Chapitre 3 : Leçon de magie

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 La forêt était très calme et le vent chantait doucement à son habitude. Les sapins de la forêt agitèrent leurs branches, leur danse entraîna le son du vent. Les herbivores broutaient paisiblement, des cerfs et d’autres petites espèces s'étaient arrêtés vers un point d'eau. L'un d'eux leva brusquement une oreille et regarda dans une direction : une bourrasque souffla. Et des traces de pieds d’lexidae apparaissaient sur les troncs des sapins. Druni n’enseignait pas seulement à son fils adoptif comment lire ou des connaissances sur le monde, mais aussi des bases de magie. Le dragon du vent était un des seuls êtres à savoir maîtriser cet élément, alors il l’enseigna à son élève. C'était un entraînement difficile, surtout pour apprendre les bases : lire les lignes du vent, faire léviter une feuille, conserver son équilibre sur un pilier de bois les yeux bandés, course d’obstacle… Pour ce jour-là, Isa'th utilisait sa magie pour se déplacer agilement en prenant appui sur les arbres et autres surfaces. Druni lui avait demandé de se déplacer le plus vite possible de l'entrée de la forêt à leur colline et le plus discrètement possible pour ne pas déranger les autres animaux pendant que lui, observait en hauteur. Il n'en était pas à sa première « leçon de vol » comme il aimait les appeler, dû à l'impression de planer après sauter et se déplacer à des vitesses qu'il n'imaginait pas à ses cinq ans. Isa'th entrait dans sa quinzième année et passait son temps à vagabonder dans la Vallée du Vent. Il arriva au sommet de la colline essoufflé et commença à avoir des vertiges. Les mains sur les genoux et la tête plongeante, il tenta de regagner sa respiration. Puis il s'assit en tailleur, joignit ses mains et prit de profondes respirations. « La magie est comme un ensemble de muscles, plus tu les mets à l'épreuve, plus ils se renforcent. Plus tes méridiens s'habituent à se regorger en magie et plus ils augmentent en taille, permettant de contenir encore plus de magie. » Il répétait ces paroles quand Druni volait loin dans le ciel, Isa'th voulait le rejoindre et voler par lui-même. Mais sans ailes et sans assez de puissance, il ne décollerait jamais suffisamment haut. Quand Druni tenta de lui enseigner sa magie, il eut besoin de convaincre Isa'th qu’il pourrait voler avec lui s’il était suffisamment investi. Une telle promesse à ses cinq ans l’avait immédiatement lancé sur son entraînement, ainsi il apprit les fondamentales de la magie selon les leçons personnelles de son père.

 Les vaisseaux sanguins sont remplis de sang et d’énergie. Il y a dans ces vaisseaux des zones plus denses : ce sont les méridiens qui sont donc plus chargés en énergie. Il existe sept méridiens plus denses que la moyenne : ce sont les chakras : terre, feu, air, eau, son, lumière et perception. Ils ont des rôles différents et des spécificités par rapport aux autres méridiens, la plus importante étant le fait qu’eux seuls ont des effets immédiats sur l’ensemble du système cardio-vasculaire en étant directement influencés par les sentiments et l’état d’esprit du mage en question. L’énergie se trouvant dans le corps est dite « énergie interne » car c’est pendant la respiration que la « magie pure », qui vient de l’atmosphère, est intégrée dans l’organisme et transformée dans les poumons. On peut aussi s'approprier de l'énergie interne grâce au système digestif, les végétaux s'approprient effectivement une partie de l'air chargé magiquement pour leur photosynthèse mais le principal intérêt de cette transformation est l'appropriation de celle d'autres animaux. Les plus chanceux des charognards peuvent même espérer tomber sur la dépouille d'un supérieur. La magie est l’art de transformer l‘ « énergie interne » en « magie impure » sous une forme que le mage donne en fonction de son apprentissage. Au cours de sa vie, un mage apprend à transformer son énergie interne de différentes façons. La propagation de la magie impure se fait par les pores de la peau, surtout ceux se trouvant aux bouts des doigts et de la plante des pieds.

