CHAPITRE 13

10 minutes de lecture

Voilà ! Son premier voyage en tant que stagiaire guide touristique, venait de se terminer. Elle avait adoré du début à la fin. Immédiatement, elle s’était sentie dans son élément et Antonio lui-même n’en était pas revenu de l’aisance avec laquelle elle s’était intégrée. Il s’attendait à devoir lui dire ce qu’elle devait faire, quand elle devait le faire, qui aller voir, comment réagir, mais il n’avait pas du tout eu besoin de le faire. D’instinct, Sylvia avait pris les choses en main et avait su s’adapter aux différentes situations rencontrées. Il avait d’ailleurs fait un très bon rapport sur elle à Mr Sanchez.

Plus elle se rapprochait de Biarritz, de son appartement et de Marco, plus l’impatience de retrouver son amoureux, la gagnait. Il lui avait manqué bien plus qu’elle ne l’avait cru. Ils s’étaient appelé tous les deux jours après la réponse de Marco au texto de Sylvia lorsqu’elle se trouvait au Portugal. Il s’était calmé et était même devenu extrêmement gentil et amoureux. Il n’a cessé de lui dire qu’elle lui manquait terriblement, qu’il était perdu sans elle, qu’il avait hâte qu’elle rentre pour la prendre dans ses bras et la couvrir de baisers.

Il était très tard, lorsqu’elle franchit la porte d’entrée sur la pointe des pieds pour en pas réveiller son compagnon. Elle voulait lui faire la surprise en se glissant doucement à ses côtés dans leur lit. Elle n’alluma aucune lumière et dans la pénombre déposa sa valise dans le salon, alla se changer dans la salle de bain et se rendit dans la chambre. Elle ne voyait absolument rien et ne se fiat qu’à sa mémoire de l’emplacement des meubles pour se guider jusqu’à son lit. Avec précaution, elle se glissa dans les draps frais et s’avança pour se coller à Marco endormi, mais….

D’un bond elle se redressa et alluma sa lampe de chevet. Marco n’était pas là. Elle vérifia l’heure sur son radio réveil : une heure vingt-trois. Il était une heure vingt-trois et Marco n’était pas là alors qu’elle lui avait dit qu’elle devait rentrer cette nuit. Elle était extrêmement déçue et inquiète. Où peut-il bien être ? Que fait-il ? Elle lui aurait bien envoyé un texto pour le prévenir qu’elle était rentrée et l’attendait, mais elle savait très bien que s’il était avec sa bande, il ne répondrait pas et qu’en plus ça le mettrait de mauvaise humeur et c’était bien la dernière chose dont elle avait envie.

Elle éteignit la lumière et se coucha un peu triste. Il finirait par rentrer et il la trouverait endormie, comme la belle au bois dormant attendant son prince charmant. Elle imagina la réaction de Marco en la découvrant en rentrant et s’endormie sur ces belles images.

A son réveil, toujours aucune trace de Marco. Il avait sûrement dû trop boire et était resté à dormir chez un pote au lieu de conduire pour rentrer, elle essaya de se rassurer. Elle entreprit de défaire sa valise, laver son linge et ranger l’appartement. Marco n’avait pas dû faire du tout le ménage en son absence vu la couche de poussière sur les meubles et le désordre qui régnait dans l’appartement. Des vêtements trainaient ça et là, la poubelle débordait, des boites vides de céréales étaient éparpillées un peu partout dans la cuisine, des bouteilles de lait ou de jus de fruits dont il ne restait qu’un fond encombraient le frigo… et dans la salle de bain ça n’était pas mieux. Elle pesta tout en rangeant, nettoyant, récurant. Ce n’était absolument comme ça qu’elle avait envisagé de passer son week-end.

Marco ne fit enfin son apparition qu’en début d’après-midi. Sylvia était partagée entre la joie de le retrouver et la colère dont il était à l’origine en ayant laissé l’appartement dans un état horrible, puis en n’était même pas là pour l’accueillir après deux semaines de séparation.

- Ciao Bella, dit-il avec bonne humeur en la prenant dans ses bras avant de l’embrasser. Je croyais que tu ne rentrais que ce soir.

Donc voilà pourquoi il était absent. Ils s’étaient mal compris sur le jour de son retour. Immédiatement, la colère de Sylvia retomba.

- J’ai voulu te faire une surprise en arrivant plus tôt, mentit-elle pour ne pas faire d’histoire.

- Et bien c’est réussi. Tu m’as manqué Bella, dit-il d’une voix rauque tout en l’embrassant dans le cou.

- Toi aussi tu m’as manqué, répondit-elle le corps déjà en feu sous les caresses expertes de son compagnon.

