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La semaine se finit aussi vite qu’elle a débuté et nous voilà déjà dimanche. J’ai calqué mon emploi du temps sur celui d’Ellie. On se couche et on se lève ensemble, et notre seul jour de repos, jeudi, nous a été bénéfique. On a profité de la journée, collée ensemble à ne pas faire grand-chose. À part le strict minimum pour rappeler à mes parents que nous étions encore en vie.

Ce matin, quand le réveil sonne, aucune de nous n’est motivée à bouger. Et on regrette d’avoir prévu cette sortie, ma belle se pose déjà beaucoup de questions sur ma fatigue. Je ne sais pas si j’arriverai à lui cacher ma surprise encore longtemps. Je ne pensais pas que rendre service au voisinage pouvait être aussi crevant, j’ai l’impression de courir des marathons tous les jours.


On est toutes les deux dans un état pitoyable, on traîne encore un peu au lit. On arrive même à se rendormir et, quand je me réveille, je regarde l’heure. Je la secoue gentiment pour la réveiller, elle grommelle, réclame plus de temps pour émerger. Je dépose un baiser sur son épaule.


— Ellie, il est déjà onze heures…


— Encore cinq minutes, juste cinq minutes.


Je la laisse tranquille, quitte la chambre mollement et vais me doucher. Quand je reviens, elle bouge seulement, totalement grognon. Je ne l’avais jamais vue comme ça, elle jure comme un charretier en enfilant son pantalon de pyjama. Elle m’engueule presque quand elle remarque mon sourire amusé, je sens que la journée va être longue.

Je descends pour préparer son café, en espérant que ça la rendra moins chiante. Je croise mes parents, une bise à chacun, et je les préviens de l’humeur massacrante d’Ellie. Mon père, lui, par contre, est en forme.


— Fais-lui un double café, ça la mettra en joie. Et si une double dose ne suffit pas, passe à la triple ! Par contre, pas plus de trois.


— Et pourquoi ?


— Tu risques d’être épuisée en la regardant courir partout après. En plus, ça sera trop dur pour elle de rester assise pendant le film.


Je ne sais pas comment il fait pour sortir autant d’âneries en restant aussi sérieux. Ma mère lève les yeux au ciel, il est fier de lui. Mais je l’écoute quand même, ce sera un double pour une fois. Quand ma petite amie me rejoint, je suis déjà en train de boire mon thé. Elle se pose sur mes genoux et me fait un câlin.


— Pardon.


— Pas grave, t’es crevée, je peux comprendre.


Sa bouche s’attarde sur mon cou, impossible de rester impassible. Je prends une grande inspiration pour ne pas craquer aux messages de mon cerveau reptilien.


— Ellie… Ton café… Il va refroidir…


Elle recule son visage, me regarde et sourit avant de l’y replonger. Je ferme les yeux, mon calme apparent s’évapore au fur et à mesure que ses lèvres jouent avec chaque millimètre de cette zone sensible. Ma main se pose sur l’arrière de sa tête, je tire légèrement sur ses cheveux pour l’obliger à stopper son jeu. Mes doigts rejoignent sa joue, je l’embrasse fougueusement. Mon autre main caresse sa cuisse, cette fille me rend dingue.

Cette fois-ci, c’est elle qui m’arrête. Son index sur ma bouche, elle affiche un sourire à tomber.


— Ce soir si tu veux, avant de dormir.


— Je sais pas si je vais tenir jusque là, vu comment tu m’as bien chauffée.


Elle me dépose un baiser sur le front, se tourne pour attraper sa tasse comme si de rien n’était. Je laisse glisser mes doigts le long de sa colonne, même si elle ne laisse rien paraître, son corps frissonne. Je ne veux pas être la seule à être frustrée.

On finit de se préparer, on mange avec mes parents et on file chercher Ian et son copain. Malgré notre manque d’énergie et de motivation, on arrive un peu en avance. Ellie recommence à me chercher, ses paroles, ses timides caresses, je tente autant que je peux de ne pas lui sauter dessus. Je sors de la voiture, j’ai besoin de prendre l’air, elle m’imite, s’installe à côté de moi. Je ne peux pas m’empêcher de la dévorer des yeux, elle sait très bien l’effet qu’elle me fait et ça lui plaît de me mettre dans un tel état. Son jeu est mis en stand-by quand ses amis se montrent enfin.

