Episode 1 - Au commencement (5)

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Penchée au-dessus du lavabo, les yeux fermés et les mains crispés sur le rebord blanc et froid Vanity tâchait de rester calme et détendu. C’était cependant plus facile à dire qu’à faire. Elle se faisait sûrement encore de fausses idées. Elle secoua la tête et redressa la tête, observant son reflet. Elle avait les traits tirés par l’anxiété, les cheveux en pagaye et les yeux brillants.

— Aller reprend toi un peu, s’intima-t-elle d’une voix qui se voulait assurée.

Elle attrapa sa brosse, peigna consciencieusement ses cheveux et les attacha en une queue de cheval haute. C’est déjà un peu mieux, songea-t-elle. Une gerbe d’eau sur le visage, une serviette pour s’essuyer et elle avait presque l’impression que son cœur ne battait plus la chamade dans sa cage thoracique. Ça ne restait qu’une impression cela dit. Elle était morte de peur. Elle baissa de nouveau les yeux vers le centre du lavabo où était posé presque religieusement un petit bâtonnet blanc. En son centre apparaissait deux petites barres perpendiculaires. Vanity, tremblante le saisi et essaya de se concentrer sur ces deux petits traits, certaines que son imagination lui jouait des tours. Mais non. Elles étaient bien là. Elle se laissa choir le long du mur, pressa le précieux petit bâtonnet contre sa poitrine et laissa couler des larmes qu’elles retenaient depuis bien longtemps.

Sa première réaction était de se précipiter dans les bras de Jo pour lui annoncer cette nouvelle qu’ils attendaient depuis deux ans. Mais alors qu’elle allait pour se relever quelque chose en elle la retint et lui dit d’attendre un peu. Elle ne savait pas trop ce que c’était mais elle sentait que ce n’était pas le bon moment. Aussi sa joie en fut amoindrie, néanmoins cela n’atteint pas le soleil qui rayonnait de bonheur tout au fond d’elle. Sa tête avait refroidi un peu sa joie, mais son corps s’en moquait éperdument. Aussi continua-t-elle de sourire un peu bêtement et s’empressa-t-elle de se débarrasser du test. Oui. Avant de l’annoncer à Jo elle voulait être parfaitement sûre que ce n’était pas un rêve. La dernière chose que voulait Vanity était de créer un faux espoir à son compagnon. Elle ne voulait pas réitérer son erreur. Aussi attendrait-elle confirmation d’un médecin. Sa décision prise elle le mit dans un emballage de serviette hygiénique et le jeta à la poubelle avant de continuer de se préparer.

Fidèle à lui-même Jo lui avait préparé une tasse de thé au Jasmin, des tartines à l’abricot et avait rajouté quelques fraises à côté. C’était un vrai amour. De son côté il préférait le café noir sans sucre ni lait avec une petite culière de miel. Il était en train de lire le journal sa tasse à la main. Vanity s’attarda à le regarder dans l’embrasure de la porte, sa chemise bleu parfaitement ajusté sur ses épaules et ses pectoraux, son pantalon noir lui moulant juste ce qu’il fallait les cuisses et surtout ses cheveux en un coiffé décoiffé étudié. Elle resta là, à sourire et à savourer ce précieux instant.

— Je sais que tu adores m’admirer mais tu peux venir le faire tout en buvant ton thé avant qu’il ne refroidisse tu sais ? lui lança-t-il malicieusement avant de boire une gorgée.

Elle rit et vint lui faire un câlin, les bras entouré autour de son cou et lui planta un baiser sur la joue, puis un autre sur ses lèvres douces et chaudes. Le goût du café avait tendance à la faire grimacer, mais le miel était là pour l’en empêcher. Elle le soupçonnait parfois de rajouter du miel non pas pour lui mais juste pour elle. Quoi qu’il en soit elle adorait.

— Je t’ai déjà dit à quel point je t’aimais ? demanda-t-elle en s’asseyant en face de lui.

— Oui, mais j’aime à t’entendre le répéter.

Vanity prit une gorgée de thé, posa une main sur sa joue appuyée sur la table et lui lança un regard débordant d’amour.

— Je t’aime.

— Moi aussi ma puce.

Oui, elle ne pouvait pas le lui dire maintenant.

Jo : Ne te fatigue pas trop aujourd’hui ma puce, je t’aime, ton homme.

