11 (V2)

4 minutes de lecture

Je ne me suis jamais sentie aussi seule. J’ai fait ce qu’il fallait pour le bien d’Ellie, mais mon cœur saigne. J’ai un goût amer dans la bouche, je n’arrive pas à oublier ce jour. Je sais que c’est dur pour elle, mais elle est forte, elle surmontera la douleur et retrouvera sa joie de vivre. Je ne l’ai pas revue depuis. J’ai tout fait pour l’éviter. J’ai arrêté les cours pour ne pas la croiser au lycée, au grand désespoir de mes parents. Que pouvais-je faire d’autre ?

L’année était foutue. J’ai fait acte de présence aux épreuves du bac et le résultat a été sans appel. J’ai lamentablement échoué, mais ce n’est rien d’autre qu’un détail. J’ai appris qu’Ellie avait tout de même réussi. De justesse. Mais, c’est quand même une réussite. Je suis fière d’elle. J’aimerais la féliciter, mais c’est impossible. Je me dois de rester à ma place.

Aujourd’hui, je suis dans une impasse. Je ne sais plus ce que je dois faire, redoubler et la revoir à la rentrée ou stopper définitivement mes études ? Je ne peux pas demander une nouvelle fois à changer de lycée. Mes parents ont déjà fait tellement. Et, je ne sais pas si je pourrais la revoir sans vouloir lui parler. Je ne sais pas si je supporterais de la voir avec quelqu’un d’autre. Pourtant, il faudra bien qu’elle passe à autre chose ! Je ne veux que son bonheur, même si ce n’est pas, forcément, avec moi.


Deux jours ont passé depuis les résultats des exams. Deux longs jours où mon moral reste au plus bas. Ma vie sans elle est vide de sens et je ne peux que m’en vouloir. Comme toujours depuis notre rupture, je passe la soirée au salon, avec mes parents. Ils ne veulent pas que je reste seule et je les comprends. J’ai fait suffisamment de conneries dans le passé.

Soudain, mon portable sonne, c’est Ian.


— Ian ?


— Solène, c’est la merde ! Je me suis pris la tête avec Ellie, elle veut plus m’écouter !


Je me redresse, mon stress monte.


— T’écouter ? Mais à propos de quoi ?


— Son nouveau pote, Mathieu. Il nous a invités à une fête, enfin, il l’a invité, je devrais dire ! Solène, il est pas clair, ce type. J’ai voulu lui en parler, mais elle m’a envoyé bouler… Putain, Solène, elle part en vrille ! Ce connard l’a fait boire !


Je ferme les yeux et prends une grande inspiration. Je tente de reprendre consistance.


— Vous êtes où ?


— Attends, je t’envoie l’adresse.


— Essaye de la gérer… J’arrive.


Je raccroche, dans la foulée, je reçois un SMS. Mes parents comprennent que quelque chose cloche, je leur explique dans les grandes lignes tout en me chaussant et en récupérant les clés de voiture. Mon cœur s’affole, mon esprit imagine le pire. Je tremble comme une feuille, mon père le remarque. Il pose sa main sur mon bras.


— Dis-moi où, on y va. Je t’accompagne, ma puce.


Il prend les clés, me sourit. Je regarde le parcours pendant qu’on démarre, dix minutes de trajet. Je ferme les yeux, j’espère que Ian va réussir à l’empêcher de faire n’importe quoi. Je m’en veux, j’aurais dû être plus forte. Ma vue se floute, merde, c’est pas le moment de pleurer ! Mon père me réconforte pendant que j’essuie mes larmes. Je fixe la route, le GPS et puis un éclair de génie, je tente le tout pour le tout. J’appelle Ellie, son meilleur ami m’a prévenu qu’elle avait récupéré son téléphone.

La sonnerie, puis le répondeur. Je retente encore et encore. Allez, ma belle, réponds ! Elle ne décroche pas. Quand on arrive, je saute de la voiture. Mon paternel se dépêche de me rejoindre. À l’intérieur, je bipe Ian.


— T’es où ?


— À l’étage… Grouille-toi, Solène ! Elle a suivi Mathieu et un de ses potes, la porte est fermée à clef, je peux pas entrer ! Putain, Solène, je sais plus quoi faire !


Il renifle avant de raccrocher, je suis pas dans un meilleur état que lui. On prend les escaliers et on le retrouve au bout du couloir. Un léger échange de regard et me voilà en train de tambouriner comme une malade contre la porte. Je hurle son prénom, mais rien n’y fait. Mon père prend les choses en main, il me demande de m’écarter et défonce la porte d’un bon coup d’épaule. Ian laisse échapper un « Waouh la vache ».

Je me précipite dans la pièce, ne prête attention qu’à une personne. Ellie est là, sur le lit, complètement dans les vapes. L’alcool, hein ? Y’a autre chose pour qu’elle soit aussi stone. Instinctivement, je la prends dans mes bras, lui parle doucement. Mes lèvres se posent sur son front. Mais qu’est-ce que j’ai été conne ! J’aurais jamais dû accepter ! C’est entièrement de ma faute si on en est là !


Une main se pose sur mon épaule accompagnée d’un « Mais putain, t’es qui, toi ? » Je n’ai même pas le temps de réagir que mon père intervient. Il les vire comme des malpropres de la chambre, le ton monte dans le couloir. Je le laisse les gérer et interpelle Ian.


— Ian, aide-moi à la sortir d’ici…


Il attrape un de ses bras, on tente de la relever. Je ne sais même pas si Ellie capte ce qu’il se passe actuellement. On avance difficilement, c’est un vrai poids mort qu’on traîne. Mon père revient, rit en nous voyant galérer.


— Les enfants, promettez-moi de vous mettre à la muscu !


Il prend Ellie dans ses bras avec une facilité déconcertante et nous quittons cette maison de fous. Ian s’installe côté passager, moi à l’arrière avec ma douce. Tout le temps du retour, je lui parle, la cajole. Je m’en veux, je m’en voudrai toute ma vie. Elle ne serait pas dans cet état si j’avais été plus forte.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Sophie M Rigger ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0