Opération Drago(n)

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Jour 11 : Dimanche 02 Décembre.

J'ai fais un drôle de rêve cette nuit, je courais dans une clairière à la tombée de la nuit. Habillée d'une fine robe blanche en soie translucide, je parcourais une longue distance en me refusant de regarder derrière moi pour découvrir qui était la personne qui me filait le train. Mes longs cheveux noirs détachés rebondissaient sur mon dos alors que je me rendais bizarrement compte que mes pieds nus ne ressentaient aucune douleur quand je passais sur des cailloux pointus. J'entendais un espèce de murmure me caresser la nuque, une voix masculine m'enveloppait d'une douce chaleur alors que le paysage continuait de défiler autour de moi à une vitesse ahurissante.

Pourtant, j'avais l'impression de courir au ralenti. Après une éternité, j'arrivais dans un petit bosquet et m'arrêtais au bord d'une petite marre dont l'eau était cristalline et fluorescente. Elle baignait le décor dans une lumière étrange, les ombres autour de moi dansaient et me menaçaient de leurs longues griffes acérées. Mais je n'avais pas peur, je savais que je me trouvais au bon endroit. Je m'accroupissais ensuite et plongeais mes doigts dans l'eau tiède, la surface bougea légèrement avant de laisser apparaitre un étrange poisson qui vînt à ma rencontre. Il était petit, sa couleur rouge contrastait presque violemment avec le vert criard de ses nageoires qui envoyaient des éclairs d'électricité autour de lui. Il tourna sur lui-même et son mouvement dessina sur la surface de l'eau une forme abstraite qui rapidement, prit celle de ma chambre. Je reconnaissais mon lit, les vieux posters qui tapissaient mes murs, mon portable qui prenait la poussière sur le bureau... Je vis ma mère venir s'asseoir sur mes draps, elle pleurait et fixait une feuille dans sa main. Je ne voyais pas ce qu'il y avait dessus, mais je savais au fond de moi que c'était un avis de recherche me concernant.

L'eau se brouilla et l'image disparu. La voix d'un homme me nomma dans un chuchotement, je le sentais dans mon dos. Il me disait que je ne devais pas plonger, que si je le faisais tout serait fini. Je me retournais vers lui mais ne rencontrais que le vide, pourtant il était toujours là, dans mon dos une fois de plus. Je répétais le même manège encore et encore, mais à chaque fois, il m'était impossible de le voir car lui aussi à chacune de mes tentatives bougeait et restait dans l'ombre de mes cheveux.
J'entendais une larme couler sur sa joue, trouvant ça totalement logique. Je gémissais, une douleur aiguë martelait ma poitrine et tentait d'étouffer mon coeur. Je devais sauter, je n'en avais pas envie, mais c'était ainsi que cela devait finir.
J'ai levé un pied au-dessus de la surface liquide qui m'appelait inexorablement, lui laissa éclater sa rage, il hurlait, mais ses cris sonnaient à mes oreilles comme une lamentation. Je ne devais pas, je ne pouvais pas abandonner. Je devais le laisser derrière moi. Je me bouchais les oreilles et sautais, quand ma peau entra en contact avec l'eau ... Je me suis réveillée.

Autant te dire que j'étais perdue et déboussolée à mon réveil. Depuis j'ai toujours cette impression bizarre que mon rêve voulait me dire quelque chose et très sincèrement je ne vois pas trop quoi hormis que dans le fond je crains que le temps ne s'écoule dans mon monde. Tout ce dont je suis certaine, c'est que je suis morose et triste depuis, sans savoir pour quelle raison. Un coup d'œil pour mon réveil m'annonça qu'il était déjà midi. Qu'est-ce que je peux dormir ...

