toujours là, immobile et enveloppé de la lumière. La douleur dans son crane le submergea à nouveau mais prévenu, il la repoussa. Cosima était affairée dans la cabine de supervision. Il la rejoignit sans lâcher du regard le robot.

— Il n’a pas bougé, remarqua la jeune femme. Néanmoins, je n’ai pas encore eu le courage de l’approcher.

— Ok reste vigilante.

Il s’avança à nouveau vers la bête. Le monstre métallique était plus grand de ce qu’il avait imaginé au premier regard. L’animal bougea et ouvrit un oeil. Prudent, Vairan tendit se main que le dragon renifla avant de reposer sa tête sur le sol.

— Qui es-tu ? Que fais-tu là ?

Il ressemblait étrangement aux monstres que Vega envoyait sur les planètes pour les conquérir. L'animal poussa un soupir, de la fumée noire sortit de son naseau. La peau n'était pas si froide qu'il le pensait, elle avait même une texture proche de la peau humaine. La technologie de pointe qui avait été utilisée était à un niveau qu'il n'avait encore jamais vu.

La tête immense du dragon était posée sur le sol. Son museau était surmonté d’une corne entre ses deux narines. De petites dents pointaient vers sa babine inférieure. Sa peau était recouverte d’écailles irrégulières, parfois rondes, parfois pointues, manquantes à certains endroits. Ses yeux étaient asymétriques, petits et légèrement pointus. On ne pouvait distinguer la forme de la pupille sous la luminosité jaune. Une crête de bois cornus garnissait le haut de son front. Chaque pic était relié entre elle par un voile léger. Sa chair était en acier brillant d'un rouge carmin aussi sombre que le sang.

Le jeune homme tendit la main pour toucher le museau de sa paume. Ses yeux brillaient de fièvre.

— As-tu trouvé d’où provenait la voix de tout à l’heure ? demanda-t-il à sa collègue.

— Quelle voix ?

— Quand la paroi s’est ouverte, j’ai entendu une voix résonner.

Cosima fronça les sourcils.

— Je ne me souviens pas d’avoir entendu quelque chose. Mais tout s’est un peu précipité dans cela m’a peut-être échappé.

— Oui peut-être.

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