Départ

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—Capitaine je vous en prie, ne me dites pas qu'il s'agit là de notre embarcation, s'exclama la jeune fille en voyant le radeau devant elle.

—Certes non mademoiselle, ceci est simplement ce qui nous mènera vers notre véritable navire, dit Augustin avec le plus grand sérieux.

—Je sais bien nigaud, rigola-t-elle. Je vous taquinais. Je me doute bien que nous n'allons pas naviguer pendant deux longues semaines à bord de cette barque.

 Le capitaine rougit face à l'attitude de cette intrigante jeune femme. Augustin Froz n'était pas du genre à beaucoup fréquenter la gente féminine. Il n'avait pas l'habitude de parler aux femmes et encore moins de rester en leur présence aussi longtemps. Admonestia l'avait bien remarqué et aussi n'avait-elle pas manqué ces deux derniers jours de faire rougir le capitaine. En effet il fallait deux jours pour se rendre de la bâtisse de la jeune femme au port où était accostée la chaloupe les guidant au navire. Pendant qu'Augustin ramait, Admonestia observait les alentours. Il y a bien longtemps qu'elle n'était pas venue en ville, plusieurs années même.

 Ils arrivèrent au bateau en peu de temps et une fois à bord, certains hommes se comportaient étrangement à l'égard d'Admonestia.

—Et bien messieurs, leur dit-elle avec un sourire doux. N'avez-vous donc jamais vu une femme ?

 Sa remarque eu l'effet escompté car les importuns détournèrent immédiatement le regard et retournèrent à leur besogne. Augustin s'excusa également du comportement des marins et lui promit qu'il irait voir le capitaine du navire pour lui demander de tenir ses hommes, afin que le voyage se passe dans de bonnes conditions. Car Augustin Froz était bien capitaine, non pas d'un navire mais capitaine de la garde du roi. L'empereur l'avait nommé à ce poste voilà déjà cinq ans. D'aucuns diraient qu'il avait favorisé Mr Froz avec qui il était ami mais l'empereur Henry n'était pas du genre à privilégier les relations dans la réussite et c'est bien à ses compétences qu'Augustin Froz devait son poste. Il n'avait d'ailleurs de cesse que de s'en montrer digne.

 Sur le chemin pour leur montrer leurs quartiers, le capitaine du navire ne manqua pas de se présenter comme il se doit à la nouvelle arrivante.

—Enchanté mademoiselle, je me présente, Faolan Ternoc, capitaine de l'Immortel pour vous servir, dit-il en lui embrassant doucement la main. J'espère que votre séjour parmi nous sera agréable.

—Je l'espère aussi, répondit-elle avec un sourire charmeur. L'immortel, voilà un bien joli nom pour un bâtiment de cette envergure. Mais permettez-moi de vous faire remarquer que vos noms s'accordent merveilleusement bien avec votre destin.

 Ternoc troublé et intrigué ne put s'empêcher de sourire.

—Ah oui vraiment ? demanda-t-il amusé.

—Et bien un loup chef, il vaut mieux pour vous que vous soyez à la hauteur d'un tel patronyme. Mais excusez-moi je suis impardonnable, je ne me suis pas présentée. Admonestia Noctiluca, mais je vous en prie, appelez-moi Tia.

 Augustin assistait bien malgré lui à ce que semblait être les prémices de la séduction. Il commençait à se sentir mal à l'aise et allait couper court à la conversation mais ce fût le capitaine Ternoc qui s'en chargea.

—Pardonnez mon indiscrétion, mais je ne sais toujours pas quelles raisons vous amènent à voyager aussi loin et en compagnie du capitaine de la garde royale en personne qui plus est.

—Oh c'est très simple. A vrai dire je ne connais pas les raisons exactes mais sa Majesté Henry, comme vous le dites si bien, me réclame. Je ne sais quel problème le hante mais ça doit être important. Mais je ne m'en plains pas, cela faisait bien trop longtemps que je ne lui avais pas rendu visite. Peut-être que je lui manque même si j'en doute fort, bien malheureusement.

—Vous semblez très...proche de notre souverain.

—En effet je le suis, mais pas comme vous le sous-entendez. Je suis en quelque sorte une amie d'enfance.

—C'est étrange, sa Majesté ne m'a jamais parlé de vous, intervint Augustin.

—Oh mais c'est bien normal très cher, dit-elle en se tournant vers son interlocuteur.