Voulant oublier ce mauvais moment, je me suis rapidement douchée et habillée. Une jupe noire asymétrique recouvrait le haut de mes jambes et un corset de la même couleur ponctué de rayures violettes soulignait la forme de mes reins. Chaussée de mes escarpins désormais habituels et complètement adoptés, je sortais de chez moi avec une idée en tête.
Je m'installais à ma place dans la grande salle et saluais le directeur qui me fit un petit signe de tête. Mon repas fût rapide et léger, je n'avais pas vraiment le coeur à manger. Je lançais un petit regard à Severus entre deux gorgées de jus d'orange. Il semblait soucieux et écrivait quelque chose dans un petit carnet bleu, ses traits étaient tirés et les cernes sous ses yeux ne me laissaient aucun doute sur la raison. Je posais mon verre et me séchais le coin des lèvres rapidement, Drago Malefoy s'apprêtait à sortir de la salle. Ni une ni deux, je l'imitais et le suivais vers la sortie. Arrivée aux grandes portes de l'école, je le vis hésiter avant de prendre le chemin de sa maison. Je ne perdis pas de temps et l'appelais d'une voix ferme et autoritaire. Bonjour l'approche.

Il se retourna étonné et fit les yeux ronds quand il se rendit compte de qui provenait cet appel. Il tendit le dos et vint lentement d'un pas se voulant désinvolte à ma rencontre. J'en étais à me demander de quelle façon j'allais aborder le sujet, quand je me souvins que prendre des pincettes n'était pas son fort, alors pourquoi me fatiguer ?
Je me raclais la gorge discrètement et dessinais un léger sourire sur mon visage histoire de ne pas effrayer l'insecte.

- Bonjour, je ne vais pas tourner autour du pot. J'ai bien remarqué ton petit manège depuis mon arrivée, puis-je savoir ce qui me vaut ton intérêt si ... insistant ?

Je le vis chercher une échappatoire, il dansait sur un pied en étant au summum de la gène. Son regard se perdait derrière moi et guettait un moyen, ou une excuse, pour ne pas me répondre. Je roulais des yeux et lui faisais un petit signe de la main pour le ramener à moi. Je n'avais pas posé une question difficile pourtant.

- Alors ?

Me rappelant qu'il n'a que quatorze ans je soupirais et laissais de côté les remarques cinglantes qui me démangaient. Mieux vaut amadouer l'agneau qui deviendra plus féroce dans quelques années.

- Je ne vais pas te mordre, je me demande simplement si tu as le moindre soucis avec moi.

Il sembla se détendre légèrement et arrêta de serrer ses poings avant de prendre cet air que je déteste tant chez lui. Précieux et hautain au possible, il levait le menton fièrement et renifla de façon méprisable.

- Qu'est-ce que ça peut bien vous faire ?

Je hoquetais presque de surprise de l'entendre me vouvoyer, j'en pris un sacré coup de vieux mais ne perdis pas mon calme qui déjà était mis à rude épreuve. Est-ce ça que ressent Rogue à tout bout de champ ? Je grimaçais en ricanant presque, pas du tout intimidée par le moustique je lui répondais presque sur le ton de l'amusement (après avoir vérifié que personne n'était dans les parages) :

- Ça m'embête voilà tout, je n'apprécie que modérément de sentir ton petit regard scrutateur sur moi quand je mange, quand je lis, quand je respire. Je suppute que tu dois avoir une vie ô combien palpitante, alors comprend-moi, j'ai dû mal à saisir ce qu'il y a de si captivant à me fixer à longueur de journée.

Il me tourna le dos et partit d'un pas cadencé bien décidé à mettre le plus de distance entre nous. Je sentis le rouge me monter aux joues et mon rythme cardiaque entama un tempo plus endiablé. Pas de ça entre nous ! Je le suivis de la même démarche et accélérais légèrement pour ne pas le perdre de vue.
Il trottinait pratiquement à quelques mètres de moi et me lançait de petits regards furtifs. "Sois pas stupide et arrête de courir tu veux bien !" Maudissant mes talons je tentais tant bien que mal de ne pas me tordre la cheville tandis que je tournais dans le dernier couloir le menant chez lui. "Mais enfin, je ne veux qu'une réponse et je te laisse tranquille !" Il prononça le mot de passe, que malheureusement je n'entendis pas, et s'engouffra dans son dortoir. Ma main qui allait attraper le bord du cadre qui se refermait ne pût atteindre son but, et c'est en rageant que je vis le portrait de l'autre aristo de mes deux me sourire sadiquement.

...