Tous les reproches, toute sa colère, toutes ses inquiétudes s’évanouirent et laissèrent place au désir, à l’amour et la passion. Ils savourèrent leurs retrouvailles et ne quittèrent pas la chambre tout le restant du week-end. Marco dû reprendre le travail dès le lundi matin tandis que Sylvia profita de sa semaine de repos.

Le samedi soir, elle reçu un texto de Marco lui disant qu’il sortait boire un verre avec ses potes, après le boulot. Une nouvelle fois, elle fût extrêmement déçue car elle pensait qu’ils passeraient cette soirée ensemble avant qu’elle ne reparte le lendemain pour deux semaines. Il pourrait sortir comme il voudrait le week-end prochain vu qu’elle ne serait pas là, il abusait. Elle garda tout de même ses reproches pour elle afin de ne pas déclencher une dispute alors qu’elle devait repartir.

Les semaines passèrent et Noël arriva à une vitesse folle. Raphaël et Virginie avaient proposé à Marco et Sylvia de se joindre à eux pour passer les fêtes dans un chalet à la montagne, mais Sylvia préféra refuser vu la réaction de son compagnon à leur retour d’Egypte. Elle y serait bien allée pourtant. Elle avait de très bons souvenirs de ses Noël à la montagne avec son meilleur ami et ça l’aidait à passer cette période difficile de l’année, un peu plus facilement.

Elle était d’humeur morose. Elle ne cessait de penser à Nicolas et essayait d’imaginer à quoi pouvait ressembler son petit garçon âgé désormais de huit ans et demi. Etait-il toujours aussi blond qu’à sa naissance ? De quelle couleur sont ses yeux ? A-t-il le même sourire charmeur que son père ? Qu’est-ce qu’il aurait commandé au père Noël cette année ? Elle l’imaginait en train de décorer le sapin tout en fredonnant des chants de Noël. Tous les ans, c’était un crève-cœur pour elle de voir les enfants s’émerveiller devant les vitrines décorées. Tous les ans, elle achetait ses cadeaux des semaines à l’avance pour ne pas avoir à se rendre dans les magasins et devoir assister au bonheur dont on l’avait privé. Cette douleur était un peu moins forte, un peu moins douloureuse, elle avait appris à vivre avec. Dans un sens elle ne voulait pas que cette douleur disparaisse car elle avait le sentiment que si elle ne la ressentait plus, elle oublierait Nicolas et elle ne voulait pas l’oublier. Jamais.

Marco avait remarqué qu’elle n’était pas comme d’habitude.

- Bella, qu’est-ce qui ne va pas ? Tu es tout le temps au bord des larmes en ce moment ?

Elle ne lui avait pas encore parlé de Nicolas et le moment était venu. Il lui tendait une perche qu’elle devait saisir.

- Chéri, il faut que je t’avoue quelque chose.

- Tu as un mec, c’est ça ?

- Nooon !! Non pas du tout. C’est très difficile pour moi d’en parler car c’est extrêmement douloureux alors s’il-te-plait laisse-moi prendre mon temps.

- Tu m’inquiètes Bella. Tu es malade ? Demanda-t-il inquiet tout à coup.

- Non ne t’en fais pas, je vais très bien, dit-elle en lui caressant tendrement la joue.

Elle posa ses mains sur ses genoux et baissa le regard vers ses pieds. Elle cherchait ses mots et essayait de retenir les larmes qui menaçaient de couler sur ses joues. Elle prit une grande inspiration et se lança.

- J’ai un fils. Il s’appel Nicolas. J’avais dix-sept ans lorsqu’il est né et mes parents m’ont forcé la main pour que je le fasse adopter à sa naissance. Je ne voulais l’abandonner, mais ils ont su trouver les arguments pour me faire flancher et j’ai fini par signer les papiers. Au début, je me suis accrochée à l’espoir de pouvoir le récupérer dès que j’aurais un travail et un appartement, mais là encore j’ai été dupée et lorsque je suis allée à l’agence d’adoption, la directrice m’a annoncé que le délai de rétractation était dépassé. Je n’ai pu le voir que deux minutes le jour de sa naissance, quand ils me l’ont posé sur mon ventre et puis ils me l’ont arraché.

Elle dû faire une pause dans son récit, les larmes coulant à flot sur son visage. Marco la prit dans ses bras pour la consoler. Elle s’accrocha à lui et pleura toutes les larmes de son corps. Ce chagrin qu’elle lui cachait depuis des mois, pouvait enfin s’exprimer librement et c’était une délivrance pour elle de pouvoir enfin se laisser aller à ses sentiments. Lorsque ses sanglots s’estompèrent elle s’écarta, se moucha et repris son récit.