Ian prend Ellie dans ses bras, lui claque la bise. Ils sont heureux de se revoir, comme à chaque fois. Il abandonne ma belle pour me dire aussi bonjour et me présenter son petit ami.


— Solène, Antoine. Antoine, Solène. Je suis sûr que vous allez bien vous entendre !


— Enchantée.


— Salut, alors voilà la fameuse dompteuse d’Ellie ! Ça va, ça te fatigue pas trop de gérer ce genre d’animal ?


— Ça peut aller pour l’instant, le plus compliqué, c’est son côté bonobo.


Je vire au rouge, mince, c’est sorti tout seul. Antoine a un fou rire, son mec lui est choqué. Je me tourne vers Ellie, elle est aussi empourprée que moi. C’est de sa faute aussi, elle m’a tellement excitée depuis qu’on est levées que mon cerveau est bloqué sur mon envie d’elle.


— Ben alors, on t’entend pas le bonobo de Solène ? Quelque chose à dire pour ta défense ?


— Antoine, au lieu de faire dire des conneries à ma meuf, grimpe dans la voiture ! On va être à la bourre.


Il l’enlace, lui fait un léger bisou sur le front et lâche un « Tu sais que je t’adore, toi » avant d’entrer dans le véhicule, suivi de Ian. Ma petite amie me lance un regard vexé.


— Bonobo ? Sérieux ?


Je ne dis rien, si elle savait que c’est le surnom que je lui donne dans ma tête depuis qu’on est ensemble. Un petit sourire gêné, une excuse et nous partons pour le cinéma. Presque une heure de trajet dans le calme et la bonne humeur. Au moins, le coup du singe a calmé les ardeurs d’Ellie et j’arrive enfin à me concentrer sur autre chose que son corps dénudé.


Une fois sur place, Antoine et moi laissons nos amoureux choisir le film. On en profite pour faire un peu plus connaissance, je découvre comment il a rencontré Ian et les difficultés rencontrées. Le collège a été une horreur pour eux, mais, depuis qu’ils sont au lycée, les choses se sont arrangées. Il m’explique aussi qu’il a été surpris par Ellie, il ne s’attendait pas à rencontrer quelqu’un comme elle, qui ne juge jamais les gens. Un soutien qui leur a fait du bien. Je comprends aussi qu’elle n’est pas du genre à montrer ses propres faiblesses, ça lui a fait un choc d’apprendre par Ian qu’elle n’allait pas bien, qu’elle était au plus bas.

Il me remercie d’être là pour elle, de lui avoir redonné le sourire. Sauf qu’elle l’avait perdu par ma faute, il ne le savait pas et l’apprend de ma bouche. Il me précise, tout de même, que ma belle n’a jamais autant transpiré le bonheur que depuis notre mise en couple. « Je pense que tu es l’élément qu’il lui manquait pour être elle à part entière », ces mots résonnent agréablement en moi et me réconforte dans ce que j’entreprends pour notre futur.


La séance est tranquille, Ellie et moi sommes dans notre bulle. Nos doigts entrelacés, sa tête bien calée entre la mienne et mon épaule. Nous profitons de notre moment. Je jette un œil vers Ian, ils font comme nous, ne prêtent aucune attention aux autres. Tous les quatre, nous sommes bien, sereins, rien ne peut nous déranger le temps du film. La lumière se rallume et, avant de quitter nos sièges, ma belle m’embrasse et me susurre un « merci ». Je ne dis rien, la fixe interloquée, sa seule réponse est sa main pour m’aider à me redresser.

Dans l’allée, je la stoppe, je reconnais plus loin Élodie. Encore elle, à croire qu’elle nous suit. J’indique à mes trois comparses sa présence. Antoine ne comprend pas pourquoi on la laisse s’éloigner, il questionne Ellie.


— Y’a un truc avec Élo ? Vous vous êtes disputées ?


— Non, c’est juste qu’on arrête pas de la croiser. Et là, ça craint, personne, à part vous deux, sait qu’on est ensemble. Si elle nous voit tous les quatre, elle va capter.


— Et ? Ça dérange qu’elle l’apprenne ?


Elle hésite, je réponds à sa place.


— Non, mais pas comme ça. On veut le faire au calme, juste entre nous.


— Okay, je comprends. Par contre, juste comme ça, elle nous a repérés.


On se retourne, elle nous regarde, nous sourit, un petit signe de la main et elle quitte la salle avec, je suppose, son copain. C’est clair, on est grillées. Un bien pour un mal peut-être, on verra bien.

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