La place Saint-Marc

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Je recommande vivement la place Saint-Marc (176 mètres sur 82) à toute personne désireuse de se débarrasser d’un enfant, garçon ou fille. L’endroit est particulièrement adapté à cela.

Des milliers de personnes s’y bousculent en regardant en l’air et en donnant à manger aux pigeons. On y entend parler plus de langues que sur la tour de Babel. Perdre un enfant dans ces conditions est chose aisée. Les méthodes pour y parvenir sont nombreuses.

Pour perdre Emilie, nous avons utilisé celle dite du « coup du pigeon ». Je vous la conseille pour sa simplicité : dites à l’enfant que vous allez le photographier donnant à manger aux pigeons et, alors qu’il s’approche de ceux-ci, partez dans la direction opposée. C’est infaillible. L’enfant choisit son pigeon parmi des milliers (il y a plus de pigeons sur la place Saint-Marc que de vénitiens à Venise), ce qui vous laisse tout le temps de disparaître.

 

Alors, vous pouvez admirer tranquillement la basilique Saint-Marc, et, sur la piazzetta voisine, le palais des Doges et le Campanile. Avec un peu de chance, vous aurez même le temps de visiter le musée Coner ou de prendre un capuccino au café Florian, sous les arcades.

Les lecteurs assidus savent qu’Emilie était avec nous pour déguster une pizza dans un ristorante de « Il ramo va in campo » (la ruelle qui débouche sur la place). Pour elle l’intérêt touristique d’un endroit, quel qu’il soit, se mesure au nombre de boutiques de souvenirs qu’elle peut visiter. La verroterie de Murano l’enchante. Mais aussi les dentelles de Burano, les cuirs artistiques, les mosaïques, les céramiques, les meubles, les objets laqués, cirés tressés, les masques mais surtout, surtout les célèbres bijoux de Venise. Ah, les bijoux de Venise, les bagues, les colliers, les bagues, les bracelets, les pendentifs, les bagues, les ras-le-cou, les boucles d’oreilles et les bagues.

Comment y résister ? Pour ma part, j’y parviens facilement, mais toutes ces bagues font beaucoup souffrir Emilie qui en parle et s’inquiète constamment de savoir si nous avons sur nous les moyens financiers d’en faire l’acquisition, au cas où, des fois que...


Nous devons faire demi-tour. Le Costa Riviera appareille pour Bari à 19H00. Le retour se fera par le même chemin. Nous prenons possession de notre cabine confortable et dotée d’un hublot qui permet de s’assurer en toutes circonstances que nous sommes toujours sur l’eau.

Il y a 1177 passagers qui font de même sur ce beau paquebot, dont une quantité non négligeable de jeunes et belles italiennes aux cheveux longs et à la poitrine opulente.

Nous ne sommes que 166 français. Le personnel de bord se compose d’environ 500 personnes dont cinq français parmi lesquels le chef cuisinier. Donc, ça ne devrait pas aller trop mal !

En cas de problème, il y a 18 chaloupes de sauvetage pouvant contenir au total 1776 personnes. Pourvu qu’on ait le temps de les mettre toutes à l’eau ! Très organisé, j’explique à Emilie et Florent que si nous coulons, qu’il n’y a plus rien à faire, que tout est perdu, la seule chose à sauver est ce petit carnet vert sur lequel j’écris.

19 heures, c’est l’heure du premier service au restaurant « Portofino » (pont 4) et nous faisons partie du premier service. Donc, à table ! De la discipline, sacrebleu ! Si nous dépassons l’heure de plus de quinze minutes, il faudra prévenir « le Maître ».

A quoi bon !

Lorsque le navire largue les amarres, qu’il navigue dans le canal de Guiecca, nous sommes à table. Nous ne pouvons pas admirer comme elle le mérite, l’île de Saint Maggiore Giorgio, ni la place Saint Marc dont la vue est splendide depuis la mer. Tout juste apercevrons-nous un morceau du jardin public de Saint Elena et de l’école navale, car notre table se trouve près d’un hublot. A peine verrons-nous l’île du Lido, le monastère Carthusian ainsi que le Fort Saint Andréa. On mange. Mille ans d’architecture vénitienne peuvent bien se dérouler à nos pieds..., nous mastiquons. Nous ne sommes et ne resterons jamais que les authentiques et très humbles esclaves de nos estomacs.

 

Las et repus, il ne sera pas nécessaire de nous border ce soir.


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