Chapitre 1 : Une matinée ordinaire

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Bruyère était un paisible village côtier où les vagues venaient doucement caresser la plage de sable doré. Le village semblait figé dans le temps, avec ses trente maisons aux toits de tuiles rouges alignées le long de rues étroites. Tous les habitants se connaissaient bien, et chacun avait sa place dans cette petite communauté. La mairie, une bâtisse en bois blanche ornée de volets bleus, trônait au centre du village. À côté d'elle se dressait la petite école en brique, où les niveaux de maternelle et de primaire étaient réunis en une seule salle. En descendant la rue, on trouvait une vieille pharmacie au charme désuet, une chaleureuse brasserie où les habitués se réunissaient pour discuter du temps et des nouvelles du village, et un modeste magasin local qui offrait l'essentiel aux villageois. Mais Bruyère, c'était surtout le lieu de résidence de la famille Vierall.

Lynne Vierall, une jeune fille de dix-sept ans, venait tout juste de se réveiller. Elle se tenait près de la fenêtre de sa chambre, contemplant de ses yeux endormis le panorama idyllique de la mer s'étendant devant elle. Ses yeux verts, pareils à des émeraudes, reflétaient la couleur apaisante de l'océan, et sa longue chevelure châtain claire, douce comme une caresse de l'écume, ondulait délicatement au gré du vent marin. Elle était l'incarnation de la douceur et de l'innocence, et son visage rayonnait d'une beauté naturelle. Ses doigts agiles, élégants comme des danseurs, savaient caresser les touches du vieux piano qui occupait une place d'honneur dans la pièce, produisant des mélodies emplies de passion et d'émotion. Ses talents musicaux étaient une source de fierté pour la famille, mais à l'école, ses camarades ne partageaient pas la même admiration. Lynne était gentille, volontaire, mais d'une naïveté touchante et d'une maladresse désarmante. Elle avait rejoint le club de musique de son lycée situé à Rosnay, la grande ville voisine, ce qui l'obligeait à prendre le bus chaque jour, quittant son havre de paix pour l'agitation urbaine. Elle soupira en pensant à la journée qui l'attendait. Sa maladresse l'avait déjà mise dans des situations embarrassantes, ce qui lui avait valu quelques moqueries de ses camarades de classe.

Elle avait un grand frère de dix-huit ans, Louis. Ses cheveux roux flamboyants et ses yeux rouges trahissaient son tempérament ardent, tandis qu'une mystérieuse cicatrice marquait son visage, rappelant un évènement obscur de son passé. Louis était un esprit rebelle, fumant des cigarettes et ayant un goût prononcé pour les livres et les pièces de théâtre. Sa chambre était un sanctuaire de mystères et d’intrigues, avec des étagères remplies de romans noirs. Ayant déjà terminé ses études au lycée, il se trouvait à présent à un carrefour, hésitant à suivre les traces de sa mère dans la marine.

La cadette de la famille, Lorelei, âgée de seize ans, était un génie discret et d'une beauté mystérieuse. Ses yeux bleus étaient la fenêtre de son intellect brillant, reflétant l'univers infini de ses pensées profondes. Une cascade de cheveux noirs et lisses encadrait son visage pâle comme la lune. Bien qu'elle ne soit pas très bavarde, son intelligence exceptionnelle la qualifiait de génie. Passionnée de robotique, de physique et de chimie, elle avait sauté une classe et partageait désormais la même classe que Lynne au lycée. Ses talents se manifestaient au travers du club informatique et du club d'échecs, où elle était redoutable. Ses camarades la considéraient à la fois avec admiration et une pointe de jalousie.

La mère de la famille, Luna, était une femme de grande stature, avec de longs cheveux roux ondulés et des yeux de la même couleur. Capitaine dans la Marine, elle passait la plupart de son temps en mer, ne voyant que rarement sa famille. Cependant, elle était forte, courageuse et intègre, bien que sa cuisine soit légendairement… terrible. Ses rares moments de détente étaient consacrés à regarder des films à l'eau de rose à la télévision, un contraste étonnant avec sa vie militaire.

Gabriel, le père, complétait cette famille singulière. Ses yeux verts brillaient d'une sagesse accumulée au fil des années, tandis que son corps portait les cicatrices de sa vie passée en tant que mercenaire. Il avait transmis à ses trois enfants l'art de se défendre et les surprotégeait peut-être un peu trop, conscient des dangers du monde extérieur. Gabriel était un amateur de sport et de lecture, se plongeant volontiers dans les romans d'aventure, qui lui rappelaient sa vie passée, faite de voyages périlleux et d'histoires incroyables.

Chien, une boule de poils ressemblant à un mélange improbable de plusieurs races, était l'adorable mascotte de la famille. Il avait de grands yeux doux, un pelage tacheté et une démarche maladroite qui le faisait ressembler à une grosse boule avec des pattes. Il adorait passer du temps avec la famille, mais avait une petite préférence pour Lorelei, qui était plus calme que les autres. Cela ne l'empêchait pas de dévorer joyeusement les chaussures de Gabriel, un jeu terrible auquel ce dernier n'avait jamais réussi à mettre fin.

Ce matin-là, comme tous les autres, la routine familière s'était mise en marche. Les trois adolescents se levèrent à l'aube, émergeant de leurs rêves pour se préparer à affronter une nouvelle journée.

