Chapitre 32

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Hestia

Trois semaines s'étaient écoulées depuis notre arrivée dans la petite Olympe.

Trois semaines que mon entraînement avait commencé.

Trois semaines que je m'entraînais d'arrache-pied.

Ici, tout était paisible et apaisant, rien ne venait troubler cette douce quiétude. Lorsque les réminiscences de cette affreuse journée venaient me hanter, j'allais me recueillir près de la cascade. Je m'allongeai dans l'herbe verdoyante et douce tout en contemplant la beauté du ciel. J'écoutais le gazouillis des oiseaux et parfois quelques animaux téméraires venaient me quémander des caresses. Tout dans cet endroit était parfait, un peu trop tout de même. J'avais l'impression d'être dans une sorte de rêve féerique.

Plus aucune larme ne s'était échappée de mes yeux depuis que je vivais dans cet maison. À quoi bon pleurer, ils ne reviendraient pas !

Contrairement à ce que l'on m'avait raconté Ares n'était pas si cruel. Certes il était intransigeant quand il me faisait faire dix tour de son domaine avec un chien affamé à mes trousses, néanmoins je le trouvais juste. Il était important que je devienne une guerrière redoutable pour vaincre son père, voilà pourquoi je devais me transcender ! Combat d’épée, au corps à corps, tir à l’arc, cours de magie, j’apprenais tout.

Exceptionnellement, aujourd’hui j’étais au repos. Arès avait dû s’absenter pour aller voir son père et Seigneur. Je profitais donc de cette journée en lisant une romance historique un peu niaise, mais adorable. Cependant, je n’arrivai pas à me plonger pleinement dans le récit car une pointe d’appréhension me titillait l’esprit. Même si au fil des jours Arès ne m’avait pas paru suspect, j’avais quand même peur qu’il ne me dénonce à son père. Qui me disait qu’il ne m’avait pas tendu un piège en me faisant venir dans son antre et en endormissent ma méfiance.

Etant donné que je ne parvenais plus à me concentrer sur l’histoire de June et Alexandre les deux principaux protagonistes du récit, je refermai le livre et décidai d’aller me dégourdir les jambes. Quoi de mieux qu’une promenade dans le parc. Avant de sortir dehors, je passai par la salle d’arme afin de me procurer des outils qui me seraient utiles si jamais je rencontrais un être indésirable. On ne savais jamais sur qui l’on était susceptible de tomber au détour d’un bosquet.

J’avais juste omis un petit détail : Danaos. Ce dernier était en train de faire des tractions sur une barre en fer surélevée. Il me tournait le dos. Cela me permit d'admirer avec béatitude sa peu[mS1] ferm et recouvert d’une fine pellicule de sueur qui faisait ressortir le doré de sa peau.

C’était indéniable, cet homme était très séduisant, hélas il ne me portait pas dans son cœur. Pour lui, je n’étais qu’une corvée, une dette à payer, une enfant. J’étais naïve de penser que je lui plaisais, même si son comportement lors de cette fameuse soirée, m’avait fait croire le contraire. Ce qui était fait ne pouvait plus être défait, mais cela m'avait fait espérer l'espace d'un baiser. Je ne comprenais pas pourquoi il agissait ainsi face à moi. À chaque fois qu’il me voyait, c’était comme si j’étais la pire engeance possible. Pourtant, j’avais tout essayé pour lui plaire, mais rien n’y faisait. Il était borné et moi j’étais lasse.

Me faisant la plus discrète possible, je m’emparai de la ceinture à poignard qui était accrochée au mur et je l’enfilai en faisant bien attention à ne pas faire de bruit.

C’était sans compter la pugnacité et les sens surdéveloppés de Danaos.

—Qu’est-ce que tu vas faire avec ça ? me harponna-t-il en désignant ce qui entourait ma taille.

Il était descendu de la barre et me faisait face les bras croisés sur son torse et un sourire moqueur au coin des lèvres.

Je ne pris même pas la peine de lui répondre et me dépêchai de déguerpir pour ne pas subir l’un de ses sermons interminable. Sauf, qu’il m’en empêcha en refermant, dans une poigne de fer, sa main sur mon bras.

Furibonde, je tentai de lui faire lâcher prise, sans résultat.

—Lâche moi ! lui ordonnai-je les dents serrés

—Pas avant que tu ne m’ait dit ce que tu vas faire de ces armes, gamine. Je te rappelle que ce ne sont pas des jouets et tu risquerais de te blesser, fit-il d’un ton moqueur.

