La Rançon de la Gloire (Partie 3)

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  La voix de Sir Hawke ne suffit pas à le calmer et il fallut que le Maître d’Armes attrape son élève par les oreilles pour le rappeler à l’ordre.

- Alistair ! Va prendre une douche pour te calmer, je te veux en tenue de cérémonie dans mon bureau dans trente minutes et tu as intérêt à ce que je n’ai rien à y redire ! Macpherson, continues à glousser et je t’assigne au service de la ferme avec les cadets, sûr que torcher le cul des poules t’apprendra l’humilité. Singh, t’as encore un peu de fierté ?

- Je n’ai pas accepté son offre Sir. Se redressa Jamal, trop honteux pour admettre qu’il l’aurait acceptée sans poser de questions si Leeroy avait eu plus de temps et moins de public.

- Dommage Macpherson, il va falloir te contenter du rapport que ton nom a mérité pour toi. Cracha Sir Hawke avec méprit. Allez vous préparer, nous avons rendez-vous dans une heure à l’auditorium avec le conseil, vos parents seront là, ne leur faites pas honte.

- Vous voulez dire que vous avez fait venir la maman de Léonard. Ricana Leeroy.

  Léonard qui était sur le point de passer la porte de la salle de bain se figea, menaçant. Jamal se préparait déjà à le retenir à nouveau.

- Lady Alistair sera présente parce que Lady Alistair a mérité de siéger au conseil par son courage, sa noblesse et sa détermination. Lady Alistair a repris le siège de son défunt époux il y a déjà trois mois et tu serais bien avisé de te renseigner sur les activités de l’Ordre avant de te servir de ta prétendue « influence » pour faire chanter tes camarades Macpherson. Maintenant, vas te préparer.

  Leeroy ne trouva rien à y redire, Sir Hawke ne s’était pas gêné pour afficher ostensiblement sa déception, ça faisait mal, même quand on s’appelait Macpherson.

  La préparation pour la présentation au conseil se fit en silence. Léonard était exilé dans le bureau de leur Maître d’armes, Leeroy était vexé, Archibald nerveux à l’idée de faire pâle figure à côté de ses frères aînés et de ses cousins. Charles quant à lui était sorti comme une fleur d’on ne sait où pour mettre son costume et Jamal était à nouveau dans le gaz maintenant que plus rien de menaçant ne se présentait à l’horizon. Quoi qu’il advienne à présent, il ne pourrait rien y changer.

- Merde ! Jamal, fais attention ! Surgit Archibald en se séchant les cheveux. Tes mains ! J’avais pas vu, montre !

  Jamal regarda ses paumes, l’entaille au creux de sa main gauche, la marque des dents d’Archie sur l’autre, c’étaient des égratignures mais elles s’étaient rouvertes. Il risquait de salir son costume. Archibald le passa soigneusement en revue puis plongea dans la trousse à pharmacie qu’il gardait dans son chevet. Sans plus de mot, il nettoya ses plaies, les banda avec soin.

- Je vais t’aider à t’habiller pour pas que tu froisse tout, attends juste, je me termine et je m’occupe de toi.

  Les yeux brûlés par le manque de sommeil et son réveil brutal, Jamal accepta docilement et passa son pantalon et ses chaussures le temps que son camarade ne soit prêt. Leeroy était sorti rapidement pour ne pas avoir à les côtoyer plus que son bon plaisir, Charles avait suivi pour pouvoir profiter du lever de soleil sur le parc du Château.

  Archie vint boutonner sa chemise méthodiquement, les sourcils froncés, il avait l’air soucieux.

- Ne t’en fais pas Archie, ton père sera indulgent, Kenneth a bien passé son examen de fin de cycle deux fois… si Sir Hawke ne te l’accorde pas cette année tu l’auras l’an prochain.

- Kenny l’a fait deux fois parce Hawke pensait qu’il avait du potentiel, moi il va me laisser passer parce que je veux devenir médecin. Léo passe parce qu’il sait écouter des ordres et qu’avec un bon mentor il peut arriver à quelque chose et Leeroy… Hawke l’a juste regardé comme si quelqu’un avait vomit sur ses chaussures.

- Alors pourquoi tu fais la tête comme ça ? Hawke ne te fera pas un rapport trop acerbe, ça devrait aller.

- Ben… Hésita Archie alors qu’il achevait de fermer les boutons sur le cou de son camarade. Après la présentation nous aurons les entretiens avec les chevaliers oints puis nous partirons en poste avec nos mentors… Au mieux, si vraiment personne ne veut de nous, il nous reste quoi ? Six mois ici.

- Au mieux ? Si on passe six mois ici c’est vraiment qu’on est vraiment une bande de nuls.

- Ouais mais quand est-ce qu’on se reverra après ? Soupira Archie en lui passant sa lavallière.