Dois-je te préciser à quel point j'étais furieuse ? Quel gamin ! Était-ce si dur de répondre à une bête question ? Quelle que soit la réponse qu'il envisageait de me donner, étais-je si intimidante ? Bon Dieu, j'avais envie de rentrer dans ce dortoir et de le prendre par le col pour lui secouer la tête jusqu'à la nausée. Je tournais en rond folle de rage qu'il m'ait snobée en beauté de la sorte. Je veux dire, mince quoi, je me fous de la réponse en plus, mais me prendre un vent par ce mioche ça me va loin. Je regardais tellement furieusement le portrait qui nous séparait que ce dernier commença à gesticuler mal à l'aise et plus si certain de vouloir jouer au coq avec moi. Je donnais un coup dans le mur au comble de l'énervement, pour qui se prenait-il ? Je ne suis pas une de ses "copines" ou une de ces gamines qui rentrent la tête dans les épaules et partent pleurer dans les jupes de leur maman, et Monsieur qui prend ses airs de "Je suis le plus fort, je n'ai pas de comptes à te rendre", je t'en donnerais moi de l'éducation.

-Miss ?
- QUOI ?!

Je me retournais telle une furie face à l'idiot assez fou pour me déranger quand je suis en pleine séance d'insultes mentales quand je stoppais net mes mouvements devenus erratiques. Mince.

Face à moi se trouvait Severus Rogue (encore) complètement ... incertain. Il avait les yeux grands ouverts et la fine ligne de ses lèvres crispées me calmèrent instantanément. Je venais de crier sur la personne la plus susceptible de ce château sans aucune raison valable. Ne voulant pas passer une exécrable journée, je soupirais avant de m'excuser même si mes mains continuaient à trembler, ce qui ne lui échappa pas.

- Pardonnez-moi Monsieur, je ne voulais pas vous crier ... Je ne savais pas que c'était vous.

Je me massais les tempes, déjà fatiguée de la joute qui allait suivre. Je posais mon dos sur les briques froides du couloir et soupirais en baissant la tête. J'entendis un froissement de tissus se rapprocher et une ombre se dessina sur mon visage. Je levais légèrement la tête pour le regarder, ne sachant pas comment réagir ni quoi penser je gardais les lèvres closes. Il avait ce petit rictus contrarié sur le visage mais je n'y lisais pourtant pas de colère, son regard allait de moi au mur sans réussir à se poser définitivement quelque part. Il ouvrit la bouche et la referma de suite et recommença une fois encore ce geste ce qui commença à m'amuser. Je laissais s'échapper un petit rire blasé (ou nerveux de par notre proximité) et lui souris repentante.

- Mauvaise matinée ...

Je hochais de la tête, il était à des années lumières d'en deviner l'énormité et en même temps le ridicule. J'inspirais profondément et me redressais un peu après quelques minutes d'un silence tendu.

- Monsieur, me donneriez-vous l'autorisation de rester un peu plus longtemps demain soir ? J'aimerais travailler sur une potion ... avec votre consentement je veux dire.

Il sembla étonné de ma question car je vis un éclat de curiosité éclairer son regard. Il ne se priva pas et m'intima d'en dire plus. Je lui proposais de faire quelques pas (car le tableau était trop curieux à mon goût) et repris lentement le chemin de l'entrée de l'école.

- Et bien, je réfléchis à un projet, des recherches pour être plus exacte. Le côté théorique a été un peu plus difficile que prévu, je ne suis pas une habituée de ce genre d'exercices... Mais j'en suis tout de même arrivée à certaines "hypothèses". Avant que ma magie ne se manifeste, je n'avais plus beaucoup d'espoir de réussir la partie pratique, mais désormais ... je peux tenter quelques expériences. C'est pour cette raison que j'ai besoin de travailler sur une potion, une simple et rapide de préférence, je pense que celle que vous faisiez lors de notre première entrevue sera parfaite, sauf ... si vous avez mieux à me proposer ... ?

Il fronça les sourcils et sembla passer en revue mentalement la liste des potions possibles avant de me dire que tout dépendait du résultat que je voulais obtenir.
Je me mordais l'intérieure de la joue, je n'avais pas envie de tout lui dire aujourd'hui et d'ainsi briser ce petit cocon serein qui s'était installé.