—Mais nous sommes amis pourtant, il aurait dû me parler de votre existence, s'emporta alors Augustin en oubliant la présence de Mr Ternoc.

 Augustin n'en revenait pas, son ami ne lui avait jamais parlé d'une quelconque amitié avec une sorcière. Il ne connaissait même pas son existence avant il y a un mois de cela. Il se sentait trahi et un peu triste également.

—Allons ne vous en faites pas Mr Froz. Notre Henry ferait un bien piètre souverain s'il divulguait ses secrets à tout va. Calmez-vous je vous prie, nous en discuterons avec lui une fois arrivés si vous le souhaitez.

—Mais c'est dans deux semaines, et encore seulement si nous ne faisons pas de mauvaises rencontres.

—Je sais. Mais dites-moi plutôt comment se porte-t-il ? Est-il marié ?

—Vous ne le savez pas ? demanda Augustin l'air surpris. La Reine Abigail a été emporté par la maladie il y a deux ans.

—Il l'aimait ? demanda Tia d'un air plus que sérieux.

—Oui, beaucoup, répondit tristement Augustin. Cela l'a profondément affecté, comme nous tous d'ailleurs. La reine Abigail était une souveraine merveilleuse. Ensemble ils dirigeaient avec justesse et droiture.

—D'où venait-elle ? Je veux dire venait-elle du même continent ?

—Euh oui, elle venait de la capitale orientale de l'empire

—Alors cet imbécile ne m'a pas écouté, murmura Tia pour elle-même.

 Admonestia continua de marmonner tout le long du chemin qui les séparait de leurs appartements et aucun des deux hommes l'accompagnant n'osait l'interrompre. Faolan se demandait ce que l'empereur pouvait vouloir à cette étrange jeune femme tandis qu'Augustin avait des préoccupations plus inquiétantes car il savait qu'elle était sorcière, et ce qui est inquiétant pour une sorcière l'est également pour eux se disait-il. C'est ainsi perdu dans leurs pensées qu'ils arrivèrent à leur destination. Le capitaine Ternoc ouvrit la porte et s'écarta pour les laisser entrer.

 La chambre était magnifique, tout respirait le luxe. Un bureau était adossé au mur sur la gauche et une porte sur la droite menait à une petite salle d'eau. Au milieu se trouvait une table bien dressée et plus au fond de la pièce, on pouvait distinguer deux lits séparés par un paravent magnifiquement décoré de gravures mythologiques.

—Je suis vraiment plus que confus, commença Ternoc. Mais un petit incident nous a contraints à vous faire loger ensemble. Nous ne pouvions décemment pas vous installer avec les matelots capitaine. Alors voilà votre chambre.

 Augustin allait protester lorsqu'Admonestia lui coupa la parole.

—C'est parfait capitaine, ne vous en faites pas pour nous. Et puis Mr Froz et moi sommes déjà proches n'est-ce pas, dit-elle avec un air malicieux en se retournant vers Augustin.

 La jeune femme faisait référence à la fois où elle l'avait surpris torse nu, faisant une petite toilette pour se rafraîchir. Cette remarque eu le don de faire devenir Augustin aussi rouge qu'une pivoine en seulement quelques secondes. Il avait tellement honte rien qu'en y repensant. Le capitaine Ternoc quant à lui eu un petit air déçu sur le visage mais alors qu'Augustin allait s'empresser de le détromper, ce fut Admonestia qui lui coupa encore une fois la parole.

—Ne vous inquiéter pas capitaine, je plaisante. Il me plaît à taquiner ce cher Augustin. Disons que cela m'occupe, rigola-t-elle.

 Le capitaine ne put retenir un léger soupir de soulagement et pris rapidement congé de ses hôtes en n'oubliant pas de leur souhaiter bonne nuit. Une fois seuls, la jeune femme s'occupa de défaire quelques-unes de ses affaires et commença à se déshabiller.

—Mais enfin que faites-vous, s'exclama Augustin qui cachait déjà son visage dans ses mains.

—Et bien voyons, je me mets en tenue pour aller me coucher. Etes-vous toujours aussi prude Augustin ? demanda-t-elle avant d'éclater d'un rire cristallin.

 Une fois mise en tenue pour la nuit, la jeune femme s'installa à table tandis qu'Augustin n'avait pas bougé de place tant il était gêné. Il dégluti difficilement en disant que le voyage serai plus long qu'il ne l'avait pensé.

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