Le soir venu, je fais nerveusement les cent pas sur le lieu de rendez-vous. Elle est en retard, mais je sais qu’elle viendra.

J’observe Lynn passer plusieurs appels du coin de l’œil, mais je suis trop stressée pour lui demander de quoi il s’agit.

• Bonsoir mon cœur. Lance une voix familière derrière moi.

Elle apparaît enfin après plusieurs minutes, me faisant signe de la suivre à l’écart. Je jette un œil en arrière sans apercevoir Lynn qui a dû s’éloigner, puis je m’exécute sans chercher à la prévenir. C’est pour le mieux de toute façon, connaissant le tempérament d’Aya, il vaut mieux éviter qu’elles ne se croisent si je veux éviter que la situation dégénère.

• Qu’est-ce que tu veux Aya ?
• Que tu t’asseyes près de moi. S’il te plaît.
• Parle, qu’on en finisse.

Contrariée par mon attitude distante, elle se résout à se relever et à m’approcher.

• Laisse-moi une seconde chance.
• La bonne blague… Tu débarques comme une fleur pour me demander ça ? Où étais-tu quand j’avais besoin de toi ?
• Tu sais très bien que c’était compliqué.
• Et qu’est-ce qui a changé ?
• Allez, tu ne vas quand même pas me faire croire que tu as oublié tout ce qu’on a vécu ?

Elle tente de me prendre la main, mais je la repousse, en réponse, elle se met à pleurer à chaudes larmes.

• S’il te plaît, pardonne-moi. Je sais que j’ai agi comme une merde, mais j’avais peur tout comme toi tu le sais.

Je détourne le regard pour ne pas me laisser attendrir, mais elle en profite pour m’enlacer par surprise.

• Je regrette de t’avoir abandonnée, je suis tellement désolée.

Je retiens un gémissement alors qu’elle enfonce soudainement sa main dans mon pantalon, me touchant et m’embrassant sans retenue.

• Arrête, s’il te plaît…
• Je sais que tu en as envie. Dis-moi oui et tout redeviendra comme avant.

Elle sait parfaitement comment me faire plier, et c’est l’une des raisons pour lesquelles j’avais autant stressé à l’idée de la rencontrer.

Son parfum pénètre mes narines, me rappelant des souvenirs aussi doux que douloureux. L’amour sans limite que je lui ai voué, la profonde misère dans laquelle elle m’a laissée.

Je la repousse violemment dans un éclair de lucidité, profitant de sa surprise pour reculer d’un bon. Elle me lance un regard plein de chagrin, auquel je réponds avec toute la colère que j’ai refoulée pendant tout ce temps.

• Je ne serai plus jamais ton jouet.

Son visage se transforme, laissant transparaître une colère intense, alors qu'elle se redresse pour me crier dessus à pleins poumons. Ses paroles sont telles des lames acérées, chacune plus blessante que la précédente. Je recule instinctivement, paralysée par l'incapacité d'agir, tandis que d'anciennes blessures refont surface.

Lynn arrive au même moment, alertée par les cris.

• Moune, tout va bien ?

La mine d’Aya se durcit davantage lorsqu’elle me tient la main.

• Alors c’est ça ? C’est pour ça que tu me rejettes ? Tu t’es trouvé une petite blanche pour te baiser alors t’as plus besoin de moi ? Comme si elle pouvait te faire le quart de ce que je te faisais, sale pute !

Elle progresse vers Lynn, menaçant de la battre, mais je m’interpose.

• Arrête.

Aya me dévisage un instant, puis recule d’un pas, laissant échapper un rire glaçant.

• Tu vas faire quoi, me frapper ? Souffle-t-elle en me regardant de haut. T’as l’air de beaucoup tenir à elle, dis donc.

Sur ces mots, elle porte son attention sur Lynn, lui adressant un sourire inquiétant.

• Dis-moi brunette, est-ce que Malimouna t’a parlé de ses petites histoires ? Vu comment vous avez l’air soudées, ce serais une honte qu’elle te cache un quelconque secret, pas vrai ?

Elle jubile en voyant ma mine se décomposer, alors que je devine ses intentions.

• Non, arrête…
• Elle ne t’a pas raconté pourquoi elle a déménagé, si ?
• Aya, arrête, je t’en prie, je ferais n’importe quoi.

L’air satisfait, alors que je supplie en larmes, elle me tend la main.

• N’importe quoi, hein ? Alors, rentre avec moi et arrête ces caprices, ma chérie. Tu devrais t’estimer heureuse que je veuille encore de toi après ce que tu as fait.

Je m’empresse d’aller la rejoindre, vaincue, mais Lynn me saisit fermement le bras.

• Dégage. Ordonne-t-elle, revêtant un regard glacial.

C’est la première fois que je la vois aussi en colère, je n’ose même pas la regarder.

• À qui tu crois parler, sale…

Deux montagnes de muscles sortent de nulle part et se plantent aux côtés de Lynn, créant une scène déconcertante. Je suis autant surprise qu’Aya, qui reste bouche bée, incapable de réagir. Aucune de nous n’avait entendu ces hommes approcher jusqu’à ce qu’ils sortent d'eux-mêmes.

• Un problème ?

Elle s’enfuit sans demander son reste, disparaissant dans la nuit comme elle était apparue.

• Viens, on rentre.
• Qui sont ces hommes ?
• Mes gardes.

Je regarde la main qu’elle me tend pendant plusieurs secondes, mais je ne parviens pas à me résoudre à la suivre, incapable de soutenir son regard, alors que le poids de la culpabilité de mes actes passés m’écrase.

• J’aurais préféré que tu ne me voies pas comme ça…

Un de ses hommes s’approche, un téléphone en main.

• Madame, votre frère.

Lynn et moi échangeons un regard inquiet avant que celle-ci ne prenne l’appareil.

À l’autre bout du fil, Edwin, furieux, lui hurle dessus. Mais, à ma grande surprise, Lynn ne se laisse pas faire. Il s’en suit naturellement une énorme altercation, à la fin de laquelle elle lui raccroche au nez.

Hors d’elle, Lynn me saisit par la main et m’entraîne vers sa voiture.

Quantité de larmes parsèment déjà son doux visage. Honteuse, je me contente de suivre ses pas sans oser ajouter un mot.