CHAPITRE XVIII - PARTIE II

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Son iris brun reflète une amère dureté sans merci quant au bleu, il dégage une glaçante impatience de vengeance. Rien de ce qui avait pu se passer auparavant n'a d'influence sur les minutes que nous partageons.

Il ne me faut pas plus longtemps pour concevoir que notre relation à ses yeux ne représente plus qu'un amas des cendres. Qu'aurais-je pu faire de pire en la trahissant de la sorte ? Étais-je coupable de leur sélection ? Ne m'étant posé la question sur cette accusation, tout à fait légitime. Selon moi, Jade me tient responsable de l'essor de leur descente dans les tréfonds de la calamité.

Nous nous fixons pendant une longue minute, seulement le train interrompt notre échange électrique. Je m'efforce de ne déverser mon bouleversement, à travers, l'ensemble de mon comportement. Il est vrai que j'ai naïvement gardé espoir d'une possible réconciliation. Au final, je m'étais plié à sa demande...

Jade aurait pu deviner mon plan visant à attendre The Tower, à fin de démembrer l'affaire criminelle du meurtre de mon fils. Cependant, je ne leur ai jamais raconté la vérité. Non pas une miette. La seule chose qu'ils aient saisie par le biais d'un total imprévu fut le décès de mon fils dont l'existence leur était inconnue.

Oui, j'ai fauté en ne veillant absolument pas aux conséquences désastreuses que mes choix auraient sur mon amitié avec les jumeaux. Seulement, il est trop tard. S'il y a bien une leçon que j'ai apprise durant ses dernières années, c'est de ne pas consacrer d'importance à ses regrets, car ils appartiennent à une temporalité or de notre portée. En revanche, je ne peux pas les empêcher de me ronger.

Une sonnette grésille dans nos oreilles: c'est le signal de départ. Nous gravissons, chacun des seize membres, les marches pour rejoindre nos compartiments. À peine, ai-je posé les pieds dans le véhicule qu'il démarre. Ils n'ont vraiment pas une seconde à perdre.

Un autre guide m'attend à l'entrée du wagon, il me prie de le suivre jusqu'à mes appartements. Il m'indique une pièce, sur la porte de celle-ci est gravées sur une plaque mon nom. Quand je rentre, j'y découvre une belle décoration digne des design intérieurs de mon île d'origine. Enfin, il n'y a plus de blanc. Mes yeux vont pouvoir s'absorber à d'autres tons. Le luxe y est prépondérant et je compte en profiter certes pour une courte durée, mais au moins j'ai l'opportunité d'y goûter.

Ornement et dorures à profusion, le bois sombre épouse les meubles, l'ambiance se délecte d'un clair-obscur saisissant. Le lit tenu par quatre colonnes sculptées est s'y confortable que j'ai l'impression de dormir sur un nuage. Je me laisse bercer par le rythme sulfureux du train et m'enroule dans les draps de soies. Cette sensation m'a tellement manqué. Il est vrai qu'une certaine aisance n'est non négligeable après s'y être accoutumé.

Lorsque je sens les rayons du soleil peu à peu baigner la pièce, j'ouvre mes paupières. C'était inattendu, mais réparateur, je me suis endormi. Je regarde la pendule et elle indique 11:07. J'ai fait une longue sieste...

Une visite du wagon s'impose, j'espère tomber sur un livre ou une babiole pour occuper mon voyage et cela si possible en éviter la présence maléfique de Lolita.

Je traverse d'abord un grand salon agencé d'une immense bibliothèque et un bar. On me propose à boire et je commande un jus de pêche, rien d'extravagant pour l'instant... Ne faut-il pas tomber si vite dans les filets encombrants de l'alcool. Il n'y a pas grand-chose dont j'ai l'accès, à pars, une autre salle de repos. Un livre me fait de l'oeil alors je le saisis et en fais ma lecture.

Tous ces petits détails me rappellent un quotidien fort lointain appartenant au luxe, au confort et aux services ne déviaient à mes attentes. Pourtant, cela ne fait que quelques mois que je m'en suis défait.

  • Salut mon canard ! jubile une voix résonnante.

Elle possède assurément un don inné, destiné à me rendre malade, suivi d'un germe de folie incertain. Lolita se jette sur le canapé, son bond imprévisible renversant mon jus de pêche sur moi. Mon t-shirt blanc se tache d'une énorme forme orange. Or de moi, je la fixe et décampe pour n'écoper de ses remarques désagréables.

  • Oh tu es là, désolé pour avant. Tu sais, moi aussi, il m'arrive d'être maladroite comme toi. Il se trouve qu'on a plus de points en commun que je le pensais... déclare-t-elle en me voyant revenir dans la pièce.

