Chapitre 5

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Après deux heures de vaisselle puis de lavage de linge, Esther partie manger. Les repas ici, c'était horrible. Au milieu de la crase de la cour, entre les cadavres et les excréments, tous les midis et tous les soirs, un homme s'installait avec une grande marmite pour servir du bouillon aux enfants. Du bouillon, c'est comme ça qu'ils appelaient cette nourriture infecte. Mais quand Esther regardait dans son bol, elle n'y voyait que des épluchures baignant dans de l'eau chaude.

Si Esther arrivait trop tard, elle n'avait rien à manger ; il n'y avait pas assez de nourriture pour tous les enfants. Et pourquoi donner de la nourriture à des macchabé ? Ça ne leurs servaient à rien de manger. A chaque minutes passé, leur mort se faisait un peu plus proche pour chacun. Chaque jour, des enfants disparaissaient, et chaque jour il y avait de moins en moins à manger.

Esther se demandait où ses enfants allaient. Elle se doutait qu'ils mourraient, les uns après les autres. Mais une question trottait dans sa tête, tous les soirs et tous les matins à l'appelle : « Pourquoi pas moi ? ». Cela faisait six mois qu'Esther vivait dans ce camp de la mort, et son tour n'était toujours pas venu. Elle ne savait pas si c'était une bonne chose ou non de vivre, de supporter toute ses atrocités du quotidien. Esther, à douze ans à peine, ne voyait plus la barrière entre le bien et le mal. Qui à raison ? Qui à tort ? Est-ce que nous sommes vraiment une sous-race ? Est-ce que ma religion est mauvaise pour le pays ? Trop de question tournait dans sa tête. Des questions que l'on n'est pas censé se poser à l'âge de douze ans. Son enfance, à cause de ce camp, était ruinée à tout jamais. Esther, qui ne connaissait absolument rien de la vie, qui ne savait pas encore tout ce que le monde pouvait lui offrir, qui ne connaissait encore rien de l'amour, de la vraie amitié, de la joie de former une famille, d'avoir un travail qu'elle aime. Et bien cette petite fille, cette petite fille qui aurait dû rentrer en école secondaire cette année n'avait plus envie de vivre. À son âge, elle avait déjà des tendances suicidaires. Sa vie dans ce camp la détruisait, des cauchemars toute les nuits à n'en plus finir, la peur de mourir lorsque qu'un officier passait, c'était invivable.

Esther récupéra sa soupe puis partie s'asseoir vers son amie Anouchka, le regard vide.

– Ça va ? Lui demanda Anouchka inquiète.

– Comme depuis six mois. Répondit-elle avant d'enfoncer une épluchure de patate dans sa bouche.

L'humanité d'Esther, sa magnifique âme d'enfant était partie en poussière, elle était allée brûler dans la grande cheminé d'Auschwitz.

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