Le jour est levé depuis un bon moment quand nous sommes réveillées par des bruits de portes et de pas. Je repense à la veille, mince, on a laissé un sacré bordel dans les pièces communes. La table n’est pas débarrassée, la vaisselle sale traîne encore dans la cuisine, je les entends déjà s’en plaindre et Julia en rajouter avec ses remarques salaces. Mes yeux brûlent tellement je suis crevée, j’ai l’impression qu’on s’est endormies il y a à peine dix minutes.

Ellie ne s’en fait pas autant, je l’entends grogner avant de venir se coller à moi. Ses bras autour de ma taille, sa tête au niveau de ma clavicule. Elle prend tout de même le temps de me déposer un baiser.

— Laisse-les faire ce qu’elles veulent, il est trop tôt pour se lever.

— Dis, t’as déjà eu des envies de coucher avec un homme depuis qu’on est ensemble ?

Un nouveau grognement.

— On dort encore une heure ou deux et on en discute…

— Non, mais c’est pas pour t’embêter, mais hier, on est d’accord que t’étais en mode tamponnage et pas frotti-frotta ?

Sa bouche me pince la peau.

— Solène, on dort.

Je ris, sa voix trahit un mélange d’agacement et de gêne. La main dans ses cheveux, je dégage son front pour y poser mes lèvres. On reste l’une contre l’autre, le silence a repris sa place dans le bungalow. On se rendort.

Quelques heures plus tard, j’ouvre à nouveau les yeux, Ellie est déjà levée. Je jette un œil à l’heure, l’après-midi est déjà bien avancée. J’attrape mes affaires, m’habille vite fait et pars en quête de ma petite amie. Je la retrouve assise, en train de boire un café, je la prends dans mes bras, un petit bisou sur la joue.

— Bien dormie ?

— Ouais et toi ? Pas trop crevée ?

Je m’assois en face, bâille.

— Laisse-moi juste le temps d’émerger.

Elle pose sa tasse.

— Non, coucher avec un homme ne m’intéresse actuellement pas. Je t’ai, c’est déjà suffisant et désolée pour hier. Je ferai plus attention, la prochaine fois.

Une réponse simple et plutôt concise, je me demande combien de temps elle a mis pour la préparer. Je lui souris, tends le bras pour caresser ses doigts.

— Il va falloir qu’on gère tes pulsions d’hétéro alors…

— Je suis pas hétéro, je suis bi. J’ai capté ça en parlant avec Julia.

— Pour une fois qu’elle sert à quelque chose.

Je laisse échapper un léger rire.

— On peut la remercier aussi pour hier soir, c’est elle qui m’a filé le stylo magique !

Je suis surprise, je ne m’attendais pas à ça de sa part. Elle peut donc être sympa quand elle veut. Ellie me lâche et part me préparer une tasse de thé, une habitude prise depuis qu’on est au camping. Et moi, j’adore ses petites attentions. Je donne un coup d’œil vers la fenêtre, le soleil tape pas mal encore aujourd’hui.

— Dommage qu’il soit déjà si tard, on aurait pu aller une dernière fois à la plage.

— Tu rigoles, j’espère ! Avec toutes les marques que tu m’as faites, même pas en rêve que je me mets en maillot de bain devant des inconnus !

Je la regarde, c’est vrai que je me suis un peu lâchée. Entre les suçons et les griffures, on pourrait croire qu’on s’est bagarrée. Et ce n’est pas mieux de mon côté. Finalement, c’est bien que nous n’ayons pas le temps d’y aller, on se serait fait remarquer.

Elle revient, me tend la tasse puis se réinstalle face à moi.

— Après, on ira se doucher.

— Ah tiens, aujourd’hui, c’est douche à deux ?

— Et ouais, c’est le week-end, c’est pour ça !

Elle me fait un clin d’œil, je regarde mon thé, le pose.

— Tu sais quoi, on va y aller maintenant. Ça lui permettra de refroidir un peu.

On file vers la salle de bain, la porte de l’autre chambre s’ouvre, on croise Alice et on la salue vite fait avant de nous enfermer dans la salle d’eau. Sous la douche, Ellie m’invite à l’aider à se laver, pour enlever toute l’encre selon ses dires. J’accepte sans rechigner et laisse mes mains parcourir son corps, m’attardant sur ses seins avant de descendre vers son ventre. Notre envie de l’autre revient au galop, mes lèvres se posent sur chaque parcelle de son corps.

Quand, soudain, je me stoppe. Je bloque à nouveau, incapable d’aller plus loin. Les larmes aux yeux, je m’excuse, moi qui étais persuadée que tout cela était derrière nous, me revoilà à la case départ. Ellie m’enlace tendrement.

— C’est pas grave, mon ange. Je te demande juste de me frotter le dos, on verra pour le reste après, d’accord ?

J’acquiesce de la tête, elle se tourne, mes mains reprennent leur travail. La nuque, le dos puis les fesses pendant qu’elle finit de se laver le devant. Mon excitation revient, je suis en pleine montagne russe. Je l’embrasse dans le cou, mes mains retrouvent sa poitrine. Nous nous offrons un dernier moment magique avant le départ. Avant notre retour dans la dure réalité de nos vies.

Enfin prêtes, nous rejoignons ma cousine et sa meilleure amie qui s’échangent un regard empli de sous-entendus à notre arrivée. Ellie s’installe sur mes genoux pendant que je bois, enfin, mon thé. Julia prend enfin la parole en repérant notre état.

— On s’est donnée à cœur joie cette nuit…

Un petit bisou sur ma joue et ma petite amie entre dans la discussion.

— Et ce n’est que la partie émergée de l’iceberg !

— Ah ouais ? Et, situation débloquée ou pas ?

— Côté pile, oui.

J’ouvre grand les yeux, cela la fait rire.

— Tu peux pas dire le contraire, de face, tu bloques, de dos, c’est un vrai feu d’artifice. Au moins, on sait comment gérer maintenant !

— Ça serait quand même mieux si on pouvait des deux côtés…

— T’inquiètes, Solène, on n’a pas encore commencé nos thérapies, ça reviendra en temps et en heure.

Les filles vont, à leur tour, se préparer et nous voilà partis. Un dernier au revoir au camping, nous les laissons gérer le trajet de retour. À l’arrière de la voiture, on profite des dernières heures de vacances. Une fois rentrées, nous ne pourrons plus nous aimer librement.