14 (V2)

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Ce matin, Solène n’est pas là, et impossible de lui demander des nouvelles. J’espère qu’elle n’a rien de grave, je me demande si je ne pourrais pas, exceptionnellement, demander à mes parents de la contacter ou alors de passer la voir. Je verrai avec ma mère quand elle viendra me chercher ce midi. Je ne désire pas passer mon après-midi chez Solène, juste lui demander comment elle va, juste avoir des news rassurantes.

Et, comme de bien entendu, elle refuse catégoriquement. Super, comment veut-elle que je me concentre sur le reste ? Pourtant, je ne demandais pas grand-chose, juste lui demander si elle va bien. Plus le temps passe et plus je me dis que mes parents n’ont plus de cœur. Ma petite amie n’est pas venue au lycée, c’est normal que je m’inquiète. Mais non, selon ma génitrice, je devrais passer à autre chose, une absence, ce n’est pas bien grave. Peut-être, mais ce n’est pas dans ses habitudes, et, avec tout ce qu’on vit en ce moment, je suis en droit de stresser, de vouloir savoir pourquoi ! C’est sûr que ça les arrangerait qu’il lui arrive quelque chose, que cette «histoire ridicule» prenne fin.

Je passe le reste de la journée, enfermée dans ma chambre, à ruminer et à broyer du noir. La nuit est courte, le lever on ne peut plus difficile. Je n’ai pas fermé l’oeil de la nuit. Entre l’inquiétude pour ma petite amie et l’énervement face au comportement de mes parents, comment j’aurais pu ?


Tout le long du trajet, je stresse. Solène sera-t-elle là ? Si je ne la vois pas, je m’en fous, j’irai chez elle. Une heure de marche ne me fait pas peur, sécher les cours et alors ? Bien sûr que je le ferai, j’ai besoin de savoir, j’ai besoin de la voir. Et personne ne pourra m’en empêcher. Point.

Je suis soulagée quand je vois Solène près du portail, elle n’a pas l’air bien. Elle se traîne, a une petite mine, je me dépêche de la rattraper, de la dépasser, lui glisse un « Je t’aime » et je rejoins mon groupe d’amis. Du coin de l’œil, je la regarde traverser la cour, elle n’est pas au top, c’est clair et je ne pourrai pas être avec elle avant ce midi. Les cours me passent bien au-dessus, le repas est enfilé en moins de deux. J’ai d’autres chats à fouetter. J’ai repéré ma belle quitter la cantine, son plateau encore bien rempli. Mais qu’est-ce qu’il lui arrive ?

Je quitte le bâtiment, cours jusqu’au lycée, j’enfile les marches comme si de rien n’était. On pourrait croire que je vole. Quand j’arrive aux toilettes, elle se trouve dans une des cabines, son estomac est en train de se vider. Je reste silencieuse, j’attends, la tête baissée, inquiète. Elle est surprise de me voir lorsqu’elle ouvre la porte, passe à côté de moi, se lave les mains et la bouche. Mes doigts frôlent son bras.


— Ça va ?


— Oui, t’inquiète. C’est rien, mon crâne se rappelle à moi, c’est tout.


Elle fouille dans son sac, sort des cachets et en prend un. Mes yeux analysent tous ses gestes, je ne l’ai jamais vue comme ça.


— C’est pour ça que t’étais pas là ?


— Je suis désolée de ne pas être venue, mais c’est la mauvaise période du mois et, comme à chaque fois, les premiers jours, j’ai la migraine.


Elle m’enlace, pose sa tête dans mon cou, elle est épuisée. Je me recule et prends sa main, tout sourire.


— Viens !


J’installe nos sacs, m’assois et l’invite à venir se blottir contre moi. On reste ainsi le temps de la pause. Sans parler, sa tête sur mon épaule, les yeux fermés, ma main jouant délicatement avec une de ses mèches. Je la laisse se reposer. Pour la première fois depuis que nous sommes ensemble, les rôles se sont inversés. Je me découvre capable de la soutenir.

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