J'ai farfouillé dans mon armoire et j'ai opté pour un chemisier blanc. Au début, j'ai penché pour demeurer cloîtrer dans ma chambre et puis ne voulant gâcher mon séjour sans m'enrichir de ses locaux, je me suis à nouveau présenté dans le salon. En revanche, j'ai du posé le contre et le pour, pendant un long moment. Soit je défiais mon entraîneuse au bar soit je m'autorisais un probable dernier verre de whisky avant les choses sérieuses. Après tout, une pique de plus ou de moins, qu'est-ce que cela changerait à notre entente déjà désastreuse ?

Puisque le serveur semble en pause, je prends place derrière le bar.

  • Je peux savoir ce que tu fais ? demande la noiraude mimant être choquée par mon attitude, une main sur la poitrine.
  • Ça ne se voit pas je vais me souler, je déclare oubliant ma résolution d'abstinence à l'alcool.
  • Non, mais attends une minute, mon canard... Tu ne penses pas qu'il te faut une bonne raison ? S'interloque la jeune femme.
  • Il existe toujours de bonnes raisons. Seulement, je ne les partagerai pas avec toi, je crache déterminé à l'envoyer chier.
  • Je comprends, mais laisse moi te donner une réelle bonne raison de vider la bouteille de whisky en solo. Ce qui, je dois ajouter, te rend encore plus navrante que tu ne l'es déjà, dégaine-t-elle.

Je devine simplement le sujet de sa phrase qui risque d'être la fameuse vidéo. Tout en actionnant un bouton sur le coter du bar, une flamme volante apparaît devant Lolita, lui permettant d'allumer une cigarette. Un écran s'affiche et instantanément une succession d'image démarre.

Tu vas vite comprendre, m'assure-t-elle un sourire inouï gravé sur son visage machiavélique.

« La nouvelle est tombée, il y a maintenant plus d'une semaine. Il faut avouer que votre famille, ces temps-ci, n'a été atteinte que de drames atroces, dévoile la journaliste. Comment survivez-vous face à cela ?

  • Il n'y a pas de mot assez fort pour décrire ce que je ressens, d'abord sa mère, donc ma petite soeur, ensuite... Il fait mine de reprendre son souffle, mon neveu nous a quittés dans des circonstances tragiques. Moi et ma soeur partagions une relation très spéciale. Je lui racontais absolument tout, entre elle et moi c'était une évidence... Je... Oui, en ce moment, je traverse des jours emplis de chagrin, aux paysages malheureux, une tristesse sans fond me secoue. Il est dur pour moi d'envisager d'aller mieux, seulement je n'en ai pas vraiment le choix. Je dois me battre, expose le jeune homme, les mains croisées sur ses jambes, le regard chancelant dans le vide.

Son visage reflète la poussière misérable de l'absence.

  • Il paraît que votre famille attend un événement capable de vous faire remonter la pente, je me trompe ? Le questionne-t-il avec une grande bienveillance, touché par les aveux du blond.
  • Oui, effectivement, un heureux événement qui sera je l'espère un nouveau départ pour moi et ma famille. Moi et ma femme allons accueillir un enfant. Un petit garçon que nous avons décidé de nommer en hommage à son cousin: Eneko.
  • Quelle magnifique preuve d'amour. »

La vidéo se coupe. Mes mains tremblent, et je ne supporte plus très bien le poids de mon corps. Une sensation étrange a pris possession de mon estomac comme si celui-ci se liquéfiait, malgré moi des larmes émergent, un mélange éreintant de répugnance et d'amertume.

  • Tu as l'aire surprise. Il y a de quoi, maintenant je juge que tu as officiellement une bonne raison de te souler la gueule. Sur ordre de ton entraîneuse préférée, se réjouit sadiquement Lolita.

C'est un monstre, Bewen est un démon qui a été créé uniquement pour m'encombrer par le mal. Je ne vois pas d'autres explications possibles. Il cherche par tous les moyens de me punir.

Je me dirige à la course dans ma salle de bain qui se trouve dans ma chambre. Je rends tout le contenu de mon estomac et essaye de me ressaisir avec volonté. Mais rien n'y fait, mes sanglots éclatent avec ardeur et mon coeur se dissout.

Comment ose-t-il faire une chose aussi aberrante ? Cet homme n'a définitivement pas d'âme. Je plains la femme et l'enfant qui vont devoir le supporter. Il me hante comme personne, me détruit et s'acharne à me rendre pathétique comme personne. Et pourtant, et pourtant... Cela persiste et s'enlise, malgré moi dans ma cage thoracique. Ce sentiment de pureté devenu toxique et aveuglant. Je l'aime, miséricorde, je l'aime.

