Chapitre 6

4 minutes de lecture

Par Rowani

Lucas et Livia étaient debout au fond de la salle, des lunettes de protection sur le nez, se passant des fioles et discutant de tout et de rien. La prof passait de temps en temps pour vérifier le travail des élèves, et affichait toujours une mine satisfaite quand elle regardait celui de Lucas et de son amie.
— Passe-moi la soude, fit-il, les yeux rivés sur sa préparation.

Livia le lui tendit. Elle aimait bien le regarder travailler, il était pleinement concentré sur ce qu’il faisait et rien ne semblait pouvoir le perturber. C’était comme s’il jouait sa vie sur chaque geste qu’il effectuait, chaque mot qu’il grattait sur sa feuille, chaque calcul qu’il posait.

— Bien, normalement on devrait avoir atteint le volume à l’équivalence à 12,1 mL. On en a versé 11,9. Donc si j’en mets encore quelques gouttes...


En disant cela, il ouvrit délicatement le petit robinet de la burette et laissa tomber le liquide petit à petit dans son bécher, jusqu’à ce que le mélange change brutalement de couleur.


Livia resta bouche bée, elle resta figée, debout devant ce qui venait de se passer sous ses yeux.
— Comment t’as su que ça allait réagir maintenant ?
— Juste deux ou trois calculs, c’est pas trop compliqué. J’ai eu de la chance que la réalité corresponde à ma théorie ! répondit-il en se grattant l’arrière de la tête, presque gêné d’avoir prédit le résultat de l’expérience.
— J’ai vraiment choisi le meilleur binôme possible pour mes TP. Au moins, ça me garantit quelques bonnes notes cette année !
— Faut pas dire ça, t’es super forte aussi !
— Mais toi, t’es un génie absolu ! s’exclama-t-elle. T’es fort absolument partout !


Le visage de Lucas vira au cramoisi. Cette avalanche de compliments ne faisaient qu’augmenter sa gêne. Il n’était pas habitué à être loué à ce point, il n’était d’ailleurs même pas habitué à ce qu’on dise du bien de lui...
— C’est faux, tu m’exploses en Français.
Le regard de Livia vira de l’admiration à la colère. Elle se mit à le dévisager, ses traits se tendirent et son expression devint sombre.


— Lucas, fit-elle d’un ton glacial. Tu cherches toujours des excuses pour te rabaisser. Un jour faudra vraiment que t’aies un minimum confiance en toi, sinon les gens vont te marcher dessus et te traiter comme leur chien. Regarde ce dont t’es capable, si tu continues, tu pourras faire absolument tout c’que tu veux !
— Je sais, je sais... répliqua-t-il en levant les yeux au ciel. Tu me l’as dit des milliers de fois. C’est pas quelque chose qui se change du jour au lendemain...
— Alors je suis prête à te le répéter pendant des années jusqu’à ce que ça rentre dans ta p’tite tête !

Lucas esquissa un léger sourire. Il adorait Livia pour ce genre de choses, c’était sans doute la personne sur terre qui le connaissait le plus au monde, en plus d’être celle qui prenait le plus soin de lui. Elle était une sorte de grande sœur pour lui, et sa présence et ses mots lui étaient toujours précieux.

Grâce à leur efficacité, ils finirent leur TP en avance et la prof leur accorda une pause méritée. Livia sortit deux Kinder de son sac et en passa un à son ami. Ils discutèrent ensuite des gens de la classe, en se demandant qui pouvait être en couple.


— Euh, d’ailleurs, en parlant de couple... dit Lucas. J’suis désolé de relancer le sujet, mais j’ai un tout dernier truc à te demander, fit-il. Après, promis, le sujet est clos définitivement.
Elle n’eut pas besoin de plus de détails pour comprendre de quoi il s’agissait.
— Oui bien sûr ! répondit-elle, tenant à cacher son appréhension.
Il hésita une seconde, chercha ses mots, puis se lança :
— Ça te dérange pas de me voir continuer à parler à Paul, même après ce qu’il t’a fait ?
Livia fronça les sourcils.
— Ben non, c’est ton pote, c’est ta vie. Tant que je me retrouve pas face à lui, tu fais ce que tu veux avec lui !

La sonnerie retentit, interrompant leur conversation. Chacun rangea ses affaires et partit de la classe. Pour Lucas, la journée était finie et il pouvait rentrer enfin à la maison. Il vissa ses écouteurs à ses oreilles et joua sa playlist favorite. I like me better, de Lauv, se lança pour son plus grand plaisir.

Quand il arriva chez lui, il trouva son père assis sur le canapé du salon en train de regarder une émission de bricolage à la télé. Celui-ci ne leva même pas la tête à son arrivée.
— Bonsoir Papa !
Son père ne répondit pas, mais cela ne sembla pas déranger Lucas, qui devait y être habitué. Il retira ses chaussures et posa son sac par terre.
— J’ai eu 17 en maths !


Un silence de quelques secondes s’installa, suffisamment long pour attaquer l’enthousiasme de Lucas.
— Pourquoi pas 20 ? répliqua sèchement son père, le regard rivé vers la télé.
— Tu sais bien que c’est pas possible d’avoir 20 en maths ! Tu devrais être content, j’ai eu la meilleure note.
— C’est pas une raison pour se relâcher, il faut que tu vises encore plus. Tu as encore beaucoup de travail avant d’être content de toi.

Lucas baissa la tête et se mit à rougir de honte.
— Désolé, t’as raison Papa. Je vais travailler dans ma chambre.

Un sourire se dessina alors au coin des lèvres de son père.
— C’est bien fiston, c’est ce que je voulais entendre.

Voyant la satisfaction qu’il avait provoqué, le visage de Lucas s’éclaira à nouveau, tout content d’avoir rendu son père fier de lui l’histoire d’un instant. Il se dépêcha de prendre son sac et grimpa les marches des escaliers à toute vitesse.

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