Chapitre 10

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Après un petit-déjeuner qu'il apprécia tout autant que le premier, Johany rassembla les quelques affaires qu'il avait déballé depuis son arrivée, puis salua la dame à l'accueil et partit.

Il se retourna une dernière fois pour observer l'hôtel dans lequel il avait passé deux nuits. La façade peu engageante et le service de nettoyage laissaient à désirer, mais il songea qu'il avait bien fait de ne pas s'arrêter aux apparences, car il avait bien aimé son séjour malgré tout, -en particulier le fruit du Jackier-.

Il s'était renseigné sur les horaires des bus et arriva pile à l'heure à l'arrêt. Le trajet devait durer six heures en moyenne. Il avait fait charger son téléphone pour pouvoir écouter de la musique et comptait lire dans les routes droites.

Lorsqu'ils démarrèrent, Johany enfonça ses écouteurs dans ses oreilles et regarda le paysage défiler par la vitre, après avoir lancé sa playlist préférée.

Il réalisa cependant bien vite que lire serait tout bonnement impossible. Il avait toujours été sensible aux longs trajets en voiture, particulièrement dans les montagnes ou les routes sinueuses. Les deux premières heures furent plutôt agréables, puis ce fut pour lui un véritable supplice.

La musique ne lui était plus d'aucun secours tandis ce qu'il réprimait un haut-le-corps dans un énième virage en épingle, qui montait toujours plus haut dans les montagnes verdoyantes. Les passagers du bus autour de lui semblaient habitués à de telles routes, mais Johany non. Il n'osait cependant pas demander un sac pour vomir et encore moins qu'ils s'arrêtent un instant. Sa timidité, la gêne qu'il éprouvait, la barrière de la langue et son état nauséeux avancé, formaient tout bonnement un vrai barrage pour lui.

Il ouvrit l'appareil photo de son téléphone, qu'il avait utilisé pour capturer l'assiette de fruits des petits-déjeuners, et se regarda dans le retour. Il avait le teint très pâle, les yeux cernés et vides. Se voir ainsi ne renforça pas sa confiance pour adresser la parole aux gens qui l'entouraient.

Il était seul dans sa rangée, mais derrière lui, il sentait les regards de quelques passagers. Il avait tenté de rester calme et de contenir la moitié de papaye, les ramboutans et la mangue qu'il avait avalés avant de partir, mais désormais il n'arrivait plus à rester impassible et s'épongeait le front en soufflant bruyamment.

La route qu'ils empruntaient était étroite et montait de plus en plus, les éloignant de la civilisation de la capitale. Ils passèrent devant quelques maisons, où des enfants jouaient avec un ballon crevé. Johany aurait bien voulu qu'il y ait un arrêt dans le coin, mais le conducteur n'avait pas ralenti pour s'arrêter.

Le jeune homme passa le quart d'heure suivant à tenter de se changer les idées. Il regarda son téléphone l'espace de cinq secondes et appuya d'un doigt tremblant sur sa musique favorite en imaginant que ça lui ferait du bien de l'entendre une troisième fois. Il releva aussitôt la tête pour regarder la route.

Lorsque la dernière note de la chanson retentit à ses oreilles, il laissa tomber ses écouteurs et se déplaça jusqu'à l'avant du bus, où il espérait avoir une meilleure vue sur la route.

Malheureusement, les places de devant étaient toutes prises et il resta debout un bon moment dans la rangée du milieu, en se tenant aux sièges qui l'entouraient. Les passagers le regardaient à présent franchement, ils devaient se demander ce qu'il faisait. En réalité, il hésitait, il n'arrivait pas à aborder l'un d'entre eux pour lui demander de lui laisser la place un instant, et ne pouvait se résoudre à parler au chauffeur.

Une femme assise à l'avant près de la vitre finit par lui adresser la parole et il ne comprit pas un mot de ce qu'elle lui raconta, alors il baraguouina qu'il avait "very very envie to puke", en faisant de grands gestes fébriles.

La femme le regarda un moment, la bouche ouverte, puis hocha la tête et glissa quelques mots à son voisin, un homme qui devait être son mari. Celui-ci lui parla très vite en détaillant Johany, qui se sentait de plus en plus faible, et il se décala de trois rangs, s'installant derrière. La femme sourit et fit un signe de la main à Johany pour lui indiquer de prendre sa place.

Le jeune homme s'apprêtait à s'y asseoir et à se fondre en remerciements, mais lorsqu'il ouvrit la bouche pour parler, un jet de vomi lui échappa et tomba en cascade sur les cuisses de la passagère.

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