Outrée par son insinuation, je m’écriai :

— Je ne suis plus une enfant ! Je sais très bien me servir de ce genre d’arme. J’ai passé ces derniers jours à m’entrainer avec Arès ! Et de toute manière je n’ai aucun compte à te rendre ! Maintenant tu me laisse partir sinon je…

Je laissai ma phrase en suspens pour laisser agir la menace, et tentai encore une fois de me dégager de sa poigne.

Sauf, qu’à l’entente de mes mots un sourire carnassier se dessina sur ses lèvres charnues.

—Sinon quoi, petite fille ? susurra-t-il tout en se penchant vers moi. Que vas-tu me faire subir, hein ?

Il était proche, un peu trop même, mais cela me donna une idée. J’en avais assez de son harcèlement, il ne cessait jamais de se gausser de moi. Il jugeait sans arrêt mes moindres faits et gestes, mais je tenais ma vengeance.

Je m’avançai vers lui jusqu’à ce que nos souffles se mélangent. Nos lèvres n’étaient séparées que par quelques millimètres. Il sembla surpris de ma soudaine proximité et j’en profitai pour attraper son bras, basculer ma hanche sur le côté et je le fit passer par-dessus mon épaule, comme me l’avait montré Arès lors de l’entrainement. J’était fière de cette prouesse surtout que Danaos était assez massif.

Je lui adressai un sourire ironique avant de m’en aller aussi vite que possible, car je savais que les représailles aller tomber. Je n’eus même pas le temps de passer les portes du jardin qu’il était à mes trousses.

—Tu vas le regretter, fillette ! gronda-t-il d’un air hargneux.

—Dis celui qui vient de se faire renverser par une fille chétive, répliquai-je avant de m’élancer à travers les arbres.

J’avais deux possibilités, soit je le distançais et trouvais une cachette en attendant qu’il se calme, soit je l’amenai dans un endroit propice à une confrontation. Je choisis la deuxième proposition, j’avais un grand besoin de me défouler.

Me faire courser par un chien affamé avait été un bon enseignement, car j’étais rapide. Mais mon adversaire l’était également, j’entendais son souffle retentir derrière moi. Je bifurquai sur la gauche, car je savais que non loin il y avait une sorte de clairière qui ferait un terrain favorable pour le combat qui allait suivre. J’accélérai l’allure et débouchai pile où je le voulais. Je fis volte-face et attendis Danaos qui ne tarda pas à se montrer. Le soleil était dans mon dos, cela me procurerait un avantage certain, car il serait ébloui.

—Ainsi tu veux te battre, petite. Je ne te ferai pas de cadeau, sache-le, tu mérites une bonne punition pour ce que tu viens de faire, dit-il d’un ton sans appel.

—Je n’en ai pas besoin ! En revanche, je te propose un marché. Si je gagne tu arrêteras de me persécuter comme tu le fais et si je perds tu pourras me demander ce que tu veux.

Mon pari était risqué, car je n’avais pas en face de moi un amateur, il était redoutable. Cependant, ses émotions étaient en train de le dominer et cela n’était pas forcément bon. Moi par contre, j’était le calme absolu, étrangement je n’avais pas peur. Peut-être parce que je savais qu’il n’était pas dangereux.

Ses cheveux dorés volaient au grès du vent et ses yeux étincelaient de rage, le faisant paraître encore plus féroce. Il sorti un poignard dans l’un de ses nombreuses cachettes et se trancha la paume de la main. Il ferma ensuite le poing et quelques gouttes de sang virent gorger l’herbe verdoyante. Je sortis mon canif et fis comme lui, en ne lui montrant aucunement ma douleur lorsque le tranchant de la lame s’enfonça dans ma peau.

—J’accepte le marché Hestia, fille d’Hadès. Si tu gagnes ce combat je cesserai de te tourmenter, en revanche si tu perds, je pourrais te réclamer ce que bon me semblera et à n’importe quel moment.

Je hochai la tête avec solennité et déclarai :

—Qu’il en soit ainsi.

À peine mes mots furent-ils portés par la brise à ses oreilles qu’il m’attaqua sans tergiverser une seule seconde. Je plantai bien mes pieds sur le sol et attendis l’impact qui ne tarda pas à arriver.

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