Chapitre 19 : Macabre découvert (2e partie)

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 L'instant suivant nous étions en route. Tout s'était assombri. Couchés sur l'encolure de nos juments, Jaskier et moi galopions comme si nous avions la mort aux trousses, ce qui n'était pas loin d'être le cas. J'avais jeté un dernier coup d'œil à Geralt avant de partir : il avait bu son élixir qu'il nommait chat-huant et ses pupilles totalement dilatées lui donnaient un regard entièrement noir dans la pâleur cadavérique de sa peau recouverte de ses veines devenues sombres. Je ne me faisait pas à cette apparence. Il se tenait prêt, campé sur ses jambes, son glaive à la main. Des hurlements à glacer le sang résonnèrent derrière nous a l'instant où le soleil acheva de disparaître à l'horizon. La bataille allait commencer. 


 Suivant les conseils de Geralt, nous nous éloignâmes jusqu'à-ce que le bosquet ne paraisse plus qu'une tâche sombre au loin. L'endroit était désert, un maigre buisson nous offrit un peu de bois. Je sortis un briquet d'une de mes sacoches et un peu d'amadou que j'avais récolté en forêt. Jaskier dénicha des herbes sèches et de la mousse. Notre feu serait petit et difficile à alimenter mais ce serait toujours mieux que rien. La demi-lune montait lentement dans le ciel, jouant à cache-cache parmis les nuages, nous privant régulièrement de sa lumière froide. Les sons couraient loin sur la plaine, des cris terrifiants arrivaient à nos oreilles, témoignant de l'action au loin. Je me rongeais les sangs pendant que Jaskier cassait la croûte, imperturbable. Assise près du feu, j'avais posé mon arc et mon carquois à portée de main, tendue.


– Comment peux-tu encore manger dans un moment pareil?!

– Si j'arrête de manger à chaque fois qu'il part se battre contre une monstruosité, je n'aurais plus que la peau sur les os. Il va s'en sortir, comme toujours.

– J'admire ta sérénité… répondis-je en serrant frileusement mes bras contre moi, le cœur battant la chamade, les tripes nouées par les échos.


 Jaskier me regarda avec un sourire tendre : 


– Tu as l'air toute tendue, viens-là que je te masse les épaules, ça te fera du bien et ça passera un peu le temps. 


 J'hésitai un instant puis acceptai, haussant les épaules avant de m'asseoir devant lui, face au feu. En ôtant ma veste, je doutais que cela apaise mon angoisse et mon sentiment d'impuissance mais effectivement ça ne pouvait pas faire de mal à mes muscles crispés. 


 J'avais oublié que cet homme avait des doigts de fée ! Ses mains chaudes et des doigts agiles dénouèrent efficacement les tensions au niveau de mes épaules et de mon dos. Je sentais mes trapèzes s'assouplir délicieusement sous ses doigts. Quand il dénicha et fit disparaître le noeud sous mon omoplate droite je laissai échapper un soupir de bien-être. Il entreprit enfin de venir exercer de délicates pressions tout le long de ma colonne vertébrale avant d'insister sur ma zone lombaire, me faisant beaucoup de bien. Il m'attira alors à lui, m'invitant à appuyer mon dos contre son torse chaud. J'étais bien, enveloppée par sa chaleur et celle du feu. J'en avais effectivement presqu'oublié que Geralt était en train de se battre à quelques lieux de là. Ma respiration était calme et profonde. Jaskier me murmura à l'oreille :


– Dors, tu en as besoin. Je veille. 


 Je fermai les yeux. Je sentis alors les mains de l'incorrigible barde glisser vers mes seins mais un claquement sec de ma langue l'arrêta dans son geste. Il me chuchota amusé :


– Je ne pouvais pas ne rien tenter après la merveilleuse nuit que nous avons passé. Dors, je me tiendrai tranquille, promis! 


 S'il tint sa promesse, mon esprit n'en fit pas autant ! Dans mes songes je repartis dans un voyage charnel plaisant dont Jaskier était l'acteur principal. Le plaisir, même en rêve, était au rendez-vous. La brume étrange m'envahit de nouveau : je reconnus vu de haut notre chariot, je flottai jusqu'à une fenêtre et vit au travers Rodric et Mélusine, profondéments endormis l'un contre l'autre. Leurs visages apparaissaient sereins. Mélusine s'agita un peu dans son sommeil, m'appelant. Son père se réveilla pour la câliner, la réconforter… La brume repris ses droits et je m'éveillai au sol, Jaskier paniqué à mes côtés.


– Enfin tu reviens à toi! Lève-toi vite! On a de la compagnie ! 

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