Le deuxième salon est un refuge parfait. J'ai voulu voir April, seulement, on m'a appris qu'elle est dans un wagon différent du nôtre. Ses services sont demandés, ailleurs. C'était bien la seule personne à qui je peux me confier. La solitude à laquelle je suis ancré se trouve être la pire que je n'ai jamais connue. Mon âme la perçoit telle une entité à part entière, à présent. Elle se moque de moi et n'est pas prête à nier mes plaintes, nous sommes devenus une valeur de préférence sans égale.

Nous sommes bientôt arrivés à destination et j'en ai presque oublié d'observer le paysage. Seulement, la plupart du temps, nous sommes obscurcis par les murs en béton gris qui se succèdent à grande vitesse. Parfois, nous avons l'opportunité d'entrevoir des bribes de verdure divertissante, une vague d'évasion inaccessible.

La tête baissée, mes yeux sont rivés sur le marbre blanc quand le grincement de la chaise, en face de moi, entrave mon isolation. Oh, non, je vous en supplie, en ce moment précis, je ne me sens vraiment pas de taille à affronter l'ouragan Lolita. Je n'ai pas la moindre envie de lui prêter mon intention, jusqu'à qu'une bouteille résonne sourdement sur la table. Mes yeux se posent sur cet objet qui se révèle être mon unique réconfort et échappatoire.

Lolita me dévisage avec sagesse, ce qui ne paraît en rien normal de sa part, plutôt étrange voir carrément horrifiant... En général, la jeune femme ne m'aborde qu'avec des gestes et des paroles d'une immense négligence. J'essaye d'attraper la bouteille, mais celle-ci s'en empare avant moi. Avant même que je ne puisse riposter, mon entraîneuse s'engage dans une réplique tout à fait inattendue:

  • Je t'ai menti, ton dossier officiel est minime comparé à mes recherches personnelles. Et lors de mon investigation, j'ai trouvé une multitude de choses intéressantes à ton sujet, Andorra. Je ne vais pas tout citer. Le plus flagrant c'est que le père de ton enfant n'était pas Sébastien, mais Bewen, m'avoue-t-elle directement.
  • À quoi ça sert de me dire cela ? Hein ? Tu n'en as pas marre de foutre de ma gueule ? Parce que moi je n'en ai absolument plus rien à battre de notre petite guerre, crié-je en cramponnant mes mains au rebord de la table. Tu as pitié de moi peut-être ? Non ! Non, je ne pense pas, après tout ce que madame s'est amusée à me faire subir ! Alors pourquoi tu me racontes cela ! Hein ? fulminé-je.
  • Il fallait bien que je te forge, non ? Ces petites choses t'ont autant heurter, mon canard ? susurre-t-elle. Voyons, tu es beaucoup plus que tu ne le montres, tranche-t-elle insérant de la froideur à son timbre. Car dorénavant que je connais, disons presque... touts tes secrets, je vais pouvoir d'aider à gagner. En réalité, tu as un peu de potentiel. Mais comment te conseiller, si je n'en perçois que la surface ? Enfaîte, je ne te faisais pas du tout confiance au début, nan nan nan, appuie-t-elle, C'est bien pour cela que je t'en ai fait baver ! Ça m'a permis d'analyser ton caractère, ton comportement et d'établir tes limites.
  • Mes limites ? Tu t'étais résolu à vraiment me rendre malade, en sommes ? Je crache à ne savoir si elle se moque de moi ou non.
  • Si on veut. C'est quand on est au plus bas qu'on découvre nos plus grandes armes de destructions. Car mon canard ses limites, il va falloir les éliminer. Tu ne peux pas survivre dans ce monde si tu te poses quelconque barrière. Pour répondre à ta précédente question, j'ai décidé que tu étais apte à recevoir ma confiance. Aujourd'hui moins que demain, mais si tu désires que cela évolue, il va devoir m'écouter à la lettre et me prouver ta bonne foi. Tu convoites la victoire, non ? m'interroge-t-elle.
  • Que veux-tu que je fasse à présent ? Je demande en suffoquant de ses révélations.

Lolita pousse le whisky pour le mettre à ma portée.

  • Bois, je veux que tu boives, pour commencer, ordonne-t-elle. Ensuite, nous entamerons une session intensive d'apprentissage. J'espère que tu as été créée avec une bonne mémoire. Voir primordiale, renchérit-elle.

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