 A chaque inspiration, il sentait les fragments de magie dans l'air entrer en lui et se mêler à ses méridiens, et à chaque expiration, il évacuait les fragments usés pour laisser la place aux autres. Du haut de ses quinze ans, Isa'th avait de longs cheveux noirs, semblables à ceux de sa mère mais beaucoup moins propres et soignés : ils arrivaient jusqu’au bas de sa nuque. Druni essayait bien de les couper, mais suite à plusieurs fausses manipulations, il attira la méfiance de son fils adoptif quand il était derrière lui. A force de s’entraîner dehors, son corps se développait proportionnellement : les courbures des muscles étaient clairement visibles et sa peau devenait un peu mat, comparée à la blancheur de sa peau quand il rentrait encore dans son drap blanc. Son visage avait un menton un peu pointu, des pommettes basses, de grands yeux expressifs, des oreilles rondes rabattues contre son crâne et le front caché par des mèches de cheveux descendants jusqu'aux yeux. Il reprit enfin sa respiration et se releva. Il vit son père dans le ciel qui resta un bon moment à planer grâce au vent et à faire des figures aériennes. Isa'th le regarda avec un air triste mélangé à de la jalousie. Et quand son père regarda dans sa direction, Druni redescendit à grande vitesse mais parvint à s'arrêter à quelques mètres du sol. « Tu récupères de plus en plus vite, il serait temps que je t’apprenne des sorts plus avancés. Jusqu'à maintenant je t'ai appris à te déplacer en propulsant de l'air sous la plante de tes pieds et avec tes mains. Mais cet air n'a que peu de pression, pas suffisamment pour couper quoi que ce soit. » annonça-t-il avec un sourire en coin. Druni se dirigea vers un rocher et leva sa patte avant droite et la baissa à un mètre de distance. Des lignes blanches apparurent sur le roc avant de disparaître. Isa'th s'en approcha et toucha le rocher, il en fit tomber trois strates et regarda son père avec un air émerveillé et des étoiles dans les yeux en demandant et en sautant de partout comment faire cela. « Concentre ta magie dans les ongles et les phalanges distales, médianes et proximales puis relâche doucement la magie jusqu'à finir de parcourir la silhouette de la cible. Il est nécessaire de faire appel principalement aux méridiens du feu et de l'air. L'énergie interne est stockée dans tous tes vaisseaux sanguins mais la plupart des magies requièrent l'utilisation du méridien du feu, qu'on simplifie en parlant de l'estomac. En contractant le ventre et remontant le diaphragme, on force les vaisseaux autour de l'estomac à partager leur énergie interne avec ses voisins. » Quand il essaya de libérer la magie contenue dans ses doigts, elle partit trop vite et il se coupa sur le dos de la main droite. Druni prit un air perplexe mais il se demandait encore comment était parvenu à canaliser aussi vite. Il avait libéré sa magie trop tôt par les pores de la peau ce qui avait provoqué la coupure. Et pendant que le fils observait sa main en se demandant pourquoi il s'était blessé, le père regardait l'arbre éraflé quelques mètres plus loin. La fierté l'envahit et son sourire allait mener à un rire. Il pensa toutefois au renard et à la mère qui confia son bambin à un inconnu. Ses doutes furent confirmés par ce test, Isa'th n'a pas été choisi par le renard pour ses beaux yeux. Le sourire s'effaça et tristement Druni lança : « Tu n’arriveras pas à voler à ce rythme.

- Pardon ? Pourquoi ?!

- Tu n’es pas assez investi ni concentré.

- Mais si, je t’assure !

- Tu ne penses qu’à l’objectif, pas aux moyens. Tu dois ressentir le vent, pas assumer qu’il est tien.

- Mais je n’ai pas l’impression de lui commander pourtant, dit-il en regardant le dos de sa main.

- J’ai peut-être une idée, mais…

- Quoi ? dis- moi je t’en prie, je veux m’améliorer !

- C’est risqué et douloureux.

- Je le supporterai, tu m’as bien élevé non ? Si je t’ai survécu, je devrais pouvoir survivre à ça. Répondit-il en ricanant.

- Très bien, tends-moi ton bras dominant »

 Alors Isa'th montra son bras droit, un bras musclé par les efforts qu’il fournissait dans les entraînements de son père, qui l'entoura de sa patte de métal. « Je ne pourrais m’arrêter en plein milieu du procédé, si je commence, tu devras tenir jusqu’à ce j’ai fini. Ce procédé me permettra de te transmettre une partie de ma magie mais cela sera très douloureux, tu comprends ?

- Oui père, je suis prêt. »

 A ses mots, le dragon resserra son emprise sur son élève et prit une grande inspiration, le vent s’intensifiait autour d’eux. Une brise froide passa entre les griffes du père pour lacérer le bras du fils. En subissant l’épreuve, Isa'th hurla de toutes ses forces sous l’effet de la surprise et de la douleur. Il avait l’impression que des centaines de lames essayaient de couper son bras, il tomba au sol en s’appuyant sur ses genoux mais son bras était toujours tenu. La douleur avait commencé sur le dos de la main : le vent taillait trois spirales dont les centres formaient les sommets d’un triangle équilatéral. Puis, ce fut au tour de l’avant-bras : de longues griffures se propageaient sur toute la longueur, elles se rejoignaient pour donner plusieurs « anneaux » de lacération, même traitement pour le bras et l’épaule. Quand Druni lâcha le bras, Isa'th s’écroula au sol et perdit connaissance : son bras saigna abondamment et les cicatrices resteraient pour toujours. C’est bien grâce à cette marque que Isa'th sera plus performant. Mais Druni profita de la chute d'Isa'th pour lâcher un sanglot.

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