- Je crois que pour commencer timidement, il faudrait une potion sans matière organique, mais à dire vrai, je testerai aussi cette substance un jour. En fait, la partie potion, si j'ose dire, elle la plus simple. Le tout est de trouvé le bon dosage de mes "propres ingrédients" avec ceux de la potion utilisée et d'ensuite faire chauffer le tout à une certaine température. Après, une partie de sortilèges sera ajoutée au résultat et c'est là que tout se jouera.

Je lui lançais un petit regard timide pour voir sa réaction et ainsi apprendre si mes idées étaient complètement loufoques ou pas. C'est avec étonnement que j'ai vu cet homme me regarder d'une façon nouvelle. J'en aurais presque été choquée si je n'avais pas été si heureuse de lire dans ses yeux du respect à mon égard. Il ne souriait pas, il ne tirait pas la tête non plus, il était détendu et dans son élément. Je lui souriais avec un léger rouge aux joues quand nous sommes arrivés à destination.

- Très bien, venez une heure plus tôt demain soir, ainsi vous aurez le temps nécessaire pour votre travail qui m'intrigue de plus en plus et dont vous omettez les détails qui m'intéressent délibérément.

Je laissais échapper un petit ricanement et hochais la tête. Nous avions un accord.

Le reste de ce Dimanche, je l'ai passé avec Fred durant deux bonnes heures avant qu'il ne me dise qu'il devait aller bosser avec son frangin. Ensuite j'ai tenté de trouver Drago Malefoy dans les couloirs et salles les plus susceptibles de l'accueillir. Faut croire qu'il a décidé de ne plus sortir de sa maison, car je ne le vis plus de toute la journée, même au repas du soir. Excédée et fatiguée de jouer au chat et à la souris, je suis finalement retournée dans ma chambre pour écrire ces quelques lignes.

Je ne suis décidément plus si certaine que c'est de Drago Malefoy dont parlait Kwincy, pourquoi me fuirait-il sinon ? Je le sais très solitaire et peu amène à accorder sa confiance, mais là ... C'est mission impossible s'il ne souhaite même pas répondre à de si insipides questions. Puis, il n'y a rien à faire, je n'arrive pas à me faire à l'idée que ce garçon ait besoin de quelqu'un, de moi en l'occurrence. Comment pourrais-je lui être nécessaire, c'est inconcevable.
J'en reviens au point de départ du coup, qui est cette fichue personne ?!

Fred peut-être ? Mais il n'est pas réellement seul ... C'est bien grotesque de le penser vu qu'il a un jumeau et un nombre incalculable d'amis. Pourtant, il est tout de même celui qui est venu le plus naturellement vers moi et avec qui je m'entends plutôt bien, quand il ne fait pas l'idiot. Mais en quoi je pourrais lui être nécessaire, c'est rageant ce truc. A part l'aider à inventer un arsenal de gadgets et de bonbons aux vertus douteuses je ne vois pas.

Poliakoff pourrait être un prétendant au titre ... Après tout, lui aussi est venu vers moi et cherche relativement souvent ma compagnie. Il n'est pas très entouré, je dirais même qu'il est solitaire, moins que l'autre abruti tout de même. Pourquoi pas ? Je sais que Durmstrang est une école difficile et réputée pour encadrer ses élèves de façon rude, presque militaire ... Ça pourrait coller. Mais je lui servirais à quoi ? Il ne m'a jamais donné l'impression d'avoir besoin de quoi que ce soit, il vient d'une famille aisée, il a tout ce qu'il désire ... Il ne semble pas en manque affectif ce qui exclu l'idée que ... Enfin que lui et moi ... Bref tu m'as comprise ! Il ne semble pas trimballer des fantômes ou des problèmes insurmontables ...

Que je déteste ne pas savoir où je dois aller ! Très sincèrement, je n'arrive pas à comprendre ce que je fais ici, je ne m'en plains pas, au contraire, mais savoir quel but a ma présence dans ces lieux me retirerait un sacré poids sur les épaules.
En plus, je n'arrive pas à savourer pleinement mon séjour ici car je me dis qu'à n'importe quel instant je peux disparaitre et me retrouver chez moi. Si au moins, j'avais une date, un compte à rebours, je pourrais ... Pourrais-je vraiment mieux profiter du moment présent ?

Je ne sais pas, ça m'énerve tellement !

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