La jeune-femme sourit en consultant son portable. Ne pas trop se fatiguer ? Elle n’avait certes plus beaucoup de boulot à rattraper mais quand même, elle devait continuer sur sa lancer afin de boucler ses dossiers en cours le plus rapidement et efficacement possible. Malheureusement pour elle, aujourd’hui monsieur Jacobs avait sollicité un autre rendez-vous deux semaines après son dernier entretien. Généreuse et très soucieuse du bien être de ses clients elle n’avait pas eu le cœur de le lui repousser à plus tard.

Vanity mit de l’ordre dans ses papiers et rangea chaque dossier méticuleusement avant l’arrivée de son client et eu la délicate attention d’apporter un verre d’eau. Elle en était encore là à relire pour la énième fois son dossier quand sa secrétaire lui annonça son arrivée. Elle resta interdite en voyant son client. Il était dans un piteux état. Ses vêtements étaient sales et troués, sa barbe mal rasée, quoi que peut-être pas rasée du tout, allait dans tous les sens et lui donnait un air de sauvage. Ses yeux étaient injectés de sang et il arborait des bleus un peu partout. La jeune femme tâcha de rester calme et professionnelle. Aussi s’empressa-t-elle de s’enquérir de sa santé.

— Est-ce que vous allez bien monsieur Jacobs ? Je vous en prie asseyez-vous ! Tenez un verre d’eau.

Il la regarda d’un œil vide derrière ses petites lunettes rondes et il émit une sorte de grognement qui glaça le sang de Vanity. Elle déglutit bruyamment et tenta tant bien que mal de garder le contrôle de ses mains et du reste de son corps.

— Monsieur Jacobs… ? Qu’est-ce que vous…

— Il va venir, dit-il d’une voix caverneuse. Il t’a choisi. Bientôt vous ne ferez qu’un, dit-il en se rapprochant dangereusement d’elle.

Elle se mit derrière sa chaise de bureau, seul rempart entre elle et son client qui débitait des inepties et qui avait clairement l’air d’avoir perdu la tête. Les divorces faisaient vraiment faire n’importe quoi aux gens.

— Je vais vous demandez de bien vouloir reculer et de sortir d’ici immédiatement monsieur Jacobs sinon je vais être contrainte d’appeler la sécurité !

Il avait les yeux rivé sur elle et sur chacun de ses mouvements, néanmoins elle avait la sensation qu’il ne la voyait pas vraiment. Elle s’agrippa à son fauteuil et se tint prête à lui jeter si jamais il tentait quoi que se soit. Faisait-elle vraiment le poids ? Elle n’en était pas sûr, mais il était clair pour elle qu’elle ne pouvait pas rester sans rien faire s’y jamais il l’agressait. Aussi se campa-t-elle bien assurée sur ses appuies en cas de sprint forcé.

Les secondes qui s’écoulaient sans que ni l’un ni l’autre ne bouge lui parurent être des heures. Puis, comme si de rien était il fit demi-tour et sorti du bureau. La porte toujours ouverte Creg passa devant sa porte et s’arrêta en la voyant là, pâle comme un linge, les yeux exorbités par la peur et les membres tremblants. Il se précipita dans le bureau et vint la prendre par les épaules, lui demanda ce qui n’allait pas, ce qui c’était passé, si elle allait bien. Impossible pour elle de répondre. Son corps ne lui répondait plus, son cerveau s’était déconnecté et elle n’entendait que vaguement ce que son collègue lui disait. Vanity le regarda, mais ne vit que son client, son allure étrange et ses quelques mots qui résonnaient à ses oreilles « il va venir, il t’a choisi, bientôt vous ne ferez qu’un ». Qu’est-ce que ça voulait dire ? Qu’est-ce que ça pouvait signifier ? Qui était ce « il » ? Qui allait venir la chercher ? Pour faire quoi ? Pourquoi elle ? Qu’est-ce qu’il entendait par « ne faire qu’un » ? Qu’est-ce que c’était que ce délire ? Toutes ces questions tournaient en boucle dans son esprit, aucune réponse, qu’elle soit sensée ou irrationnelle. Rien ne lui venait. Juste une peur effroyable lui répondait. Un mauvais pressentiment lui tordait les entrailles. Sa tête se mit à tourner violemment et elle senti son corps partir sans qu’elle puisse le retenir.

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