- Ben, quand on voudra… Hésita Jamal en approximation totale. Quand nos mentors nous donneront du temps libre.

- Oh Seigneur, ça va être délicat de t’expliquer ça à toi. Frissonna-t-il en achevant son nœud.

- Je n’ai pas beaucoup dormi mais je ne suis pas encore complètement diminué… S’offusqua Jamal.

  Archibald s’arrêta une seconde puis l’aida à passer et ajuster son veston. Il cherchait une manière de présenter les choses, qu’il prenne son temps, il n’était pas encore six heures et demie. Toujours pensif, il fit un pas en arrière pour vérifier sa silhouette puis s’attela à le recoiffer.

- Tu sais qu’en plus des mentors, Sir Hawke va nous présenter des filles, tu sais fiançailles, mariage, procréation, transmission, tout ça…

- Oui, et alors ? On n’est pas censés se marier avant l’onction. Au pire si celle qu’il te trouve ne te plait pas tu demandes une affectation internationale et tu rentreras pour les fêtes pour voir tes enfants. Répondit-il en haussant les épaules.

- Disons que j’ai déjà… des inclinaisons pour quelqu’un.

- La grande brune qu’on croise à l’office et que Léo appelle « double airbag » ? S’amusa Jamal. Elle est jolie mais je crois qu’elle est déjà fiancée…

- Ce n’est pas elle. La personne que j’aime n’est promise à personne à ce que je sache. Soupira Archie avec lassitude en achevant d’arranger ses cheveux.

- Alors lance-toi, tu es noble, tu es riche, t’es pas plus laid ou bête qu’un autre. Qu’est-ce que tu as à perdre ?

- Bien plus que tu ne crois. Sourit pâlement Archibald en s’écartant pour contempler son œuvre.

- Je crois que tu te poses trop de questions, je serai une fille, je tannerais mes parents pour qu’ils acceptent ta proposition. T’es le mari idéal, tu es gentil, tu es prévenant, tu as de la conversation, tu es soigné, tu es prudent. Imagine un peu la pauvre qui se retrouvera mariée avec moi ? Tu penses qu’elle sera ravie de se retrouver accolée à l’hindou de service, qui fait la gueule à longueur de temps et rentre balafré et couvert de sang puis qui passe sa nuit à chialer en tremblant comme une feuille.

- Tu penses que je ferais une bonne épouse ? S’arrêta tout d’un coup Archie dans sa quête du détail qui lui aurait échappé.

  Jamal eut besoin d’un moment pour y réfléchir. Archibald était doué pour les tâches du quotidien, il avait toujours une astuce pour ôter une tâche d’une chemise, repriser un accroc ou rattraper un ragoût, il cuisinait d’ailleurs merveilleusement bien lorsqu’il en avait le temps. Jamal eut sur la langue le souvenir d’un gâteau d’anniversaire qui lui avait imprimé dans la bouche un goût de cannelle et de pommes caramélisées extraordinaire. Il était aussi un très bon infirmier et avait d’ailleurs demandé une dérogation pour étudier la médecine d’urgence et les soins aux blessures magiques au collège des filles. Léo l’avait accusé d’avoir des intentions troubles mais non seulement Archie s’était révélé une véritable passion pour le secourisme mais aussi un talent indéniable pour les soins. C’étaient les qualités minimums exigées pour une épouse de chevalier. Si Jamal épousait Archibald, il aurait l’assurance d’un foyer propre, de bons repas, d’un refuge où il pourrait trouver les premiers soins le temps que l’Ordre envoie un médecin à son chevet. S’il poussait sa réflexion jusqu’au sujet d’une hypothétiques descendance, aux côtés d’Archie, il aurait l’assurance que ses enfants seraient parfaitement soignés, éduqués et bordés chaque soir par quelqu’un qui les aimerait inconditionnellement. Jamal prit une grande inspiration, il devait bien l’admettre, Archibald n’était pas le chevalier idéal mais il était l’épouse rêvée.

- Si je le pouvais, je t’épouserais et je serai le plus heureux des hommes de ce monde.

- Tu le pense vraiment ? Rougit violemment Archie.

- Je pense que tu fais partie de ces rares personnes à être capable de faire d’une simple maison un foyer. Charles aussi peut-être maintenant que j’y pense, il n’est pas moitié aussi doué de ses doigts que toi et il est sans doute un peu trop tête en l’air mais il ferait une bonne épouse. Moi en revanche je serai une calamité. Tu t’imagines rentrer le soir, manger des pâtes trop cuites et voir ma sale trogne ? Un vrai plaisir de retrouver la maison ! Pouffa Jamal.

- Un délice, c’est vraiment le rêve de ma vie. S’amusa vaguement Archie.

  La nuit avait été courte et riche en émotions pour lui aussi il devait être sur les rotules ça irait mieux une fois la présentation passée, ils pourraient prendre une bonne journée de repos.

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