Chapitre 2

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« Qu’est-ce qu’elle t’a dit, cette vieille chouette ? s’enquit ce dernier alors qu’ils parcouraient les couloirs en direction de la cour principale.

-Je ne sais pas, un truc sur les dangers de l’amour ou je-ne-sais-quoi. »

Son ami éclata de rire.

« Comme si elle s’y connaissait ! ricana-t-il. Elle n’est même pas jolie ! »

Minchi se mit à rire lui aussi. Les deux garçons se frayèrent un chemin à travers les étals du marché, dans l’immense cour du palais, et sortirent de l’enceinte de la cité impériale par la porte Sud. Ils descendirent ensuite la rue en direction de la rivière, où ils avaient l’habitude de se rafraîchir l’été. La plupart des jeunes gens de la capitale avait eu la même idée, et les berges étaient bondées. Ne voulant pas se mêler à la plèbe, ils rejoignirent un coude du cours d’eau qu’ils connaissaient bien, où les herbes étaient plus longues, et l’accès à l’eau plus difficile. L’endroit était donc désert. C’était leur coin secret.

Pas si secret, pourtant. Lorsqu’ils arrivèrent, des vêtements étaient étalés dans l’herbe, et une jeune fille assise à côté. Elle se releva d’un bond lorsqu’elle les vit, et s’empressa de s’incliner très bas devant eux.

« Votre Majesté, salua-t-elle d’une voix tremblante.

-Qui êtes-vous ? demanda Taejun.

-Je… je suis Keguri, Majesté, la dame de compagnie de… »

Les herbes masquant la berge s’écartèrent alors, et une jeune femme en sortit, seulement vêtue de sous-vêtements. Minchi se cacha machinalement les yeux. La jeune femme poussa un petit cri de surprise.

« Jiyoun !? s’exclama le prince.

-Taejun ! s’écria-t-elle avec colère. Ne regarde pas ! »

Le jeune homme détourna la tête. Les deux amis attendirent que Jiyoun se soit rhabillée. Cela prit du temps, en raison des nombreuses couches composant la tenue de la jeune fille, des jupons vaporeux, des pièces en soie, des colliers, des perles... Ils finirent par avoir l'autorisation de se retourner. Elle les toisait boudeusement.

« Qu’est-ce que tu fais dans notre coin secret ? s’insurgea Taejun. »

  La jeune fille rejeta ses cheveux bruns en arrière, comme si elle se préparait à attaquer.

« Votre coin secret ? La rivière est à tout le monde, non ?

-Oui, mais pas cet endroit ! Je n’aurais jamais dû te le montrer.

-Tu parles, c’est moi qui l’ai découvert bien avant toi !, riposta Jiyoun.

-Arrêtez de vous disputer, vous deux ! intervint Minchi. Jiyoun, tu allais partir, n’est-ce pas ? »

  Elle le dévisagea d'un air supérieur.

« C’est Mademoiselle Jiyoun, le rectifia-t-elle. »

  Taejun leva les yeux au ciel.

« Ça y est, maintenant qu’elle a seize ans, elle se croit devenue impératrice, geignit-il.

-Et toi alors, pauvre débile ? répliqua Jiyoun. Moi, je ne me balade pas avec mon diadème vissé sur le crâne en permanence, au moins. »

  Le prince porta machinalement la main à la pierre opaline qui pendait à son front.

« Mais moi j’ai le droit, je serai empereur !

-Pas si je te fais jeter aux oubliettes avant !

-T’auras pas le droit, une princesse, ça n’a pas de soldats sous ses ordres !

-Ça suffit tous les deux ! s’exclama Minchi en les séparant. »

Les deux adversaires étaient presque nez contre nez, se fusillant mutuellement du regard.

« Jiyoun, rentre au palais, intima le danseur. Les rues vont devenir dangereuses pour une demoiselle.

-Oui, les bandits adorent les demoiselles ! renchérit Taejun avec un sourire sadique.

-N’importe quoi, répondit-elle. De toute façon, vous êtes trop nuls. Viens, Keguri, on s’en va. »

La servante s’empressa de suivre sa maîtresse, non sans s’être à nouveau inclinée profondément devant son prince.

« Bon débarras !, s’exclama ce dernier quand elles furent parties. Qu’est-ce qu’elle est pénible, celle-là. Attends de voir quand je serai empereur, je lui réserverai le cachot le plus humide de la prison !

-Taejun, c’est quand même ta sœur, tempéra Minchi.

-Tu as raison. Elle aura peut-être droit à un matelas. »

Ils se déshabillèrent et entrèrent dans l’eau. Quelle satisfaction, après leur calvaire passé au soleil ! Les deux garçons nagèrent un moment, puis lorsque le ciel commença à se teinter d’orange, ils se rhabillèrent et regagnèrent le palais, se séparant devant les appartements du prince.

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