- Il aura neuf ans en Mars, mais la période de Noël est toujours difficile pour moi. Croiser dans la rue et les magasins, des parents heureux tenant par la main leur petit garçon d’à peu près du même âge que mon fils, je ne peux pas m’empêcher de les envier.

- Bella, il ne faut plus y penser. C’était il y a longtemps, tu ne pourras rien y changer. Il faut que tu oublies.

- Mais je ne veux pas l’oublier, s’offusqua-t-elle. C’est mon bébé, je l’ai porté pendant neuf mois. Je l’ai senti grandir et bouger dans mon ventre. Il fera toujours parti de ma vie et j’espère qu’un jour il fera la démarche pour me retrouver et que nous serons enfin réunis.

- En attendant, c’est bientôt Noël et c’est une période joyeuse alors fais un effort. Tu n’es plus une enfant de dix-sept ans, prends sur toi.

Elle resta stupéfaite et sans voix. Elle s’attendait à un peu plus de compassion et de compréhension de sa part. Raphaël comprenait ce qu’elle pouvait ressentir et l’avait toujours aidé et soutenu lors des deux périodes de l’année les plus difficiles de l’année, qu’étaient Noël et le jour de l’anniversaire de Nicolas. Marco ne comprenait pas sa douleur, elle ne pouvait pas compter sur lui, maintenant au moins elle était fixée.

Elle venait à peine de lui révéler son douloureux secret, qu’il lui annonça qu’il sortait voir un pote. Incroyable !! Il ne restait même pas avec elle pour la réconforter. Pour lui c’était sans importance et il fallait continuer à vivre et qu’elle fasse abstraction de cette période de sa vie. Elle attendit qu’il ait quitté l’appartement et téléphona à Raphaël. Elle avait besoin d’entendre sa voix et d’une oreille attentive et c’est ce qu’il fit. Comme toujours, il prit le temps de l’écouter, de la réconforter, de la rassurer et lui apporta toute son amitié et son amour. Cet échange lui fit énormément de bien et elle avait retrouvé un peu le sourire en raccrochant. Désormais, elle savait qu’elle ne pourrait compter que sur son fidèle ami et elle ne parlerait plus de son douloureux passé avec Marco.

Chacun sa façon de réagir et d’appréhender la vie et les coups dur. Marco préférait peut-être les occulter pour éviter de souffrir et il attendait sûrement qu’elle en fasse de même, d’après Raphaël. Il avait raison, mais elle ne pouvait pas s’empêcher d’en vouloir tout de même à Marco pour son manque d’empathie.

Elle garda sa rancœur pour elle afin de ne pas gâcher les fêtes de fin d’année. Marco lui offrit un bracelet en or qu’il lui présenta comme un seul et même cadeau pour son anniversaire et son Noël. Il se vanta de trouver très pratique qu’elle soit née à cette date, ça lui faisait économiser un deuxième achat. Sylvia fût une nouvelle fois un peu déçue de son comportement. Ses parents, son frère et Raphaël avaient toujours eut pour habitude de lui faire des cadeaux bien distinct pour marquer les deux évènements, alors que Marco ne fasse pas le même chose la blessa. Pour se consoler, elle se dit qu’au moins il avait pensé à lui faire un cadeau et un beau en plus. C’était vrai qu’en y réfléchissant, il n’avait pas les moyens de lui faire deux cadeaux aussi onéreux, en même temps et qu’il avait tout simplement été maladroit dans ses paroles pour excuser le fait qu’il n’avait qu’un seul présent pour elle.

Passons. Ça n’était pas si important que ça après tout. Cette fête n’était-elle pas pour célébrer la naissance du Christ et se retrouver en famille ? Les cadeaux n’étaient qu’une pure invention commerciale. La base même de ce jour c’était l’amour et le fait de se réunir pour partager un repas.

Ils réveillonnèrent avec la famille de Marco et Sylvia fût touchée par leur accueil et leur gentillesse. Ils l’embrassèrent et la serrèrent dans leurs bras chaleureusement, comme si elle était leur propre fille. Même si elle ne croyait plus en Dieu, elle se plia à leur tradition de se rendre à la messe de minuit. Elle ne voulait pas les blesser en refusant d’aller à l’Eglise. C’était très important pour eux, elle pouvait bien faire cet effort une fois dans l’année.

Elle découvrit de nouveaux usages, de nouveaux plats traditionnels et de nouvelles coutumes auxquelles elle se plia avec plaisir et bonne humeur. Elle eut une pensée pour Nicolas bien sûr, mais elle la garda pour elle.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Sabrina CRESSY ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0