Lynne, aux yeux encore ensommeillés, se traîna hors de son lit. Ses pas la menèrent vers le piano qui trônait au milieu de sa chambre, un instrument majestueux qui semblait taillé dans l'ébène. Ses doigts délicats, semblables à des pétales de fleur, s'étirèrent et caressèrent les touches, créant une douce mélodie qui réveillait doucement la maison. Ses talents musicaux étaient une source de joie pour la famille, et sa mélodie matinale était devenue une tradition bien-aimée, un rayon de lumière dans la quiétude du matin.

Pendant ce temps, Lorelei se préparait dans sa chambre, déjà plongée dans la pensée de ses cours de la journée à venir. Ses affaires scolaires étaient impeccables, soigneusement alignées sur son bureau, prêtes à être utilisées pour repousser les limites de la connaissance. Elle avait un livre de physique quantique ouvert à côté d'elle, et des formules compliquées griffonnaient les pages de son cahier. Elle réfléchissait aux défis scientifiques qui l'attendaient, son esprit déjà immergé dans un océan d'énigmes. Elle était la fierté silencieuse de la famille, mais elle préférait la solitude à la conversation, trouvant la véritable richesse dans le savoir.

Louis, quant à lui, était déjà levé et adossé au cadre de la porte d’entrée, une cigarette fumante à la main. Il fixait le paysage marin, perdu dans ses pensées. Son visage en ombre et lumière, éclairé par la lueur de la cigarette, reflétait une profondeur d'esprit et une maturité au-delà de son âge. Il aimait à penser que la clé de nombreux mystères de la vie se trouvait entre les pages de ces romans préférés, et il rêvait d'en résoudre un, un jour.

Le soleil se levait à l'horizon, peignant le ciel de nuances roses et oranges, comme un artiste habile qui ajoutait des touches de couleur à un tableau encore endormi. La routine se poursuivit lorsque tous se rassemblèrent autour de la table du petit déjeuner. Gabriel avait préparé un repas simple mais nourrissant, une odeur familière de pain grillé et d'œufs brouillés emplissant la pièce.

"Alors, quels sont les projets pour aujourd'hui ?" demanda-t-il en servant une tasse de café à Luna, l'arôme riche de ce dernier flottant dans l'air matinal.

Lorelei, les yeux rivés sur son assiette, répondit brièvement : "Je vais au lycée, puis au club informatique." Ses paroles étaient précises, reflétant son approche méthodique de la vie.

Lynne, assise en face de Louis, soupira bruyamment. "Encore une journée à affronter le lycée…" se lamenta-t-elle, son visage exprimant son aversion pour les banalités de la vie scolaire.

Louis haussa les épaules. "Tu sais, Lynne, tu pourrais peut-être essayer de faire plus attention en cours. Ça pourrait t'aider à réussir." Ses mots étaient teintés de préoccupation fraternelle, bien qu'il les prononçât avec une nonchalance typique.

Lynne baissa les yeux vers son assiette de céréales. "Je sais, Louis, mais c'est tellement, tellement, tellement ennuyeux. La musique est franchement plus excitante." Ses yeux brillaient d'une passion intense pour son art.

Lorelei, qui était plongée dans un livre de physique quantique, leva les yeux, ses pupilles bleues perçant l'air. "Lynne a raison, Louis. Chacun a ses passions, et la sienne est la musique. On ne peut pas tous être des génies comme moi." Son visage laissait transparaître une pointe d'ironie, révélant un certain humour subtil.

Chien, la petite boule de poils, se frotta contre les jambes de Lorelei, cherchant un peu d'attention. Elle se pencha pour le caresser, un sourire léger sur son visage, un rare moment d'affection publique.

Pendant que la famille discutait de leurs projets pour la journée, les dernières bouchées du petit déjeuner furent dégustées avec appétit, chaque miette de pain grillé racontant l'histoire de la matinée.

Une fois le repas terminé, Lynne et Lorelei se préparèrent à partir pour l'arrêt de bus à l'entrée du village. Leur mère les accompagna à la porte.

"Prenez bien soin de vous, mes chéries", dit-elle en les embrassant, son étreinte empreinte de tendresse maternelle.

Lynne sourit et répondit : "Ne t'inquiète pas, maman. On sera de retour avant que tu ne t'en rendes compte." Sa voix était douce comme une brise marine, rassurante.

Alors qu'elles marchaient vers l'arrêt de bus, Lynne et Lorelei entamèrent une discussion animée. Les sujets allaient de la dernière énigme mathématique que Lorelei avait résolue en un éclair, à la mélodie que Lynne avait composé la veille pour la guitare d'Hilda. Les sœurs partageaient une complicité unique, malgré leurs différences frappantes, leurs rires cristallins s'élevant dans l'air frais du matin.

À l'arrêt de bus, elles retrouvèrent Hilda, leur meilleure amie. Hilda était une jeune femme aux cheveux très courts et aux yeux noirs, toujours vêtue de manière décontractée, avec une guitare en bandoulière. Elle en jouait de temps en temps avec Lynne, créant une harmonie parfaite entre les mélodies de la guitare et du piano.

"Salut les filles ! Vous êtes prêtes pour une nouvelle journée de cours épique ?" s'exclama Hilda en leur lançant un sourire radieux, son visage rayonnant d'énergie.

Les trois amies discutèrent joyeusement pendant que le bus se faisait attendre, partageant des rires et des secrets, leur complicité amicale créant un espace de chaleur au milieu de la fraîcheur du matin. La journée commençait comme toutes les autres, mais le village de Bruyère réservait toujours son lot de surprises et d'aventures, même dans les moments les plus ordinaires.

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